COMPTE RENDU INTÉGRAL

PRÉSIDENCE DE M. JEAN-CLAUDE GAUDIN

vice-président

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à onze heures cinq.)

1

PROCÈS-VERBAL

M. le président. Le procès-verbal de la séance du 18 décembre 2003 a été distribué.

Il n'y a pas d'observation ?...

Le procès-verbal est adopté.

2

DÉCÈS D'UN ANCIEN SÉNATEUR

M. le président. J'ai le regret de vous faire part du décès de notre ancien collègue Yves Durand, qui fut sénateur de la Vendée de 1968 à 1986.

3

DÉSIGNATION DE SÉNATEURS EN MISSION

M. le président. M. le président a reçu de M. le Premier ministre deux lettres respectivement en date du 22 décembre 2003 et du 5 janvier 2004, par lesquelles il a fait part au Sénat de sa décision de placer respectivement en mission temporaire : auprès du ministre délégué à l'enseignement scolaire M. Christian Demuynck, sénateur de Seine-Saint-Denis ; auprès du ministre délégué à la famille, M. Louis de Broissia, sénateur de la Côte-d'Or.

Acte est donné de ces communications.

4

FIN DE MISSION D'UN SÉNATEUR

M. le président. M. le président a reçu de M. le Premier ministre une lettre lui annonçant, dans le cadre des dispositions de l'article L.O. 297 du code électoral, la fin, le 15 décembre 2003, de la mission temporaire confiée à M. Serge Lepeltier, sénateur du Cher, auprès de lui.

Acte est donné de cette communication.

5

DÉCISIONS DU CONSEIL CONSTITUTIONNEL

M. le président. M. le Président a reçu de M. le président du Conseil constitutionnel, par lettre en date du 29 décembre 2003, le texte des décisions rendues par le Conseil constitutionnel, d'une part sur la loi de finances rectificative pour 2003 et, d'autre part, sur la loi de finances pour 2004.

Acte est donné de cette communication.

Ces décisions du Conseil constitutionnel ont été publiées au Journal officiel, édition des lois et décrets.

6

ACCORD AVEC L'AUSTRALIE SUR L'EMPLOI

DES PERSONNES À CHARGE DES MEMBRES

DES MISSIONS OFFICIELLES

Adoption d'un projet de loi

 
Dossier législatif : projet de loi autorisant l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République Française et le Gouvernement de l'Australie sur l'emploi des personnes à charge des membres des missions officielles d'un Etat dans l'autre
Art. unique (début)

M. le président. L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi (n° 371, 2002-2003), adopté par l'Assemblée nationale, autorisant l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de l'Australie sur l'emploi des personnes à charge des membres des missions officielles d'un Etat dans l'autre. [Rapport n° 381 (2002-2003).]

Dans la discussion générale, la parole est à Mme la ministre.

Mme Noëlle Lenoir, ministre déléguée aux affaires européennes. Monsieur le président, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, lorsqu'un agent de l'Etat est affecté en poste à l'étranger, il n'est pas toujours aisé pour les membres de sa famille de trouver un emploi dans le pays concerné. Or l'exercice d'une profession par les deux conjoints étant devenu une pratique à la fois courante et salutaire pour l'équilibre du couple, il convenait de prendre en considération les aspirations légitimes à la poursuite d'une carrière professionnelle dans le cadre de l'expatriation.

En conséquence, la France a entrepris, depuis plus de quinze années, de conclure des accords sur l'emploi des conjoints de diplomates, afin de répondre au souhait des conjoints et d'élargir le vivier des candidatures à une affectation à l'étranger des personnels exerçant dans les postes diplomatiques et consulaires. A cet égard, ce type d'accords constitue donc un instrument fort utile pour la politique des ressources humaines du ministère des affaires étrangères ainsi que de l'ensemble des administrations qui détachent des personnels à l'étranger.

Des accords ont déjà été conclus en 1987 avec le Canada, en 1994 avec l'Argentine, en 1996 avec le Brésil et en 1999 avec la Nouvelle-Zélande. Des dispositions intérimaires, plusieurs fois renouvelées dans l'attente de la conclusion d'un accord définitif, s'appliquent avec les Etats-Unis et continuent ainsi de donner lieu à une application de fait au profit de conjoints d'agents français en poste dans ce pays. Des négociations ont, en outre, été proposées à une dizaine d'autres pays, notamment d'Amérique latine.

Les négociations entreprises à partir de 1997 avec l'Australie ont permis d'aboutir à la signature d'un accord à Adélaïde le 2 novembre 2001. Comme les textes précédents, cet accord franco-australien vise à permettre aux personnes à charge, essentiellement des conjoints, des agents des missions diplomatiques ou consulaires d'exercer une activité professionnelle salariée dans le pays d'accueil, alors que cette possibilité leur est normalement fermée en raison de leur statut de résident dérogatoire au droit commun, et de l'existence de privilèges et immunités dont ils bénéficient en application des conventions de Vienne de 1961 et 1963 sur les relations diplomatiques et consulaires.

En vertu du présent accord, et sous réserve de considérations d'ordre public ou de sécurité nationale, les autorités compétentes du pays d'accueil pourront ainsi délivrer, à titre dérogatoire, une autorisation de travail aux personnes à charge des membres des missions officielles qui ont obtenu une proposition d'emploi salarié ; en contrepartie, le bénéficiaire de cette autorisation devra renoncer à ses privilèges et immunités pour tout ce qui se rapporte à l'emploi exercé.

Même si cet accord ne concerne que peu de personnes dans l'absolu, son entrée en vigueur est vivement attendue de part et d'autre, la partie australienne l'appliquant quant à elle en faveur de nos agents depuis la date de sa signature.

Telles sont, monsieur le président, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, les principales observations qu'appelle l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de l'Australie sur l'emploi des personnes à charge des membres des missions officielles d'un Etat dans l'autre, qui fait l'objet du projet de loi aujourd'hui soumis à votre approbation. (Applaudissements.)

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. Jean-Guy Branger, rapporteur de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, je ne reviendrai pas sur le dispositif de l'accord franco-australien qui vient d'être présenté afin de mettre l'accent sur les raisons qui motivent la conclusion d'un tel accord.

Effectivement, la signature d'un accord international entre deux Etats pour autoriser les femmes et les enfants des diplomates à exercer un métier à l'étranger peut surprendre.

Cette situation s'explique par deux raisons principales. D'une part, les privilèges et immunités diplomatiques accordés aux diplomates s'appliquent par extension aux membres de leur famille proche afin qu'aucune pression ne puisse être exercée contre eux. De ce fait, en raison des immunités de juridiction et d'exécution, des privilèges fiscaux dont ils bénéficient, de la situation matérielle habituellement confortable dont jouissent les personnels diplomatiques à l'étranger, de la composition essentiellement masculine du corps diplomatique et consulaire, et du rôle traditionnel des épouses, les conventions de Vienne de 1961 sur les relations diplomatiques et de 1963 sur les relations consulaires ont interdit aux conjoints et aux enfants de diplomates d'exercer une profession rémunérée à l'étranger.

D'autre part, les diplomates ne peuvent renoncer eux-mêmes aux immunités et privilèges dont ils bénéficient au nom de l'Etat qui les envoie. En droit international, seul celui-ci peut renoncer explicitement de sa propre initiative ou à la demande de l'Etat d'accueil, à certains privilèges ou immunités. Il était donc du ressort des Etats, sous la forme d'un accord international, et non pas d'un simple accord administratif entre les ministères des affaires étrangères, de déroger, sous réserve de réciprocité, aux règles générales régissant le statut des missions diplomatiques et consulaires.

Cet accord permettra aux ministères des affaires étrangères de l'Australie et de la France de satisfaire les demandes de leurs personnels qui désirent, dans les pays économiquement développés, que leurs conjoints ou leurs enfants à charge puissent exercer une profession. En effet, en Australie comme en France, il est devenu tout à fait habituel que, dans un couple de diplomates, les deux conjoints travaillent et qu'ils nourrissent une même ambition professionnelle. De plus, les difficultés économiques et la nécessité de cotiser pour la retraite rendent de plus en plus nécessaire la poursuite par le conjoint non diplomate d'une activité salariée. Face à une telle situation, afin d'éviter une séparation durable des familles et des couples et des difficultés de mobilité, le ministère des affaires étrangères souhaite rendre possible le travail des conjoints.

Vous me permettrez toutefois d'observer que l'accord fait encore preuve d'un certain conservatisme puisque la situation des personnels ayant signé un pacte civil de solidarité, un PACS, n'est pas envisagée.

En conclusion, monsieur le président, madame le ministre, mes chers collègues, je crois que cet accord répond à une légitime aspiration des conjoints de nos diplomates et à la nécessaire modernisation du service public.

C'est pourquoi, sous le bénéfice de ces observations, je vous demande, au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, d'approuver le présent projet de loi. (Applaudissements.)

M. le président. Personne ne demande la parole dans la discussion générale ?...

La discussion générale est close.

Nous passons à la discussion de l'article unique.

Discussion générale
Dossier législatif : projet de loi autorisant l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République Française et le Gouvernement de l'Australie sur l'emploi des personnes à charge des membres des missions officielles d'un Etat dans l'autre
Art. unique (fin)

Article unique

Est autorisée l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de l'Australie sur l'emploi des personnes à charge des membres des missions officielles d'un Etat dans l'autre, signé à Adélaïde le 2 novembre 2001, et dont le texte est annexé à la présente loi.

M. le président. Personne ne demande la parole ?...

Je mets aux voix l'article unique du projet de loi.

(Le projet de loi est adopté.)

Art. unique (début)
Dossier législatif : projet de loi autorisant l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République Française et le Gouvernement de l'Australie sur l'emploi des personnes à charge des membres des missions officielles d'un Etat dans l'autre
 

7

ACCORD AVEC L'ARABIE SAOUDITE

SUR L'ENCOURAGEMENT ET LA PROTECTION

RÉCIPROQUES DES INVESTISSEMENTS

Adoption d'un projet de loi

 
Dossier législatif : projet de loi autorisant l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Royaume d'Arabie saoudite sur l'encouragement et la protection réciproques des investissements (ensemble un protocole)
Art. unique (début)

M. le président. L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi (n° 375, 2002-2003), adopté par l'Assemblée nationale, autorisant l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Royaume d'Arabie saoudite sur l'encouragement et la protection réciproques des investissements (ensemble un protocole). [Rapport n° 9 (2003-2004).]

Dans la discussion générale, la parole est à Mme la ministre.

Mme Noëlle Lenoir, ministre déléguée aux affaires européennes. Monsieur le président, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, c'est afin de garantir un cadre juridique sûr aux investissements et donc de favoriser l'activité internationale de nos entreprises que la France souscrit des engagements internationaux en matière de protection des investissements. Ainsi, quatre-vingt-un accords de ce genre sont actuellement en vigueur.

Entreprises en 1993, les négociations en vue d'un accord d'encouragement et de protection des investissements entre la France et l'Arabie saoudite ont finalement abouti le 26 juin 2002. Le texte signé comporte l'ensemble des stipulations qui constituent, du point de vue des pays de l'OCDE, le socle nécessaire pour protéger les investissements. Ce socle est composé de cinq éléments fondamentaux.

D'abord, les investisseurs se voient accorder un traitement juste et équitable et bénéficieront du traitement le plus avantageux, entre ceux qui sont accordés aux investisseurs nationaux ou à la nation la plus favorisée.

Ensuite, les revenus de l'investissement seront librement transférables.

Par ailleurs, les investisseurs sont prémunis contre le risque d'expropriation. Toute dépossession donnera droit à une indemnisation prompte, adéquate et transférable.

En outre, le Gouvernement français pourra accorder aux investissements une quatrième garantie, conformément à l'article 26 de la loi de finances rectificative pour 1971, qui subordonne, sauf exception, son octroi à l'existence d'un tel accord.

Enfin, le droit de recourir, en cas de désaccord avec l'Etat d'accueil, soit aux juges nationaux, soit à l'arbitrage international - et ce au choix de l'investisseur -, est un gage d'effectivité des dispositions contenues dans cet accord avec l'Arabie saoudite.

Ainsi, ce texte protégera les investissements français. C'est donc un puissant signal pour nos investisseurs.

Que l'Arabie saoudite ait accepté, après de longues hésitations, de souscrire à l'ensemble de ces clauses reflète un changement d'esprit plus général dans le Royaume. La volonté nouvelle d'attirer les capitaux étrangers et les entreprises étrangères s'est d'ailleurs exprimée au travers de la loi saoudienne de 2000 sur les investissements.

La France se devait de tirer parti de ce nouveau climat d'affaires, d'autant que ses relations avec l'Arabie saoudite s'inscrivent, depuis 1996, dans le cadre d'un « partenariat stratégique », que cet accord vient renforcer.

Nos échanges commerciaux avec l'Arabie saoudite sont importants et caractérisés par un important déficit structurel. En effet, l'Arabie saoudite est, vous le savez, notre second fournisseur de pétrole dans le monde. Elle est également pour nous un client essentiel dans cette région, le deuxième après les Emirats arabes unis.

En termes d'investissements, le flux de capitaux saoudiens vers la France reste limité et difficile à évaluer avec exactitude ; il se concentre surtout dans le secteur immobilier.

La France a donc une place importante, mais avec une vraie marge de progression, parmi les investisseurs étrangers en Arabie saoudite : elle est le huitième pays investisseur ; au total, soixante entreprises françaises implantées sur place ont été recensées par la mission économique à Riyad.

Cette présence se concentre, en stock, dans le secteur bancaire, avec la présence de longue date de Crédit agricole - Indosuez, via la Banque Al Saudi Al Fransi.

D'ores et déjà, la loi saoudienne de 2000 a donné un nouvel essor aux flux d'investissements français, notamment dans le secteur agro-alimentaire avec Danone et Perrier. Mais, malgré l'implantation nouvelle de Saint-Gobain dans le pays, notre présence dans le secteur des textiles techniques, ou encore celle de Stesa, de Schneider, de la Compagnie générale de géophysique, l'investissement des entreprises industrielles françaises peut, et doit, se renforcer. C'est le cas, bien évidemment, du secteur gazier, mais également, par exemple, de ceux de l'immobilier et des loisirs.

La présence économique française permet de « peser » dans ce pays, dans cette région, dans ces secteurs d'activité cruciaux. L'accord de protection des investissements avec l'Arabie saoudite encouragera et accompagnera une forte présence de nos entreprises.

Telles sont, monsieur le président, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, les principales observations qu'appelle l'accord sur l'encouragement et la protection réciproques des investissements avec l'Arabie saoudite, qui fait l'objet du projet de loi aujourd'hui proposé à votre approbation. (Applaudissements.)

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. Serge Vinçon, rapporteur de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, l'accord sur l'encouragement et la protection réciproques des investissements entre la France et l'Arabie saoudite, signé à Djeddah le 26 juin 2002 entre le ministre français des affaires étrangères et le ministre saoudien des finances et de l'économie nationale, s'inscrit dans la ligne de plusieurs accords similaires.

La France a, en effet, entrepris, depuis les années soixante-dix, de donner un cadre juridique stable et normalisé aux relations économiques nouées avec ses principaux partenaires commerciaux.

A ce jour, quatre-vingt-sept accords bilatéraux visant à encourager nos investisseurs à s'engager à l'étranger ont ainsi été signés avec des pays extérieurs à l'Organisation de coopération et de développement économiques, l'OCDE. En effet, des mécanismes protecteurs des investissements existent déjà au sein de cet ensemble économique.

Notre ministre des affaires étrangères a mis à profit sa première visite dans la région du golfe Arabo-Persique pour signer un accord de ce type avec le royaume saoudien.

Ce texte reprend les clauses « standard » des accords de protection des investissements, comme la définition des termes d'investissement et de revenu, la prohibition des entraves, de droit ou de fait, aux activités des investisseurs, et l'établissement du traitement dit « national » des investisseurs, qui conduit les opérateurs de l'Etat partenaire à recevoir le même traitement que les investisseurs nationaux. Une exception est prévue en ce domaine pour les accords économiques régionaux, ce qui permet à la France de réserver un statut spécifique à ses partenaires de l'Union européenne.

La protection des investissements effectués sur le territoire ou dans la zone maritime de l'Etat partenaire établit le droit à une indemnité « prompte, adéquate et effective » en cas d'expropriation motivée par l'utilité publique, seule exception à l'interdiction d'une dépossession des biens. Enfin, les modalités de règlement des litiges éventuels pouvant surgir entre les deux Etats pour l'application de l'accord sont précisées.

L'accord est conclu pour une durée initiale de dix ans et reste en vigueur au-delà en cas de non-dénonciation par les Etats.

La conclusion de cet accord s'inscrit dans le partenariat stratégique qui unit la France et l'Arabie saoudite.

Le dialogue politique entre les deux pays est nourri par des convergences de vues sur la situation régionale, notamment sur le conflit israélo-palestinien. La France a ainsi soutenu l'initiative de paix formulée en 2002 par le prince Abdallah, qui vise à des concessions mutuelles des deux parties en conflit. Cette appréciation commune porte également sur la situation en Irak.

Rappelons que le prince Abdallah s'est rendu au G 8 d'Evian, en juin dernier, à l'invitation du Président de la République, M. Chirac.

Notre pays juge possible de développer nos liens, notamment économiques, avec le royaume. C'est la raison de la signature de cet accord de protection des investissements, qui confortera la stabilité juridique nécessaire à nos opérateurs économiques. En 2001, la France a exporté pour 1,55 milliard d'euros vers le royaume, ce qui en faisait son trente-quatrième client dans le monde et son deuxième client dans la région, après les Emirats arabes unis. Ce chiffre est réalisé par les ventes d'agroalimentaire, de parfums et de produits pharmaceutiques

En retour, la France a importé, la même année, pour 2,24 milliards d'euros d'Arabie saoudite, constitués en totalité par le pétrole brut : le royaume est ainsi le septième fournisseur global de la France et son deuxième fournisseur pétrolier, après la Norvège.

Les principales sociétés françaises qui ont bénéficié, comme les autres sociétés, de l'adoption en 2000 d'une nouvelle législation saoudienne plus protectrice pour les investissements étrangers sont, pour l'essentiel, de grands groupes, comme Danone, Perrier, Saint-Gobain, Thalès, Schneider, ainsi que la Compagnie générale de géophysique.

Des projets sont en cours, impliquant Bouygues et TotalFinaElf. Le gouvernement saoudien a entrepris une vaste libéralisation de son marché intérieur, qui comportera notamment la privatisation de ses gisements gaziers. On décompte ainsi près de soixante filiales de sociétés françaises opérant dans le royaume, qui emploient environ douze mille personnes.

Les deux pays entretiennent une coopération militaire marquée notamment par l'escale du groupe aéronavale du Charles-de-Gaulle à Djeddah, en 2002.

Je souhaiterais, avant de conclure, rappeler que le royaume, fortement suspecté de financer le terrorisme international depuis les attentats du 11 septembre 2001, a été lui-même le théâtre d'attentats successifs en 2003, dont le plus meurtrier a visé, le 13 octobre 2003, un complexe résidentiel abritant des étrangers.

La monarchie s'est dotée, au mois d'août dernier, d'une loi réprimant sévèrement le blanchiment d'argent. C'est mesures, jugées « significatives » par les autorités américaines, ne suffiront sans doute pas à réduire la méfiance qui a émergé entre les Etats-Unis et l'Arabie saoudite. Cependant, le régime actuel, bien qu'ébranlé par l'évolution internationale et les difficultés économiques internes, semble assuré de sa stabilité, notamment du fait de l'absence d'une opposition structurée.

C'est pourquoi la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées vous recommande d'adopter le présent accord, qui contribuera à renforcer une présence économique française encore trop discrète dans une région à fort potentiel d'investissement. (Applaudissements.)

M. le président. Personne ne demande la parole dans la discussion générale ? ...

La discussion générale est close.

Nous passons à la discussion de l'article unique.

Discussion générale
Dossier législatif : projet de loi autorisant l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Royaume d'Arabie saoudite sur l'encouragement et la protection réciproques des investissements (ensemble un protocole)
Art. unique (fin)

Article unique

Est autorisée l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du royaume d'Arabie saoudite sur l'encouragement et la protection réciproques des investissements (ensemble un protocole), signé à Djeddah le 26 juin 2002, et dont le texte est annexé à la présente loi.

M. le président. Personne ne demande la parole ?...

Je mets aux voix l'article unique du projet de loi.

(Le projet de loi est adopté.)

Art. unique (début)
Dossier législatif : projet de loi autorisant l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Royaume d'Arabie saoudite sur l'encouragement et la protection réciproques des investissements (ensemble un protocole)
 

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ACCORD RELATIF À L'INTERDICTION

DES ARMES NUCLÉAIRES EN AMÉRIQUE LATINE

ET DANS LES CARAÏBES

Adoption d'un projet de loi

 
Dossier législatif : projet de loi autorisant la ratification de l'accord entre la République française, la Communauté européenne de l'énergie atomique et l'Agence internationale de l'énergie atomique relatif à l'application de garanties dans le cadre du traité visant l'interdiction des armes nucléaires en Amérique latine et dans les Caraïbes (ensemble deux protocoles),
Art. unique (début)

M. le président. L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi (n° 439, 2002-2003) autorisant la ratification de l'accord entre la République française, la Communauté européenne de l'énergie atomique et l'Agence internationale de l'énergie atomique relatif à l'application de garanties dans le cadre du traité visant l'interdiction des armes nucléaires en Amérique latine et dans les Caraïbes (ensemble deux protocoles). [Rapport n° 122 (2003-2004).]

Dans la discussion générale, la parole est à Mme la ministre.

Mme Noëlle Lenoir, ministre déléguée aux affaires européennes. Monsieur le président, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, le traité visant à l'interdiction des armes nucléaires en Amérique latine et dans les Caraïbes, dit « traité de Tlatelolco », a été signé en 1967 et a créé la première « zone exempte d'armes nucléaires » dans le monde. Il engage les Etats parties à utiliser à des fins pacifiques les installations nucléaires soumises à leur juridiction et à interdire sur leurs territoires respectifs l'essai, l'emploi, la fabrication, la production ou l'acquisition de toute arme nucléaire, ainsi que la réception, l'entreposage, l'installation, la mise en place ou la possession d'armes nucléaires.

C'est en application des engagements pris par la France en 1992, lorsqu'elle est devenue partie au protocole I additionnel à ce traité, qu'a été signé à Vienne, le 21 mars 2000, conjointement avec Euratom et l'Agence internationale de l'énergie atomique, l'AIEA, un accord relatif à l'application de garanties sur toutes les matières brutes et tous les produits fissiles spéciaux dans toutes les activités nucléaires pacifiques dans les territoires français d'Amérique latine et des Caraïbes.

Ce protocole I, auquel sont également parties la Grande-Bretagne, les Pays-Bas et les Etats-Unis, applique en effet le « statut de dénucléarisation » prévu par le traité aux territoires de la zone soumis à notre juridiction. Il s'agit, en l'espèce, de la Guyane, de la Martinique, de la Guadeloupe et de l'île Clipperton.

Le présent accord est par ailleurs complémentaire à l'accord existant entre la France, Euratom et l'AIEA relatif à l'application de garanties en France, accord qui est entré en vigueur le 12 septembre 1981.

Les effets concrets de l'accord sur nos activités nucléaires seront limités du fait de l'absence, à ce stade, d'installations nucléaires dans la zone couverte par le traité. En outre, notre liberté d'action en matière de dissuasion est préservée par les réserves formulées lors de l'adhésion au protocole I du traité, qui excluent des obligations résultant de ce protocole le transit d'armes nucléaires « par des territoires de la République française situés dans la zone du traité et à destination d'autres territoires de la République française ».

La France est très favorable au développement des zones exemptes d'armes nucléaires, sur la base d'arrangements librement négociés entre les Etats de la région considérée. Ce type d'approche régionale, qui prend en considération les enjeux de sécurité locaux, représente l'une des voies privilégiées du désarmement et de la non-prolifération, que nous souhaitons.

En garantissant qu'elle n'utilisera pas d'éventuelles installations nucléaires dans la zone à des fins autres que pacifiques, la France, Etat doté d'armes nucléaires, offre aux Etats parties au traité de Tlatelolco une contrepartie à leur engagement à ne pas se doter d'armes nucléaires. Ce faisant, la France, comme ses partenaires du traité de Tlatelolco, contribue activement à la paix et à la sécurité dans la région et dans le monde.

Telles sont, monsieur le président, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, les principales dispositions de l'accord entre la République française, Euratom et l'AIEA relatif à l'application de garanties dans le cadre du traité de Tlatelolco, qui fait l'objet du projet de loi aujourd'hui soumis à votre approbation. (Applaudissements.)

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. Xavier Pintat, rapporteur de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, l'accord signé le 21 mars 2000, qui nous est soumis aujourd'hui, découle directement de l'adhésion de la France, en sa qualité d'Etat disposant de territoires dans la région, à la zone exempte d'armes nucléaires d'Amérique latine et des Caraïbes instituée en 1967.

Il s'agit, par cet accord, de soumettre au contrôle de l'Agence internationale de l'énergie atomique le respect de l'engagement pris par notre pays de ne pas faire stationner d'armes nucléaires dans cette zone.

La France a certes déjà souscrit auprès de l'AEIA un accord de garanties, en 1978, mais un texte particulier était nécessaire pour traiter les questions spécifiques se rapportant à cet engagement valant pour nos territoires des Caraïbes et d'Amérique latine qui sont inclus dans cette zone exempte d'armes nucléaires.

L'accord pose le principe d'un contrôle international, par l'AIEA, des éventuelles activités nucléaires que nous pourrions conduire dans ces territoires. Il présente un caractère technique et reprend un certain nombre de dispositions habituelles dans les accords de garanties, telles que les modalités de comptabilité des matières concernées ou les conditions pratiques de déroulement des inspections. Il s'agit, enfin, d'un accord tripartite, associant la Communauté européenne de l'énergie atomique, afin d'assurer une coordination avec les contrôles prévus dans le cadre du traité Euratom.

Il paraît clair que la portée pratique de l'accord demeurera réduite dans la mesure où, pour l'essentiel, ses dispositions ne seront appliquées que dans l'éventualité, peu probable, où les matières nucléaires présentes dans les territoires français dépasseraient le seuil minimal fixé par le texte. Il convient aussi de préciser que le transit d'armes nucléaires par nos territoires n'est pas prohibé par les engagements auxquels nous avons souscrit.

La commission des affaires étrangères et de la défense a approuvé cet accord, qui constitue pour notre pays une obligation juridique dans le cadre du traité de 1967. Les trois autres pays-tiers qui ont des possessions dans la zone - les Etats-Unis, les Pays-Bas et le Royaume-Uni - ont d'ailleurs conclu un accord de garanties similaire avec l'AIEA.

Cet accord formalise surtout le soutien que la France apporte à la zone exempte d'armes nucléaires d'Amérique latine et des Caraïbes. Depuis que Cuba s'y est rallié à la fin de l'année 2002, elle regroupe désormais la totalité des trente-trois pays de la région.

A l'heure où le régime de non-prolifération est fortement ébranlé du fait du retrait nord-coréen du TNP cette année et du programme nucléaire iranien, il est important de préserver et de confronter de tels traités régionaux fondés sur le renoncement unanime d'une même région à l'arme nucléaire. Les questions de sécurité régionale sont au coeur du développement de la prolifération, que ce soit au Moyen-Orient ou en Asie. Aussi l'approche régionale est-elle un complément indispensable des traités multilatéraux à vocation mondiale.

C'est pourquoi la commission des affaires étrangères et de la défense vous demande, mes chers collègues, d'adopter le présent projet de loi. (Applaudissements.)

M. le président. La parole est à Mme Hélène Luc.

Mme Hélène Luc. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, les instruments internationaux révélateurs de la volonté des pays et des peuples de réglementer l'arsenal nucléaire sont des initiatives qu'il faut encourager et saluer. Ainsi, le projet de loi qui nous est aujourd'hui présenté s'inscrit dans cette logique et il convient que nous associions la France à cet effort.

Cependant, si la satisfaction peut paraître de mise, elle doit être contrebalancée par une analyse de l'état du nucléaire dans le monde et l'impuissance des instruments internationaux pour enrayer toute prolifération.

L'inquiétude est d'autant plus présente que les technologies employées de nos jours dans ce domaine permettent d'obtenir des armes nucléaires relevant quasiment du domaine du conventionnel.

L'exemple de la politique du gouvernement américain est des plus flagrant et doit être condamné. En effet, les Etats-Unis se fondent de plus en plus sur une doctrine faisant de l'arme nucléaire une nouvelle arme d'emploi. Ils reviennent ainsi sur les principes édictés par les engagements internationaux qui interdisent l'utilisation de cette arme contre un pays qui ne la posséderait pas.

De ce fait, la remise en cause de la thèse classique de la dissuasion met à mal la logique du désarmement et annonce l'avènement d'une nouvelle ère de prolifération nucléaire.

Ainsi, l'adoption par le Congrès américain du projet de budget de la défense pour 2004 est très préoccupante. Selon le journal Les Echos « Ce projet de loi donne le feu vert à la recherche et au développement de têtes nucléaires de moins de 5 kilotonnes de puissance, interdites pendant dix ans et dont les responsables de l'administration affirment qu'elles permettraient de détruire des stocks d'armes chimiques ou nucléaires enterrées. »

C'est également sans compter sur l'existence de pays détenteurs de l'arme nucléaire comme l'Iran - la signature récente du protocole additionnel au traité de non-prolifération par ce pays ne saurait à ce titre totalement nous rassurer quant à ses intentions - l'Inde, le Pakistan - ces deux pays ont engagé des discussions, ce qui constitue un point positif -, la Corée du Nord, la Libye ou encore Israël, pour n'en citer que quelques-uns, qui agissent en dehors de tout contrôle international.

En ce qui concerne la Corée du Nord, justement, nous venons d'apprendre, selon une dépêche de l'AFP, qu'elle avait offert de ne plus ni tester ni produire des armes nucléaires et de geler ses activités. Cette concession interviendrait indépendamment des négociations multilatérales difficilement engagées avec les Etats-Unis, le Japon, la Russie, la Corée du Sud et la Chine. Aujourd'hui, une délégation américaine non officielle se rend pour quelques jours sur son territoire pour visiter, semble-t-il, un complexe nucléaire. Toutes les négociations engagées avec la Corée du Nord, mais aussi avec tous les pays détenteurs de l'arme nucléaire, devraient se tenir sous l'égide de l'ONU et des organes issus des traités internationaux. Il y va d'un devoir de transparence, primordial dans ce domaine.

Dans ce contexte mondial, il est essentiel de rappeler que la course à l'armement nucléaire poursuivie par une ou quelques nations n'a jamais eu pour corollaire de ralentir, voire de stopper les efforts nucléaires des autres pays, notamment de ceux qui seraient visés par cette prolifération nucléaire. Bien au contraire, la conséquence qui en a toujours découlé a été de provoquer un rattrapage ou un contournement de la part des autres pays. Bien souvent, il est dit qu'il faut se servir des leçons de l'histoire pour ne pas réitérer ses erreurs. En matière d'arsenal nucléaire, la communauté internationale devrait mettre à profit cet adage !

Notre planète ne doit plus être l'enjeu d'escalades de la terreur entre surpuissances militaires dont le nucléaire serait la clé de voûte. Tous les pays ont pour responsabilité d'engager des politiques multidimensionnelles avec une réorientation de leurs politiques de défense.

Ainsi, en France - j'ai déjà eu l'occasion de le dire lors du vote du budget de la défense pour 2004, mais également lors du vote de la loi de programmation militaire -, nous avons le devoir d'opérer une réorientation de la politique de défense axée non seulement sur la protection du territoire national et européen, sur la promotion et sur l'intensification des actions humanitaires et de paix sous l'égide de l'ONU et du droit international, mais encore sur une augmentation des capacités d'intervention de la protection civile, s'accompagnant d'une augmentation des moyens humains et financiers.

Avec une stratégie essentiellement tournée vers la projection des forces, la France se positionne aujourd'hui comme un pays pour lequel les moyens militaires sont les moyens premiers du règlement des problèmes de sécurité, ce qui, au final, pourrait conduire à une logique du surarmement dans laquelle le nucléaire se fait la part belle, avec 20 % du budget pour 2004.

Les récentes déclarations du Premier ministre sur la possible réorientation de la doctrine nucléaire de la France, bien que démenties par lui-même et par l'Elysée, nous incitent à être très vigilants. Je réitère d'ailleurs ma demande qu'un débat ait lieu très rapidement au Parlement sur notre conception de la défense. Notre pays ne doit pas s'engager sur la voie d'un suivisme aveugle de la conception de défense imposée par les Etats-Unis.

La question du nucléaire est centrale et suscite toujours des inquiétudes justifiées. Le groupe communiste républicain et citoyen votera pour le projet de loi relatif à l'adoption de l'accord entre la France, la Communauté européenne, de l'énergie atomique et l'AIEA dans le cadre du traité visant l'interdiction des armes nucléaires en Amérique latine et dans les Caraïbes, car il s'inscrit dans une logique de maîtrise de l'armement nucléaire.

Toutefois, nous resterons très attentifs pour que cet accord et tous ceux qui sont censés réguler le nucléaire ne restent pas de simples accords de principe et pour que le nucléaire de défense ne devienne pas un instrument de guerre comme les autres. C'est un point qui retient d'ailleurs l'attention de tous les membres de la commission des affaires étrangères et de la défense et des forces armées.

M. le président. Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ? ...

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