II. LES ASPECTS ÉCONOMIQUES DU VIEILLISSEMENT DÉMOGRAPHIQUE : ÉVOLUTION DE LA POPULATION ACTIVE ET DÉPENDANCE ÉCONOMIQUE DES INACTIFS

Cette partie étudie deux aspects du vieillissement qui intéressent directement l' économie : l'évolution de la population active , qui est le facteur déterminant de la croissance à long terme 16 ( * ) , et l'évolution du taux de dépendance des inactifs par rapport aux actifs, qui détermine les adaptations nécessaires en matière de partage du revenu national.

Après une approche qualitative du vieillissement qui caractérise la première partie de ce chapitre, les éléments présentés ci-après relèvent d'une description essentiellement quantitative. Les adaptations de l'économie française à ces évolutions - autrement dit leurs conséquences économiques - ne sont pas abordées (elles le seront au deuxième chapitre). Ainsi, la visée de cette présentation est-elle double :

- mettre en évidence quelques ordres de grandeur, car votre rapporteur a le sentiment que si les aspects économiques du vieillissement ne sont pas toujours clairement perçus, c'est plus en raison d'une surabondance que d'une insuffisance de statistiques ;

- montrer aussi que si le vieillissement démographique est inéluctable, de fortes incertitudes apparaissent dès la présentation de ses aspects économiques.

A. L'ÉVOLUTION DE LA POPULATION ACTIVE

Depuis le milieu des années 1960, la population active a augmenté de 200.000 personnes par an en moyenne. La France compte actuellement environ 27 millions d'actifs. Selon les projections à long terme élaborées par l'INSEE 17 ( * ) et la DARES 18 ( * ) , ce nombre pourrait augmenter jusqu'à près de 28 millions vers 2006 pour redescendre ensuite .

Il peut paraître audacieux de prévoir les évolutions de population active à quarante ans, alors que beaucoup de ses facteurs ne sont pas connus : fécondité, immigration, comportements d'activité des différentes catégories (jeunes, femmes, personnes de plus de 55 ans).

Ces projections ne sont donc pas des prévisions, mais elles s'appuient sur des connaissances démographiques (les personnes déjà nées) ou sur des tendances à la fois lourdes et rigides (en matière de fécondité ou de comportements d'activité), et il faut leur reconnaître une certaine " solidité ".

Néanmoins, les facteurs d' incertitudes - démographiques ou économiques - peuvent affecter ou modifier, parfois très sensiblement, le scénario tendanciel d'évolution de la population active.

1. Le scénario tendanciel d'évolution de la population active

La population active évolue principalement sous l'effet de la démographie : chaque année, une jeune génération se présente sur le marché du travail à la fin des études alors qu'une génération ancienne part à la retraite. Les jeunes générations, nées dans les années 1970, sont beaucoup plus nombreuses que les générations anciennes, nées dans les années 1930. Cette simple succession de générations conduit la population en âge de travailler à augmenter actuellement de 167.000 personnes chaque année.

A cette cause démographique s'en ajoutent deux autres : l'évolution des comportements d'activité et l' immigration .

Chaque génération n'a pas le même comportement d'activité professionnelle que les précédentes tout au long de sa vie. Ainsi, dans la période actuelle, les femmes occupent plus souvent un emploi et restent moins souvent au foyer que celles des générations précédentes ; les jeunes poursuivent leurs études plus longtemps et se présentent, de ce fait, un peu plus tard sur le marché du travail ; enfin, les actifs anciens se retirent de plus en plus tôt, grâce à l'avancée de l'âge de la retraite. Par ailleurs, l'immigration est supérieure à l'émigration, de sorte que la population active est augmentée par l'apport de travailleurs immigrés.

Entre 1990 et 1995, l'ensemble de ces causes a entraîné une augmentation de 163.000 actifs chaque année : 13.000 hommes et 150.000 femmes (voir tableau ci-après). Cette augmentation va se poursuivre à ce rythme jusqu'à la fin du siècle. Puis elle se ralentira entre 2001 et 2005 : les générations arrivant sur le marché du travail, nées dans les années 1980, seront moins nombreuses et, surtout, les générations du baby boom atteindront l'âge où certaines professions prennent leur retraite.

En 2006, il y aura un plafonnement suivi d'un retournement à la baisse . Cette année-là, la première génération d'après-guerre arrivera à son soixantième anniversaire et, dès lors, les générations sortantes seront plus nombreuses que les générations entrantes.

Selon le scénario tendanciel, la population active devrait diminuer d'environ 20.000 personnes par an pendant quelques années puis de plus en plus vite, jusqu'à atteindre une diminution de 70.000 personnes par an vers 2030 .

En 2040, la population active compterait 26 millions de personnes, soit le même nombre qu'en 1993 , après avoir frôlé les 28 millions en 2006. Cependant, la composition démographique de la population active aura changé : les femmes en représenteront 48 % au lieu de 45 % en 1993 et les jeunes actifs de moins de 25 ans ne compteront plus que pour 7 % contre 10 % encore en 1993.

Ce scénario tendanciel retient le maintien d'une faible fécondité (1,8 enfant par femme), ainsi qu'un apport migratoire annuel de 50.000 personnes (actives ou non), dans le prolongement des deux dernières décennies.

L'activité féminine continuerait sa progression. Celle des jeunes et des plus de cinquante-cinq ans continuerait de baisser durant quelques années avant de se stabiliser. Enfin, celle des hommes de trente à cinquante-quatre ans resterait stable.

ÉVOLUTION ANNUELLE DE LA POPULATION ACTIVE

(en milliers)

Observée

Projetée (scénario tendanciel)

1.1.1985/
1.1.1990

1.1.1990/
1.1.1995

1.1.1995/
1.1.2001

1.1.2001/
1.1.2006

1.1.2006/
1.1.2011

1.1.2011
1.1.2021

1.1.2021
1.1.2040

Ensemble

+ 193

+ 163

+ 165

+ 124

-20

- 41

- 67

Selon le sexe

hommes

- 1

+ 13

+ 83

+ 27

- 42

- 34

- 38

femmes

+ 194

+ 150

+ 132

+ 97

+ 22

- 7

- 29

Selon l'âge

15 à 24 ans

- 127

- 148

- 80

- 5

- 3

- 5

- 5

25 à 54 ans

+ 342

+ 353

+ 218

- 35

- 29

- 53

- 51

55 ans

et plus

- 22

- 42

+ 27

+ 164

+ 12

+ 17

- 11

Source : Projections de population active 1995-2040, INSEE-DARES.

EVOLUTION OBSERVÉE ET PROJETÉE DE LA POPULATION ACTIVE DE 1968 À 2040

2. Les incertitudes du scénario tendanciel

a) Les incertitudes des facteurs démographiques

Au-delà de 2015, les facteurs démographiques sont difficiles à anticiper puisque les générations qui arriveront alors à l'âge de travailler ne sont pas encore nées. D'autres hypothèses de fécondité ou un solde migratoire très différent affecteraient sensiblement la projection tendancielle présentée ci-dessous.

Une fécondité élevée, remontant progressivement à 2,1 enfants par femme en 2015, enrayerait la baisse de la population active et susciterait même une nouvelle hausse à partir de 2035. En revanche, une poursuite de la chute de la fécondité jusqu'à 1,5 enfant par femme en 2010 accentuerait la baisse : la population active repasserait en 2040 le niveau de 1980. Ces hypothèses alternatives n'ont aucune conséquence jusqu'en 2015, mais à l'horizon 2040, elles font varier le nombre d'actifs de près de 10 % en plus ou en moins par rapport au scénario tendanciel.

IMPACT DES HYPOTHÈSES DE FÉCONDITÉ
SUR L'ÉVOLUTION PROJETÉE DE LA POPULATION ACTIVE

Le solde migratoire du scénario tendanciel pour la France correspond à un solde migratoire positif de 50.000, soit un apport annuel d'environ 30.000 actifs (directement ou par le biais de la descendance des immigrants). Un solde migratoire nul entraînerait 1,4 million d'actifs de moins (- 5,5 %) à l'horizon 2040 par rapport au scénario tendanciel.

A l'inverse, un solde migratoire trois fois supérieur à celui de la projection tendancielle (soit + 160.000 par an environ, contre + 50.000 dans le scénario tendanciel) permettrait de stabiliser la population active à son niveau de 2006.

Il convient donc d'observer que si une augmentation de l'immigration ne pourrait pas infléchir significativement la tendance au vieillissement démographique (cf. page 20), elle pourrait toutefois avoir une incidence marquée sur l'évolution de la population active.

b) Les comportements d'activité

Aux incertitudes démographiques s'ajoute l'incertitude sur les comportements d'activité. Le taux d'activité des hommes de 30 à 54 ans, qui a peu évolué dans le passé, peut être anticipé sans trop de risque. Il n'en est pas de même pour celui des femmes, des jeunes et des actifs les plus âgés.

• Pour les femmes adultes, une activité professionnelle encore plus fréquente accélérerait la convergence avec les pays scandinaves. Le taux d'activité féminin y est très élevé : 90 % entre 25 et 54 ans. Au contraire, avec la persistance d'un contexte économique peu favorable, le chômage élevé ou les faibles salaires pourraient amoindrir la présence féminine sur le marché du travail. Si on exclut la possibilité d'un retour au foyer, on peut néanmoins examiner un scénario où la hausse serait ralentie de telle sorte que les taux d'activité des femmes ne franchiraient pas la barre des 85 %. L'activité professionnelle des femmes étant élevée et s'accroissant rapidement, les hypothèses alternatives sont étroitement limitées .

• L'augmentation de la scolarisation, qu'elle résulte du chômage des jeunes, particulièrement élevé en France, de politiques publiques délibérées ou d'aspirations individuelles, s'est traduite par une forte baisse de l'activité des jeunes : aujourd'hui un jeune de 22 ans sur deux seulement est actif, contre deux sur trois il y a dix ans.

Le scénario tendanciel de l'INSEE et de la DARES repose sur un arrêt rapide du recul de l'activité des jeunes. On peut imaginer des variantes de stabilisation encore plus rapide de l'activité des jeunes.

Combiné à une hypothèse haute sur l'activité des femmes, l'INSEE et la DARES ont ainsi élaboré un scénario d'activité haute dont les effets sur l'évolution de la population active à l'horizon 2040 sont cependant assez faibles : + 2 % de population active par rapport au scénario central.

3. Conclusion

A moyen terme , soit à l'horizon 2010, il est acquis que l'évolution de la population active connaîtra un retournement en 2006 : augmentation de l'ordre de 120.000 par an jusqu'à cette date, puis baisse de 20.000 par an par la suite.

• A un horizon plus lointain , l'éventail des possibles semble beaucoup plus ouvert.

Selon un scénario tendanciel, la population active baisserait de plus en plus vite jusqu'en 2040 pour retrouver à cette date son niveau de 1995.

Des ruptures , tant démographiques que sur les comportements d'activité pourraient toutefois sensiblement infléchir ces évolutions.

• On peut observer que les ruptures démographiques (fécondité ou immigration) auraient, potentiellement , une incidence beaucoup plus forte sur les évolutions de population active que celles sur les comportements d'activité.

Votre rapporteur considère toutefois que des hypothèses de modifications profondes des comportements d'activité, en particulier des jeunes et des personnes de plus de 55 ans, ne sont pas suffisamment explorées .

Chacun sait que l'économie française s'est " adaptée " de manière bien particulière à la montée du chômage, c'est-à-dire par une exclusion massive du marché du travail de ces deux catégories de la population active.

Comment ne pas imaginer que la période à venir, où l'éventualité d'une pénurie de main-d'oeuvre ne peut pas être exclue, se traduirait par une adaptation inverse ?

Dans cette hypothèse, il est en effet probable que les entreprises concourront à mettre en place des dispositifs de formation plus courts, intensifs et qualifiants . La préservation, et même l'amélioration, du " capital humain " serait ainsi compatible avec une forte remontée du taux d'activité des jeunes de 16 à 25 ans.

De même, il faut avoir en mémoire que le taux d'activité des personnes de plus de 55 ans est passé en France de 71 % en 1970 à 41 % aujourd'hui, alors qu'il se situe à 64 % pour la moyenne des pays de l'OCDE.

Dans les pays les plus concernés par la baisse de la fécondité, comme l'Allemagne ou l'Italie, on observe déjà une remontée du taux d'activité des personnes âgées de plus de 55 ans.

En France, la remontée progressive du taux d'activité de cette catégorie de population, de telle sorte qu'il retrouve en 2040 son niveau de début des années 1970, se traduirait à cet horizon par trois millions d'actifs supplémentaires (soit 11,5 % de plus que dans les scénarios habituellement retenus).

Ceci suppose implicitement une remontée de l'âge de la retraite , question que votre rapporteur n'évoquera pas à ce stade. Il paraît cependant tout à fait nécessaire que les spécialistes étudient plus précisément les conséquences, sur l'évolution de la main-d'oeuvre réellement disponible, de l'arrêt des politiques d'encouragement aux départs en retraite anticipée et d'une remontée du taux d'activité des 55-59 ans.

Il faut bien convenir que les perspectives d'évolution du ratio de dépendance des inactifs par rapport aux actifs, présentées ci-après, sont fortement tributaires de ces incertitudes.

B. L'ÉVOLUTION DU RATIO DE DÉPENDANCE DES INACTIFS PAR RAPPORT AUX ACTIFS

Le deuxième aspect économique du vieillissement démographique concerne l'évolution de la charge des inactifs sur les actifs, mesurée par le ratio de dépendance .

L'évolution du ratio de dépendance peut être appréciée à l'aune de critères différents. Le tableau ci-après, extrait du rapport CHARPIN, en présente cinq :

- selon un premier critère, le ratio de dépendance rapporte la population de plus de 60 ans à la population de 20 à 60 ans. On peut en déduire la mesure des problèmes de financement des retraites à venir.

Ainsi mesuré, le taux de dépendance passerait de 0,39 en 1995 à 0,53 en 2020 et 0,71 en 2040. Autrement dit, il y aurait 7 retraités pour 10 actifs en 2040 contre 4 actuellement.

Ce ratio de dépendance progresse de 36 % entre aujourd'hui et 2020 et de 82 % entre aujourd'hui et 2040.

- Les quatre autres indicateurs présentés dans le tableau ci-dessous prennent en compte l'idée selon laquelle la baisse probable du nombre d'enfants, ainsi que celle du nombre de chômeurs, pourraient alléger la charge pesant sur la population au travail. Ces indicateurs renvoient ainsi à une problématique plus large que celle des retraites, de partage du revenu national entre actifs et inactifs.

Si l'on rapporte l'ensemble de la population inoccupée, c'est-à-dire en incluant les chômeurs et en considérant que les enfants pèsent pour la moitié des adultes dans la consommation, ce ratio de dépendance élargie serait stable à l'horizon 2020 et progresserait de 11,6 % à l'horizon 2040 (contre 82 % pour le ratio de dépendance strict plus de 60 ans/20-60 ans).

Le rapport CHARPIN insiste sur la très forte progression du ratio de dépendance calculé selon le premier critère (plus de 60 ans / 20-60 ans), ce qui est logique dans une analyse des perspectives financières des régimes de retraite.

Dans une analyse plus large des conséquences économiques du vieillissement, l'évolution beaucoup moins " défavorable " du ratio de dépendance élargie mérite néanmoins d'être soulignée.

EVOLUTION DES RATIOS DE DÉPENDANCE

1995

2005

2010

2020

2030

2040

1. + 60 ans / 20 - 60 ans

0,39

0,40

0,43

0,53

0,64

0,71

2. - 20 ans et + 60 ans/20-60 ans

0,87

0,86

0,91

1,00

1,12

1,19

3. - 20 ans pondérés (1) et + 60 ans / 20-59 ans


0,63


0,63


0,68


0,78


0,89


0,96

4. Population inoccupée (2) / population occupée


1,63


1,47


1,40


1,52


1,64


1,73

5. Population inoccupée pondérée (1) (2) / population occupée

1,29

1,17

1,11

1,23

1,36

1,44

1. Pour tenir compte du fait que les enfants pèsent environ la moitié des adultes dans la consommation, l'effectif des moins de 20 ans a été pondéré par 0,5.

2. Y compris chômeurs. On a fait l'hypothèse d'un taux de chômage de 6 % à partir de 2005. On suppose que le " stock " de préretraités et de chômeurs dispensés de recherche d'emploi est résorbé en 2005.

Source : Rapport du Commissariat Général du Plan : " L'avenir de nos retraites ".

Votre rapporteur regrette par ailleurs que le ratio privilégié par le Commissariat Général du Plan (plus de 60 ans/20-60 ans) ne permette pas de mesurer l'incidence d'une baisse du chômage . S'il est en effet discutable de mettre sur le même plan la charge des jeunes actifs et celle des retraités, en raison des engagements financiers des actifs à l'égard des retraités, il n'est pas choquant de considérer que les ressources publiques dégagées par la baisse du nombre de chômeurs pourraient être affectées au financement des retraites.

Le Conseil Economique et Social, dans un rapport récent sur " Les perspectives socio-démographiques à l'horizon 2020-2040 " 19 ( * ) , propose ainsi diverses projections d'un taux de dépendance différent de celui mis en exergue par le rapport CHARPIN, rapportant le nombre de retraités à la population occupée (hors chômeurs). Cet indicateur permet ainsi de mettre en évidence l'impact des évolutions macroéconomiques et d'une forte baisse du taux de chômage (jusqu'à 3 %). Dans le scénario le plus favorable, le taux de dépendance des retraités par rapport à la population occupée n'augmente que de 64 % à l'horizon 2040 (contre 82 % pour le ratio de dépendance strict présenté dans le rapport CHARPIN).

*

* *

Si le mouvement de fond, c'est-à-dire celui d'un accroissement de la charge des retraites pesant sur les actifs, est inéluctable, des évolutions susceptibles de freiner cet accroissement sont néanmoins à prendre en compte. Elles ne joueraient certes qu'à la marge : mais la " marge ", dans ce domaine, est tout à fait essentielle. Ce n'est pas une solution unique qui permettra de résoudre la question du financement des régimes de retraite, mais un ensemble de mesures et d'adaptations de natures très différentes : l'augmentation de l'activité des jeunes ou des plus de 55 ans, la baisse du chômage, l'immigration ou la hausse de la fécondité en font partie.

* 16 Sur longue période, on considère, à partir de travaux du prix Nobel d'Economie, Robert SOLOW, que la croissance est égale au produit de l'augmentation de la population active et celui de la productivité, le capital augmentant au rythme de la croissance.

* 17 Voir INSEE Première, n° 507, février 1997.

* 18 Direction de l'Animation de la Recherche, des Etudes et des Statistiques, du ministère de l'Emploi et de la Solidarité.

* 19 J.O. du 29 octobre 1999.

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