AUDITION DE M. ROGER BELOT,
PRÉSIDENT DIRECTEUR GÉNÉRAL DE LA MAIF

(10 MARS 1999)

Le président lit la note sur le protocole de publicité des travaux de la commission d'enquête et fait prêter serment à M. Roger Belot.

M. Adrien Gouteyron, président - Nous allons opérer en deux temps, pour vous permettre de faire une introduction à votre propos, puis de répondre aux différentes questions des sénateurs.

M. Roger Belot - Je vous remercie. Je dois avouer que je ne connais pas précisément les raisons pour lesquelles vous avez souhaité m'entendre. Je peux vous présenter la MAIF, mais j'ignore si tel est votre souhait.

M. le Président - La commission d'enquête créée a pour but d'étudier les moyens et les personnels mis à disposition de l'éducation nationale dans le premier et le second degré, et de voir les choses qui peuvent être améliorées, modifiées, transformées, ou ce qui marche bien. La commission s'interroge à la fois sur la gestion des personnels ATOS, du personnel d'enseignement, et sur la gestion des moyens. Nous souhaitions donc vous entendre sur les personnels mis à disposition ou non des organismes.

Présidence de M. Jean-Léonce DUPONT, président

M. Roger Belot - J'avais imaginé que vous souhaitiez m'entendre dans ce cadre. La MAIF, dans le cadre d'une convention signée avec le ministère de l'éducation nationale, bénéficie de dix mises à disposition, dont sept personnes à mi-temps et trois à temps plein. Dans le cadre de cette convention, la MAIF rembourse intégralement au ministère de l'éducation nationale les salaires de ces collègues, charges comprises.

La MAIF est une mutuelle qui a été créée en 1934 par des enseignants, instituteurs, pour l'assurance de leurs risques et de leurs biens. Nous sommes une mutuelle d'assurance accident. Depuis toujours, la MAIF est dirigée par ses sociétaires. Elle intègre, outre des enseignants, puisque nous sommes la mutuelle de l'éducation nationale, les gens de la recherche, de la culture et des loisirs.

Le fonctionnement démocratique de notre mutuelle fait que nous avons de nombreux militants, qui sont engagés dans tous les départements pour développer notre mutuelle. Ces militants, au nombre de 550, sont des enseignants soit en activité, soit en retraite et exercent leur activité, sur leur temps de loisir, en complément de leurs fonctions dans l'éducation nationale, ou dans la recherche, dans la culture, même si les enseignants sont majoritaires.

Les seules mises à disposition dont nous bénéficions concernent les membres du conseil d'administration Le conseil d'administration de la MAIF est composée de 21 membres élus par l'assemblée générale des sociétaires, dont près de la moitié est composée d'enseignants à la retraite, pour lesquels nous n'avons pas besoin de demandes de temps particulières. Les dix autres sont des enseignants en activité qui, pour pouvoir exercer leur mandat d'administrateur, ont besoin de temps, parce qu'ils viennent de toute la France.

Notre siège social est basé Niort. Nos réunions et les missions nécessitent que du temps soit libéré par rapport à leur fonction dans l'éducation nationale. C'est pourquoi nous avons sollicité et obtenu cette convention avec le ministère de l'éducation nationale.

M. Jean-Léonce Dupont, président - Concernant les personnes mises à disposition, pouvez-vous préciser les avantages que vous retirez d'un recours à ces personnels de l'éducation nationale, et les incidences financières ?

Par ailleurs, pouvez-vous préciser si la MAIF reçoit des subventions de l'éducation nationale ?

M. Roger Belot - Les avantages sont essentiellement liés au fonctionnement de la mutuelle. Une disponibilité est nécessaire pour que les élus exercent réellement le pouvoir dans cette importante mutuelle. Nous avons aujourd'hui 4 800 salariés dans le groupe MAIF, pour environ 11 milliards de chiffre d'affaire dans le groupe.

Ce qui nous distingue des sociétés traditionnelles est que le pouvoir est exercé par les sociétaires. La présence de sociétaires au plus haut niveau dans la mutuelle exige la présence d'élus, d'une part, de techniciens, salariés, professionnels de l'assurance, d'autre part.

On peut faire la comparaison avec une municipalité où le maire est élu, et où le secrétaire-général de la mairie et les services, qui sont des professionnels, exécutent les décisions du conseil municipal. Nous tenons beaucoup à ce que le pouvoir reste aux sociétaires ; les administrateurs élus sont leurs représentants.

En ce qui concerne la question des subventions, nous remboursons intégralement l'éducation nationale, ce qui représente une somme annuelle de 2 MF pour les sept emplois demi-postes et les trois plein-temps.

Nous ne recevons aucune autre subvention. Nous en accordons même quelques unes. Dans le cadre de l'activité de la MAIF, nous avons créé une association "prévention MAIF", dont la vocation est de développer auprès des enfants des actions de prévention dans le domaine de la sécurité routière, ou des accidents domestiques. Dans ce cadre, nous avons des partenariats, dont nous sommes les financeurs. A titre d'exemple, le dernier en date avec le ministère de l'éducation nationale porte sur le financement d'une brochure à destination des élèves qui viendra compléter le nouveau dispositif mis en place pour le brevet de sécurité routière enseigné dans les collèges. Nous avons aussi des partenariats avec le ministère des transports.

M. Francis Grignon, rapporteur - Revenons à la question des emplois qui nous intéresse. Dans les rapports entre la MAIF et l'éducation nationale, vous avez indiqué qu'il n'y a que des mises à disposition. Quand vous dites éducation nationale, c'est aussi bien administration centrale que rectorats.

N'y a-t-il pas, en plus des situations particulières en province, dont les recteurs s'arrangent ? N'y a-t-il pas, par ailleurs, des distorsions de concurrence ? La MAIF a été créée pour l'éducation nationale, mais la MAIF s'adresse-t-elle uniquement à l'éducation nationale, ou va-t-elle plus loin ?

M. Roger Belot - Je ne suis pas surpris par votre question sur la concurrence, car il est légitime à mon sens de se la poser. Si la MAIF bénéficiait d'avantages financiers, ce serait sans doute condamnable et nos concurrents ne manqueraient pas de le faire. Mais la MAIF ne bénéficie d'aucun avantage financier puisqu'elle rembourse intégralement l'éducation nationale.

Aujourd'hui, les 21 membres élus du conseil d'administration relèvent du ministère de l'éducation nationale, mais la MAIF a des statuts ciblés. Nous utilisons le mot "sociétaire" plutôt que le mot "client". Nos sociétaires relèvent de l'éducation nationale et aussi de la recherche, de la culture et des loisirs. C'est un champ qui est tout de même bien fermé. Rien n'interdirait à l'assemblée générale d'élire comme administrateur quelqu'un relevant du ministère de la recherche, ou d'un ministère autre que l'éducation nationale. Mais les enseignants restent le noyau dur de la MAIF et la grande majorité ; le reste existe mais est minoritaire.

M. Jean-Claude Carle, rapporteur adjoint - Concernant les mises à disposition, quelle est leur durée moyenne ? Un enseignant peut-il faire toute sa carrière, ou la quasi-totalité de sa carrière, à la MAIF ?

M. Roger Belot - La réponse est non. D'abord, pour être mis à disposition, il faut être élu au conseil d'administration. C'est une position par définition fragile. Le mandat est de six ans. Au terme du mandat, la démocratie jouant, l'administrateur peut-être réélu certes, car il n'y a pas de limitation du nombre de mandats, mais il peut aussi ne pas l'être. D'où l'utilité de la mise à disposition pour que ce collègue, le cas échéant, puisse retrouver un emploi.

Par ailleurs, on n'entre pas à 20 ou 30 ans au conseil d'administration de la MAIF même si ce n'est pas interdit. Pour être élu au conseil d'administration, la démocratie joue son rôle. Et un sociétaire qui n'aurait que deux ans d'ancienneté pourrait formellement être élu. Dans ce système, notre réseau de militants dans nos départements ne bénéficient d'aucun avantage particulier. J'ai occupé cette fonction pendant des années avant de devenir administrateur, puis président. Le militant ne bénéficie d'aucune disponibilité. C'est là que l'on fait ses preuves, avant de pouvoir espérer être élu au conseil d'administration de la MAIF.

Le sociétaire anonyme qui se présente devant l'assemblée générale pour être élu en a certes le droit, mais il a tout de même peu de chances de l'être car il ne sera pas connu comme militant, ayant déjà donné beaucoup de son temps, ayant fait preuve d'un véritable engagement pour sa mutuelle. Jusqu'à présent, les administrateurs ont toujours été des collègues qui, dans le passé et pendant de nombreuses années, ont fait preuve de leur attachement à la mutuelle.

C'est pourquoi l'âge moyen d'élection des administrateurs se situe aujourd'hui autour de cinquante ans. La personne élue bénéficiera alors d'une mise à disposition de cinq ans pour le corps des ex-instituteurs, et au maximum dix ans avant l'âge de la retraite. Aujourd'hui sur nos 21 élus, il y dix actifs, et cela se renouvelle. Il y a généralement parité entre le nombre d'actifs et de retraités.

La durée moyenne de mise à disposition se situe entre six et dix ans. On ne fait pas toute sa carrière à la MAIF. Ce n'est pas un endroit où l'on peut se réfugier ; il y a un vrai travail. La mission d'administrateur est très prenante ; ce n'est pas une sinécure. Nos administrateurs sont élus, l'assemblée générale les répartit géographiquement sur le territoire et leur attribue de nombreuses missions et déplacements. Ces heures de militantisme ressemblent beaucoup à des heures de travail.

M. Jean-Claude Carle, rapporteur adjoint - Vous parlez d'organisation sur le territoire. Comment êtes vous organisés ? Y a-t-il des caisses locales ?

M. Roger Belot- Nous avons 135 délégations départementales, qui sont à la fois des bureaux et des lieux de rencontres entre le sociétaire et son assureur mutualiste. Dans ces délégations départementales figurent une double structure : des sociétaires consacrent leur temps, militent à la MAIF, ceci sans aucun avantage particulier, et les salariés compétents, les techniciens d'assurance procèdent aux opérations techniques.

Ce réseau de 135 délégations départementales représente près de la moitié de nos effectifs salariés avec 2.000 salariés répartis et 550 militants que l'on appelle les correspondants ou délégués départementaux.

Notre siège social est basé à Niort et regroupe les fonctions centrales de l'entreprise et la direction. C'est là que se réunit le conseil d'administration, qui vient quelquefois à Paris pour des raisons de commodité. Les administrateurs ont pour mission de veiller à la pratique et au maintien des valeurs mutualistes dans les départements. Ils participent donc non seulement au conseil d'administration et aux commissions, aux groupes de travail, mais il vont aussi sur le terrain pour effectuer des visites de délégation, et ce, au rythme environ d'une fois tous les trois ans.

Ce travail est réparti entre les administrateurs. Ils ont donc une véritable mission. J'ai arrêté de faire à la fois la classe et la MAIF, parce qu'à un moment donné, il est impossible de faire correctement les deux. J'ai toujours pensé qu'il fallait être d'abord un bon enseignant si on veut être un bon administrateur de la MAIF. Ce n'est pas un refuge.

M. Jean Bernadaux - Les délégués départementaux sont-ils rétribués ? Si oui, par qui le sont-ils ?  La CAMIF, qui est une consoeur de la MAIF, a-t-elle des mises en disponibilité ?

M. Roger Belot - Il n'y a pas de rétribution des délégués départementaux.

M. Jean Bernadaux - Ce sont des bénévoles ?

M. Roger Belot - Oui, ils perçoivent des indemnités correspondant au remboursement de leurs frais, mais ce ne sont pas des salariés de la MAIF. Nous tenons beaucoup à cette distinction.

M. Jean Bernadaux - Cela devrait plaire à Mme Luc. Dommage qu'elle ne soit pas là !

M. Roger Belot - Parce que vous pensez que le militantisme n'est plus possible ?

M. Jean Bernadaux - Je suis sociétaire de la MAIF.

M. Roger Belot - J'espère que vous êtes un sociétaire satisfait.

Lorsque l'on milite dans une association ou un syndicat, on n'est pas rémunéré a priori, mais simplement indemnisé des frais divers, des frais de déplacements. Nous tenons beaucoup à cette distinction entre une structure salariée d'entreprise et une structure militante composée de sociétaires, dont la plupart sont enseignants, mais dont quelques uns relèvent du ministère de la culture par exemple, qui donnent de leur temps pour leur mutuelle.

Ce temps n'est pas permanent. Une permanence est assurée, y compris durant les congés, les vacances, l'été, où il se répartissent par rotation.

Quant à la CAMIF, je ne me sens pas vraiment habilité pour répondre à votre question. A l'origine, la CAMIF est une création de la MAIF qui avait l'idée d'en faire une caisse de solidarité ; du moins que les excédents des ventes de cette coopérative bénéficient à la collectivité des sociétaires de la MAIF sous la forme de caisse de solidarité. C'était à une époque où nos garanties n'étaient pas aussi complètes qu'aujourd'hui, et où les sociétaires pouvaient rester dans la difficulté après un événement car une partie des dommages subis pouvait ne pas être couverte par l'assurance.

Nos garanties se sont élargies, et la CAMIF a volé de ses propres ailes. Au-delà de l'affinité, il n'y a plus aujourd'hui aucun lien institutionnel entre la MAIF et la CAMIF. Ce sont des amis, nous avons beaucoup d'affinités, mais structurellement, économiquement, sur tous les plans, la CAMIF est pleinement autonome. Les liens avec la MAIF sont des liens d'affinité, et dus au fait que la CAMIF s'adresse d'abord à nos sociétaires et à un public plus élargi.

Cela dit, je ne me sens pas habilité à parler de la CAMIF, mais je sais qu'ils n'ont pas de mises à dispositions.

M. le Président - Avez-vous des participations dans certaines sociétés, du type MAE, etc. ?

M. Roger Belot - Non. Nous avons de bonnes relations car nous sommes complémentaires. C'est le cas avec la MGEN jusqu'à aujourd'hui. La plupart des assureurs proposent une assurance santé. Nous nous le sommes interdit jusqu'à présent, parce dans le monde de l'éducation nationale, d'autres oeuvres couvrent ces besoins.

Par exemple, nous ne sommes pas un assureur santé, car il y a la Mutuelle Générale de l'Education Nationale ; nous ne sommes pas une banque, la CASDEN-Banque Populaire proposant ses services à nos collègues. Cela cible notre champ. Nous avons donc des relations d'organisations amies, de partenariat, nous n'avons pas de relations financières puisque eux comme nous ne sont pas des sociétés de capitaux.

M. le Président - Pouvez-vous nous préciser la place de la MAIF sur le marché des assurances et des mutuelles, ainsi que les conditions pour être sociétaire ?

M. Roger Belot - Je ne veux pas faire de prosélytisme. La MAIF aujourd'hui, c'est la MAIF et une filiale. Les statuts de la MAIF stricto sensu, ce sont les salariés de l'éducation nationale, du monde de la recherche, de la culture et des loisirs, ainsi que les personnes morales qui agissent dans ces domaines, et les salariés de ces personnes morales.

Par exemple, un centre d'action culturelle ou une maison de la culture peut être assuré à la MAIF, et ses salariés également. Aujourd'hui, sur un 1 700 000 sociétaires à la MAIF, deux tiers sont composés d'enseignants, d'agents de l'éducation nationale et l'autre tiers de ces publics plus divers.

La MAIF a également créé il y a dix à onze ans une filiale, société anonyme pour en conserver la maîtrise, essentiellement destinée à conserver en son sein les enfants des sociétaires de la MAIF lorsqu'ils ont atteint un âge et une fonction, une profession qui ne leur permet plus de rester à la MAIF.

J'illustre ce propos. Autrefois, un enfant de sociétaire de la MAIF faisait ses études. Il était couvert par le contrat de ses parents. Il atteignait l'âge de 26 ans, et accédait alors à une fonction. Il devenait médecin, il n'avait plus qualité pour adhérer à la MAIF. Il ne remplissait plus les conditions statutaires, nous ne pouvions plus l'assurer. Nous "l'offrions" alors à nos concurrents, qui s'en régalaient alors que nous avions assumé la période la plus coûteuse, c'est à dire celle du jeune conducteur entre 18 et 25 ans. C'était à une époque où l'on pouvait s'interroger sur les évolutions de recrutement de personnels de l'éducation nationale, et la mutuelle craignait de ne pas avoir un développement suffisant.

Comme d'autres, nous avons besoin de développement. D'où l'idée de créer cette filiale, pour conserver les enfants de sociétaires. C'est ce qui constitue aujourd'hui majoritairement la filiale, qui compte désormais 480 000 adhérents. Nous y gardons aussi les ex-sociétaires qui divorcent, qui se séparent, qui changent de métier. Un enseignant qui abandonne la profession perd la qualité d'adhérer à la MAIF. Nous lui proposons d'adhérer à la filiale. C'est une société anonyme. Les tarifs sont un peu plus élevés, et les conditions ne sont pas totalement identiques.

M. le Président - Puis-je vous demander le nom de cette filiale ?

M. Roger Belot - Filia-MAIF.

M. le Président - Y a-t-il des détachements dans cette filiale ?

M. Roger Belot - Pas du tout.

M. le Président - Le ministère de la culture connaît-il aussi des détachements, comme le ministère de l'éducation nationale ?

M. Roger Belot - Nous n'avons pas été confrontés à cela. Nous y serions si nous avions un administrateur élu et si une assemblée générale prochaine élisait un administrateur relevant du ministère de la culture, et non pas du ministère de l'éducation nationale. Nous n'avons jamais été confrontés à ce cas de figure jusqu'à présent. Mais si cela se présentait, nous solliciterions certainement le ministère concerné. C'est peu probable à court terme. La MAIF reste quand même majoritairement la mutuelle des enseignants.

M. Jean-Claude Carle, rapporteur adjoint - Proposez-vous d'autres produits que l'assurance ?

M. Roger Belot - Non. Mais nous avons désormais l'assurance de biens, de dommages, et maintenant une filiale d'assurance-vie. Nous restons dans le champ de notre métier, nous avons décidé de ne pas en sortir. L'assurance-vie fait pleinement partie de ce champ. Notre filiale d'assurance-vie a une douzaine d'années d'existence ; elle propose à nos sociétaires des produits d'épargne-retraite classiques. Si nous ne le faisons pas, nos concurrents le font. Nous devons fidéliser les sociétaires en proposant une gamme de produits répondant à leurs besoins.

M. Jean Bernadaux - La MAIF bénéficie de quelques avantages venant de l'éducation nationale, en particulier des mises à disposition, mais elle a des adhérents raisonnables. C'est ce qui fait la valeur de la MAIF. Et si les enfants ont bénéficié des qualités de leurs parents, ce n'est pas la peine de les laisser partir ailleurs.

Quel est le nombre de sinistres qu'un ancien instituteur a dans sa vie ? Ce n'est pratiquement rien. C'est cela qui a fait le démarrage de la MAIF, et la valeur de la mutuelle.

M. Pierre Martin - Au niveau de l'habitat, cela se comprend. Ce sont les communes qui entretiennent.

M. Roger Belot - De moins en moins, car les logements de fonction disparaissent. Cela a pu être vrai à une époque, mais cela ne l'est plus aujourd'hui. Il y a de moins en moins d'instituteurs et de moins en moins de logements de fonction. Je ne suis pas sûr, et je doute même fortement -cela relève de la responsabilité des maires- que s'il y avait un incendie dans le logement de fonction, la municipalité le prendrait en charge sans lui demander de faire une déclaration à son assureur.

M. Pierre Martin - A travers vos diverses activités, il est évident que vous vous professionnalisez. Pensez-vous que des gens formés pour être dans des écoles sont plus aptes que de vrais professionnels pour être dans des conseils d'administration de la MAIF ? Est-ce véritablement une façon de vous développer, ou préférez-vous le clientélisme au professionnalisme ?

M. Roger Belot - Je ne pense pas qu'il s'agisse de clientélisme. La MAIF prouve depuis l'origine son succès -j'ose prononcer le mot- dans un marché de plus en plus difficile. Nous sommes de plus en plus soumis à la concurrence, avec le développement de la banque-assurance notamment. Cela montre que le système mis en place par la MAIF est viable et qu'il n'est pas incompatible d'avoir d'un côté une structure politique garante des valeurs qui font la différence par rapport à une société d'assurance traditionnelle et de l'autre des professionnels de haut niveau concourant à la prise de décisions, et ensuite à la mise en oeuvre des décisions qui font se développer la mutuelle.

Au plan politique, vous devez aussi vivre cela. Vous avez à prendre des orientations et des décisions politiques dans des domaines qui ne sont pas forcément, à moins d'être omniscients, de votre compétence. Il n'en reste pas moins que vous avez une vision globale de la société que vous voulez construire pour les citoyens.

Nos administrateurs ont une vision de la mutualité. Il faut ensuite la confronter aux réalités professionnelles et économiques. Nous sommes conscients d'être à la fois mutuelle et entreprise. Nos structures permettent de conjuguer les deux. La force de la MAIF réside dans sa complémentarité : une structure de professionnels qui sont aussi compétents que ceux de n'importe qu'elle société d'assurance. Nous avons les moyens de nous offrir les compétences techniques nécessaires.

Le plus est la présence d'une structure politique garante de valeurs et qui contribue à la fidélité d'un sociétariat qu'il faut entretenir. Ce n'est plus aussi spontané que dans les années de fondation et dans les années juste après-guerre. Nous devons expliquer à nos sociétaires la différence. Le rôle des militants est d'expliquer la différence, car nous refusons la banalisation. En ce sens, leur présence est utile et nécessaire.

Ce n'est pas du clientélisme. C'est au contraire le fondement de la mutualité. Le sociétaire est conscient, comme les anciens, qu'il adhère à une mutuelle. Il n'est pas un client banal d'une société d'assurance banale. Il fait un choix lorsqu'il adhère. Et, par sa cotisation, il contribue à la fois à être un assureur. Il apporte d'abord sa cotisation pour créer une collectivité qui assure les autres. Et s'il est lui même victime d'un sinistre, la collectivité va lui donner sa qualité d'assuré et l'indemniser au titre de son sinistre. La différence est qu'on est à la fois assureur et assuré. C'est toute la différence, et il faut des gens qui continuent à divulguer ce message et le promouvoir, sinon ce sera la banalisation.

M. le Président - Les emplois-jeunes peuvent-ils adhérer ?

M. Roger Belot - Nous acceptons les emplois-jeunes dans le champ statutaire. L'emploi-jeune employé à l'hôpital de Niort n'a pas qualité pour adhérer à la MAIF. Mais ceux de l'éducation nationale ou d'un centre d'action culturelle ont qualité pour adhérer. Nous avons fait adhérer l'an dernier 7 000 emplois-jeunes. Par rapport au volume total des emplois-jeunes, tous ne sont pas venus chez nous. Ils n'ont malheureusement pas beaucoup de biens à assurer. C'est souvent le contrat des parents qui les assure. Ce chiffre n'est pas très significatif.

M. Jean-Claude Carle, rapporteur adjoint - Quelle est votre position par rapport à d'autres groupes d'assurances ? Vous avez un chiffre d'affaire de 30 milliards ?

M. Roger Belot - Nous sommes essentiellement un assureur de particuliers. Pour les risques professionnels, les groupes d'assurances encaissent des cotisations ou des primes d'assurances considérables ; les chiffres d'affaires ne sont pas comparables. A titre de comparaison, le plus grand assureur mutualiste est la MACIF. Elle a quatre millions d'assurés, alors que, MAIF plus FILIA-MAIF, nous atteignons deux millions. Ils ont le double de nous parce que leur potentiel est énorme. Ils s'adressent à tous les salariés du commerce et de l'industrie.

La MAIF a initié la création de la MAAF d'abord, et de la MACIF ensuite. La MAIF, à l'époque, plutôt que d'élargir ses statuts, a contribué à la création d'autres mutuelles pour que le principe se propage à d'autres. La MACIF nous a largement dépassés, et compte aujourd'hui quatre millions de sociétaires.

La MAAF est à peu près comme nous. Le champ de la MAAF a dépassé les artisans. Elle s'est beaucoup plus ouverte que nous. Elle a créé une société anonyme. Il reste un petit bout de mutuelle et une grande société anonyme qui fait de la publicité à la télévision. C'est son choix.

Nous sommes le huitième assureur de dommages en France, toutes sociétés confondues. Les grands comme AXA sont loin devant nous. Et parmi les mutuelles, c'est la MACIF la plus grande. Nous sommes un peu plus grands que la MATMUT, qui est la quatrième des grandes mutuelles françaises. La MAIF se situe au second rang, avec la MAAF.

La MATMUT est la mutuelle-assurance des travailleurs mutualistes. Son siège est à Rouen. Elle est greffée sur la mutualité santé. Elle a comme partenaires les mutuelles-santé, à l'exception de la MGEN, c'est à dire plutôt les mutuelles de la FNMF. Toute personne qui a une mutuelle-santé relevant de la fédération nationale de la mutualité française a qualité pour s'assurer à la MATMUT. Le champ est ici considérable ; il n'est pas socioprofessionnel comme nous. C'est la grande différence avec la MAAF, la MAIF et la MACIF, qui avaient un secteur socioprofessionnel. La MATMUT concerne les travailleurs bénéficiant d'une mutuelle-santé, ce qui donne un potentiel important.

M. le Président - Y a-t-il d'autres questions ? Non.