IV. LA COHÉRENCE DES POLITIQUES PUBLIQUES

A. UN MANQUE DE COHÉRENCE

D'une manière générale, le rapport pointe du doigt le manque de cohérence des politiques publiques.

La politique de la pêche n'est pas parvenue à organiser la filière qui souffre encore d'une opposition entre une offre atomisée et une distribution concentrée et d'un manque de circulation de l'information.

Certains dysfonctionnements sont mis en valeur : le rapport souligne les difficultés liées à la superposition du cadre d'action institué par l'Union Européenne avec celui des institutions issues de la législation antérieure de gestion des pêches maritimes françaises d'après l'ordonnance de 1945, révisée par la loi de 1991.

Il note d'autre part les difficultés dans la coordination et la répartition des attributions réglementaires pour la gestion des ressources ("un contexte réglementaire obscur").

Le rapport constate une dispersion des acteurs et un manque de volonté à coopérer et à coordonner leurs actions notamment en ce qui concerne le contrôle sanitaire : "un manque de volonté et de moyens pour contrôler réellement le secteur des pêches maritimes". Par exemple, aucune autorité n'est compétente pour contrôler le niveau de fraîcheur des lots de poissons et il n'existe pas d'harmonisation nationale dans l'appréciation des exigences sanitaires.

En matière de construction navale , le rapport relève une méfiance des chantiers privés vis-à-vis des procédures publiques d'appel d'offre. Des dysfonctionnements apparaissent également dans la réglementation de protection du secret défense et dans le contrôle de l'industrie d'armement. Au delà des protocoles de collaboration d'État à État, les travaux au sein d'équipes multinationales sont presque impossibles. Les textes sur le contrôle de l'industrie d'armement sont également un frein important au rapprochement d'entreprises.

Concernant la marine marchande, la politique menée est "partielle et inefficace" car elle ne permet pas de compenser le surcoût du pavillon français.

La politique portuaire répond à une pluralité d'objectifs, parmi lesquels l'organisation spatiale du territoire et la politique de l'emploi. Mais son objectif principal doit être le renforcement de la compétitivité globale de la chaîne des transports, au sein de laquelle les ports s'insèrent.

La politique du littoral souffre de l'imprécision des termes de la "loi littoral", ce qui entraîne une insécurité juridique préjudiciable au développement du tourisme et à la protection des espaces.

B. UNE NÉCESSAIRE COORDINATION DES ACTEURS DE LA FILIÈRE MARITIME

Le rapport préconise de développer une vision plus globale de la politique maritime en mettant en cohérence certaines approches sectorielles .

Chaque secteur obéit à sa logique propre mais un certain nombre de liens ont pu être mis en évidence.

Invoquant les exemples italien, japonais et néerlandais, le rapport estime ainsi que la croissance de la construction navale dans un pays va souvent de pair avec la croissance de sa flotte de commerce . Il faut de plus que la spécialisation de la flotte corresponde à la spécialisation de la construction navale. La flotte de commerce française actuelle, autant par sa taille que par sa structure, ne donne à la France qu'un très faible potentiel de filière maritime. Le rapport regrette en effet le manque d'adéquation entre la construction navale civile et la flotte de commerce : le taux de correspondance des spécialisations de la construction (très polarisée) et de la flotte (très diverse) n'est que de 25 % :

La création d'une filière peut également passer par une rationalisation, au sein du pays, entre les acteurs du secteur de la construction navale en amont (fournisseurs - constructeurs) ou bien en aval (constructeurs sociétés de classification).

Le rapport note que la présence des armateur-, français dans les grandes alliances internationales est trop faible pour négocier des escales favorables aux ports français.

Certaines politiques gagneraient à faire preuve d'une vision globale. Ainsi, toute action en matière portuaire est une action qui concerne l'ensemble de la chaîne de transport. La politique de desserte terrestre (ferroviaire, fluviale et routière) influe directement sur la compétitivité portuaire, la priorité maritime devrait être prise en compte dans l'élaboration d'une politique intermodale de transports.

Dans de nombreux secteurs, une réflexion doit être mise en oeuvre sur le plan interne : la filière pêche est marquée par un fort individualisme préjudiciable à sa modernisation et qui permet a la demande d'influencer fortement le marché, la filière portuaire souffre d'une segmentation de certains métiers (dockers et grutiers) et de la timidité des initiatives de coopération entre les ports, la marine marchande ne parvient pas à s'organiser pour participer aux alliances internationales... L'action des pouvoirs publics n'est pas seule à pouvoir remédier à certains dysfonctionnements caractéristiques du manque d'organisation du domaine maritime français. Il sera manifestement difficile de surmonter de tels handicaps qui traduisent les erreurs de conception souvent fort anciennes de la politique menée par l'État : son interventionnisme parcellaire ne reflète aucun projet cohérent.

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