Art. 21
Dossier législatif : projet de loi d'orientation et de programme pour l'avenir de l'école
Rappel au règlement

Articles additionnels après l'article 21

M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.

L'amendement n° 115 est présenté par M. Carle, au nom de la commission des affaires culturelles.

L'amendement n° 167 rectifié est présenté par M. Longuet, au nom de la commission des finances.

Tous deux sont ainsi libellés :

Après l'article 21, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Les lycées d'enseignement technologique ou professionnel peuvent mener, pour une durée maximum de cinq ans, une expérimentation permettant au conseil d'administration d'élire son président parmi les personnalités extérieures à l'établissement siégeant en son sein.

Cette expérimentation donnera lieu à une évaluation.

La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 115.

M. Jean-Claude Carle, rapporteur. Par cet amendement, la commission propose d'étendre aux lycées d'enseignement technologique ou professionnel, par la voie d'une expérimentation suivie d'une évaluation, le principe de la présidence du conseil d'administration de l'établissement par une personnalité extérieure, élue en son sein.

Cette disposition prend modèle sur l'organisation qui prévaut dans les établissements d'enseignement agricole, en application du code rural.

Plusieurs avantages peuvent en être attendus pour les lycées professionnels : elle permettrait de recentrer les fonctions du conseil d'administration sur ses missions essentielles de définition de la politique de l'établissement et de ses orientations stratégiques, de favoriser l'ouverture des établissements sur leur environnement, dans le souci notamment de faciliter l'insertion professionnelle des élèves et, enfin, de clarifier les fonctions du chef d'établissement.

Ce dernier serait recentré sur sa mission première d'animation pédagogique. La création du conseil pédagogique qu'il préside incite en effet à repenser son rôle. Le fait qu'il soit à la fois représentant de l'Etat et président du conseil d'administration rend sa position actuelle parfois complexe à gérer. Il serait ainsi dégagé d'une partie de ses charges, ce qui lui permettrait d'exercer pleinement ses attributions essentielles.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis, pour défendre l'amendement n° 167 rectifié.

M. Gérard Longuet, rapporteur pour avis. Cet amendement a le même objet que l'amendement qui vient d'être défendu.

M. le président. Le sous-amendement n° 654, présenté par M. Charasse, est ainsi libellé :

I. Dans le deuxième alinéa de l'amendement n° 115, remplacer le mot :

mener

par le mot :

décider

II. Dans le même alinéa, remplacer les mots :

, une expérimentation permettant au conseil d'administration d'élire

par les mots :

et à titre expérimental que le conseil d'administration élit

III. Dans le dernier alinéa, remplacer le mot :

donnera

par le mot :

donne

Ce sous-amendement n'est pas soutenu.

Le sous-amendement n° 227, présenté par M. Demuynck, est ainsi libellé :

Dans le second alinéa du texte proposé par l'amendement n° 115 pour insérer un article additionnel après l'article 21, remplacer le mot :

expérimentation

par le mot :

initiative

La parole est à M. Christian Demuynck.

M. Christian Demuynck. Je retire ce sous-amendement, monsieur le président.

M. le président. Le sous-amendement n° 227 est retiré.

Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements identiques nos115 et 167 rectifié ?

M. François Fillon, ministre. Le Gouvernement émet un avis défavorable.

Dans les établissements publics locaux d'enseignement, le chef d'établissement représente l'Etat, et c'est à ce titre qu'il préside le conseil d'administration. En effet, au-delà de sa mission de responsable administratif et pédagogique et de chef du personnel de son établissement, il est aussi le représentant du ministre dans la mise en oeuvre de la politique de l'établissement.

Même si je comprends bien l'idée qui sous-tend ces deux amendements identiques, je ne voudrais pas qu'un message ambigu soit adressé aux chefs d'établissement quant à la plénitude de leur rôle et la reconnaissance dont ils bénéficient de la part de la souveraineté nationale.

M. le président. La parole est à Mme Annie David, pour explication de vote.

Mme Annie David. Monsieur le ministre, pour une fois, je suis d'accord avec vous. (Exclamations amusées sur les travées de l'UMP.)

Après quelques amendements sur l'expérimentation pédagogique, nous voici en présence d'amendements visant à introduire une certaine forme d'expérimentation institutionnelle.

Relisons le texte de ces deux amendements : « Les lycées d'enseignement technologique ou professionnel peuvent mener, pour une durée maximum de cinq ans, une expérimentation permettant au conseil d'administration d'élire son président parmi les personnalités extérieures à l'établissement siégeant en son sein. Cette expérimentation donnera lieu à une évaluation. »

Sur l'appréciation de cette disposition, je vous rejoindrai, monsieur le ministre...

M. Ivan Renar. Les liaisons dangereuses ! (Sourires.)

M. François Fillon, ministre. C'est toute la différence entre nous : cela vous ennuie, et moi, pas du tout !

Mme Annie David. Je ne suis pas sûre que cela ne vous dérange pas...

Cette disposition ne serait destinée, dans un premier temps, qu'aux établissements d'enseignement technologique et professionnel. Pourquoi ?

La priorité accordée à ces établissements permet une rapide identification de l'objectif fixé : il s'agit de confier la responsabilité de la présidence du conseil d'administration des lycées d'enseignement professionnel et des lycées techniques à des « personnalités extérieures issues de l'environnement économique, social et culturel » des établissements. Cette expression recouvre en quelque sorte de façon pudique le qualificatif plus ordinaire de « chef d'entreprise », pour ne pas dire de « patron ».

En fait, cet amendement commun à la commission des affaires culturelles et à la commission des finances vise, ni plus ni moins, à assimiler l'enseignement technique et professionnel à un vivier de formation à court terme d'une main-d'oeuvre directement employable par les entreprises du bassin d'emploi proche des établissements concernés.

Ce ne sont pas là les arguments que vous avez avancés, monsieur le ministre. Aussi était-il important que je fasse part de notre point de vue.

Vous avez toujours privilégié la voie de l'enseignement privé, comme d'ailleurs celle de l'apprentissage. Mais considérons la question au regard des indicateurs de performance de chacun ?

Nous ne sommes pas opposés à l'existence de l'apprentissage, mais nous constatons que les jeunes ne sont pas si enthousiastes que cela pour choisir ce parcours de formation. S'ils préfèrent préparer un brevet d'études professionnelles, puis un baccalauréat professionnel et, ensuite, un diplôme de technicien supérieur dans un établissement public technique, il faut leur en laisser le droit.

L'orientation professionnelle précoce des jeunes, la restriction des filières proposées dans l'enseignement professionnel public sont autant de handicaps que vous cherchez, coûte que coûte, à nous faire valider.

La rénovation de l'enseignement professionnel et technique ne passe pas par un droit de regard renforcé des chambres consulaires, des fédérations professionnelles, du MEDEF ou de leurs groupements locaux sur son fonctionnement et ses évolutions.

Prenons un exemple : les lycéens de Cluses ou de Bonneville n'ont rien à gagner à ce que quelque employeur de l'industrie de décolletage soit partie prenante dans l'orientation générale des établissements techniques et professionnels du bassin de l'Arve, monsieur le rapporteur.

Nous nous opposons donc, sans la moindre hésitation, à ces deux amendements, nostalgiques d'un passé révolu, et nous invitons le Sénat à les rejeter.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. Jean-Claude Carle, rapporteur. Je tiens à préciser que cette disposition n'a aucun caractère obligatoire ou contraignant. Il s'agit simplement de donner aux établissements qui le souhaitent la possibilité de lancer une expérimentation qui sera évaluée au terme de quelques années.

M. Ivan Renar. Il vaudrait mieux retirer les amendements !

M. le président. La parole est à M. Jean-Luc Mélenchon, pour explication de vote.

M. Jean-Luc Mélenchon. En fait, il s'agit de savoir pourquoi cette expérimentation est faite et à quoi elle sert.

M. Ivan Renar. Et comment cela marchera !

M. Jean-Luc Mélenchon. Il faudra ensuite effectivement voir comment le système fonctionne.

Notons que, dans l'enseignement agricole, le système a donné des résultats qui sont considérés comme positifs. Je ne cache pas que je m'y suis intéressé, le but étant de rapprocher toutes ces structures et de les mettre sous une autorité politique unique, à condition cependant de le vouloir.

Au demeurant, soyons attentifs au fait que, même si nous utilisons des mots semblables, nous pouvons aboutir à des conclusions diamétralement opposées.

Ainsi, dire que l'on va mettre en place des présidents élus dans les établissements peut conduire aux conséquences suivantes : premièrement, on élit le président dans l'établissement ; deuxièmement, le budget est autonome ; troisièmement, l'établissement a un projet à caractère propre ; quatrièmement, il pratique sa propre pédagogie ; cinquièmement, il entre dans un système d'étalonnage qui permet de comparer les établissements entre eux. Finalement, vous avez non plus une éducation nationale, mais une éducation régionale, voire locale, construite autour d'un mythe, l'établissement d'enseignement professionnel qui formerait à un métier local ; or les métiers locaux n'existent pas.

Les formations et les qualifications professionnelles sont de plus en plus transversales. C'est d'ailleurs l'une des raisons pour lesquelles il est possible d'imaginer un statut commun à l'ensemble des établissements d'enseignement professionnel, agricole, maritime et autres.

Les différences entre les métiers sont extrêmement limitées. Par exemple, le secrétariat administratif est identique dans l'agriculture et dans l'industrie. Je pourrais citer d'autres exemples un peu moins caricaturaux, notamment dans les secteurs de la chimie ou de la mécanique.

C'est la raison pour laquelle M. le rapporteur doit nous dire à quoi va servir l'expérimentation et comment elle fonctionnera. Ce faisant, il dissipera l'impression d'approche idéologique que donne ce dispositif ; nous avons en effet l'impression que ce sont des raisons de principe qui conduisent la commission à considérer que le chef d'établissement ne serait pas le mieux placé pour faire vivre l'établissement et présider le conseil d'administration.

N'oublions pas que la tradition dans l'enseignement agricole n'est pas la même que dans l'enseignement professionnel public.

M. le président. La parole est à M. Christian Cointat, pour explication de vote.

M. Christian Cointat. Par nature, je ne suis pas très favorable à ce qui porte atteinte à l'organisation des pouvoirs publics et à la place de l'Etat.

Mais il est vrai que, si l'on veut que ce genre d'établissement fonctionne, il faut aussi se tourner vers l'extérieur.

Aussi, dans la mesure où il s'agit d'une expérimentation et où nous avons toujours défendu l'idée qu'il fallait améliorer les choses par l'expérimentation, en dépit de mes réticences, je voterai ces deux amendements identiques en espérant que M. le ministre n'en sera pas trop fâché ! (Sourires.)

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 115 et 167 rectifié.

Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe CRC.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.

(Le scrutin a lieu.)

M. le président. Personne ne demande plus à voter ?...

Le scrutin est clos.

(Il est procédé au comptage des votes.)

M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 142 :

Nombre de votants 329
Nombre de suffrages exprimés 226
Majorité absolue des suffrages exprimés 114
Pour l'adoption 201
Contre 25

Le Sénat a adopté.

En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 21.

L'amendement n° 176 rectifié bis, présenté par M. Détraigne, Mme G. Gautier, MM. Deneux,  J.L. Dupont,  Nogrix,  Badré,  C. Gaudin et  Pozzo di Borgo, est ainsi libellé :

Après l'article 21, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le dernier alinéa (5°) du I de l'article L. 241-4 est complété par une phrase ainsi rédigée :

« Toutefois les délégués départementaux de l'éducation nationale ne peuvent exercer leur mission que dans des établissements autres que ceux de leur commune de résidence. »

La parole est à M. Yves Pozzo di Borgo.

M. Yves Pozzo di Borgo. Cet amendement vise à faire en sorte que les délégués départementaux de l'éducation nationale n'exercent pas leur mission dans leur commune de résidence, et ce afin de respecter la neutralité qui sied à leur fonction.

A bien y réfléchir, j'ai peur que, tel qu'il est rédigé, cet amendement ne pose des problèmes dans les zones urbaines. Si la commission et le Gouvernement s'y déclarent favorables, il faudra sans doute le modifier.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Claude Carle, rapporteur. Il peut être en effet utile de préciser que les délégués départementaux chargés des missions d'inspection des établissements scolaires ne peuvent pas être à la fois juge et partie. Il y va de l'intérêt des délégués, des collectivités et des établissements concernés.

C'est pourquoi la commission émet un avis de sagesse positive sur cet amendement.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. François Fillon, ministre. Le Gouvernement s'en remet également à la sagesse du Sénat.

Je comprends fort bien la motivation de M. Pozzo di Borgo. Toutefois, la rédaction de cet amendement pose problème pour la ville de Paris. Il faudrait résoudre cette difficulté technique.

M. le président. La parole est à M. Yves Pozzo di Borgo.

M. Yves Pozzo di Borgo. En effet, mon amendement pose un problème pour Paris, mais aussi pour Lyon et Marseille, chacune de ses villes constituant une commune divisée en arrondissements.

En conséquence, je rectifie l'amendement n° 176 rectifié bis de façon à prendre en compte cette réalité.

M. le président. Je suis donc saisi d'un amendement n° 176 rectifié ter, présenté par M. Détraigne, Mme G. Gautier, MM. Deneux,  J.L. Dupont,  Nogrix,  Badré,  C. Gaudin et  Pozzo di Borgo, et ainsi libellé :

Après l'article 21, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le dernier alinéa (5°) du I de l'article L. 241-4 est complété par une phrase ainsi rédigée :

« Toutefois les délégués départementaux de l'éducation nationale ne peuvent exercer leur mission que dans des établissements autres que ceux de leur commune ou, à Paris, Lyon et Marseille de leur arrondissement de résidence. »

Je mets aux voix l'amendement n° 176 rectifié ter.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 21.

L'amendement n° 577, présenté par Mme David, MM. Renar,  Ralite,  Voguet et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :

Après l'article 21, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article L. 421-6 du code de l'éducation est ainsi rétabli :

« Art. L. 421-6. - Le Conseil scientifique et pédagogique a pour mission de favoriser, dans le respect de la liberté pédagogique des enseignants, la concertation entre les personnels pour coordonner les enseignements et les méthodes pédagogiques, l'évaluation des activités scolaires, la mise en place et le suivi de dispositifs adaptés pour lutter contre l'échec scolaire constaté au niveau de l'établissement.

« Il peut s'adjoindre à cet effet et en tant que de besoin des collaborations extérieures à l'établissement, notamment liées à la recherche en science de l'éducation et à la politique de la ville.

« Il coordonne ses travaux avec ceux de l'observatoire des scolarités correspondant et, peut faire appel au Fonds national de lutte contre les inégalités ».

La parole est à Mme Annie David.

Mme Annie David. Nous proposons de nouveau la création du Conseil scientifique et pédagogique qui réponde à nos voeux.

Le conseil pédagogique que vous proposez, monsieur le ministre, nous paraît négatif, car il crée, entre les professeurs, un ordre hiérarchique anti-statutaire et contraire à la bonne entente qui devrait régner dans les établissements, et impose, des choix pédagogiques aux enseignants.

Par ailleurs, en matière de lutte contre l'échec scolaire, force est de constater que toute généralisation institutionnelle d'un dispositif se traduit immanquablement par la création d'une filière de relégation.

C'est pourquoi il est nécessaire de développer, au niveau local, des outils nouveaux pour analyser les causes de l'échec scolaire au moment où il se manifeste et élaborer les dispositifs de nature à y porter remède.

C'est la raison pour laquelle nous proposons de mettre en place un Conseil scientifique et pédagogique dans chaque école ou groupement d'écoles, chaque établissement scolaire fonctionnant comme une véritable cellule de mise en commun des expériences, de réflexion collective et d'initiatives.

Regroupant des représentants des personnels, notamment enseignants, des parents et des élèves et fonctionnant indépendamment du conseil d'école ou du conseil d'administration, s'appuyant sur une solide politique de formation continue des personnels et travaillant en collaboration avec l'Observatoire des scolarités et le Fonds national de lutte contre les inégalités à l'école, que nous vous avons également proposé de créer hier par le biais d'un amendement tendant à insérer un article additionnel avant l'article 9, le Conseil scientifique et pédagogique serait chargé d'élaborer, de conduire et d'évaluer les résultats du projet pédagogique de l'établissement. Il pourrait, en outre, s'adjoindre autant que de besoin des collaborations extérieures à l'établissement, notamment en relation avec la recherche en sciences de l'éducation.

Monsieur le président, j'indique dès maintenant que le groupe CRC demandera un scrutin public sur cet amendement.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Claude Carle, rapporteur. La commission émet un avis défavorable sur cet amendement, qui vise à créer un Conseil scientifique et pédagogique dont les missions sont redondantes avec celles que doit remplir le Conseil pédagogique créé par l'article 21 du projet de loi.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. François Fillon, ministre. Le Gouvernement partage le même avis.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 577.

Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe CRC.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.

(Le scrutin a lieu.)

M. le président. Personne ne demande plus à voter ?...

Le scrutin est clos.

(Il est procédé au comptage des votes.)

M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 143 :

Nombre de votants 329
Nombre de suffrages exprimés 322
Majorité absolue des suffrages exprimés 162
Pour l'adoption 120
Contre 202

Le Sénat n'a pas adopté.

Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures quarante-cinq.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à dix-neuf heures quarante-cinq, est reprise à vingt et une heures quarante-cinq.)

M. le président. La séance est reprise.

Nous poursuivons la discussion des articles du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après déclaration d'urgence, d'orientation pour l'avenir de l'école.

Rappels au règlement

 
 
 

Mme Annie David. Je demande la parole pour un rappel au règlement.

M. le président. La parole est à Mme Annie David.

Mme Annie David. Nous en avons déjà longuement débattu en début d'après-midi, mais je souhaite revenir sur l'organisation de nos travaux.

Aujourd'hui vendredi, à vingt et une heures quarante-cinq, il reste 292 amendements à examiner sur le projet de loi d'orientation pour l'avenir de l'école, c'est-à-dire la moitié, ou presque, du total des amendements déposés sur ce texte.

Cet après-midi, par un véritable coup de force, le Gouvernement et la majorité sénatoriale ont imposé au pied levé la tenue d'une séance demain samedi. Du jour au lendemain, il a fallu que les groupes se réorganisent pour permettre la tenue d'un débat digne et efficace. Une telle organisation de dernière minute est d'autant plus difficile que ce samedi est le quarante-troisième anniversaire de la signature des accords d'Evian, signés le 19 mars 1962 et établissant la paix en Algérie. Nous sommes très attachés à cette date et aux cérémonies qui s'y rapportent, car il est toujours important de célébrer la paix.

Il reste donc 292 amendements à examiner et, à l'heure où je vous parle, rien n'indique que nos débats seront achevés samedi soir.

M. Fillon a eu besoin d'une première prolongation et j'ai tendance à penser qu'il en aura besoin d'une seconde pour faire adopter son texte, toujours dans l'urgence, toujours dans la précipitation, c'est le moins que l'on puisse dire, et, de surcroît, en catimini, avant la réunion de la commission mixte paritaire prévue pour le mardi 22 mars par un gouvernement sur ce point inébranlable.

Mme Hélène Luc. Mais non ! Le ministre va repousser cette date...

Mme Annie David. N'oublions pas que cette obstination mise à imposer, après l'urgence déclarée, après la précipitation des débats, la CMP ce jour-là, conduit le Sénat à légiférer dans des conditions inadmissibles pour toute personne convaincue de la nécessité du débat parlementaire.

Nous sommes en première et unique lecture d'un texte important, lui-même objet d'un débat public, rappelons-le. D'ailleurs chacun se revendique de ce débat public, sans pour autant qu'il en ait été beaucoup tenu compte.

Cette peur du temps et, disons-le, cette peur de la démocratie ont amené la majorité sénatoriale à emboîter le pas au Gouvernement en bafouant les prérogatives de son assemblée.

Monsieur le président, pouvez-nous nous confirmer que des séances seront prévues la semaine prochaine pour que nous puissions conclure ce débat dans des conditions respectables ?

M. Bernard Vera. Très bien !

M. le président. Je vous donne acte de votre rappel au règlement, madame David.

Vous parlez de précipitation. Je tiens simplement à rappeler que, cet après-midi, en quatre heures quarante-cinq minutes de débat, nous avons examiné en tout et pour tout quarante-deux amendements.

M. Jean-Claude Carle, rapporteur. Ce n'est pas de la précipitation !

M. le président. Je ne pense pas que cela puisse constituer le signe tangible d'une précipitation exagérée. Cela correspond à un rythme d'environ neuf amendements à l'heure, ...

Mme Annie David. A qui la faute ?

M. le président. ... soit un rythme à peu près convenable pour que chacun puisse, de manière tout à fait légitime, s'exprimer sur le fond.

Je suis dans l'impossibilité à cet instant de vous donner des précisions sur la suite de nos travaux. Il faut maintenant laisser les débats se poursuivre. Le Sénat a eu à se prononcer sur la demande formulée par le Gouvernement s'agissant de la tenue d'une séance demain, samedi. Nous ferons le point à l'issue de la séance de ce soir.

Une chose est sûre : nous avons délibéré conformément au règlement du Sénat, en respectant les procédures et en adoptant un rythme que je pense assez raisonnable pour l'examen des amendements.

Bien sûr, chacun d'entre nous a d'autres obligations. Mais nous souhaitons tous que ce débat puisse se dérouler dans les meilleures conditions. C'est en tout cas le voeu que je forme personnellement.

M. Jean-Claude Carle, rapporteur. Très bien !

Mme Annie David. Il est regrettable qu'à l'origine on ait prévu si peu de temps pour l'examen d'un tel texte !

M. Yannick Bodin. Je demande la parole pour un rappel au règlement.

Art. additionnels après l'art. 21
Dossier législatif : projet de loi d'orientation et de programme pour l'avenir de l'école
Art.  additionnels après l'art. 21

M. le président. La parole est à M. Yannick Bodin.

M. Yannick Bodin. Monsieur le président, vous venez vous-même d'en apporter la démonstration, nous avons eu, cet après-midi, la possibilité d'examiner un certain nombre d'amendements à un rythme qui a permis aux uns et aux autres de s'exprimer. C'est d'ailleurs ce que nous souhaitions, puisque nous ne voulions pas « bâcler » ce débat, malgré l'urgence déclarée.

Cela étant, il faut bien avouer qu'un tel rythme, que je n'hésite pas à qualifier de « sérieux », me fait craindre également que nous ne puissions pas avoir terminé nos travaux demain samedi. Je reste convaincu qu'il aurait été beaucoup plus sage, beaucoup plus raisonnable, d'interrompre nos travaux pendant le week-end pour les reprendre tranquillement à partir de lundi en prenant tout le temps nécessaire. C'était notre proposition, et elle reste valable.

Si nous devons siéger demain matin, vous serez obligé de lever la séance aux alentours de zéro heure trente, monsieur le président, et donc je crains fort que, demain soir, nous n'ayons à constater que nous sommes loin de la fin de nos travaux.

M. Jean-Claude Carle, rapporteur. Nous continuerons dimanche !

M. Yannick Bodin. Je tenais à formuler de nouveau ces quelques remarques qui prouvent que la méthode adoptée n'était pas la bonne.

M. le président. Acte vous est donné de votre rappel au règlement, monsieur Bodin.

Mes chers collègues, pour ne pas prendre davantage de retard, je vous propose de poursuivre la discussion des amendements tendant à insérer un article additionnel après l'article 21.

Rappel au règlement
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Intitulé du chapitre V

Articles additionnels après l'article 21 (suite)

M. le président. L'amendement n° 553, présenté par Mme David, MM. Ralite, Renar, Voguet et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Après l'article 21, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l'article L. 421-8 du code de l'éducation, il est inséré un article ainsi rédigé :

« Art. L.... ? Dans le cadre de la promotion de l'égalité des chances à l'école, il peut être constitué, dans chaque établissement public local d'enseignement, des équipes de réussite éducative composées de personnels de l'éducation nationale dont les effectifs devront être renforcés à cet effet. Ces équipes devront apporter un soutien éducatif, culturel, social et sanitaire aux enfants relevant de l'enseignement du premier et du second degré. »

La parole est à Mme Annie David.

Mme Annie David. Cet amendement est défendu, monsieur le président.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Claude Carle, rapporteur. Cet amendement est satisfait par les articles 128 et 129 de la loi du 18 janvier 2005 de programmation pour la cohésion sociale. Je demande donc aux auteurs de l'amendement de bien vouloir le retirer ; à défaut l'avis de la commission sera défavorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. François Fillon, ministre. Le Gouvernement partage l'avis de la commission.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 553.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. L'amendement n° 390, présenté par M. Assouline, est ainsi libellé :

Après l'article 21, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article L. 422-3 du code de l'éducation est complété par un alinéa ainsi rédigé :

"L'école supérieure des arts appliqués aux industries de l'ameublement et d'architecture intérieure (Boulle), l'école supérieure des arts appliqués (Duperré) et l'école supérieure des arts et industries graphiques (Estienne) sont transformées en établissements publics locaux d'enseignement, conformément aux dispositions de l'article L. 421-1, à la demande de la commune de Paris. Par dérogation aux dispositions de l'article L. 214-6, la commune de Paris assume la charge de ces établissements. Elle exerce aux lieu et place de la région les compétences dévolues par le présent code à la collectivité de rattachement."

La parole est à M. David Assouline.

M. David Assouline. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, Paris est la ville d'Europe qui offre le plus grand choix d'établissements d'enseignement supérieur, 263 établissements au total.

Parmi ceux-ci, notre capitale est fière d'accueillir trois établissements essentiels à la pérennité d'une vie artistique riche notamment d'excellence dans les métiers d'art.

Il s'agit d'abord de l'école supérieure des arts appliqués Duperré, fondée en 1856 et de laquelle sortent chaque année cent cinquante diplômés en métiers de la création.

Il s'agit ensuite de l'école Estienne, née en 1883 de la volonté de créer une école municipale professionnelle des arts et industrie du livre et qui forme en quatre ans des graveurs, des lithographes, des doreurs, des typographes et des relieurs.

Il s'agit enfin de l'école supérieure d'arts appliqués aux industries du meuble et de l'architecture intérieure, c'est-à-dire la célèbre école Boulle, créée en 1886.

Ces trois écoles, qui sont aujourd'hui des écoles municipales, ont besoin, pour se développer, à l'instar de la plupart des établissements d'enseignement, d'une réelle autonomie de gestion comme celle dont jouissent les établissements publics. Néanmoins, la relation privilégiée nouée entre ces écoles et la Ville de Paris, qui les a soutenues et accompagnées depuis leur création, a besoin d'être préservée, car elle a permis et doit continuer de permettre d'inscrire pleinement ces établissements dans la vie culturelle de la capitale.

C'est pourquoi l'amendement que je soumets à votre examen prévoit de compléter les dispositions de l'article L. 422-3 du code de l'éducation par un alinéa transformant les écoles Boulle, Duperré et Estienne en établissements publics locaux d'enseignement, ou EPLE, rattachés, par dérogation, à la Ville de Paris.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Claude Carle, rapporteur. Je suis personnellement très attaché au principe de subsidiarité. Si les élus parisiens le souhaitent, je ne vois donc pas d'inconvénient à ce que ces trois écoles d'arts appliqués puissent devenir des EPLE tout en conservant leurs liens historiques avec la Ville de Paris.

L'avis de la commission est donc favorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. François Fillon, ministre. Favorable.

M. le président. La parole est à M. Jean-Luc Mélenchon, pour explication de vote.

M. Jean-Luc Mélenchon. Je suis bien désolé pour mon camarade et ami David Assouline, mais je ne partage pas son appréciation. On peut, en effet, s'interroger : pourquoi ces trois écoles, et pas les autres ? Si pas les autres, pourquoi ? Si ces trois-là, pourquoi ? Comme je ne partage pas votre enthousiasme pour la subsidiarité dans ces domaines, monsieur le rapporteur, je ne suis pas favorable à cet amendement.

Je tenais à le dire, sinon ceux qui connaissent les liens qui m'unissent à David Assouline ne comprendraient pas pourquoi je ne lève pas la main en même temps que lui pour voter cet amendement.

M. le président. La parole est à M. David Assouline, pour explication de vote.

M. David Assouline. Peut-être y a-t-il une certaine méconnaissance du dossier dans l'appréciation que peuvent porter les uns et les autres.

Mes chers collègues, ces trois écoles d'arts appliqués sont aujourd'hui trois écoles municipales dont nous voulons au contraire qu'elles rentrent dans le droit commun, ce qui leur permettra de bénéficier de ce dont bénéficient les lycées à Paris, qui ont des classes préparatoires, des possibilités d'autonomie de gestion et de recherche de financement.

Alors, pourquoi elles ? Tout simplement parce qu'elles sont attachées historiquement à la Ville de Paris et au département de Paris ; elles coûtent très cher à la Ville de Paris et, d'ailleurs, l'autre collectivité territoriale n'a pas prévu dans son budget - et elle n'a pas l'intention de le faire - les sommes que la Ville de Paris a, elle, prévues de longue date à ce titre dans son budget.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis.

M. Gérard Longuet, rapporteur pour avis de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Je suis favorable à l'amendement de David Assouline, pour des raisons très particulières, qui honorent le principe de subsidiarité, monsieur Mélenchon.

Il est évident que la Ville de Paris a acquis une notoriété internationale dans le domaine des arts appliqués, notamment dans celui du meuble avec l'école Boulle et dans celui des arts et industries graphiques avec l'école Estienne.

Dès lors que la Ville de Paris revendique la responsabilité de ces établissements, nous aurions mauvaise grâce à ne pas la lui donner. Il faut au contraire soutenir très largement sa demande.

A cet égard, je voudrais rendre hommage à l'école Boulle, qui coopère avec de nombreuses régions de France, y compris la Lorraine, pour organiser la formation de ses élèves à partir de la restauration d'éléments du mobilier du patrimoine historique.

M. le président. La parole est à M. Yves Pozzo di Borgo, pour explication de vote.

M. Yves Pozzo di Borgo. A la mairie de Paris, je suis dans l'opposition. Toutefois, je voterai cet amendement et souscris à l'ensemble des arguments que David Assouline a développés.

Je n'ai pas consulté mes collègues de l'UMP conseillers de Paris, mais je pense qu'ils seraient d'accord avec moi.

M. le président. La parole est à Mme Hélène Luc, pour explication de vote.

Mme Hélène Luc. Je connais bien l'école Boulle pour l'avoir visitée et avoir rencontré son proviseur, qui présidait d'ailleurs le comité de défense des enseignements artistiques.

Cette école est loin de n'appartenir qu'à Paris : elle a un rayonnement national, sinon international.

Pour notre part, nous ne comprenons pas pourquoi la Ville de Paris souhaite prendre la charge financière de ces trois écoles. Mais vos raisons sont certainement légitimes, monsieur Assouline. C'est pourquoi nous ne prendrons pas part au vote.

M. le président. La parole est à M. Yannick Bodin, pour explication de vote.

M. Yannick Bodin. Les établissements qui, par cet amendement, bénéficieront du statut d'établissements publics locaux d'enseignement sont actuellement sous la responsabilité de la Ville de Paris. J'en prends acte.

Cela m'amène à parler du dialogue entre les différentes collectivités territoriales. En effet, la Ville de Paris souhaite que les autres établissements qui lui sont rattachés, en particulier un certain nombre de lycées professionnels, soient transférés ou « récupérés » par la région d'Ile-de-France.

A titre d'information, l'adoption de cet amendement - pour ma part, je m'en remets à la sagesse du Sénat, si j'ai le droit de m'exprimer ainsi ! (Sourires.) - ne manquera pas d'avoir des conséquences sur l'enthousiasme de la région d'Ile-de-France pour « récupérer » les autres établissements.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 390.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 21.

L'amendement n° 306, présenté par MM. Assouline,  Bodin,  Dauge,  Guérini,  Lagauche,  Mélenchon,  Repentin et  Signé, Mme Tasca, M. Todeschini, Mme Voynet et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Après l'article 21, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Dans le second alinéa de l'article L. 531-1, après les mots : « des ressources de la famille » sont insérés les mots : « et de la distance entre l'établissement scolaire et le domicile de l'élève » et après les mots : « code de la sécurité sociale », sont insérés les mots : « et du coût du transport entre le domicile et l'établissement scolaire. »

La parole est à M. David Assouline.

M. David Assouline. Cet amendement s'inscrit dans le débat que nous avons depuis quelques jours sur l'ambition affichée par le Président de la République dans ce projet de loi, qui est de fixer des objectifs importants pour lutter contre l'échec scolaire et renforcer l'égalité des chances dans le système scolaire.

Nous en sommes loin, nous avons essayé de le démontrer, d'autant que rien n'a été fait pour augmenter le montant des bourses octroyées sur critères sociaux.

Comment atteindre ces louables objectifs, que toutes les formations attachées à l'école de la République partagent, sans améliorer l'aide sociale aux élèves ?

Notre amendement vise à compléter le code de l'éducation en ce sens. Ainsi, pour une famille, le coût de prise en charge d'un élève augmente avec son âge, d'autant que l'établissement qui doit l'accueillir, du fait d'une spécialisation particulière par exemple, peut se trouver éloigné du domicile familial.

Il convient donc d'intégrer, dans les critères d'attribution des bourses, le coût du transport entre le domicile et l'établissement scolaire.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis.

M. Gérard Longuet, rapporteur pour avis. Monsieur le président, au nom de la commission des finances, j'oppose l'article 40 de la Constitution.

M. le président. En conséquence, l'amendement n° 306 n'est pas recevable.

chapitre V

Dispositions relatives à la formation des maîtres

Art.  additionnels après l'art. 21
Dossier législatif : projet de loi d'orientation et de programme pour l'avenir de l'école
Art. additionnels avant l'art. 22

M. le président. L'amendement n° 116, présenté par M. Carle, au nom de la commission des affaires culturelles, est ainsi libellé :

Dans l'intitulé de ce chapitre, après le mot :

relatives

insérer les mots :

aux formations supérieures et

La parole est à M. le rapporteur.

M. Jean-Claude Carle, rapporteur. Il s'agit d'un amendement de conséquence avec les nouvelles dispositions qui ont été introduites concernant les formations supérieures.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. François Fillon, ministre. Avis favorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 116.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, l'intitulé du chapitre V est ainsi modifié.