B. UN ENVIRONNEMENT RÉGLEMENTAIRE FRAGILISANT

1. Des dispositions " consuméristes " pénalisantes

Les compagnies d'assurance-vie sont d'autant plus vulnérables que la loi du 7 janvier 1981 a fixé le montant des valeurs de rachat des contrats à des niveaux inégalés en Europe : 95 % de la provision mathématique pendant les dix premières années et 100 % ensuite. La loi (articles L. 132-5 et L. 132-51 du code des assurances) permet ainsi un exercice facile de la faculté de résiliation sans pénalité par le souscripteur qui se traduit par une option ouverte à tout moment sur le passif de la société d'assurance et se reflète par conséquent négativement sur les performances et la compétitivité des sociétés d'assurance française.

Les garanties de rachat échelonnées dont sont assortis les contrats en France expliquent en partie (outre les critères prudentiels assez stricts) la place prépondérante des placements obligataires dans les portefeuilles d'investissement des sociétés d'assurance française. C'est au contraire l'absence de garanties de rachat (avec il est vrai l'existence d'importants fonds de pension) qui explique la place des actions dans le portefeuille des sociétés britanniques.

Comme l'écrit le Commissariat Général du Plan, " le point commun de ces deux types de dispositions réglementaires concernant la gestion d'actifs par création d'obligations unilatérales excessives, du moins comparativement, est de privilégier le souci du court terme par rapport à celui du long terme. Dans la mesure où elles exercent leurs influences principales vis-à-vis de la branche assurance-vie de l'assurance, dont le souci et le métier sont la mutualisation et le lissage temporel dans une optique de long terme, on peut se demander si elles ne risquent pas de handicaper gravement les produits d'assurance et les sociétés qui les offrent par rapport à leurs rivales européennes et internationales . "

Ainsi dans l'assurance-vie, une forte hausse des taux d'intérêt pourrait déclencher une vague de rachat de la part des assurés, exposant les assureurs à de lourdes pertes.

2. Des règles de gestion contraignantes

a) La règle de fonctionnement de la réserve de capitalisation n'est pas optimale

La réserve de capitalisation est une provision technique destinée à lisser les résultats financiers des placements obligataires à taux fixe en cas de variation de taux. Les plus-values réalisées en cas de cession d'obligations sont versées à cette réserve. Les moins-values réalisées sont compensées par un prélèvement sur cette réserve, qui est admise dans la marge de solvabilité.

Toutefois, en pratique, le caractère global de la règle de fonctionnement de la réserve de capitalisation combiné à la règle comptable " premier entré, premier sorti ", dissuade les assurances d'utiliser cette réserve de plus-values pour y imputer en cas de besoin les moins-values qui peuvent survenir, comme c'est son objet.

b) L'utilisation des produits dérivés est trop restrictive

En matière de gestion d'actifs, les instruments financiers à terme ne peuvent pour l'instant pas être utilisés en couverture des provisions techniques.

Selon le Commissariat Général du Plan, " s'ils devaient le devenir prochainement, se poserait alors la question de savoir comment les comptabiliser sans remettre en cause le principe de comptabilisation en coût historique des actifs qu'ils couvriraient, alors que prévaut par ailleurs une tendance à la généralisation d'une comptabilisation à la valeur de marché issue de la philosophie des normes comptables IASC, qui peut être jugée négativement dans la perspective de long terme propre à la gestion de l'assurance ".

Les règles d'évaluation des actifs des sociétés d'assurances

Les textes communautaires prévoient une double évaluation des actifs, à leur valeur historique et en valeur de réalisation. Ces deux évaluations doivent être publiées par les sociétés d'assurance, mais le choix est offert pour l'inscription au bilan. Au Royaume-Uni, les actifs sont comptabilisés à leur valeur de réalisation, alors que, en Allemagne, ils sont inscrits à leur valeur d'acquisition. La situation en France est la suivante.

Le principe général

Les actifs des sociétés d'assurances sont comptabilisés au bilan à leur valeur d'acquisition ou à leur prix de revient, après déduction d'éventuels amortissements et dépréciations. Cela concerne tous les actifs, ceux qui garantissent les engagements pris envers les assurés (provisions techniques) comme ceux qui représentent les fonds propres.

La publication extracomptable des valeurs de réalisation

Tous les actifs sont par ailleurs évalués à leur valeur de réalisation : cours de Bourse du jour de l'inventaire ; prix de rachat pour les OPCVM ; pour les actifs immobiliers, évaluation par un expert agréé par la Commission de contrôle des assurances. La valeur de réalisation est publiée chaque année par les sociétés d'assurance, dans une annexe spéciale.

Les provisions pour dépréciation

Les valeurs amortissables (obligations, titres participatifs, titres de créances négociables) ne font pas l'objet d'une provision en cas de constat d'une moins-value latente.

En revanche, pour tous les autres actifs, une provision doit être inscrite au bilan dès lors que le total des valeurs de réalisation fait apparaître une moins-value globale.

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