4. Diverses autres réformes sont en cours

4.1 La modernisation bien avancée des pratiques douanières et administratives

Un plan d'action « douanes-ports », mis au point par la Direction des ports et la Direction générale des Douanes et fortement porté par ces deux administrations, a été retenu par le Comité interministériel de la mer du 26 octobre 1995. Il comporte 60 mesures, dont 48 sont déjà en application ou en cours de mise en oeuvre avancée. Les enjeux sont le développement de l'activité économique par reconquête du trafic maritime perdu au bénéfice des autres ports concurrents européens. Par ailleurs, il s'agissait de fixer dans nos enceintes portuaires les opérateurs économiques, qui ont, depuis le 1 er janvier 1996, une liberté de choix de lieu de dédouanement de leurs flux commerciaux à l'importation et à l'exportation.

Les 60 mesures sont regroupées autour de trois axes :

1° Accélérer la fluidité du passage portuaire en simplifiant et facilitant les mouvements de marchandises (notamment par la promotion du pré-dédouanement permis par l'informatique).

2° Favoriser l'implantation de services logistiques industriels et commerciaux (en assouplissant les pratiques administratives, en améliorant la sûreté et la sécurité des enceintes portuaires - loi du 26 février 1996 -).

3° Harmoniser, au plan européen, les procédures et politiques douanières.

Parmi les nombreuses mesures mises en application ou en cours, on peut citer :

- l'élargissement du bénéfice de « l'entrepôt franc » aux opérateurs privés dans les enceintes portuaires. L'entrepôt franc est un régime douanier très simplifié et dispensé de cautionnement permettant l'entreposage, hors taxe, de marchandises originaires des pays n'appartenant pas à l'Union européenne ;

- la création de deux nouvelles catégories « d'entrepôt fiscaux » 57 ( * ) : entrepôt de stockage de biens négociés sur un marché à terme et entrepôt pour les fabrications coordonnées en exécution d'un contrat international (loi de finances rectificative du 30 décembre 1995 et textes d'application du 25 juillet 1996),

- la simplification du statut de « représentant fiscal » 58 ( * ) , qui met les opérateurs français à égalité avec leurs homologues belges et néerlandais (décret du 22 août 1996) ;

- la promotion des régimes douaniers économiques existants qui permettent aux entreprises d'exercer des activités - hors taxe - de stockage, de groupage, de transformation et de négoce ;

- la personnalisation du dédouanement, qui consiste à offrir aux entreprises, de façon conventionnelle, une palette de procédures à simplifications graduées, adaptée à leur spécificité et à leur activité.

Cette démarche s'est traduite, sur place, par la signature de sept chartes de qualité entre les douanes et les ports (Le Havre, Bordeaux, Bayonne, La Rochelle, Nantes-Saint-Nazaire, Marseille, Sète et prochainement Dunkerque). Il est souhaitable que cette procédure soit poursuivie.

Mais au total, les « 60 mesures » traduisent un esprit positif des administrations concernées. Reste à savoir si elles suffiront pour rétablir l'équilibre avec des politiques résolument laxistes pratiquées par les pays du Nord. Certains n'ont-ils pas été jusqu'à vanter dans une annonce publicitaire l'attitude particulièrement « compréhensive » de leur administration des douanes ? Ainsi, la Lettre de l'Expansion du 20 janvier 1997 mentionne l'existence « d'un document de prospection aux États-Unis, qui incite à importer en Europe, sur le thème : il y a un seul droit douanier européen mais, pour l'application, il y a les "durs", la France et l'Allemagne notamment, et les "intelligents", les Pays-Bas. Il semble également que le port de Rotterdam applique deux vitesses de dédouanement. Une, rapide, pour les produits en transit vers les autres pays européens ; l'autre, plus lente, plus scrupuleuse, pour les importations destinées au marché national ». En tout état de cause, le programme communautaire « Douanes-2000 » en discussion, cité dans les « 60 mesures » devrait contribuer à l'harmonisation des politiques.

Dans le prolongement du plan « douanes-ports », il est enfin apparu souhaitable d'améliorer la coordination et la simultanéité de tous les contrôles des services administratifs, plus particulièrement des contrôles douaniers et sanitaires (vétérinaires et phytosanitaires). Un groupe de travail agriculture-équipement devrait émettre prochainement des propositions. Au niveau local, des aménagements ont été ponctuellement mis en oeuvre pour faciliter et accélérer les flux des produits agro-alimentaires et des animaux.

4.2 Les mesures fiscales en cours d'examen

Les distorsions fiscales qui pourraient exister par rapport aux places portuaires étrangères constitueraient un handicap pour nos ports.

C'est pourquoi un groupe de travail commun au ministère des Finances et au ministère de l'Équipement et des Transports, présidé par Rose-Marie Vittemant (Trésorier-Payeur général), a été chargé de dresser un état comparatif des règles fiscales en vigueur dans les différentes zones portuaires européennes et pour les opérateurs de pré et post-acheminement portuaires.

Son analyse concerne la fiscalité des entreprises installées à l'intérieur du périmètre portuaire et travaillant avec les installations des ports. Il propose notamment que soit examiné le cas de entreprises de manutention françaises qui, contrairement à leurs homologues étrangères, sont soumises au paiement de la taxe professionnelle.

Les ports autonomes et les Chambres de commerce et d'industrie 59 ( * ) sont, quant à eux, soumis en principe aux impôts de droit commun. Mais ils sont exonérés, sur les seules activités portuaires, par des dispositions légales en ce qui concerne la taxe professionnelle, par la reconduction d'année en année d'une circulaire ministérielle pour les autres impôts directs nationaux ou locaux.

- Les politiques publiques : appréciation et essai d'évaluation -Un point est fait en annexe 7 sur la fiscalité touchant les ports français.

Par ailleurs, l'UPACCIM a effectué une comparaison avec les ports étrangers qui montre que les ports du Bénélux et les ports allemands sont officiellement soumis aux règles d'imposition de droit commun. Cependant, en raison de leur caractère d'établissements municipaux ou d'État, ils échappent en réalité à l'essentiel des impositions. Au demeurant, quand il existe des comptabilités identifiées, les dépenses qui apparaissent au titre des impôts sont tout à fait limitées. En outre, il n'existe pas, dans ces pays, d'imposition équivalente à notre taxe professionnelle et à nos impôts fonciers.

Les plus importants des ports (Anvers, Rotterdam) effectuent un reversement à la commune. Ce reversement reste cependant limité et il est en outre dans certains cas, affecté à des dépenses liées au port 60 ( * ) .

Dans certains ports importants (Gand par exemple), la ville verse en revanche un subvention annuelle destinée à combler le déficit d'exploitation et présentée comme « rémunérant » l'activité économique apportée à la ville par le port.

L'UPACCIM estime que le port de Rotterdam paye en 1995 au total 5,625 millions de florins de taxes diverses soit près de 17 MF, chiffre à comparer à la situation des ports français, décrite dans le tableau page suivante.

ACTIVITÉ

IMPOTS (MF)

Total des

impôts payés

dont

Impôts liés aux rémunérations 61 ( * )

Taxe foncière

Tonnage (MT)

CA (MF

Rotterdam (1995)

295

2100

17

n.c

n.c

Marseille (1996)

90,7

925

8,4

8,4

0,3

Le Havre (1996)

56,2

843

7,9 62 ( * )

7,9 63 ( * )

0

Dunkerque(1996)

34,9

428

15 64 ( * )

6,5

8

Nantes-St-Nazaire

(1996)

24,7

367

2,9

2,4

0,3

Rouen (1996)

18,1

382

10

8,2 65 ( * )

1,5

Bordeaux (1996)

8,7

175

4

1,5

2

Total Ports autonomes

233,33

3 120

49,7

34,9

12,1

France métropolitaine

Source : Direction du transport maritime , des ports et du littoral (96/97) et informations communiquées par les ports

Le problème de la taxe foncière semble être une pomme de discorde depuis plusieurs années entre les ports autonomes et de l'administration fiscale, voire avec les élus locaux des communes concernées. Il semble urgent de pallier les lacunes actuelles, soit par un texte législatif, soit de définir une doctrine claire qui fasse cesser les différences de traitement et mette un terme aux contentieux en cours, tout en ne pénalisant pas les ports français.

4.3 Mesures favorisant la maîtrise et la réduction des coûts de passage portuaire

4.3.1 Un observatoire des coûts de passage portuaire en gestation

Le Comité interministériel de la Mer du 4 juillet 1996 a décidé la création d'un observatoire des coûts de passages portuaires.

Outre la mesure et l'analyse des coûts de passage portuaire dans les ports français, l'observatoire effectuera des comparaisons des coûts de passage portuaire avec les autres ports européens et analysera la part relative des coûts de passage portuaire au sein des coûts de l'ensemble de la chaîne logistique. L'observatoire analysera également la contribution de l'évolution du coût de passage portuaire à l'évolution de la compétitivité économique nationale.

Il s'agit d'une oeuvre utile mais très complexe, qui requiert de recueillir un très grand nombre de données. C'est pourquoi le Conseil général des Ponts-et-Chaussées a été chargé d'une mission de préfiguration confiée à l'ingénieur en chef Alain Bernard. La mission a conclu à l'obligation d'une mise en oeuvre progressive qui devrait, selon nos informations, nécessiter environ trois ans. Ce délai sera mis à profit pour fixer la méthodologie, expertiser les données utilisables, définir un cahier des charges et un programme de travail, mobiliser des moyens au sein de l'administration.

Le gouvernement a émis l'intention d'un lancement rapide de ce nouvel instrument.

4.3.2 Un examen en cours de la situation de diverses professions

Le gouvernement a confié à Marie-Françoise Simon-Rovetto un groupe de travail sur les professions du pilotage et du remorquage. L'objectif global est que « chaque intervenant portuaire mène, à l'égard de ses clients, une démarche d'entreprise visant à la meilleure adaptation possible entre les prix facturés et le coût des services rendus, dans la recherche permanente de la qualité optimale ».

Les conclusions de ce groupe de travail s'articulent autour des thèmes suivants :

- repenser la sécurité, avec notamment une révision de l'ensemble des règlements locaux existants ;

- réaménager la politique tarifaire ;

- envisager des réformes de structure, certaines ne pouvant être approchées que dans un cadre régional ou national.

La logique de ces conclusions amènerait à la constitution de contrats locaux d'objectifs au niveau de chacune des places portuaires, ceux-ci pouvant être réalisés sans modification réglementaire dans un premier temps.

D'ores et déjà, il a été observé dans un certain nombre de ports une approche nouvelle de la part du pilotage et du remorquage lors des discussions au sein des commissions.

4.3.3 Une adaptation des droits de ports à favoriser

L'objectif est d'inciter les ports à adapter les droits de ports pour assurer une meilleure adéquation avec le service rendu. Il s'agit du problème déjà évoqué de la péréquation des tarifs entre les trafics captifs, tels que le trafic pétrolier et les trafics volatils, tels les trafics de conteneurs. Une première phase de dépéréquation a été engagée depuis cette année dans certains ports.

4.4 Quelques mesures de promotion de l'esprit commercial

Les Français sont réputés ne pas être de bons commerciaux. Les ports n'échappent pas à ce genre de critiques et plusieurs intervenants ont déploré ce qui, à leur avis, traduit la faiblesse du système de promotion commerciale de ces établissements. D'après eux, les directions commerciales occupent une position trop faible dans les organigrammes et n'ont pas suffisamment de marges de négociation. Certains estiment regrettable que les ports soient dirigés exclusivement par un seul corps de fonctionnaires.

De telles accusations, qui ne sont pas sans rapport avec les débats sur le management des ports, qui seront évoqués plus loin, ne pourraient être infirmées ou confirmées que par des études comparatives, y compris internationales, et des audits dont la méthodologie serait difficile à établir.

Il n'en reste pas moins que des mesures sont envisagées par la Direction des ports pour dynamiser la gestion des ports. En voici l'inventaire :

4.4.1 Pour les ports autonomes

- création de comités d'orientation stratégique

- assouplissement du système de prises de participations dans des sociétés, groupements, organismes ayant un objet connexe ou complémentaire, utile au développement de leurs activités, même au-delà de leur circonscription

- définition de « chartes d'entreprises », documents contractuels fixant le cadre d'intervention de chacun, État, collectivités territoriales et dirigeants du port pour renforcer leur pôle d'entraînement économique

4.4.2 Pour les ports d'intérêt national

- création de comités de pilotages permettant de mieux associer les collectivités locales

- réactivation des conseils portuaires, organes officiels de concertation associant les différents intervenants portuaires

- mise en place officielle d'un nouveau cahier des charges de concession, avec pour objectif de moderniser les relations entre les partenaires concernés et de mieux responsabiliser les exploitants dans le développement des ports

4.4.3 Pour tous les ports relevant de l'État (PA et PIN)

- possibilité de constituer une « communauté de ports » pour traiter en commun un certain nombre de fonctions et assurer, dans une optique de volontariat, la cohérence du développement de ports voisins

- allégement et déconcentration des procédures attachées au contrôle administratif et financier

- mise en place d'une procédure permettant d'éviter des conflits d'intérêt pour les dirigeants des ports

* 57 Ce régime permet de stocker des marchandises communautaires en suspension de taxes (TVA ou taxes parafiscales)...

* 58 Interlocuteur de l'administration fiscale du pays dans lequel est réalisée une opération d'importation pour le compte des opérateurs des autres États-membres.

* 59 Les chambres de commerce et d'industrie sont également exonérées pour d'autres activités exercées de manière non lucrative.

* 60 À Anvers, ce versement couvre officiellement dans les comptes annuels publiés, pour un tiers des compléments de retraite pour les agents du port, alors même que, selon le Lloyd, la dépense correspondante serait supérieure au reversement total.

* 61 Les contributions les plus importantes dans l'ensemble des ports sont le versement transport et la participation à la formation continue

* 62 Dont 3,5 MF pour des redevances versées à l'ADEME pour l'exploitation par le port d'une décharge pour déchets industriels

* 63 La taxe foncière représente environ 8 MF. Une telle situation paraît paradoxale si on la compare à celle des autres ports, notamment Marseille et Le Havre qui ne font apparaître que des sommes symboliques au titre de cette taxe. Les conditions d'exploitation, notamment la location à des entreprises tierces peut expliquer une partie de cette différence.

* 64 La taxe foncière représente environ 8 MF. Une telle situation paraît paradoxale si on la compare à celle des autres ports, notamment Marseille et Le Havre qui ne font apparaître que des sommes symboliques au titre de cette taxe. Les conditions d'exploitation, notamment la location à des entreprises tierces peut expliquer une partie de cette différence.

* 65 Dont une dépense ponctuelle FNECAA de 3,5 MF.

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