Courriers et nouvelles technologies de l'information

Jean-Paul VILLOT Président de Néopost

Je tiens à remercier Monsieur Larcher pour avoir pensé à inviter une entreprise du secteur postai qui n'est ni une poste ni un transporteur. Néopost est une entreprise spécialisée depuis 70 ans dans la conception et la production de systèmes de gestion et d'affranchissement du courrier. A travers l'analyse de notre stratégie je souhaiterais vous faire sentir l'influence des nouvelles technologies de l'information sur l'interface entre l'utilisateur et la poste dans l'avenir.

Néopost est une entreprise française qui s'est implantée aux États-Unis où notre activité est maintenant plus importante qu'en France. Nous sommes le premier fournisseur européen et le deuxième fournisseur mondial d'équipement de traitement du courrier pour les entreprises. Notre chiffre d'affaire atteignait 400 millions d'Euro en 1998 et notre entreprise compte 3200 employés pour 450 000 clients. Notre croissance a été de 10 % en 1997 et 9 % en 1998 et nous avons créé 90 emplois en deux ans en France.

Notre métier principal est donc la fabrication et la commercialisation de machines à affranchir. Notre valeur ajoutée vient du fait que nous facilitons le courrier, tant pour les entreprises que pour les organisations postales. Nous pensons que le volume du courrier va continuer de croître au cours des années à venir du fait de forces d'entraînement considérables. Le courrier aux États-Unis, en Suisse ou en Scandinavie atteint 600 lettres par habitant et par an. La relation avec le PNB par habitant est frappante puisque le nombre de lettres tombe à 100 en Espagne ou en Grèce. La croissance économique est donc génératrice de courrier.

D'autre part, la gestion du courrier va changer du fait de la libéralisation du marché postal. Dans les secteurs du transport aérien et des télécommunications qui ont été ou sont en voie de libéralisation, on a constaté une très nette dynamisation du marché, une amélioration du rapport qualité/prix, une gestion plus fine des opérateurs du secteur, l'arrivée de nouveaux entrants, une fièvre d'acquisitions et d'alliance et, enfin, une accélération du changement. A l'heure actuelle, ce sont déjà des caractéristiques du secteur postal.

Le deuxième facteur de changement provient des nouvelles technologies qui ne prennent un sens que lorsqu'elles répondent vraiment à un besoin. Or, aujourd'hui, le client demande un usage facilité et sécurisé du courrier. Il ne veut plus être forcé de faire la queue à la poste ou de gérer des stocks de timbres. Il veut un dépôt de courrier proche et accessible 24 heures sur 24, un paiement simplifié, une parfaite confiance dans les délais et une confirmation immédiate de remise au destinataire.

Du point de vue des organisations postales, le service du timbre est onéreux. Les postes souhaitent également bénéficier d'un mode de paiement simple et assuré ainsi que d'analyses fines par clients ou par produits qui étendront leur capacité de gestion et d'offres ciblées. Les attentes dans le domaine des colis sont de même nature.

Face à ces attentes, Néopost a développé des technologies nouvelles, se transformant ainsi de fournisseur de machines à affranchir en fournisseur de produits et de services informatiques spécialisés. Cette mutation était urgente puisqu'il fallait devenir une véritable force de proposition auprès des postes et bâtir un avantage compétitif. Cela a nécessité un changement radical de notre culture d'entreprise : en deux ans, nous avons augmenté notre recherche-développement de 70 %, embauché 70 ingénieurs logiciels et acquis deux sociétés spécialisées dans ces secteurs. Il y a deux mois, nous avons été introduits à la Bourse de Paris pour assurer un meilleur accès aux sources de financement.

Aujourd'hui, nous en sommes au stade du bourgeonnement des idées qui sont autant de pistes pour l'avenir. Parmi nos innovations, je citerai :


• Simply Postage qui est à la fois une petite imprimante de timbres (121212 cm) et un portefeuille électronique. Grâce à un PC équipé pour Internet, l'utilisateur se connecte une fois par mois pour un relevé de compteur ou un rechargement du portefeuille. Ensuite, l'imprimante est utilisable déconnectée du réseau pour imprimer autant de timbres que désiré. Simply postage est également connectable à une balance pour affranchir des envois plus sophistiqués (colis ou recommandés). Elle est en vente aux États-Unis et nous discutons actuellement avec les postes européennes pour la commercialiser en Europe. C'est un produit qui s'adresse notamment aux PME, aux professions libérales ou aux travailleurs à domicile.


• Un timbre spécial qui a été créé aux États-Unis. Il contient 250 caractères d'informations cryptées qui permettent d'identifier de façon précise chaque envoi. Néopost a actuellement deux solutions en cours de qualification qui permettront d'acheter de l'affranchissement par Internet et d'imprimer ce timbre sur une enveloppe à partir d'une imprimante ordinaire. Nous comptons lancer ce produit dans la seconde moitié de 1999.


• Un kiosque postal en collaboration avec IBM. Néopost est actuellement très en avance sur ses compétiteurs dans ce domaine.

En fait, toutes les postes réfléchissent aujourd'hui à la poste et au timbre de demain. Toutes prennent des initiatives en matière de technologie. Ces évolutions auront une grande influence sur la manière dont les services postaux seront mis à la disposition des entreprises et sur le paysage postal de demain. La Poste française a mis l'accent sur la connaissance fine de ses clients et sur le télé-relevé de statistiques de consommation client par client. Un test concluant a été lancé en 1998 et La Poste disposera désormais d'un outil très performant de ciblage de ses clients. De nombreuses autres postes sont passionnées par ce type de projets comme la poste australienne qui vient de définir son nouveau timbre et qui mettra en place un service identique en 1999.

Aujourd'hui, 100 000 machines à affranchir de Néopost sont déjà téléchargées de par le monde. Dans les 5 ans qui viennent, on peut estimer que la majorité des machines à affranchir sera connectée à des serveurs pour des échanges bidirectionnels d'information avec les postes. De nombreux services seront alors rendus possibles : promotions, demandes ponctuelles d'enlèvement, confirmation de remise au destinataire...

En matière d'affranchissement des colis, Néopost a également pris des initiatives importantes aboutissant à des solutions qui vont modifier la mise à disposition des services par les postes. Dès la fin de cette année aux États-Unis, on pourra choisir sur un serveur le transporteur de son colis, choisir le point de dépôt où le faire enlever et suivre son acheminement en direct.

En conclusion, je dirais que l'énumération que je viens de vous faire frappe par sa diversité et par les approches radicalement différentes des solutions nouvelles aux problèmes d'affranchissement. Nous avons souvent rêvé dans le passé de standardisation et de solution unique mais nous savons aujourd'hui que la libéralisation est indissociable d'une plus grande prise en compte du client et d'une différenciation de l'offre. Des alliances majeures émergeront sans doute beaucoup plus tard pour mettre en commun méthodes et moyens.

Henri LOIZEAU

Vous nous avez dit que l'entreprise Néopost était d'origine française. Pouvez-vous nous donner un aperçu de la répartition de son capital ?

Jean-Paul VILLOT

Néopost était une filiale d'Alcatel jusqu'en 1992. Puis ce fut une entreprise privée jusqu'en 1998 avant d'être introduite en bourse. Aujourd'hui, 52 % du capital est détenu par des investisseurs français ou étrangers tandis que 48 % constitue un noyau dur détenu par des français comme le Crédit Agricole.

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