IV. LA RÉGLEMENTATION EST NÉCESSAIRE, À TITRE COMPLÉMENTAIRE

1. La maîtrise des émissions de gaz à effet de serre ne saurait entièrement reposer sur la réglementation

La réglementation 42( * ) consiste à imposer des limites quantitatives à l'émission de substances nocives ou à l'utilisation de certains biens. Elle peut prendre de nombreuses formes : normes d'émission individuelles, obligations de recourir à des techniques de production moins polluantes ou à des dispositifs de dépollution, etc.

D'une manière générale, la réglementation est indispensable en matière environnementale quand il s'agit de prévenir des risques vitaux identifiés ou localisés, par exemple pour le transport des produits dangereux ou le fonctionnement des centrales nucléaires. Mais cela n'est pas le cas des risques associés au changement climatique, car on ne peut établir la chaîne des causalités entre les émissions d'une installation donnée et les perturbations du climat.

Lorsque des contrôles sont possibles la réglementation peut être efficace et présente l'avantage que ses effets sur l'environnement sont parfaitement prévisibles , dans la mesure où elle s'appuie sur des normes définies avec précision. Le rapport du Comité interministériel de l'évaluation des politiques publiques relatif à la maîtrise de l'énergie 43( * ) , souligne ainsi que " l'action réglementaire développée avec continuité depuis 1975 pour améliorer l'efficacité énergétique des nouveaux bâtiments constitue un exemple réussi qui a eu un impact énergétique marqué et rentable ".

L'établissement de normes peut également faciliter la production de certains produits en grande série, donc conduire à des économies d'échelle .

La réglementation est toutefois difficile à calibrer . Trop exigeante, elle fait peser des coûts excessifs sur les agents économiques. Insuffisante, elle est inefficace.

Le Comité interministériel d'évaluation des politiques publiques 44( * ) remarque, par exemple, que " la réglementation qui avait exigé en 1975 un niveau minimum de rendement pour les chaudières est un échec exemplaire. Insuffisamment exigeante, elle n'a servi à rien alors qu'elle aurait pu généraliser l'emploi de matériels plus performants et stimuler le progrès technique ".

En raison de ces difficultés de calibrage, la réglementation est difficile et coûteuse à administrer : les négociations entre les industriels et l'administration pour la codétermination des seuils réglementaires peuvent être longues et délicates. Elle est également instable , ce qui brouille les anticipations des entreprises et des ménages et ne favorise pas les meilleurs choix d'investissements. Par ailleurs, lorsqu'elle impose certains moyens technologiques, la réglementation constitue un frein au progrès technique puisqu'elle fixe une fois pour toutes les méthodes à utiliser 45( * ) .

En outre, la réglementation est difficile à coordonner à l'échelle internationale. Il y a alors un risque que les Etats cherchent à manipuler les normes pour créer des barrières aux importations ou pour avantager leurs entreprises à l'exportation.

Enfin, les réglementations, même les mieux définies, ne sont pas efficientes économiquement : elles ne minimisent pas le coût total pour atteindre un objectif fixé. En effet, il est impossible de les différencier suffisamment pour tenir compte de chaque situation, de sorte que les réductions d'émissions ne sont pas nécessairement effectuées là où elles sont les moins coûteuses (les coûts marginaux de réduction des émissions ne sont pas égalisés pour tous les agents). D'un côté, certains agents devront effectuer des investissements très coûteux et peu efficaces ; de l'autre, les agents qui pourrait réduire leurs émissions à très faible coût ne sont aucunement incités à aller au-delà des normes existantes.

Au total, la maîtrise des émissions de gaz à effet de serre ne saurait donc entièrement reposer sur une approche réglementaire.

Les thèmes associés à ce dossier

Page mise à jour le

Partager cette page