Séance du 18 février 1999







M. le président. La parole est à M. Auban.
M. Bertrand Auban. Ma question s'adresse à M. le ministre de la défense.
Monsieur le ministre, le décret de privatisation d'Aérospatiale a été publié le 14 février dernier au Journal officiel.
Voilà plusieurs mois, le Gouvernement s'est saisi du difficile dossier des restructurations industrielles dans le domaine de l'aéronautique et de la défense.
Le transfert du secteur public au secteur privé de la majorité du capital de la société Aérospatiale doit permettre la fusion avec Matra-hautes technologies. Il s'agit de la concrétisation d'un projet très attendu, visant à constituer une industrie aéronautique civile et militaire nationale forte pour préparer d'ultérieurs regroupements européens. Cette stratégie industrielle doit nous permettre de faire face à la concurrence internationale, et notamment d'affronter l'offensive menée par les grands groupes américains.
Monsieur le ministre, quelle sera la place et le rôle de l'Etat actionnaire dans la future société ?
Par ailleurs, quelles seront les conséquences de cette fusion sur les salariés et, de façon plus générale, sur l'emploi ? (Applaudissements sur les travées socialistes et sur celles du groupe communiste républicain et citoyen, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Alain Richard, ministre de la défense. Monsieur le sénateur, je souhaiterais tout d'abord vous répondre sur les perspectives d'avenir et la stratégie industrielle du nouvel ensemble Aérospatiale-Matra.
Le rapprochement répond en effet à une logique industrielle. Le nouvel ensemble Aérospatiale-Matra réalisera un chiffre d'affaires voisin de 80 milliards de francs et se positionnera à la cinquième place mondiale. Il sera présent, le plus souvent en position de leader européen, voire mondial, dans tous les métiers de l'aéronautique civile et militaire et de l'espace. Dans tous ses métiers, le nouvel ensemble disposera d'alliances avec les principaux partenaires industriels européens, Dasa, British Aerospace, GEC-Marconi et, bientôt, nous l'espérons, avec Finmeccanica et l'entreprise espagnole Casa.
La stratégie industrielle du Gouvernement, qui a été constante et qui a porté ses fruits, consiste à renforcer Aérospatiale en donnant au pôle aéronautique français les meilleures cartes pour se développer, comme nous l'avons fait antérieurement pour Thomson-CSF.
La fusion entre Aérospatiale et Matra n'entraînera pas de restructurations susceptibles d'avoir des conséquences négatives en termes d'emploi, car les deux entreprises sont largement complémentaires, y compris dans le domaine des missiles, où leurs gammes de produits ne se recouvrent pas.
Ce rapprochement a, au contraire, vocation à conforter les perspectives de croissance des différentes branches d'activité du nouvel ensemble, et donc les perspectives d'emploi, même si les efforts de productivité doivent être poursuivis afin que l'ensemble Aérospatiale-Matra demeure au meilleur niveau de mondial compétitivité.
J'en viens enfin aux modalités de l'accord intervenu entre l'Etat, principal actionnaire, et le groupe Lagardère.
Cet accord précise les modalités financières de la fusion et s'inscrit dans le prolongement de l'accord industriel conclu voilà deux mois entre Aérospatiale, Lagardère, Thomsom-CSF et Alcatel, accord qui a précisé les rôles respectifs de chacune des entreprises dans les domaines de l'avionique, des systèmes de missiles et des satellites.
Cet accord doit maintenant, comme l'ensemble de l'opération, être examiné en pleine indépendance par la commission des participations et des transferts, dont l'avis conforme est nécessaire, vous le savez, à l'aboutissement de la fusion.
Afin de répondre pleinement à votre interrogation, je rappellerai deux des principales modalités de l'accord.
L'Etat demeurera, de façon déterminante, le premier actionnaire d'Aérospatiale-Matra et détiendra, aux côtés des salariés actionnaires, plus de 50 % du capital. Le groupe Lagardère, en contrepartie de l'apport de Matra- hautes technologies et des compensations patrimoniales qu'il a apportées à l'Etat, sera actionnaire du nouvel ensemble à hauteur de 33 %.
S'agissant des compensations financières, l'Etat va récupérer les 4 % de Thomson-CSF détenus par Aérospatiale et représentant environ 1,5 milliard de francs, ainsi qu'une soulte dont le montant sera compris entre 850 millions et 3 milliards de francs, en fonction des résultats futurs d'Aérospatiale.
Je poursuivrai la concertation avec les organisations syndicales des entreprises concernées, comme je l'ai fait depuis mon entrée en fonction. Nos discussions se dérouleront dans la loyauté et la confiance, car tous les partenaires sans exception sont persuadés, comme le Gouvernement, qu'une évolution novatrice est nécessaire pour porter au plus haut niveau la contribution technologique française à la construction de l'industrie européenne de défense que nous voulons. (Applaudissements sur les travées socialistes, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

RESTRUCTURATION DU SECTEUR AUTOMOBILE
À L'ÉCHELLE MONDIALE