PREMIERE PARTIE - L'ÉFFICACITÉ DES FLUX FINANCIERS EN MATIERE D'EMPLOI : L'ÉTAT DES LIEUX

CHAPITRE I - HISTORIQUE, VOLUME ET STRUCTURE DES FLUX FINANCIERS EN MATIERE D'EMPLOI

L'objet de ce chapitre est de donner une définition la plus complète possible des flux financiers en matière d'emploi. Les catégories habituellement utilisées pour circonscrire le champ de la politique publique en matière d'emploi sont en effet souvent peu appropriées pour décrire les mécanismes économiques enclenchés par les dispositifs mis en place.

La distinction entre les dépenses actives et les dépenses passives est certes commode, mais elle ne dit rien sur la nature des mesures retenues. Les sous-catégories de la DPE, définies par la DARES en fonctions, surmontent partiellement ce problème, mais la DPE exclut elle-même les mesures d'ordre général qui représentent désormais un domaine de plus en plus important de la réflexion des pouvoirs publics en matière d'emploi.

La première section exposera notre propre définition des flux financiers en matière d'emploi provenant des collectivités publiques. La deuxième section fournira un aperçu comparatif des modèles nationaux d'intervention publique sur le marché du travail en tentant de situer le cas français. La troisième section analysera l'évolution quantitative et la structure des flux financiers en matière d'emploi en France.

1. Les flux financiers en matière d'emploi : définitions

La Dépense Publique pour l'Emploi constitue la catégorie définissant les dépenses de la collectivité consacrées à la politique de l'emploi. La DPE correspond à un compte public spécifique (Compte de l'Emploi et de la Formation Professionnelle) établi annuellement par la DARES.

La DPE comprend les mesures "actives" et "passives" de politique de l'emploi. Les dépenses "actives" concernent les mesures de formation et les aides à l'emploi mais excluent les mesures généralisée d'exonération des charges sociales portant sur les bas salaires. Les dépenses passives définissent l'indemnisation des chômeurs et les dispositifs de retrait de l'activité.

Définition de la dépense pour l'emploi en France

"La dépense pour l'emploi recense les efforts de la collectivité dans la lutte pour l'emploi et contre le chômage" (Marioni. Roguet, 1997, p. 29).

Dans une perspective opérationnelle, il s'agit de l'agrégat issu des Comptes de l'Emploi et de la Formation Professionnelle, qui constitue un outil global d'évaluation financière et administrative de la politique de l'emploi, créé en 1973.

Cette définition très générale peut être précisée , en référence aux agents financeurs correspondants. La dépense pour l'emploi regroupe alors trois principaux types de dépenses :

- les dépenses des pouvoirs publics (État, établissements publics, collectivités locales). En ce qui concerne l'État, il s'agit principalement des crédits du Ministère du Travail, de l'Emploi, et de la Formation Professionnelle, mais également d'autres Ministères (Agriculture, Industrie, Économie--Finances, Éducation...) ;

- les dépenses de l'UNEDIC. c'est-à-dire des employeurs et salariés, ainsi que l'Association pour la Structure Financière (ASP) 2 ( * ) :

- les dépenses des employeur au titre de la participation obligatoire à la formation professionnelle.

Les données correspondent à des dépenses effectives (crédits consommés) ou, très rarement, à des manque-a-gagner (exonérations non compensées) 3 ( * ) , ou encore à des dépenses fiscales (crédits d'impôt-formation et crédit d'impôt-apprentissage).

Sources : DARES (1996) ; Marioni, Roguet (1997).

Cette distinction est conventionnelle. Dans la réalité, de nombreuses mesures telles que les mesures de formation professionnelle, peuvent être inclues dans les deux catégories. La DARES (1996) propose pour sa part de distinguer au sein de la dépense pour l'emploi les mesures non-spécifiques et les mesures spécifiques ou ciblées. Ces dernières (incluant des mesures actives et passives) comprennent 76 mesures classées en quatre catégories : les emplois marchands aidés, les emplois marchands non-aidés, les mesures concernant la cessation anticipée d'activité, la formation professionnelle. En sont exclues l'indemnisation du chômage, la formation continue des actifs occupés, les dispositifs en faveur des handicapés, les dispositifs destinés aux entreprises, les dispositifs sectoriels.

La dépense pour l'emploi correspond tout d'abord à une dépense publique pour l'emploi. Cette caractéristique doit être appréciée de manière extensive, en référence soit à l'origine publique des fonds (budget de l'État, des collectivités locales), soit au caractère d'obligation légale de la dépense si celle-ci émane d'une institution privée (par exemple la formation professionnelle) 4 ( * ) . Cette notion de dépense publique s'oppose à celle de dépense nationale pour l'emploi, qui devrait alors inclure les dépenses de l'ensemble des agents économiques. Elle constitue donc une première restriction du champ de la dépense pour l'emploi, qui se confond avec l'ensemble des politiques publiques de l'emploi. La définition repose de plus sur l'exclusion des composantes législatives générales et macro-économiques de l'intervention publique en faveur de l'emploi (droit du travail, salaire minimum, réglementation de la durée du travail en particulier), et sur une différenciation par rapport aux mesures de politique industrielle (tes aides sectorielles ou régionales ne reposant pas sur un critère explicite de création ou maintien d'emploi sont également exclues du champ). Cette définition inclut également les flux consacré à l'indemnisation chômage, ces flux ne proviennent pas des collectivités publiques mais de l'UNEDIC.

En isolant ces dépenses d'indemnisation chômage qui n'entrent pas dans le champ de l'étude commandée, nous utiliserons une définition plus large que celle couramment utilisée pour désigner les dépenses publiques pour l'emploi. Notre rapport définira les flux financiers en matière d'emploi comme l'ensemble des dépenses des collectivités publiques dont l'objectif affiché est d'infléchir le niveau ou la structure de l'emploi à l'échelle macro-économique comme à l'échelle micro-économique.

Cette définition inclut, en plus des mesures comprises dans la DPE (à l'exception de l'indemnisation du chômage), les mesures d'ordre général d'exonération de cotisations sociales sur les bas salaires. Elle intègre également les interventions des collectivités locales pour la défense ou la promotion de l'emploi, ainsi que les aides sectorielles et autres primes à l'aménagement du territoire.

Dans le cadre de ce rapport intermédiaire portant sur "l'état des lieux" nous ne pourrons bien souvent que nous cantonner, notamment dans la comparaison internationale, aux données disponibles recensées dans la catégorie de la dépense pour l'emploi, telle qu'elle est définie par l'OCDE, cette définition étant elle-même plus restrictive que celle de la DARES dont le caractère restrictif vient d'être souligné. L'OCDE prend en compte les Politiques mises en oeuvre par les administrations centrales ou régionales et par les organismes parapublics comme les régimes d'assurance-chômage alimentés par les cotisations obligatoires des employeurs et salariés. Le champ retenu par l'OCDE couvre environ 80 % des comptes pour l'emploi de la DARES. La différence majeure entre la définition reprise dans les comptes pour l'emploi de la DARES et la définition OCDE tient à l'inclusion dans la DPE française des dépenses engagées par les entreprises dans le cadre de la formation professionnelle continue (non comptabilisées par l'OCDE).

* 2 L'Association pour la Structure Financière est une structure spécifique destinée à financer les conséquences de l'abaissement de l'âge de la retraite, notamment du point de vue de financement du maintien des dispositifs de préretraites garanties de ressources de l'UNEDIC pour les bénéficiaires effectifs et potentiels au 1er janvier 1983 (ces flux, financiers ont existé jusqu'en 1995). Elle est financée par une cotisation sur les salaires, une subvention de l'Etat, et le recours à l'emprunt.

* 3 Ceci renvoi aux exonérations de cotisations sociales accordées par les régimes sociaux (assurance-maladie, retraite...) dans le cadre des politiques actives de l'emploi, et ne faisant pas l'objet d'une compensation par l'État : elles correspondent donc à un manque-à-gagner pour les régimes sociaux, non pris en compte dans la DPE jusqu'en 1995. À partir de cette date, les Comptes de l'Emploi intègrent ces "dépenses".

* 4 À l'oppose, les indemnités de licenciement versées par les entreprises, de nature essentiellement conventionnelle. ont été exclues du compte de l'emploi en France.

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