III. HIÉRARCHISER LES NIVEAUX D'INTERVENTION, TOUT EN DÉCLOISONNANT LES INSTRUMENTS PROGRAMMATIQUES

6.  Hiérarchiser trois niveaux d'intervention : européen, national et local, en concentrant sur ces deux derniers niveaux :

l'aide aux structures qui visent à démocratiser la culture scientifique technique et entrepreneuriale,

l'aide aux PME traditionnelles ou aux start up .

Au niveau européen, il serait souhaitable de favoriser la mise en place d'un système permettant aux États de se doter d'une structure telle que l'ANVAR.

L'encouragement public à la recherche-développement en Europe ne peut s'effectuer, à tous les niveaux, indépendamment de l'ampleur et de l'ambition stratégique des programmes.

Si la Communauté doit concentrer ses efforts sur de grands programmes fédérateurs et intégrés, ceci n'exclut pas qu'elle puisse encourager les programmes dont le contenu stratégique est plus faible, même lorsque ceux-ci font l'objet de politiques de coordination des États membres.

S'agissant de l'indispensable diffusion de la culture scientifique, technique et entrepreneuriale , c'est de même au niveau local que ceci doit être renforcé . La population doit être mieux informée des réalités du progrès, et non être inhibée par les craintes abusives véhiculées par les tendances passéistes. Ceci est essentiel, car on ne construit pas l'avenir avec une petite élite qui n'est plus comprise par la majorité.

S'agissant des PME dont la capacité à faire de la recherche-développement est très variable, les soutiens devront prioritairement être dispensés aux échelons nationaux et locaux .

Naturellement, celles de ces PME éligibles aux grands programmes européens seront spécifiquement encouragées à y participer.

L'aspect transnational de la participation des PME devra également être assuré par l'initiative Eurêka (cf. infra ).

Enfin, la Communauté doit encourager la constitution, dans ceux de ses États qui n'en sont pas dotés, d'organismes du type de l'ANVAR -qui devront impérativement adopter des modes d'intervention souples-, afin qu'une hiérarchisation des niveaux d'intervention permette que les crédits européens soient consacrés à l'essentiel, et ne soient pas utilisés comme substitut à l'insuffisance des structures d'intervention nationales.

7.  Décloisonner les instruments programmatiques :

créer une ou plusieurs structures de coopération entre les différents programmes et actions européens de la recherche (FEDER, BEI, programme-cadre, EUCLID) en y associant les États membres ;

adosser étroitement l'initiative Eurêka , et notamment ses grands programmes, au programme-cadre, dans le respect des procédures Eurêka qui ont l'avantage de la rapidité, de la confidentialité et de la souplesse ;

faire évoluer institutionnellement Eurêka , en associant les régions européennes à la décision et au financement ;

libérer le futur instrument programmatique de soutien :

en supprimant la procédure, lourde, coûteuse et peu adaptée, de l'appel d'offres,

en confiant la gestion des programmes stratégiques à un consortium de participants publics et privés, la Commission n'effectuant que les arbitrages en cas de conflit, la contractualisation étant du ressort du consortium,

en faisant assurer par la Commission :

une évaluation scientifique et technologique et/ou économique décentralisée et rapide par ses bureaux régionaux, la mise en réseau facilitant le contact entre les experts de différentes nationalités,

des contrôles, notamment scientifiques, a posteriori .

en déconcentrant, auprès des États membres, la gestion des soutiens communautaires à la coordination de l'implantation des grands équipements et des programmes nationaux de recherche, ainsi que celle de certains aspects de l'action relative à la mobilité des chercheurs. La Commission assurant, sur ces points, des contrôles a posteriori .

Par sa conception limitée et son fonctionnement lourd et centralisé, le programme-cadre ne constitue plus un instrument adapté aux problèmes de la recherche-développement européenne .

Il est donc essentiel d'en réformer les ambitions et les méthodes :

En décloisonnant l'instrument par la constitution de structures de coopération avec les autres programmes et institutions communautaires, afin d'établir une cohérence avec l'utilisation des fonds " recherche " du FEDER, certains fonds de la politique agricole et avec la politique militaire commune en gestation. Ceci doit permettre des infléchissements renforçant massivement l'effort financier de recherche et, en particulier, l'ensemble des propositions précédentes (FEDER, BEI, le cas échéant, FSE), mais, également, amplifiant l'effort de recherche militaire trop modestement entrepris, avec EUCLID 11 ( * ) .

En adossant très étroitement, sur la base de l'article 169 du Traité, l'initiative Eurêka aux programmes communautaires de recherche, tout en prenant en compte les actions prévues par le programme Eurêka 2000 + . L'initiative qui bénéficiera de fonds communautaires :

pourra participer à la définition des programmes stratégiques de la Communauté,

assurera le financement des projets transnationaux de recherche-développement d'ambition moindre,

constituera, sur ces projets, la principale assise de la participation des PME de moyenne technologie.

En outre, elle serait habilitée -sous une forme qui pourra ou non exiger une réécriture de l'article 169 du Traité précité- à activer des financements régionaux et locaux des projets dont elle assurera la gestion.

Dans un contexte qui se rapproche de l'aval de la chaîne de recherche-développement où la rapidité des décisions est essentielle, les procédures des appels d'offres suivis d'évaluation, de contractualisation et de contrôle n'ont plus de raison d'être . En conséquence, il convient :

de privilégier la délégation de gestion des grands projets stratégiques à des consortiums de partenaires privés et publics, la Commission assurant à la fois l'arbitrage, en cas de conflit, et le contrôle a posteriori . Elle sera en outre, tenue informée des contractualisations auxquelles donneront lieu ces projets ;

de laisser en l'état les procédures Eurêka qui donnent satisfaction aux usagers ;

de décentraliser les évaluations (scientifique, technologique et économique) dans les bureaux locaux de la Commission ;

de déconcentrer auprès des États membres -comme c'est le cas pour le FEDER- la gestion des fonds communautaires destinés à activer les coopérations des politiques nationales, la Commission assurant des contrôles financiers et scientifiques a posteriori .

Ces sept propositions ne sont pas exhaustives . Mais leur orientation est claire. Recherche, innovation et développement de l'économie nouvelle s'appuient sur des initiatives individuelles, locales, régionales et nationales.

L'Europe de la modernité se construit avec l'appui des énergies et initiatives venant de la base et un financement global renforcé, et coordonné au niveau adéquat.

S'appuyant sur le principe de subsidiarité, mais en ne négligeant surtout pas les zones où l'instrument juridique est inexistant et le travail en commun faible, le Conseil des ministres, le Parlement européen et la Commission doivent forger un espace européen consensuel permettant de dynamiser les secteurs les plus cruciaux.

C'est à ce prix que l'Europe sera un acteur majeur de la globalisation, ce qui est nécessaire pour un monde qui doit rester pluriculturel.

En outre, les États, les collectivités locales, les associations, les institutions et surtout les communautés scientifiques, technologiques, économiques et politiques de toute l'Europe doivent contribuer à cette indispensable ambition.

* 11 Au niveau de 60 millions d'euros à comparer avec les dizaines de milliards de dollars des programmes financés par le département de la Défense aux États-Unis.

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