M. le président. Par amendement n° 106, M. Cantegrit propose d'insérer, après l'article 1er, un article additionnel ainsi rédigé :
« Les citoyens français établis hors de France peuvent demander leur adhésion à un plan existant, lors même qu'ils ne relèvent pas d'un régime de retraite complémentaire. »
La parole est à M. Cantegrit.
M. Jean-Pierre Cantegrit. Cet amendement a pour objet de permettre aux Français de l'étranger de bénéficier de la protection accordée par la proposition de loi présentée.
Nombreux sont nos compatriotes qui relèvent d'un régime de retraite par répartition soit de source française, soit de source étrangère.
En ce qui concerne la source française, le sénateur Armengaud, aujourd'hui décédé, qui était un membre éminent de la commission des finances, a donné son nom à un texte de 1965 qui a permis à plusieurs centaines de milliers de Français d'adhérer à un système de retraite de source française de couverture sociale, système qui a très bien fonctionné en permettant à nos compatriotes de se constituer une retraite non seulement en cotisant, mais également en rachetant des points.
Malheureusement, depuis 1992, en raison des problèmes qui se posent pour notre système de retraite métropolitain, nos compatriotes ont les plus grandes difficultés, compte tenu du coût du rachat, à se constituer un système de retraite de source française. Ils peuvent, bien entendu, se constituer un système de retraite de source étrangère.
Pour nos compatriotes qui vivent dans les pays de la Communauté européenne ou de l'Association européenne de libre-échange il n'y a pas de problème particulier. Malheureusement, ce n'est pas le cas de tous. Ceux qui sont dans d'autres pays sont soumis à un régime obligatoire, mais il ne cotisent pas à un régime complémentaire car, le plus souvent, celui-ci n'existe pas.
Monsieur le ministre, la dévaluation du franc CFA au début de l'année 1994 a mis l'accent sur les défaillances de nombreuses caisses africaines, notamment en Afrique francophone, qui ne paient plus à nos compatriotres français, qu'il soient revenus en France ou restés dans leur pays de résidence, les retraites pour lesquelles tant leurs entreprises qu'eux-mêmes ont cotisé.
La gravité de cette situation a amené le Premier ministre à confier à l'inspection générale des affaires sociales, l'IGAS, une mission conjointe avec le ministère des affaires étrangères et le ministère de la coopération.
Après avoir inspecté de nombreuses caisses africaines et avoir pris l'avis des missions diplomatiques françaises et des Français résidant dans ces pays, un rapport a été remis au Premier ministre en septembre dernier. La lecture de ce rapport est édifiante quant aux défaillances des caisses africaines qui gèrent des régimes par répartition.
C'est la raison pour laquelle il paraît important que les Français expatriés bénéficient de la protection accordée par la proposition de loi relative à l'épargne retraite. Dans certains cas, ce sera une solution importante pour qu'ils constituent une épargne retraite de source française.
Cette mesure contribuera donc, si elle est acceptée, au renforcement de la présence française dans le monde, qui est souhaitée par le Président de la République, par le président du Sénat et par les représentants des Français de l'étranger, qui ont d'ailleurs l'appui des principales composantes de la vie politique de notre pays.
M. Philippe Marini, rapporteur, MM. Jean Chérioux et Jacques Habert. Très bien !
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur. M. Cantegrit pose un véritable problème. La commission accepte tout à fait de le suivre dans sa démarche et a d'ailleurs émis ce matin un avis favorable sur l'amendement n° 106.
Cet amendement, qui concerne les Français salariés d'entreprises locales dans le pays où ils sont expatriés, nous conduit à penser aux situations très difficiles qu'ont vécues récemment des personnes ayant fait toute leur carrière en Afrique et dont les pensions sont donc versées en francs CFA dévalués ; prenant leur retraite en France, ces personnes ont vu leur niveau de vie brutalement divisé par deux.
M. Jacques Habert. Exactement !
M. Philippe Marini, rapporteur. Evidemment, ces personnes-là ne sont plus concernées par cette disposition, qui est faite pour l'avenir. Mais, lorsque l'on s'expatrie, lorsque l'on en prend le risque et que l'on est assujetti à des régimes de droit local, il est bon de pouvoir par ailleurs, et parce que l'on travaille pour la prospérité de la France à l'étranger, être affilié à un régime d'épargne retraite en France.
C'est pourquoi la commission des finances, après avoir entendu M. Cantegrit, ne peut qu'être tout à fait favorable à la proposition qu'il a formulée.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Alain Lamassoure, ministre délégué. Comme l'a indiqué M. le rapporteur, M. Cantegrit a raison d'appeler notre attention sur un vrai problème qui n'était pas traité dans la proposition de loi : celui des Français établis hors de France qui ne relèvent pas d'un régime de retraite complémentaire et qui, dans la rédaction actuelle de la proposition de loi, ne pourraient pas bénéficier d'un plan d'épargne retraite.
Or il est logique qu'une même règle s'applique aux Français de l'étranger et qu'il y ait une égalité des droits pour tous les citoyens français, quel que soit le lieu où ils travaillent et quelle que soit leur situation au regard du droit du travail.
Cela étant, nous avons besoin d'un peu de temps pour, peut-être, compléter et améliorer la rédaction concise que M. Cantegrit nous propose dans cet amendement n° 106, car tous les citoyens français établis hors de France ne sont pas dans la même situation au regard du droit du travail, et donc des régimes de retraite, selon qu'ils travaillent pour une filiale française ou pour une entreprise locale et selon les accords bilatéraux qui ont été passés par la France avec les pays concernés.
Je peux donc, au nom du Gouvernement, donner à M. Cantegrit un accord de principe, mais je propose que nous nous donnions un délai pour nous assurer que la rédaction sera irréprochable : j'entends par là une rédaction qui prenne en compte tous les Français qui sont concernés et que vous avez décrits. A cet effet, nous pourrions mettre à profit la navette pour trouver une rédaction définitive.
Si M. Cantegrit acceptait cette suggestion, il pourrait alors retirer son amendement.
M. le président. Monsieur Cantegrit, votre amendement est-il maintenu ?
M. Jean-Pierre Cantegrit. Je suis, bien sûr, sensible aux propos de M. le ministre, que je remercie. Je suis néanmoins tenté de lui demander pourquoi nous ne garderions pas cet amendement comme base de travail.
Je suis très ouvert, monsieur le ministre, à des modifications ultérieures, auxquelles je suis d'ailleurs tout à fait prêt à collaborer. Je n'ai pas du tout d'amour-propre d'auteur, croyez-le bien, mais, le Sénat étant, vous le savez, la seule assemblée parlementaire où sont représentés les Français établis hors de France, convenez avec moi qu'il est d'autant plus opportun qu'une telle initiative émane de cette maison !
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 106.
M. Hubert Durand-Chastel. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Durand-Chastel.
M. Hubert Durand-Chastel. C'est un fait reconnu, les Français s'expatrient trop peu et sont en nombre insuffisant à l'étranger, ce qui constitue un grave handicap dans le contexte actuel de mondialisation de l'économie.
Il convient d'y remédier et de rendre leur mobilité à nos compatriotes. Pour cela, il ne faut pas les priver, à l'étranger, de qualités qu'ont leurs concitoyens de l'Hexagone. Il faut que les Français, lorsqu'ils vont s'installer hors de France, n'aient pas l'impression d'être considérés comme étant de seconde zone, exclus de certains droits.
Pour cette raison, je demande à la Haute Assemblée de voter l'amendement n° 106 de notre excellent collègue M. Cantegrit, qui vise à permettre aux Français expatriés de bénéficier de la protection accordée par la proposition de loi que nous examinons.
M. Jacques Habert. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Habert.
M. Jacques Habert. Les sénateurs des Français établis hors de France remercient M. Cantegrit de son excellente initiative. Ils expriment également leur gratitude à la commission des finances qui, par la voix de M. Marini, a donné un avis favorable à l'amendement n° 106.
Ils comprennent aussi très bien les explications que M. le ministre vient de leur fournir et prennent acte des promesses qu'il a faites.
Cela dit, ils estiment évidemment que le mieux est de voter cet amendement et, bien entendu, de se tenir prêts, au cours de la navette, à accepter toutes les modifications que le Gouvernement, voire l'Assemblée nationale jugeraient nécessaires.
M. Jean-Philippe Lachenaud. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Lachenaud.
M. Jean-Philippe Lachenaud. Nous souhaitons voter cet amendement. Cela étant, nous avons été sensibles à l'argumentation du Gouvernement.
Il est vrai qu'il conviendrait déjà de faire la distinction entre les salariés d'entreprises françaises à l'étranger et les salariés d'entreprises locales. Les situations sont très différentes.
Par ailleurs, le principe de l'adhésion à un régime complémentaire ayant été institué par la commission des finances, le fait d'introduire une exception à ce principe pose problème.
Nous allons voter cet amendement mais, pour faciliter la discussion, monsieur le ministre, je me permets de vous suggérer de présenter un sous-amendement consistant à ajouter, après le mot : « existant », les mots : « dans des conditions qui seront définies par décret en Conseil d'Etat ».
Cela permettrait, d'entrée de jeu, de fixer le principe, pour ensuite prévoir des solutions spécifiques de façon à répondre dans les meilleures conditions possibles aux situations difficiles dans lesquelles se trouvent les salariés installés à l'étranger.
M. Alain Lamassoure, ministre délégué. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Alain Lamassoure, ministre délégué. J'ai exprimé tout à l'heure mon sentiment personnel. Je crois que nous aurions intérêt à nous donner un peu de temps afin de nous assurer que la rédaction que nous proposons est parfaite.
Je comprends que le Sénat souhaite faire un geste politique et, comme le Sénat représente notamment les Français de l'étranger, chacun peut comprendre qu'il tienne particulièrement à ce que l'initiative de ce geste lui revienne.
Je ne sais pas si la proposition faite par M. Lachenaud est la meilleure. Je le remercie en tout cas d'essayer de nous faire avancer vers un compromis.
Je crois que la meilleure solution est que le Gouvernement, sur ce sujet, s'en remette à la sagesse du Sénat. Nous sommes conscients les uns et les autres que le texte proposé est probablement perfectible. Peut-être faudra-t-il le compléter comme le propose M. Lachenaud ?
J'ai le sentiment que le texte de loi devrait être plus précis que le texte qui nous est proposé par M. Cantegrit. Nous pouvons admettre les uns et les autres que celui-ci constitue un point de départ sur lequel nous invitons l'Assemblée nationale à travailler de manière à l'améliorer.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 106, accepté par la commission et pour lequel le Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans la proposition de loi, après l'article 1er.
Par amendement n° 135, M. Vasselle propose d'insérer, après l'article 1er, un article additionnel ainsi rédigé :
« Les dispositions prévues à l'article 154 bis du code général des impôts sont applicables aux exploitants agricoles. »
Cet amendement est-il soutenu ?...

Article 2