B. EXPÉRIENCE DES PA YS CONCURRENTS

Le renforcement de l'Union Européenne a permis que l'implantation dans un pays européen constitue une ouverture totale sur l'ensemble de l'Europe. La concurrence entre territoires s'en trouve donc exacerbée.

Certains pays sont partis très tôt dans la course à l'attraction d'investissements étrangers, avec ces politiques et des objectifs clairs, d'autres sont partis avec beaucoup de retard.

1. les choix stratégiques opérés par les pays concurrents

Comme le montrent les évolutions du contexte analysées plus haut et notamment la part prise dans l'attractivité par les éléments hors projet, la politique générale d'un pays a une influence considérable sur l'attraction de l'investissement étranger.

La Grande-Bretagne et les Pays-Bas sont les plus importants concurrents de la France en Europe, et l'Italie est elle aussi entrée dans la course. Il est important de noter ce qui a fait le succès des uns et des autres, et d'en tirer des conclusions sur l'organisation du dispositif en France.

a) Les Pays-Bas

Dans les années 50 et 60, le but de la politique industrielle des Pays-Bas était de nature très défensive. Il s'agissait de stimuler l'industrialisation, afin d'éviter le chômage, et les déficits chroniques de la balance des paiements. L'État avait choisi l'interventionnisme et développait en priorité l'industrie pétrochimique.

Dans les années 70, de nouveaux objectifs sont apparus, centrés autour de la planification spatiale, l'environnement et la technologie, par exemple. Puis, la situation économique s'est dégradée après 1973.

La récession des années 80 a conduit à un nouveau type de politique, basé essentiellement sur un éloignement de l'État et une approche beaucoup plus offensive. Les éléments importants de cette politique ont principalement été la dérégulation, la politique anti cartel et les privatisations.

La politique régionale des Pays-Bas, quant à elle, a deux objectifs : tout les régions doivent participer à la prospérité nationale, et en même temps, profiter de cette prospérité.

Enfin, les Pays-Bas ont adopté une politique active en matière de promotion des IDE. À la suite d'une réflexion de grande ampleur, ils ont défini une stratégie, centrée sur une cible particulière d'investisseurs. Les Pays-Bas ont choisi de devenir le territoire de référence pour les entreprises extra-européennes qui souhaitent accéder au marché européen à partir d'une implantation unique. Ils ont valorisé les atouts pertinents pour cette cible, notamment :


• la qualité des infrastructures (ports et connexion à l'arrière-pays et à l'ensemble du continent) ;


• fiscalité attractive, notamment pour les sièges sociaux, avec une possibilité de négocier, pour une période donnée, les régimes d'imposition, de manière à garantir une fiscalité stable ;


• maîtrise des coûts du travail, dans le cadre d'un accord national qui a mobilisé l'ensemble des partenaires sociaux.

Dans les années 1990, deux nouvelles orientations ont été mises en place :

1. la première veut conforter le jeu des forces du marché (déréglementation des marchés du travail, des biens et des services),

2 . la seconde veut concentrer les dépenses publiques sur l'investissement (infrastructures), dans la perspective de confirmer le positionnement des Pays-Bas comme Portes de l'Europe.

De plus, la politique industrielle s'est portée plus particulièrement sur l'innovation et la coopération technologiques.

b) Le Royaume-Uni

La politique industrielle britannique a connu des changements majeurs depuis les années 60.

Dans les années 60 et 70, elle a été très interventionniste. Puis, avec l'élection du Gouvernement Thatcher en 1979, le coeur de la nouvelle politique est devenu le marché, qui devait être libéralisé, pendant que les dynamiques de marché étaient renforcées, et les initiatives individuelles récompensées.

Cela a signifié :


• une approche basée sur l'offre,


• une approche horizontale plutôt que par secteur,


• un accroissement de la rentabilité des politiques mises en place.

Dans ce cadre, le gouvernement n'a pas de rôle direct, puisque la politique est de laisser le marché agir, mais il a une responsabilité indirecte importante en ce qui concerne la lutte contre l'inflation (surtout pendant les années 80), une réduction importante des dépenses publiques, les taux d'intérêt et le maintien d'une monnaie forte (voire surévaluée).

De nombreuses privatisations datent de cette période : British Telecom, British Aerospace, British Steel, et British Gas parmi les exemples les plus connus.

La promotion des investissements étrangers est une priorité de longue date, au coeur de la politique économique et industrielle. Elle s'est traduite notamment par les actions suivantes :


• promotion des avantages du Royaume-Uni comme site d'implantation pour les entreprises,


• création d'un guichet unique pour aider les investisseurs étrangers à appliquer les règles de l'investissement au Royaume-Uni ;

La promotion des investissements étrangers reste une priorité pour les cinq prochaines années. Les investisseurs étrangers sont considérés comme des catalyseurs de la compétitivité. Les actions mises en oeuvre pour renforcer l'attractivité du territoire britannique portent sur :


• la création d'un environnement compétitif et attrayant pour les entreprises,


• la création de nouvelles agences de développement régional (Angleterre) et le renforcement des agences existantes (Écosse, Pays de Galles),


• la diffusion des avantages du Royaume-Uni, par l'action de l'IBB,


• la collaboration entre l'État et les partenaires locaux pour élaborer des stratégies régionales de compétitivité.

c) L'Italie

Les performances de l'économie italienne se sont améliorées, notamment dans le cadre de l'entrée du pays dans l'Union Européenne. En effet, des choix politiques ont été faits, qui ont permis d'aboutir à des résultats importants pour l'image et la compétitivité du pays : une plus grande stabilité politique, des taux d'intérêt en baisse, une inflation contrôlée, un marché et une réglementation du travail plus flexibles...

L'Italie a également su mettre en évidence les points forts dont elle dispose, sur certains domaines ou secteurs (infrastructures et services publics, distribution, logistique et transport, tourisme, et alimentation).

L'Italie s'est tournée vers l'attraction des investissements étrangers depuis peu de temps, jusque là, le pays était plutôt tourné vers une stratégie d'exportation. L'Italie a donc encore du travail à faire dans le domaine de la promotion de son territoire auprès des entreprises étrangères, mais a pris conscience de la nécessaire réorganisation de son dispositif.

2. les choix organisationnels des pays concurrents

Le rôle de l'État dans la promotion de l'investissement étranger apparaît comme prépondérant. Le processus de promotion découle d'une volonté politique forte de prospérer et de créer de l'emploi par l'implantation d'entreprises étrangères.

L'une des caractéristiques majeures des systèmes de promotion britannique et néerlandais est le fait que les organismes ou agences ont une stratégie bien définie. Ainsi, leurs missions sont claires. Chaque organisme a des secteurs cibles, des pays cibles, des objectifs clairs, et une mission propre.

a) Le Royaume-Uni

En Grande-Bretagne, l'un des instruments les plus importants de la politique générale d'attraction de l'investissement étranger est l'Invest in Britain Bureau, émanation du Ministère de l'industrie, aujourd'hui rattachée également au Foreign and Commonwealth Office. L'IBB se comporte comme une "organisation parapluie" par rapport aux agences locales, ayant vocation à coordonner leur effort et à constituer un point d'entrée unique pour l'investisseur.

Aujourd'hui, l'IBB, servi par sa forte notoriété, semble jouer pleinement son rôle de communication et de point d'entrée. Sa mission de coordination n'est pas pleinement assurée, dans la mesure où les concurrents du Royaume-Uni constatent la sévère guerre commerciale que se livrent les provinces britanniques, notamment à base de surenchères fiscales et d'incitations financières.

Le rattachement de l'IBB au Foreign Office indique que les britanniques son fait le choix d'une vaste présence au niveau mondial, au détriment d'une plus grande spécificité de l'accueil des prospects. Ce choix suppose des procédures rapides de diffusion de l'information et de relais par les acteurs régionaux.

Au Royaume-Uni, la politique régionale, quant à elle, est caractérisée par une très forte orientation locale et un grand nombre d'initiatives du gouvernement central pour développer les économies locales. Dans ce cadre, les motivations fiscales sont l'un des instruments majeurs. Les "Local Enterprise Agencies" jouent un rôle important.

Grâce à cette implication de l'État, la Grande-Bretagne a connu un record en Union Européenne en 1997/98 avec 618 projets réussis, ce qui a permis la création de 45 937 nouveaux emplois, et la sauvegarde de 78 685 autres.

Les trois points marquants de cette politique volontariste ont été :

1. l'arrivée du nouveau gouvernement qui s'est engagé dans la voie de la stabilité économique et de la création de conditions économiques favorables à l'investissement ;

2. un changement au niveau de l'Invest in Britain Bureau, qui a été rattaché à la fois au Foreign and Commonwealth Office, et au Department of Trade and Industry. L'objectif principal de l'agence est à présent de stimuler l'emploi en Grande-Bretagne, notamment grâce au réseau diplomatique dense du FCO ;

3. la mise en place d'un réseau national britannique d'organismes régionaux de développement. Leur nombre est aujourd'hui porté à 13 agences, dans un système intégré (la planification, la mise à disposition de ressources qualifiées, et autres éléments permettant de répondre aux besoins des investisseurs potentiels sont coordonnés).

b) Les Pays-Bas

L'État a joué un rôle déterminant dans les actions entreprises. La prospection et l'accueil des investissements sont coordonnés directement par le Ministère de l'Économie. Une stratégie est définie de façon extrêmement claire, et se concentre autour des points forts et des atouts du pays. Des plans stratégiques sont élaborés et révisés régulièrement afin de mieux correspondre aux évolutions du marché et de la demande.

c) L'Italie

L'Italie cas un peu à part, dans l'organisation de la promotion de son territoire. En effet, l'attraction d'investisseurs étrangers en Italie est une préoccupation relativement récente. C'est la raison pour laquelle l'Italie a encore un système de promotion des investissements désorganisé, comportant de nombreux acteurs, avec des objectifs et des stratégies différents.

En Italie, le Gouvernement a lancé en 1997 une initiative afin de créer un organisme sur le même modèle que la Welsh Development Agency, le SVILUPPO ITALIA, afin de coordonner les efforts de toutes les agences déjà en place. Cet organisme dépendra du Ministère du Trésor et sera constitué au plus tard le 31 Décembre 1999.

3. les moyens de ces politiques

Tous ces organismes, qu'ils soient britanniques, hollandais ou italiens, ont des réseaux à l'étranger, sur lesquels ils peuvent s'appuyer afin de faire de la prospection d'investisseurs, ou encore de l'information et de la publicité, selon les cas. La coordination efficace qui existe entre les diverses agences est le garant de la réussite de la politique d'attraction de l'investissement (Pays-Bas).

Le système et le fonctionnement des divers organismes démontrent en fait leurs caractéristiques en termes d'objectifs. Ils sont décrits plus en détail dans les annexes par pays.

On peut noter que l'Invest in Britain Bureau a été reconnu en 1997 comme la meilleure agence de promotion de l'investissement étranger, dans une enquête réalisée conjointement par Coopers & Lybrand et le magasine Corporate Location. De plus, à la Convention Mondiale des Agences de Promotion l'Investissement à Chicago, l'IBB a reçu le titre d'Agence de promotion de l'investissement de l'année.

L'interprétation des chiffres de résultats demande une grande prudence : certains ne sont pas officiels, et ils ne sont pas tous cohérents les uns avec les autres. Notons que l'IFN engage une concertation avec les organismes concurrents de la France pour homogénéiser les critères de comptabilisation des résultats. Cependant, ils permettent de remarquer que la Grande-Bretagne est très performante, puisque avec un nombre d'employés relativement restreint (130 seulement pour l'IBB), le nombre d'emplois créés en 1997 est de 45 937. On constate également que les employés sont répartis de façon très importante dans le monde entier, ce qui correspond aux objectifs fixés par le pays, en termes de cible géographique.

Cf. tableau page suivante.

Aux Pays-Bas, deux organisations coopèrent, le "Netherland Foreign Investment Agency", et le "Holland Distribution Council", mais chacune avec des pays et des secteurs cibles qui lui sont propres. Ces organismes se veulent également des portes d'entrée pour les investisseurs. Le slogan du HIDC est d'ailleurs "Netherlands, the Gateway to Europe".

Le HIDC est plus particulièrement spécialisé dans les transports et la distribution, et se concentre autour des États-Unis, du Japon, de la Corée, et de l'Asie du Sud-Est.

Aux Pays-Bas, la politique de promotion est gérée depuis le centre, grâce au HIDC et au NFIA, qui ne renvoient le travail en local qu'après avoir examiné les dossiers, et conseillé les investisseurs.

La stratégie du pays se focalise sur les points forts en les développant au maximum : principalement, la logistique axée sur le port de Rotterdam, les quartiers généraux d'entreprises européennes, la chimie fine, les biotechnologies et les biotechnologies.

Par ailleurs, les Pays-Bas, grâce à leurs organismes, informent très précisément les investisseurs, et leur fournissent des conseils, de façon très orientée, c'est-à-dire en comparant intelligemment leur pays et les territoires concurrents

Au niveau humain, les Pays-Bas ont une particularité, qui provient du fait que le HIDC, par exemple, est en réalité une agence constituée d'acteurs locaux professionnels. Cet organisme revoit sa stratégie tous les quatre ans, de même que les subventions qui en découlent. La NFIA, par contre, prévoit un plan annuel. De même, les organismes britanniques sont constitués de personnel professionnel.

Le dernier point et non des moindres, concerne l'après-vente. Il s'agit là d'un objectif très fort de l'Invest in Britain Bureau, qui a compris qu'attirer l'investisseur ne suffit pas : il faut aussi le retenir et l'encourager à se développer dans le pays. En Grande-Bretagne, la moitié des nouveaux investissements étrangers sont le fait d'entreprises déjà présentes sur le territoire. Les dirigeants britanniques se sont largement impliqués dans ce programme. À titre d'exemple, on peut citer le cas de Derek Fatchett et Ian McCartney (Ministres du FCO et du DTI responsables pour l'IBB) qui ont fait une "visite d'après-vente" à tous les principaux investisseurs étrangers du Royaume-Uni.

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