B. LES ÉTATS D'ASIE CENTRALE ET LA RUSSIE : UN DÉCOUPLAGE EN COURS

Certains observateurs estiment que les États d'Asie centrale n'ont pas recherché leur indépendance à tout prix en 1991. Celle-ci est arrivée, sans avoir été forcément -ou fortement- souhaitée. La réaction des Gouvernements d'Asie centrale durant l'été 1991, au moment du putsch, tend à accréditer cette thèse.

L'indépendance est désormais acquise, et même si on peut la qualifier six ans plus tard " d'inachevée ", le processus de " découplage " entre la Russie et l'Asie centrale est en marche . Les relations entre les Etats d'Asie centrale et la Russie restent néanmoins complexes, tant sur le plan politique ou économique que militaire.

1. L'indépendance politique des Etats d'Asie centrale face aux ambitions russes

Chacun des Etats d'Asie centrale est doté d'une Constitution et d'institutions politiques totalement souveraines . Les chefs d'Etat du Kazakhstan, de l'Ouzbékistan et du Turkménistan n'ont d'ailleurs pas manqué à de multiples reprises d'affirmer leur indépendance vis-à-vis de la Russie et d'agir en conséquence.

Les ambitions russes en Asie centrale ont paru longtemps assez floues. La tentation a existé d'abandonner toute prétention à l'égard d'une région considérée comme un fardeau. Tel est le point de vue d'intellectuels, comme Alexandre Soljénitsyne qui l'a réaffirmé dans son ouvrage " Le problème russe à la fin du XXe siècle " : " Il faut quand même finir par le comprendre clairement : la Transcaucasie a sa voie propre, différente de la nôtre, la Moldavie a la sienne, les pays baltes ont la leur, et c'est encore plus vrai de l'Asie centrale. Presque tous les leaders de cette dernière région ont déjà annoncé que leurs Etats se tournaient vers la Turquie. Tout le monde n'a pas remarqué, en décembre 1991, la conférence lourde de promesses qui s'est tenue à Alma-Ata pour créer le " Grand Touran ", de la péninsule anatolienne à l'Altaï de Dzungarie. Au XXIè siècle, le monde musulman, qui connaît une rapide croissance démographique, se lancera sans doute dans des entreprises ambitieuses. Qu'aurions-nous à faire là-dedans ? ".

Il est sans doute plus exact de dire que la Russie n'a pas réussi, au début de l'indépendance, à définir clairement sa politique . Son objectif est de maintenir la région dans sa zone d'influence, mais elle hésite entre une politique de puissance et une politique d'influence, plus conforme aux principes qui régissent désormais ses relations avec le reste du monde.

Aujourd'hui, comme le souligne Olivier Roy : " la Russie a échoué dans le passage d'une structure impériale traditionnelle à la mise en place d'une sphère d'influence stratégique moderne 7( * ) .

L'absence de partis pro-russes dans ces Etats constitue d'ailleurs une indication sur les limites de l'influence russe.

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