Séance du 16 novembre 1998







M. le président. Par amendement n° 85 rectifié, M. Bernard propose d'insérer, après l'article 12, un article additionnel ainsi rédigé :
« Il est institué un remboursement de la contribution sociale généralisée, de la contribution pour le remboursement de la dette sociale et du prélèvement social en faveur de la caisse nationale des allocations familiales et de la caisse nationale d'assurance vieillesse des travailleurs salariés en faveur des ménages non imposables titulaires de revenus de placement. »
La parole est à M. Bernard.
M. Jean Bernard. Cet amendement se justifie par son texte même.
Les personnes non imposables sont exonérées de la contribution sociale généralisée. Il est proposé par cet amendement d'instituer un remboursement de la CSG, de la CRDS et du prélèvement social dus par ces personnes sur les revenus de leurs placements.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Charles Descours, rapporteur. Cet amendement, on vient de le dire, tend à rembourser la CSG, le CRDS et le prélèvement social de 2 % prélevés sur les revenus des placements aux ménages non imposables.
Il est effectivement des personnes vivant tout à fait chichement qui se retrouvent, du fait qu'elles ont accumulé tout au long de leur vie un peu d'épargne, taxées à 10 % dès le premier franc sur les revenus de leurs placements, alors qu'elles ne sont par ailleurs pas imposables en raison de la modicité des pensions ou des pensions de réversion qu'elles touchent.
Je rappelle d'abord que la France est le pays d'Europe qui compte le plus grand nombre de foyers fiscaux exonérés - onze millions.
Mais il est vrai que, au cours des dernières semaines, les Français ont pris conscience, avec l'envoi des rôles émis par l'administration fiscale, de l'importance des prélèvements sociaux sur l'épargne : 7,5 % de CSG, 0,5 % de CRDS et 2 % de « prélèvement social » affecté à la CNAF et à la CNAVTS.
La commission des affaires sociales, je le rappelle, n'avait pas été favorable, lors de la discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 1998, à un transfert aussi important de la CSG, même si elle n'était pas hostile au principe d'un rééquilibrage des prélèvements sociaux entre revenus du travail et revenus du capital. Elle avait déploré l'alourdissement considérable, en une seule année, des prélèvements sur l'épargne et elle avait proposé d'exclure les primes des comptes et plans d'épargne logement, qu'elle considérait comme un placement social, ainsi que les produits d'assurance vie de l'assiette du nouveau prélèvement social.
L'Assemblée nationale n'avait pas retenu cette exonération, qui visait à limiter les effets de cette fiscalité accrue sur les classes moyennes.
D'après la loi de financement de l'année dernière, restent exclus des prélèvements, au titre de la CSG, du RDS et du prélèvement social, les intérêts des livrets A, des CODEVI et des livrets d'épargne populaire.
Cependant, il convient de rappeler que la CSG sur les revenus d'activité s'applique aux personnes touchant le SMIC.
En outre, le dispositif proposé par M. Bernard a l'inconvénient du système des « exonérations en cascade » : une personne tout juste imposable devra payer les prélèvements sociaux sur les revenus de ses placements, tandis qu'une personne se trouvant en dessous du seuil d'imposition sera remboursée.
Je comprends l'inquiétude de M. Bernard.
Ces dernières semaines, nous avons vu des retraités non imposables manifester après avoir reçu un avis leur demandant de payer 4 000 francs au titre de la CSG et des autres prélèvements sociaux. C'est donc une vraie question.
Peut-être faudrait-il prévoir un taux réduit pour les personnes non imposables. Peut-être aussi faudrait-il prévoir un paiement en trois fois pour éviter ce prélèvement-couperet en fin d'année, ce qui aurait d'ailleurs l'avantage de soulager la trésorerie de l'ACOSS, l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale, qui, en l'état, n'encaisse le fruit de la CSG qu'en fin d'année.
En tout cas, je ne suis pas sûr que la solution proposée par M. Bernard soit la bonne, et c'est pourquoi je lui demande de retirer l'amendement.
M. le président. Répondez-vous à l'invitation de M. le rapporteur, monsieur Bernard ?
M. Jean Bernard. Je remercie M. le rapporteur d'avoir ouvert de nouvelles voies d'approche, ou de recherche, sur cette question.
Je vais retirer l'amendement parce que je fais confiance à Mme le ministre et à la commission pour trouver des solutions.
Il m'est apparu que la discussion de ce projet était l'occasion de faire part des difficultés de certains, notamment de certains retraités des régimes agricoles qui, devenus veufs ou veuves, après une vie de labeur leur ayant permis d'accumuler un patrimoine modeste qu'ils mettent en location, se voient obligés de payer ces prélèvements.
Je retire également l'amendement parce que je préjuge votre réponse, madame la ministre, pour avoir vu le sort qui a été réservé, à l'Assemblée nationale, à l'amendement de même nature présenté par M. de Courson.
Il n'empêche, il faut rechercher des solutions : peut-être faudrait-il solder cette imposition en trois fois, peut-être la moduler en fonction des ressources réelles des contribuables.
M. le président. L'amendement n° 85 rectifié est retiré.
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité. Bien que M. Bernard ait retiré son amendement, je veux apporter quelques informations complémentaires - car nous en avons déjà parlé.
Je rappelle que la CSG s'applique au premier franc pour n'importe quel salarié, y compris celui qui travaille à temps partiel et qui gagne 2 000 francs par mois.
Je fais par ailleurs observer que, dans notre pays, on peut être non imposable et avoir un patrimoine important, du fait de réductions d'impôts qui peuvent représenter des montants élevés, et du fait que les revenus de capitaux sont soumis non pas à l'impôt sur le revenu mais au prélèvement libératoire - je pense aux intérêts de l'assurance-vie ou aux intérêts d'obligations - voire ne sont soumis à aucun prélèvement fiscal, comme le plan d'épargne en actions, le PEA. Aujourd'hui, un ménage peut avoir un PEA représentant 1,2 million de francs et ne payer aucun impôt, alors que la personne qui, elle, gagne 2 000 francs par mois, payera la CSG !
Je suis toujours prête à envisager la situation de ceux qui rencontrent des difficultés pour essayer d'apporter des solutions. En l'occurrence, tel ne me paraît pas être le cas.
Monsieur le rapporteur, vous avez évoqué le cas d'une personne qui doit payer 4 000 francs de CSG alors qu'elle n'en payait pas auparavant. Qu'est-ce que 4 000 francs de CSG ? C'est 50 000 francs de revenus de capital, soit un patrimoine de 1,5 million de francs environ. Est-il anormal qu'une personne qui possède un patrimoine de 1,5 million de francs paie la CSG, alors que, encore une fois, la vendeuse à temps partiel au supermarché va la payer ? Personnellement, je ne le crois pas et je garde mon émotion pour des cas qui le méritent véritablement.
M. Jean Bernard. Et il y en a !

TITRE III

DISPOSITIONS RELATIVES
AUX DÉPENSES ET À LA TRÉSORERIE

Section 1

Branche famille

Article 13