AUDITION DE M. GEORGES SEPTOURS,
INSPECTEUR GÉNÉRAL DE L'ÉDUCATION NATIONALE

(17 FÉVRIER 1999)

AUDITION À HUIS CLOS
Audition de M. OLIVIER SCHRAMECK,
DIRECTEUR DU CABINET DU PREMIER MINISTRE

(10 MARS 1999)

Présidence de M. Adrien GOUTEYRON, président

Le président lit la note sur le protocole de publicité des travaux de la commission d'enquête et fait prêter serment à M. Olivier Schrameck.

M. Adrien Gouteyron, président - Vous n'avez pas souhaité faire de déclaration liminaire, préférant vous livrer d'entrée aux questions. Ces questions pourront porter sur votre expérience actuelle et les responsabilités éminentes que vous exercez actuellement, mais aussi sur celles que vous avez exercées lorsque le Premier ministre actuel était ministre de l'éducation nationale.

Je vous poserai une première question qui portera sur le passé : M. Jospin, lorsqu'il était ministre de l'éducation nationale, a obtenu une revalorisation importante des salaires et rémunérations des enseignants. Je voudrais vous demander quels étaient les objectifs initialement poursuivis par cette revalorisation. Pensez-vous que ces objectifs ont été atteints ? Plus clairement : ne pensez-vous pas que l'on a manqué là une occasion de changer un certain nombre de choses ?

En effet, je crois savoir qu'il y a eu quelque débat au sein même du gouvernement de l'époque, certains ayant considéré que les avantages supplémentaires donnés aux enseignants l'avaient été sans contrepartie et qu'une chance a peut-être été manquée.

Voilà la question que vous attendiez sans doute.

M. Olivier Schrameck - Je n'en suis pas surpris, Monsieur le Président. C'est une question très large qui appelle, à mon sens, plusieurs éléments de réponse.

Il convient d'abord de se replacer dans le contexte des années 1987/88. C'est d'ailleurs à dessein que je parle de l'année 1987, cette revalorisation de la condition, ou de la profession enseignante (les deux termes étaient employés à l'époque) étant une promesse de M. René Monory qui l'avait exprimée en termes extrêmement précis, même si elle s'était heurtée à une certaine incrédulité de la part des syndicats enseignants. Elle a été portée, y compris dans la campagne électorale de 1988, par ce qui devait devenir l'opposition. Il y avait donc l'apparence d'un consensus politique sur cette question, puisque les forces politiques qui devaient devenir la majorité parlementaire avaient fait, à la suite du Président de la République sollicitant son renouvellement, de la priorité à l'éducation nationale un objectif d'ensemble.

Cette situation ne peut pas s'expliquer sans prendre en compte l'état d'esprit de la profession enseignante à l'époque, état d'esprit qui correspondait à une réalité détectable à travers, par exemple, les résultats des concours d'entrée dans la profession.

Il y avait une sensation ambiante de dévalorisation, de méconnaissance de l'importance des fonctions par la société, qui n'était pas seulement matérielle, mais aussi psychologique, et qui s'expliquait par l'insuffisance perçue comme telle des rémunérations, mais aussi par les conditions de travail et par l'accent porté au moins dans une partie de la société politique sur des valeurs dans lesquelles les enseignants ne se reconnaissaient pas. Accent porté sur l'entreprise on parlait de l'entreprise France à l'époque très fréquemment, entre 1986 et 1988, et les valeurs du service public apparaissaient comme étant relativement dévalorisées aux yeux d'un certain nombre de syndicats enseignants. Voilà quelle était la situation psychologique.

Je parlais des indicateurs objectifs. Par exemple, en ce qui concerne le CAPES externe, près de 60 % des places étaient pourvues. Beaucoup de candidats inscrits ne se présentaient pas et, parmi les candidats inscrits, les jurys considéraient que la qualité des candidats ne permettait pas de pourvoir une grande partie des postes, soit près de 40 %. Au surplus, il y avait au sein des écoles normales, s'agissant du premier degré, un certain sentiment d'enfermement dans un milieu trop peu ouvert sur le monde extérieur.

Tout cela forme un contexte psychologique dont les organisations syndicales se sont évidemment prévalu pour réclamer d'abord une amélioration des conditions matérielles de leurs mandants ; amélioration qui, dans son principe, leur avait d'ores et déjà été promise sous d'autres formes techniques. A l'époque, par le biais des heures supplémentaires, M. Monory ministre de l'éducation nationale, avait fait valoir qu'il assurerait une augmentation des rémunérations.

Lorsque M. Jospin est arrivé rue de Grenelle, il a donc eu face à lui des interlocuteurs extrêmement revendicatifs, qui lui demandaient de tenir des promesses auxquelles, de différentes façons, le monde politique s'était engagé dans son ensemble.

Vous m'avez interrogé sur les objectifs, les modalités, et aussi les éventuelles compensations de ces mesures indiciaires et indemnitaires que l'on a parfois qualifiées de "plan Jospin".

Il y avait trois objectifs :

- Le premier était de rétablir une reconnaissance, au sein de la nation, de la fonction enseignante, par les actes et par le discours, mais le discours ne pouvait pas, pour les raisons que je viens d'évoquer, se passer des actes, et notamment les mesures financières.

- Le second objectif avait trait à la formation. Le ministre de l'éducation nationale de l'époque était persuadé que les modalités de formation étaient devenues très insuffisantes. Il n'a jamais voulu s'inscrire dans la distinction traditionnelle entre savoir et pédagogie. Il considérait que les deux étaient intimement liés. Pour autant, il lui semblait que la reconnaissance même de la fonction enseignante supposait qu'il y eût des lieux de formation reconnus comme tels, et bien adaptés à ce que devait être le profil de la profession enseignante, ce qui suppose de faire bénéficier de son savoir par des méthodes pédagogiques adaptées.

D'où l'idée, inséparable de la revalorisation, de la création des Instituts universitaires de formation des maîtres (IUFM), qui avaient vocation à accueillir les futurs enseignants du premier degré et du second degré, avec un certain nombres de contacts, d'échanges et de formations communes, même s'il ne s'agissait nullement de nier la spécificité des milieux scolaires des premier et second degrés.

Il y avait aussi le souci d'assurer une meilleure formation universitaire préalable avant la phase de préparation à la profession, ce qui a notamment motivé les exigences universitaires posées pour la formation des maîtres du premier degré. Au-delà de ces exigences proprement dites, il y a eu le souci de reconnaître une sorte "d'égale dignité" entre les fonctions du premier degré et celles du second degré, qui ne devait se traduire ni par une hiérarchie psychologique, ni par une hiérarchie indiciaire, le gouvernement de l'époque étant persuadé que beaucoup se jouait dès l'enfance en matière de discrimination scolaire, et qu'il était essentiel que les meilleurs des enseignants motivés puissent se diriger vers les carrières du premier degré. Voilà un second objectif, important, qui relève de la fonction enseignante en tant que telle.

- Le troisième objectif, au centre duquel s'est trouvée la question de la création ou non d'un corps de professeurs des collèges, a été de faciliter la gestion des enseignants, et de les mobiliser au bénéfice des tâches qui apparaissaient les plus urgentes et les plus difficiles. On aurait pu procéder en matière de revalorisation, soit comme le suggérait M. Monory par une augmentation des heures supplémentaires, soit comme le réclamaient les organisations syndicales par une augmentation aussi uniforme que possible des montants indiciaires correspondant aux différents échelons et grades des corps. Ce n'est pas, pour l'essentiel, la voie qui a été choisie.

On a choisi de procéder essentiellement à la création d'un régime indemnitaire, car l'une des particularités de la fonction enseignante parmi les diverses professions de la fonction publique était d'être presque totalement dépourvue de régime indemnitaire, puisqu'à l'époque il n'y avait qu'une indemnité, jamais revalorisée, qui devait être de 23 francs, si mes souvenirs sont exacts...

M. Xavier Darcos - ... et 33 centimes.

M. Olivier Schrameck - Il nous a semblé que, si le régime indemnitaire pouvait avoir une utilité, c'était précisément d'introduire davantage de souplesse dans la politique des rémunérations, et aussi d'inciter les enseignants à affronter des conditions peut-être plus difficiles d'exercice de la profession qu'ils ne l'auraient fait spontanément. D'où les types d'indemnités qui ont été mis en oeuvre à l'époque, et que je rappelle :

- les indemnités, dites de ZEP, étaient une innovation complète et accompagnaient le mouvement de relance des zones d'éducation prioritaires dès l'année 1988 ;

- le régime des indemnités de première affectation facilitaient les débuts de carrière des enseignants, notamment dans les disciplines déficitaires, ce qui devait encourager les futurs enseignants à se présenter aux concours de ces disciplines déficitaires ;

- les indemnités péri-éducatives, c'est-à-dire celles qui devaient pousser les enseignants, au delà de leurs heures de classe, à encadrer les activités collectives de leurs élèves et dont on retrouve l'inspiration dans les programmes de réforme actuelle.

Bien sûr, il y avait des mesures de nature indiciaire, sinon ce plan n'aurait pas été de nature à être accepté. Mais encore une fois, plutôt que de consentir à des augmentations uniformes, nous avons procédé à un prolongement de carrière, puisque l'une des grandes insatisfactions des enseignants d'alors était que leur carrière se déroulait entièrement sur une période de 25 années.

Nous avons donc voulu leur donner des perspectives qui puissent les motiver au-delà, d'où la création de la "hors-classe" dont le principe de départ avait été qu'elle ne serait pas susceptible d'être pourvue automatiquement à l'ancienneté. L'ouverture progressive de la hors-classe a fait qu'en réalité la possibilité en a été donnée progressivement à la quasi-totalité des enseignants.

Cette hors-classe s'accompagnait, pour le second degré, de la perspective de la création d'un mécanisme de même nature pour le premier degré, toujours selon le même parallélisme des carrières.

A la question de savoir si j'estime que les résultats ont été atteints, je ferai d'abord une observation expérimentale. Ce thème de la revalorisation de la condition enseignante, que l'on trouvait à la manchette de tous les journaux, quotidiens ou hebdomadaires, a complètement disparu en deux à trois ans.

Même les organisations syndicales, qui ont réclamé depuis de nouveaux plans de revalorisation, n'ont jamais invoqué comme ils l'avaient fait par le passé ce sentiment diffus et général d'insatisfaction qui se cristallisait autour de ces formulations.

De manière tout aussi décelable, à travers les résultats des concours, on a perçu une remontée générale des candidatures qui ne s'explique pas, à mon sens, uniquement par l'attrait pour des carrières prolongées et améliorées. Elle s'explique aussi par l'appareil de formation mis en place. Il y a eu une reconnaissance du rôle des IUFM comme écoles professionnelles de formation. Bien sûr, il y a eu des critiques dès l'origine mais, malgré tout, cette expérience entièrement nouvelle a motivé un certain nombre de générations et de promotions d'étudiants à emprunter cette voie. On peut dire qu'il n'y a plus de crise de recrutement dans l'éducation nationale aujourd'hui.

Cela a eu un certain coût, sachant que tout doit être relativisé eu égard aux masses considérables que représente l'éducation nationale. Je rappelle que le plan originel était de 17 milliards de francs échelonné sur dix ans (10 milliards sur les cinq premières années, sept milliards sur les suivantes). On a calculé a posteriori qu'en fait il aura coûté 19 milliards.

Par rapport aux masses des rémunérations, cela comportait une augmentation de 1,6 % par an des rémunérations des enseignants. Il faut donc relativiser globalement cet effort de mise à niveau.

J'ai n'éluderai pas, Monsieur le président, la question mentionnée explicitement à travers votre triple interrogation : aurait-on pu, aurait-on du négocier une sorte de compensation préalable à la revalorisation de la fonction enseignante ?

Je vous dirai très nettement même si je sais que cela peut ne pas correspondre au sentiment de certains participants que le ministre de l'éducation nationale de l'époque ne l'a pas pensé. D'abord, parce qu'il estimait que les organisations syndicales et les enseignants n'étaient absolument pas prêts à ce type de discours. Certes, une organisation syndicale importante, la Fédération de l'Education Nationale, avait développé au congrès de La Rochelle un discours sur le "travailler autrement". La FEN était représentée au sein du second degré par le SNES, et à l'époque la scission n'était pas faite, même si elle était déjà imaginée par certains le SNES avait des positions radicalement inverses de celles de la FEN, et aucune velléité de cette nature n'avait été exprimée par elle.

Par ailleurs, les contacts normaux qui avaient pu être menés dans la concertation avec la FEN n'avaient pas conduit à dégager des propositions de mesures préalables en termes d'alourdissement des horaires, par exemple, que l'on aurait pu imaginer même si, bien sûr, on les avait formulées différemment.

La démarche du ministre de l'éducation nationale a été inverse : elle a été de reconnaître qu'il y avait un vrai problème de reconnaissance et de dévalorisation a contrario de la fonction enseignante, qu'il fallait prendre appui sur un geste de confiance fait à l'égard des enseignants pour promouvoir une pédagogie nouvelle. Telle a été la philosophie de la loi d'orientation sur l'éducation, votée définitivement par le Parlement dès la session du printemps 1989, et qui est devenue la loi du 10 juillet 1989.

Cette loi d'orientation a rencontré dès l'origine, et bien au-delà, un très large consensus, et pose les bases d'une pédagogie nouvelle qui s'est développée depuis, notamment en ce qui concerne l'accompagnement, l'encadrement des élèves, le travail en équipe, et aussi la réforme de l'appareil de formation. Je crois que le vote et l'application de cette loi d'orientation auraient été inconcevables si le gouvernement n'avait pas manifesté au préalable sa volonté de répondre à une revendication reconnue comme légitime par l'ensemble de la société politique.

M. Xavier Darcos - Face à M. Schrameck, que je considère plus comme un généraliste actuel que comme un spécialiste de naguère, je voudrais faire une observation et poser deux questions.

Première observation : le plan de revalorisation est considéré aujourd'hui comme faisant partie des évidences, et plus personne ne discute le fait qu'il était nécessaire de le faire à un certain moment. En revanche, en ce qui concerne les enseignants du premier degré, cela crée une difficulté qui n'est pas réglée : lorsque des enseignants recrutés aujourd'hui intègrent leur premier poste, ils ont très souvent une rémunération supérieure à ceux qui enseignent dans les mêmes conditions, dans les mêmes classes, pour la même fonction, avec les mêmes horaires, depuis une trentaine d'année, parce qu'ils sont instituteurs.

Concernant les questions plus générales qui nous préoccupent, nous faisons deux observations. La première est que l'on dépense en France environ un milliard par jour pour l'éducation nationale.

Je ne polémique pas. Nous avons même accéléré le plan d'intégration des professeurs des écoles. Un milliard par jour, c'est beaucoup. Et pourtant, on a toujours le sentiment que le discours revendicatif aussi bien des enseignants que parfois même des parents d'élèves est qu'il manque quelque chose, et qu'il faut donner plus. Est-ce votre sentiment ? Cela vous paraît-il juste ? Dans le cas contraire, d'où vient cette optique continuelle du quantitatif que l'on ne semble pas pouvoir dégager de l'esprit des gens ? Et ce n'est pas seulement le SNES qui dit cela.

Ma seconde question porte sur les chefs d'établissements. Je crois, en effet, que le recrutement aujourd'hui est abondant, mais ce n'est pas vrai pour les chefs d'établissements. On n'a pas de bons candidats. Les concours ne fournissent pas des gens de qualité. Les chefs d'établissement ne sont pas très heureux de leurs fonctions. On a des gens très variés, surtout parmi les chefs d'établissements en collèges. Partagez-vous cette analyse ? Quelles solutions imaginez-vous ? Ne faudrait-il pas faire quelque chose d'important sur la fonction des chefs d'établissements, envisager une autre conception de la fonction, une autre relation d'autorité avec les enseignants ?

Enfin, dernière question : nous observons également, depuis que nous avançons dans notre enquête, alors que le rapport entre le nombre d'enseignants et d'élèves n'est pas défavorable (un sur douze), que la distribution des postes par rapport à la population scolaire est très difficile à gérer, qu'il y a des situations très contrastées, que beaucoup d'utilisateurs de l'école ont le sentiment que les classes sont surchargées, que le système des options et des disciplines très nombreuses complique aussi la redistribution des postes ; il nous semble que tous les observateurs et tous les spécialistes, de quelque bord qu'ils soient, pensent que l'une des solutions à cette difficulté est la bivalence des enseignants du collège.

Nous nous demandons s'il a été heureux d'entrer dans une voie d'extinction des corps des PEGC, s'il a été heureux que, finalement, le projet précédent au vôtre, qui consistait à créer des professeurs brevetés, ait été abandonné. Je voudrais connaître votre sentiment à ce sujet.

M. Olivier Schrameck - Vous m'avez posé quatre types de questions différentes. Pour ce qui concerne la situation des enseignants du premier degré, nous avions perçu le problème que vous soulignez, et qui existe. Mais en matière de revalorisation du premier degré, nous avions le choix entre deux perspectives : revaloriser les rémunérations des instituteurs (ce qui n'aurait rien changé au fonctionnement du système) ou créer un corps nouveau (que l'on a qualifié de professeurs des écoles) fondé sur un système de formation nouveau (celui des IUFM), qui bénéficierait de perspectives de carrière plus attractives.

Je rappelle qu'en francs d'aujourd'hui, un instituteur pouvait espérer terminer sa carrière à 11 300 francs, et un professeur du second degré à 14 400 francs. Il y avait d'abord une marge importante et ensuite, les perspectives des instituteurs étaient singulièrement réduites. Donc nous avons choisi de créer ce nouveau corps, ce qui permettait d'étaler la charge financière.

Bien entendu, la situation transitoire est toujours difficile à gérer. Je reconnais bien volontiers que plus le corps de professeur des écoles s'accroît, plus l'effet de contraste s'amplifie lui aussi. C'est d'ailleurs la raison pour laquelle un protocole d'accord a été signé avec les enseignants du premier degré, qui comporte d'ailleurs un certain nombre de mesures de compensation, notamment en matière de formation continue, extrait du temps de travail, pour régler plus aisément les problèmes de présence des enseignants, et qui prévoit que le mécanisme d'extinction du corps des instituteurs prendra fin en 2007.

Si l'on avait appliqué mécaniquement les règles, cette extinction aurait été retardée de près de dix années supplémentaires. C'est un problème à la fois objectif et psychologique qui, malheureusement, ne pouvait être réglé autrement, sauf par une augmentation uniforme à l'intérieur du corps existant des instituteurs.

Seconde question : le problème général du coût de l'éducation nationale, auquel il est difficile de répondre en quelque phrases.

La revendication quantitative dans notre pays n'est pas le seul fait des enseignants ou de leurs syndicats. L'opinion publique est acquise à l'idée qu'il faut faire davantage d'efforts en matière d'éducation nationale, même s'il peut y avoir une approche un peu schizophrénique entre le contribuable et le citoyen. Il suffit d'ailleurs de voir les problèmes que vous connaissez bien, en tant que représentants des territoires, et qui se posent avant chaque rentrée scolaire, concernant les redéploiements nécessaires.

Si l'on décidait effectivement de s'aligner sur l'évolution des effectifs scolaires (et donc ne pas augmenter relativement la masse des moyens lorsque les effectifs n'augmentent pas, voire de les diminuer lorsqu'ils décroissent), on provoquerait des réactions politiques extrêmement fortes.

Un chiffre étonnant concerne la situation du premier degré, puisqu'il y a 300 000 élèves en moins dans l'enseignement du premier degré, et qu'il n'y a pas eu de diminution des effectifs ! Pour l'année prochaine, le Gouvernement a décidé de faire des redéploiements à emplois constants, et pourtant l'on connaît tous les problèmes que posent, notamment dans la France rurale, les fermetures de classes ou, pires, les fermetures d'écoles.

Une réaction naturelle des organisations syndicales est de demander davantage ce n'est pas propre à l'éducation nationale mais il y a aussi une propension de l'opinion à considérer que l'on ne doit surtout pas faire d'économies sur le réseau éducatif existant, ce qui suppose de dépenser plus dans la mesure où l'on doit consacrer de nouveaux efforts, de nouveaux investissements (en équipements, en locaux ou en postes) pour faire face à l'augmentation des besoins sur certaines zones du territoire.

La situation des chefs d'établissements me paraît un point essentiel. D'ailleurs, beaucoup de parents d'élèves manifestent, par expérience, qu'un établissement vaut d'abord par la qualité de son chef d'établissement. Qui ne connaît d'établissements de valeur qui ont beaucoup décru en qualité à l'occasion du changement d'un chef d'établissement et bien entendu, inversement, qui se sont redressés grâce aux qualités d'un nouveau chef d'établissement ?

C'est un problème très difficile, qui ne peut se traiter uniquement par des problèmes de revalorisation. Il y a eu, si je ne m'abuse, quatre revalorisations successives des chefs d'établissements. Ceux-ci ont connu les revalorisations relativement les plus élevées depuis 1988.

Je crois sans esprit partisan que l'erreur première a été commise en 1987, avec la mise en place par M. Monory du concours de chef d'établissement. Nous avons beaucoup hésité d'ailleurs en 1988 pour le remettre en cause, parce qu'il nous semblait que les critères de recrutement n'était pas adaptés à la fonction de chef d'établissement.

Il faut bien dire que le système antérieur n'était pas satisfaisant non plus. On comprend pourquoi M. Monory a souhaité le changer. C'était un recrutement au choix qui n'offrait pas toutes les garanties d'objectivité nécessaires. Mais je ne pense pas que le système actuel que l'on a essayé de redresser en professionnalisant les concours, de les simplifier (les premiers concours tels qu'ils avaient été conçus étaient d'une très grande complexité) réponde vraiment à un changement total de fonction. Entre la fonction d'enseignant et celle de chef d'établissement, il y a un changement radical de nature.

Un autre phénomène me paraît très insatisfaisant, c'est une certaine crise de confiance entre les enseignants et les chefs d'établissements. L'un des éléments qui m'ont le plus frappé, lorsque j'ai fait connaissance avec les milieux scolaires, est cette méfiance viscérale des enseignants à l'égard des chefs d'établissements. Ils craignent toujours que ces derniers viennent empiéter sur leurs compétences pédagogiques, sur leurs compétences disciplinaires, alors qu'ils ne les reconnaissent pas d'un point de vue disciplinaire et pédagogique.

Faut-il réfléchir à une double compétence d'animateur pédagogique et de gestionnaire d'établissement ? Je n'ai pas la réponse, n'y ayant pas suffisamment réfléchi durant ces dernières années, mais je pense que l'un des problèmes névralgiques de l'éducation nationale réside bien dans l'exercice de cette profession.

Quatrième question : le problème de la distribution des postes. J'y ai en partie répondu par avance, mais il comporte d'autres aspects que celui de la redistribution territoriale. Il y a effectivement un problème de gestion des carrières.

Nous espérons que la déconcentration, souhaitée par plusieurs ministres de l'éducation nationale quelle que soit leurs appartenances politiques, portera ses fruits. Je ne dis pas qu'elle les portera immédiatement ; il y aura certainement, durant la première année de son application, un certain nombre de difficultés, comme toujours quand on substitue un nouveau système à un ancien. Elle devrait néanmoins permettre, d'abord aux enseignants de faire des choix mieux raisonnés en matière d'affectation, de diminuer les frustrations nées de l'impossibilité de mutations souhaitées depuis des années (voire des dizaines d'années), et aussi de faciliter le contact entre l'autorité gestionnaire et l'enseignant lui-même, qui a trop souvent l'impression d'être traité comme un numéro et un chiffre de barème.

Le problème des options est une des grandes difficultés de gestion du système. Dès que l'on souhaite rationaliser et simplifier les options, ce que beaucoup de ministres de l'éducation nationale se sont essayé à faire, ils se sont à leur corps défendant prêtés à des procès d'intention sur la baisse des niveaux d'exigences. On l'a vu encore tout récemment. Un certain nombre d'établissements vivent sur un système d'options trop favorable au regard des contraintes générales du système, qui crée des inégalités injustifiables entre les établissements.

Certes, il faut maintenir des options spécialisées ; certes les lycéens qui souhaitent cultiver les langues anciennes ou rares doivent pouvoir le faire. Mais alors, sans doute faut-il qu'ils supportent un regroupement des options et acceptent d'aller dans un établissement un peu plus éloigné de leur domicile pour suivre ces options. Il faut tenir un langage très clair à cet égard.

Concernant la bivalence des professeurs des collèges, le problème s'est posé en 1988. Là encore, le ministre de l'éducation nationale a beaucoup hésité sur cette question qui pouvait ouvrir une perspective intéressante. Il ne l'a pas fait car, à l'époque, créer d'emblée un corps de professeurs de collèges à l'intérieur de l'enseignement du second degré aurait entraîné à son avis une plus grande complexité dans la gestion, notamment dans les mécanismes de mobilité, qu'elle n'aurait généré d'avantages.

Il ne l'a pas fait aussi en raison d'un refus frontal des organisations syndicales que j'ai mentionnées tout à l'heure, et il y aurait eu immédiatement un procès d'intention sur la dévalorisation relative des savoirs des enseignants.

Je ne pense pas que cette idée doive pour autant être laissée de côté sur le long terme. Encourager à condition de ne pas l'imposer les bivalences peut présenter un double intérêt : un intérêt de gestion, notamment dans l'optique des remplacements, ou des gestions de quart-temps ou de demi-temps dans les plus petits collèges, et aussi un intérêt pédagogique. Car pour les élèves, il peut être intéressant d'avoir le même enseignant dans des disciplines pouvant être considérées comme connexes du point de vue de leur apprentissage. L'erreur serait de donner une portée statutaire à ce qui doit d'abord être un changement pédagogique.

M. Francis Grignon, rapporteur - Une question sur les objectifs, une autre sur les moyens. L'éducation nationale est l'objet, au gré des ministres, de nombreuses réformes.

On nous a dit ici que quand on change une heure de cours, cela signifie 5 000 professeurs en plus, qui mettent trois ans à être formés et cinq ans à être opérationnels, et qu'on les garde pour trente ans. Ne pensez-vous pas, avec votre grande expérience à la fois de généraliste et de spécialiste, comme le disait notre collègue Xavier Darcos, qu'on pourrait faire une pause dans ce domaine, se mettre tous autour d'une table et voir exactement où l'on veut aller, d'une façon raisonnable, en intégrant bien sûr les forts besoins de la population quoiqu'il y ait, à mon avis, parmi les options, des options sélectives et des options démagogiques, et qu'il faudrait peut-être, un jour, avoir le courage de revenir là dessus ? Voilà en ce qui concerne les objectifs.

Au niveau des moyens : je rencontre, dans ma commune, un problème à l'école maternelle qui compte un peu plus de 60 élèves. La semaine dernière j'ai rencontré l'inspecteur, qui m'a dit qu'un emploi-jeune allait être mis en place pour arranger les choses. J'en suis enchanté, encore plus dans la mesure où c'est l'Etat qui le prend en charge, et non la commune. Mais dans deux ou trois ans, je n'aurai plus besoin de cet emploi-jeune, car la démographie diminue. Qu'allez-vous faire de tous ces emplois-jeunes mis en place ? C'est très bien pour le moment, mais quels sont vos objectifs à long terme pour ces emplois-jeunes ?

M. Olivier Schrameck - Sur le premier point, je voudrais souligner l'extraordinaire difficulté que rencontrent les ministres et les gouvernements successifs pour traiter cette question des contenus d'enseignement et de leur traduction en moyens.

Lionel Jospin, ministre de l'éducation nationale, avait essayé d'aborder la question en créant le conseil national des programmes, en faisant en sorte que des autorités scientifiquement reconnues acceptent d'envisager des simplifications des cursus d'enseignement puisque le ministre actuel de l'éducation nationale insiste sur ce point l'on procède le plus souvent par stratifications successives. On ne remet pas en cause les contenus anciens, et on en ajoute de nouveaux. Pourtant, on ne peut pas dire que la réussite soit totale.

Quand j'étais lycéen, j'ai commencé à étudier la physique en seconde. J'ai fait des études de physique qui m'ont conduit en mathématiques élémentaires et qui m'ont permis, je crois, d'acquérir le bagage que l'on peut demander à chaque lycéen. Savoir comment je m'en suis servi depuis est une autre histoire. Dans le système d'enseignement tel qu'il existait en 1988, on avait commencé l'enseignement de la physique dès la classe de sixième, et cela s'était ajouté aux autres enseignements que l'on n'avait pas voulu réduire.

Lorsque, sur la proposition du Conseil national des programmes, il a été proposé de ne commencer la physique qu'en quatrième, c'est-à-dire de faire deux années de plus que ce que ma génération avait connu, il y a eu une levée de bouclier de tous les enseignants, de toutes les organisations syndicales, de toutes les sommités scientifiques, sauf celles qui l'avaient proposé et qui ne parlaient pas trop fort à l'époque, sur le thème "vous dévalorisez l'enseignement scientifique de nos lycées". On pourrait multiplier les exemples de ce type.

On nous a aussi accusés, à l'époque, de ne faire cela que par souci gestionnaire, parce que nous n'avions pas suffisamment d'enseignants en physique et que, par conséquent, nous voulions reporter des compétences rares des premières classes de l'enseignement du premier degré aux classes les plus avancées.

On ne peut recevoir que favorablement votre appel aux bonnes volontés, mais l'exercice est singulièrement plus difficile qu'il n'y paraît de prime abord.

En ce qui concerne les emplois-jeunes, vous n'attendez sûrement pas de moi des déclarations définitives sur leur avenir. Il est un peu tôt pour se poser cette question. Ils ont été conçus sur une période de cinq années mais, en matière d'enseignement du premier degré, ils ont été intégrés dans une approche générale et nouvelle de l'enseignement du premier degré à laquelle Claude Allègre et Ségolène Royal se sont attachés. Il faudra faire un bilan de cette école du XXIe siècle au bout de deux ou trois ans, faire le bilan de ce qui a été réalisé.

Puisque nous parlons d'aspects pédagogiques, je rappelle que cette pédagogie de l'évaluation et du bilan a été engagée par M. Monory qui a créé la direction de l'évaluation et de la prospective au ministère de l'éducation nationale. Elle a été beaucoup développée à la fin des années 1980 et au début des années 1990.

En ce qui concerne l'école primaire, c'est à ce moment là qu'ont été mises en place les évaluations à l'entrée en CM2 et à l'entrée en sixième. Ce qui a été le moyen, pour la première fois, d'apprécier véritablement les acquis et les méthodes de l'enseignement du premier degré. Il faudra faire un bilan d'ici deux ou trois ans. Ces aides éducateurs peuvent-ils harmonieusement s'intégrer dans le système pédagogique, ou l'expérience sera-t-elle moins concluante ? Il faudra alors en tirer les conclusions, tant en ce qui concerne les emplois qu'en ce qui concerne leur prise en charge.

Mme Hélène Luc - Trois observations : la première, sur les chefs d'établissements et les maîtres directeurs. Je me rappelle très bien de cette réforme. Cela nous a valu, au Sénat, d'être envahis par les instituteurs.

Les difficultés, la crise entre les chefs d'établissements et les enseignants, sont en quelque sorte traditionnelles. Les professeurs ont peur que le chef d'établissement empiète sur leur domaine pédagogique. Cela peut se comprendre. Je pense qu'il y a à cela des raisons plus profondes, et qui s'accentuent, à savoir les conditions plus difficiles dans lesquelles la profession d'enseignant s'exerce.

Quand nombre d'élèves échouent, quand il y a de la violence, tous les problèmes que l'on connaît, cela ne peut qu'augmenter ces difficultés. D'autre part, les chefs d'établissements travaillent aussi dans des conditions difficiles : ils font absolument tout, parfois même la dactylographie. En tant membre de trois conseils d'administration de collèges, je peux vous dire que les principaux sont des militants. Par moment, je dis à mes trois principales : "Vous êtes comme moi, vous ne comptez pas vos heures" . Elles travaillent énormément. Leurs conditions, leurs salaires, ne sont pas à la hauteur. Ils n'ont pas toute la considération qu'ils devraient avoir. Je pense donc qu'il y a quelque chose à faire.

Deuxièmement, à propos des IUFM : vous travailliez avec M. Jospin à l'époque. J'ai voté la création des IUFM, et je pense que cela a été une très bonne chose. Pensez-vous que les IUFM progressent au rythme où il le faudrait, et innovent suffisamment ? Je pose la question car je pense que ce n'est pas le cas. Il y a un gros effort à faire pour avoir l'enseignement qu'on voudrait que les enseignants donnent aux élèves, et qu'ils réagissent mieux en fonction des connaissances fondamentales comme le dit bien M. Allègre, mais aussi en fonction de ce que sont les élèves et de l'environnement.

Une question piège : que pensez-vous de la mesure prise sur le non-paiement des heures supplémentaires, du moins de leur diminution ?

Dernière question, à propos des emplois-jeunes : j'ai voté pour. J'ai vu des jeunes sauvés par les emplois-jeunes, qui viennent nous remercier dans les conseils d'administration, et qui nous disent : "Enfin, je vis, j'ai l'espoir, et je vais faire quelque chose". C'est pour moi quelque chose de formidable. Mais, il y a un "mais" : dernièrement, la principale d'un collège nous proposait d'en employer trois. On n'a voté finalement que pour un. On leur propose en fait de remplacer des surveillants, qui ont commencé à dire pourquoi ils étaient contre. Les enseignants ont voté contre parce qu'un problème se pose.

Ne faut-il pas créer, pour ces emplois-jeunes, les conditions pour qu'ils puissent passer des concours, pour les stimuler, les encourager ? Certains veulent devenir enseignants. Je pense qu'on manque d'enseignants motivés au départ. C'est pourquoi je suis toujours attachée à l'aide financière qu'on pourrait donner à certains étudiants qui n'ont pas les moyens nécessaires, mais qui ont envie d'être enseignants.

M. Olivier Schrameck - Je vais essayer d'apporter quelques éléments de réponse à ces questions très concrètes. Vous avez rappelé la situation des responsables d'établissements, et je prends un terme générique puisque vous avez fait allusion à la fois aux maîtres-directeurs (réforme que le gouvernement avait abandonnée en 1988) et au nouveau profil de carrière des chefs d'établissements. Ces derniers éprouvent un sentiment d'interrogation et d'incertitude qui s'exprime d'ailleurs par la voie syndicale.

Comme je m'intéresse à ces questions, je lis les prises de position de M. Romero. Je suis frappé par le fait que, manifestement, le climat psychologique que j'ai connu il y a dix ans ne s'est pas vraiment amélioré. Cela vient certainement, au delà des problèmes de revalorisation que j'ai déjà évoqués, de la plus grande difficulté du métier, et aussi des plus grandes exigences adressées à l'école et au système scolaire en général. Ces exigences se personnalisent, se cristallisent autour de la personne du chef d'établissement. Il a donc l'impression d'avoir sur les épaules des charges considérables, matérielles, psychologiques, affectives même, auxquelles il n'est pas en mesure de répondre.

Je perçois comme vous le problème, même si je n'ai pas de solution miracle pour le résoudre.

La profession d'enseignant devient de plus en plus difficile. La fonction d'enseignant du second degré que ma génération a connue n'a plus grand chose à voir avec celle qui se présente aujourd'hui, depuis que le lycée accueille de nombreuses catégories sociales qui n'y avaient pas accès auparavant. C'est en quelque sorte une grande révolution démocratique.

Le lycée s'est généralisé dans son implantation géographique, et le contenu même de la fonction enseignante a changé. Ce qui était encore concevable dans les lycées de centre-ville d'autrefois, avec des professeurs qui pouvaient se limiter à leurs heures de cours et faire confiance à l'environnement de l'élève pour l'accompagner en dehors ne l'est plus aujourd'hui, ou est en tout cas socialement très discriminateur.

A propos des IUFM, les données dont je dispose ne me permettent pas de répondre avec précision à votre question. Cela dit, je pense que l'acquis est considérable, que les IUFM sont devenus la maison de formation des enseignants, et qu'ils sont devenus indispensables. Le système des écoles normales avait vieilli, s'était un peu sclérosé, refermé sur lui même, et les méthodes de formation dans les centres pédagogiques régionaux des enseignants du second degré étaient inadaptées. Nous avons maintenant un instrument qu'il faut parfaire, améliorer, mais dont les fondations me semblent posées.

En ce qui concerne les emplois-jeunes, l'insertion de ces jeunes dans le milieu éducatif est peut-être plus délicate et plus difficile que dans d'autres milieux. Ce problème a été évoqué lors du dernier conseil de sécurité intérieure.

Le gouvernement a décidé de créer 10 000 emplois-jeunes supplémentaires dans l'éducation nationale. Plutôt que de reproduire des modèles déjà expérimentés, nous avons ouvert une réflexion sur un profil nouveau d'aide-éducateur qui ne soit pas la reproduction du surveillant d'externat, ou du maître d'internat que nous connaissons bien, mais qui puisse assurer à ces jeunes une véritable formation, les ouvrir aux concours, non seulement d'enseignants mais aussi des personnels ATOS de l'éducation nationale, et fondé sur un système de recrutement plus large, l'une des limites de notre expérience actuelle étant l'insuffisante proportion des jeunes issus des quartiers.

L'exigence de bac+2, que l'on peut comprendre pour des raisons d'insertion dans les établissements, a été un obstacle à la diversité du recrutement. La réflexion est ouverte. Nous l'avons évoquée récemment en réunion de directeurs de cabinet avec les responsables de l'éducation nationale.

Quant à la question des heures supplémentaires, elle se pose dans le cadre plus général des moyens. Nous avons dû faire un effort considérable dans l'éducation nationale, notamment pour le recrutement des emplois-jeunes qui sont pris en charge à 100 % par l'Etat (80 % sur le budget du ministère de l'emploi et de la solidarité, et 20 % sur celui de l'éducation nationale). Il a été estimé alors que l'on pouvait réorganiser le système des heures supplémentaires .

Je n'entrerai pas dans les controverses sur les modes de calcul des heures supplémentaires, la prise en compte ou non des semaines correspondant aux congés. On doit constater que, même si le système avait vieilli, même s'il était mal adapté (on peut le concéder), l'effet psychologique et matériel pour les enseignants a été très négatif. Lorsqu'un agent de l'éducation nationale, qu'il soit fonctionnaire ou salarié, s'aperçoit que sa rémunération nette a été objectivement diminuée alors que ses charges ne l'ont pas été, il a une réaction négative.

Cette question aura vocation à être reprise en concertation avec l'ensemble des partenaires syndicaux, et aussi au regard des contraintes générales du budget de l'éducation nationale. Je rappelle tout de même que l'ensemble des heures supplémentaires en cause représente 700 millions de francs. On ne peut procéder à de simples abondements au regard du budget de l'éducation nationale voté chaque année par le Parlement.

M. le Président - Y a-t-il d'autres questions ?

Mme Hélène Luc - On pourrait discuter très longtemps.

M. le Président - Bien entendu, quand nous publierons notre rapport, nous le ferons parvenir au Premier ministre et à vous-même.