politique de prévention du cancer de l'utérus

M. le président. La parole est à M. Philippe Richert, auteur de la question n° 754, adressée à M. le ministre de la santé et des solidarités.

M. Philippe Richert. Ma question, adressée à M. le ministre de la santé et des solidarités, se rapporte au dépistage du cancer et, plus particulièrement, à celui du col de l'utérus.

M. le Président de la République a fait de la lutte contre le cancer une priorité nationale, au travers notamment du plan présenté le 24 mars 2003.

Je voudrais ensuite souligner qu'une campagne de dépistage du cancer du col de l'utérus, intitulée « EVE », est menée dans le Bas-Rhin depuis janvier 1994. Elle a été étendue au Haut-Rhin en septembre 2001, son objet étant d'optimiser le dépistage par une meilleure participation de la population et par une assurance qualité couvrant l'ensemble des étapes du processus.

Grâce à la collaboration de tous les acteurs, professionnels de santé, organismes d'assurance maladie et conseils généraux, ce programme est un succès : en dix ans, environ 800 cancers ont pu être évités dans le Bas-Rhin. Le rapport du nombre de lésions précancéreuses découvertes sur celui des cancers diagnostiqués ne cesse d'augmenter, ce qui témoigne de l'efficacité croissante de la campagne. Dans le Bas-Rhin, le taux de participation des femmes atteint 73 % à trois ans et 86 % à cinq ans, ce qui est comparable aux résultats obtenus dans les pays du nord de l'Europe, qui sont des références et des pionniers en matière de dépistage.

Or, nous le savons tous, la politique de prévention relève à nouveau de la compétence de l'Etat depuis l'entrée en vigueur des lois de décentralisation. Cela amène les responsables de l'association de dépistage à s'interroger, en particulier, sur la possibilité de pérenniser l'action entreprise et sur l'avenir du dépistage du cancer du col de l'utérus en France.

En effet, le groupe technique national qui réfléchissait à l'optimisation du dépistage dans le cadre du plan cancer ne se réunit plus depuis octobre 2004. En outre, aucune information émanant de l'Institut national du cancer ne nous est parvenue depuis la lettre du 19 octobre 2004, et l'appel à candidatures pour le démarrage de nouveaux programmes expérimentaux ne semble pas avoir été diffusé.

Cela me conduit à poser les questions suivantes, monsieur le ministre : quelle politique de prévention du cancer du col de l'utérus sera mise en place, et dans quels délais ? Dans quelle mesure sera-t-il tenu compte de l'expérience alsacienne, une expérience parmi d'autres mais qui, me semble-t-il, en référence à ce qui se pratique dans le nord de l'Europe, se révèle assez exemplaire ?

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Christian Estrosi, ministre délégué à l'aménagement du territoire. Monsieur le sénateur, vous avez attiré l'attention du ministre de la santé et des solidarités sur le problème du cancer du col de l'utérus et sur l'importance de la mise en oeuvre de son dépistage, qui est, comme vous venez de le rappeler, pratiqué avec succès dans votre département depuis plus de dix ans.

L'incidence estimée de ce cancer a fortement diminué en France, comme dans d'autres pays européens, puisqu'elle est passée de 6 000 nouveaux cas en 1975 à 3 400 en 2000. Dans le même temps, la mortalité a régressé, mais dans de moindres proportions, passant de 3,3 pour 100 000 à 1,9 pour 100 000, soit un nombre estimé de décès un peu supérieur à 1000 en 2000.

La diminution de l'incidence de ce cancer est liée en majeure partie au dépistage spontané, très largement répandu en France depuis plus de vingt ans. L'ANAES, l'Agence nationale d'accréditation et d'évaluation en santé, recommande, pour les femmes âgées de vingt-cinq ans à soixante-cinq ans, deux frottis à un an d'intervalle, puis, s'il n'y a pas d'anomalie, un frottis tous les trois ans. En France, 5,5 millions de frottis ont été réalisés en 2000, couvrant en théorie 57 % de la population cible, à savoir 16 millions de femmes.

Toutefois, on constate des disparités dans la participation à ce dépistage, qui sont liées non pas à des problèmes d'ordre économique, puisqu'il est pris en charge par l'assurance maladie, mais plutôt à des réticences d'ordre sociologique ou culturel.

Par ailleurs, l'accès au dépistage n'est pas égal sur l'ensemble du territoire, le dépistage étant le plus souvent réalisé - dans 80 % à 90 % des cas - par des gynécologues médicaux, qui sont présents surtout en milieu urbain. Les généralistes, pas ou peu formés à cette pratique (M. René-Pierre Signé s'étonne), n'assurent que de 10 % à 20 % des dépistages.

Compte tenu de ces éléments, de la fréquence du dépistage spontané et donc de la faiblesse du gain qui serait permis par un dépistage organisé, le groupe technique national du cancer du col de l'utérus, placé auprès du ministère de la santé, recommande dans un premier temps de mettre en place des actions favorisant, d'une part, l'accès à ce dépistage, d'autre part, la participation.

La mesure retenue dans le cadre du plan Cancer - elle porte le numéro 26 - consiste à favoriser le dépistage individuel du cancer du col de l'utérus par les dispositions suivantes : élargissement de l'offre de frottis à de nouveaux acteurs pour mieux atteindre les femmes non suivies par les gynécologues ; développement des actions auprès des femmes ; facilitation de l'utilisation du test de papillomavirus.

Considérant cet axe du plan Cancer, le groupe technique national a proposé les actions suivantes : formation des médecins généralistes et des sages-femmes à la pratique du frottis ; valorisation de celle-ci par sa codification ; développement de campagnes ciblées en direction des femmes qui ne participent pas au dépistage ; systématisation de la pratique du frottis pendant la grossesse ; réalisation d'études sur les freins au dépistage. Il n'existe pas, actuellement, de consensus sur la « valeur ajoutée » de l'utilisation du test de papillomavirus pour un dépistage en population.

Les expérimentations de dépistage organisé déjà engagées dans certains départements ne sont pas remises en cause. En revanche, la mise en place des actions favorisant le dépistage du cancer du col de l'utérus est prévue pour 2006, notamment par le biais de l'Institut national du cancer, dont la convention constitutive a été publiée le 26 juin 2006, concernant les études, les campagnes d'information et l'expertise sur les méthodes de dépistage.

En outre, le ministère chargé de la santé a engagé avec les organismes d'assurance maladie une réflexion sur la cotation du frottis, ainsi que sur les méthodes et les modalités de formation des médecins généralistes et des sages-femmes.

Monsieur le sénateur, le Gouvernement confirme donc son engagement dans la lutte contre le cancer, y compris en matière de dépistage du cancer du col de l'utérus, et met en oeuvre progressivement les mesures retenues au titre du plan Cancer.

A cet effet, il a décidé d'anticiper la généralisation du dépistage organisé du cancer colorectal, dont l'incidence est nettement plus élevée, avec 36 000 nouveaux cas et 16 000 décès en 2000. Par ailleurs, il sera proposé au Parlement d'inscrire 22 millions d'euros de mesures nouvelles dans le projet de loi de finances pour 2006 au titre du plan Cancer, afin que sa montée en charge puisse se poursuivre.

M. le président. La parole est à M. Philippe Richert.

M. Philippe Richert. Je voudrais tout d'abord remercier M. le ministre de ces précisions montrant que le Gouvernement n'entend pas se désintéresser d'un dossier qui concerne toutes les familles.

Comme cela a été souligné, on enregistre chaque année quelque mille décès dus au cancer du col de l'utérus. C'est à chaque fois un drame, une famille endeuillée, mais les nouvelles que vous nous avez annoncées permettent, à mon sens, de reprendre confiance.

Je voudrais maintenant rappeler brièvement que, lorsque nous avions décidé, dans cet hémicycle, le transfert des collectivités territoriales à l'Etat de la responsabilité des politiques de prévention, s'agissant en particulier du cancer, le Gouvernement avait affirmé qu'il convenait d'homogénéiser l'ensemble des pratiques sur le territoire national, le niveau de performance n'étant pas le même partout.

A cet égard, j'ai indiqué tout à l'heure que, dans le Bas-Rhin, le taux de participation au dépistage des femmes concernées atteignait 86 % à cinq ans, chiffre particulièrement élevé, des taux comparables étant obtenus dans les pays d'Europe du Nord. Cela signifie que, lorsque l'on met en place, sur la durée, une politique de prévention, on parvient à atteindre la quasi-totalité des femmes, tant en milieu urbain qu'en milieu rural, et ce dans toutes les strates sociologiques.

Je crois donc que nous ne devons pas perdre de vue que, s'agissant de cancers très traumatisants, encore souvent mortels, nous devons garder pour objectif de faire reculer un fléau qui continue de frapper de très nombreuses femmes. Sur ce plan, les précisions que vous avez apportées concernant les inscriptions budgétaires et la volonté du Gouvernement d'intensifier son action, s'agissant notamment du cancer colorectal, permettent d'espérer que demeure fructueux, demain, le partenariat entre l'Etat et, particulièrement, les départements.

Je vous remercie de votre réponse, monsieur le ministre.

conditions de versement de l'apl

M. le président. La parole est à M. Thierry Repentin, auteur de la question n° 762, transmise à M. le ministre de l'emploi, de la cohésion sociale et du logement.

M. Thierry Repentin. Cette question relative aux aides personnalisées au logement comporte deux volets.

Je voudrais tout d'abord attirer l'attention de M. le ministre sur les conséquences d'un arrêté, en date du 30 avril 2004, fixant un seuil de 24 euros par mois en deçà duquel l'aide personnalisée au logement n'est plus versée.

Cette mesure, comme le relève l'excellent Médiateur de la République, M. Jean-Paul Delevoye, dans une lettre adressée spontanément au ministre chargé du logement, est vécue par les personnes concernées comme un « déni de droit ».

La conséquence de l'application de cette réglementation nouvelle, pour les foyers modestes, est la privation d'une prestation d'un montant non négligeable, puisqu'il est de près de 290 euros par an. Quelque 115 000 foyers français sont frappés, chiffre qui devrait d'ailleurs augmenter au 1er janvier 2005.

Le profil type du ménage concerné est le couple avec deux enfants disposant de revenus mensuels inférieurs à 1 900 euros par mois. On ne peut pourtant pas dire qu'il soit très riche ! Pour un célibataire, la mesure s'applique dès lors qu'il perçoit un salaire proche du SMIC sans que ce niveau soit atteint.

En outre, l'aide personnalisée au logement a fait l'objet, au 1er janvier 2003, d'une actualisation des barèmes tenant compte de l'évolution de la valeur moyenne de l'indice des prix à la consommation et de la réévaluation des loyers plafonds. Cependant, l'actualisation de ces paramètres n'a pas permis de faire évoluer le montant de l'APL au même rythme que le coût de la vie, d'où une perte de pouvoir d'achat dès 2003.

De plus, en 2004, ces évolutions ont été contrebalancées par des mesures d'économies portant sur les barèmes décidées par le Gouvernement, pour un montant de 18 millions d'euros.

Tout cela induit un décalage croissant entre l'inflation et la progression des aides au logement.

Monsieur le ministre, eu égard aux difficultés financières auxquelles est confronté un nombre grandissant de ménages aux revenus modestes ou moyens, le Gouvernement entend-il revenir sur l'arrêté du 30 avril 2004 ?

Par ailleurs, compte-t-il réévaluer dans de justes proportions, au 1er janvier 2005, les aides au logement, qui concernent près de six millions de foyers, sachant que ces derniers sont locataires de logements relevant tant du parc privé que du parc public et situés dans les grands centres urbains, dans les agglomérations moyennes ou même dans des zones où la situation est moins tendue ?

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Christian Estrosi, ministre délégué à l'aménagement du territoire. Monsieur le sénateur, permettez-moi tout d'abord de vous dire que M. Jean-Louis Borloo, que vous avez interrogé sur la revalorisation des aides personnelles au logement et sur les modalités de versement de celles-ci, vous prie de bien vouloir excuser son absence.

Le seuil en deçà duquel les aides personnelles au logement ne sont pas versées n'avait pas été actualisé depuis juillet 1988. Le relèvement, au printemps 2004, de ce seuil de 15 euros à 24 euros, après plus de quinze ans d'absolue stabilité, a donc suivi avec beaucoup de retard l'inflation enregistrée au cours de cette période. Il convient d'ajouter que 98 % des 6 millions de bénéficiaires des aides personnelles au logement ne sont pas concernés par cette mesure.

Lors de la dernière actualisation des aides personnelles au logement, le Gouvernement a souhaité affecter en priorité les moyens budgétaires supplémentaires à la revalorisation générale des prestations. Cette actualisation représente un coût de 220 millions d'euros par an, dont 120 millions d'euros sont imputés sur le budget du logement. Il s'agit d'un effort financier important, venant s'ajouter à un montant de prestations annuelles d'aides personnalisées au logement et d'allocations de logement qui dépasse aujourd'hui 14 milliards d'euros, plus de 5,5 milliards d'euros étant supportés par le budget du logement.

Je puis vous assurer que le Gouvernement travaille actuellement à une revalorisation du barème des aides personnelles et qu'il s'efforcera de tenir compte des remarques formulées par l'ensemble des acteurs du secteur du logement.

En outre, je tiens à mettre en exergue l'engagement très fort du Gouvernement en faveur de l'amélioration des conditions de logement des personnes disposant de ressources modestes.

Les difficultés que rencontrent nombre de nos concitoyens pour se loger sont dues, en grande partie, à la carence de l'offre locative. Celle-ci résulte de l'insuffisance de la construction de logements sociaux au cours de la dernière décennie.

L'action menée par le Gouvernement pour combler ce déficit de logements a déjà conduit à des résultats tangibles : avec 363 000 mises en chantier au cours de l'année 2004, notre pays a, en effet, connu un niveau de production inégalé depuis plus de vingt ans.

Ce haut niveau d'activité profite, en premier lieu, aux ménages à revenus modestes. Ainsi, 75 000 logements locatifs sociaux ont été financés en 2004, contre 58 000 logements en 2003, soit une hausse de 30 %. A titre de comparaison, seulement 42 000 logements sociaux ont été financés en 2000. La production de logements locatifs privés à loyers maîtrisés a également progressé, passant de 17 000 logements en 2003 à plus de 25 000 logements en 2004, soit une augmentation de près de 50 %.

Mais l'ambition du Gouvernement se situe encore au-delà. La loi du 18 janvier 2005 de programmation pour la cohésion sociale définit les moyens nécessaires à la réalisation de 500 000 logements locatifs sociaux entre 2005 et 2009, hors programme national de rénovation urbaine. La loi de programmation prévoit également de mobiliser le parc locatif privé, grâce aux aides de l'Agence nationale pour l'amélioration de l'habitat, l'ANAH. Ainsi, 200 000 logements privés à loyers maîtrisés seront produits, au cours des cinq prochaines années, et 100 000 logements vacants seront remis sur le marché locatif.

Le Gouvernement a également mené à bien une réforme majeure de l'accession sociale à la propriété en améliorant le barème du prêt à taux zéro et en ouvrant ce dispositif à l'acquisition de logements anciens. Chaque année, plus de 200 000 ménages seront aidés par l'Etat à devenir propriétaires, ce qui encouragera la mobilité dans le parc locatif.

L'augmentation de l'offre de logements accessibles aux ménages disposant de ressources modestes, que favorise l'action menée par le Gouvernement, contribuera à modérer les tensions sur les loyers.

M. Roland Courteau. Ce n'est pas la question !

M. le président. Mais M. le ministre délégué sait faire de la politique ! (Sourires.)

La parole est à M. Thierry Repentin.

M. Thierry Repentin. Monsieur le président, dans l'ancien gouvernement il y avait un ministre du logement chargé de cette question, et il n'y a pas eu de revalorisation des aides au logement. Comme, dans le nouveau gouvernement, il n'y a plus de ministre spécifique, je pensais qu'il y aurait peut-être une revalorisation !(Sourires sur les travées du groupe socialiste.)

Monsieur le ministre, je vous parle de perte de pouvoir d'achat et vous me répondez que le nombre de constructions de logements sociaux augmente.

Ce sera un argument difficile à opposer à ceux qui ont des difficultés à se loger dans les grands ensembles, y compris à Marseille, monsieur le président, dans les quartiers Nord, à la Belle de Mai, ou du côté du Merlan.

Monsieur le ministre, quand l'un de vos administrés vous dira qu'il a du mal à payer son loyer, allez donc lui répondre qu'on lui construira des logements en plus grand nombre, mais ailleurs ! Vous lui aurez certes répondu, mais à côté.

Je vous donne rendez-vous dans quelques mois, à l'occasion de l'examen en première lecture du projet de loi « Habitat pour tous ». Nous ne pourrons pas faire l'impasse sur un sujet qui préoccupe six millions de familles, celles qui ont de plus en plus de difficultés à honorer leur loyer. Je crains que ces difficultés n'aient contribué à ce qu'un dimanche, pas si éloigné, la réponse apportée par les Français à une fameuse question n'ait pas été à la hauteur de nos espérances sur un sujet pourtant majeur.

M. le président. Vous savez, monsieur Repentin, les choses changent et les gens évoluent.

Dans la ville de Gap, 55 % des électeurs avaient voté non au référendum sur le traité constitutionnel. Or, dans la même ville, dimanche dernier, ils ont été 55 % aussi pour élire un conseiller général qui n'est pas de votre bord. Ce qui prouve que les changements peuvent survenir très rapidement. (Sourires.)

Donc, restons modestes sur les résultats électoraux.

M. René-Pierre Signé. Mais cela n'a rien à voir, monsieur le président !

M. le président. Monsieur Signé, nous savons tous que, dans la Nièvre, et depuis des années, vous vous sortez très bien d'affaire. (Nouveaux sourires.)

mise en oeuvre de la loi sur la forêt

M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Carle, auteur de la question n° 755, adressée à M. le ministre de l'agriculture et de la pêche.

M. Jean-Claude Carle. Monsieur le ministre, vous le savez mieux que quiconque, la forêt constitue un enjeu économique important, un enjeu d'avenir pour notre pays.

La forêt française, publique et privée, représente en termes d'emplois, près de 35 000 postes si l'on compte les seules activités de sylviculture et d'exploitation.

Ce sont 51 millions de mètres cubes qui sont exploités chaque année, pour une valeur ajoutée qui représente 1,5 % de la valeur ajoutée nationale, tandis que seulement 0,12 % du budget de l'Etat est consacré à la politique forestière.

C'est le premier maillon de la filière bois, qui emploie 450 000 personnes, depuis la plantation jusqu'aux produits finis, en passant par les phases de transformation, et qui doit faire face à la concurrence très rude des pays du nord et de l'est de l'Europe.

L'exploitation des sous-produits contribue également à la promotion d'énergies renouvelables. Les installations de chaudières à bois se développent de plus en plus dans notre pays, dans les bâtiments publics comme dans les logements privés.

La forêt joue également un rôle de premier plan dans la préservation de notre environnement, de notre écosystème.

Au mois de juillet 2001, le Parlement a adopté, à l'unanimité, la loi forestière. Celle-ci comprend plusieurs volets majeurs, dont, d'une part, la mise en place de documents de gestion durable relatifs à la forêt privée et, d'autre part, le développement du rôle de la forêt dans la préservation de la biodiversité.

Ces missions ont été confiées aux centres régionaux de la propriété forestière, les CRPF. Afin de les mettre en oeuvre, le déploiement de quatre-vingts nouveaux ingénieurs et techniciens forestiers avait été prévu.

Le précédent ministre de l'agriculture s'était engagé, lors de la présentation du projet de budget pour 2004, à effectuer ces recrutements à hauteur d'un tiers par an.

Si, en 2004, 30 emplois ont effectivement été pourvus, aucun n'a été programmé pour cette année.

L'interruption de cette procédure signifierait, à terme, l'abandon de ce programme.

Je me dois d'ajouter que l'Office national des forêts, l'ONF perd, essentiellement par départ en retraite, 215 emplois par an. Actuellement, seules 350 personnes gèrent les 14,5 millions d'hectares de la forêt en France, soit 27,7 % du territoire national.

Aussi, je souhaite connaître vos intentions, monsieur le ministre. Ce programme est-il supprimé, suspendu, ou bien allez-vous le poursuivre en inscrivant les postes budgétaires nécessaires ?

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Dominique Bussereau, ministre de l'agriculture et de la pêche. Monsieur Carle, vous avez raison d'interroger le Gouvernement sur la forêt, car elle constitue un patrimoine économique et environnemental majeur. Vous savez bien, monsieur le sénateur, vous qui êtes élu d'un département forestier, que la forêt augmente en superficie chaque année.

La forêt française, par son étendue, est la troisième d'Europe. Chaque année, elle s'accroît de 40 000 hectares, elle couvre le quart du territoire national. La forêt contribue positivement au respect de nos engagements internationaux en termes de réduction des gaz à effet de serre et de maintien de la biodiversité.

Le 27 avril dernier, j'ai présenté une communication en conseil des ministres sur la politique forestière. Les perspectives reposent notamment sur une meilleure valorisation de la forêt, source de croissance et d'emplois. Il s'agit également de conforter la gestion durable de nos forêts.

J'ai veillé au maintien de mesures forestières dans le règlement de développement durable pour la période 2007-2013.

L'Etat prolonge aussi son engagement en faveur de la reconstitution des forêts sinistrées par les tempêtes des 26 et 27 décembre 1999. Ainsi, 585 millions d'euros ont déjà été mobilisés, ce qui représente en cinq ans 64 % du plan que Lionel Jospin avait fixé sur dix ans.

Le projet de loi d'orientation agricole qui sera examiné par la Haute Assemblée à partir du mois d'octobre prochain comportera d'autres éléments. Il y aura notamment des mesures fiscales concernant les chaudières à bois. J'ai demandé au Premier ministre que, lors de la prochaine réunion du Comité interministériel pour l'aménagement et le développement du territoire, au mois de juillet, soit examinée une partie consacrée à la forêt.

Par ailleurs, les centres régionaux de la propriété forestière, les CRPF, qui sont des établissements publics à caractère administratif, ont vu leurs compétences élargies par la loi d'orientation sur la forêt.

L'obligation de plan simple de gestion est étendue progressivement aux propriétaires de 10 à 25 hectares. De nouveaux documents de gestion sylvicole doivent être élaborés. Ces mesures accroissent ainsi les compétences et les responsabilités des CRPF.

Pour tenir compte de cette évolution, comme vous l'avez rappelé, monsieur Carle, trente emplois ont pu être ouverts en 2004, malgré un contexte budgétaire contraint. Ces nouveaux emplois renforcent les capacités des CRPF pour assurer la mise en oeuvre des nouveaux documents de gestion sylvicole, dont la montée en puissance est attendue dans les années à venir, et permettre ainsi à un plus grand nombre de propriétaires de présenter des garanties de gestion durable.

Toutefois, nous sommes dans un contexte difficile. Je connais bien l'ancien ministre délégué au budget, Jean-françois Copé, qui, malheureusement, n'a pas pu autoriser l'ancien ministre de l'agriculture à opérer de nouveaux recrutements en 2005, et j'en suis navré, dans le contexte budgétaire qui était celui de la préparation de la loi de finances appliquée aujourd'hui. Nous arrivons à la préparation du projet de loi de finances pour 2006, et je resterai très vigilant sur toutes ces questions

Nous avons, en effet, besoin de conforter la gestion durable des propriétés forestières privées. Il faut donc que nous trouvions le moyen, malgré ce contexte budgétaire difficile, de mettre en oeuvre sur le terrain les moyens humains que vous avez, à juste titre, monsieur le sénateur, réclamés.

M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Carle.

M. Jean-Claude Carle. Je tiens à remercier M. le ministre des précisions qu'il a bien voulu apporter et de l'intérêt renouvelé qu'il porte à la forêt, secteur important de notre économie.

Je regrette, bien sur, que le contexte budgétaire ne permette pas de poursuivre le plan de création de postes mis à disposition des CRPF.

Je souhaite que, lorsque les conditions budgétaires le permettront, vous puissiez poursuivre la mise en place de ce plan, car la valorisation du patrimoine forestier est étroitement liée à son entretien et à sa bonne exploitation.

Monsieur le ministre, j'ai pris acte de votre vigilance, je resterai moi-même très vigilant.

contrats d'agriculture durable

M. le président. La parole est à M. René-Pierre Signé, auteur de la question n° 756, adressée à M. le ministre de l'agriculture et de la pêche.

M. René-Pierre Signé. Je souhaite attirer votre attention, monsieur le ministre, sur les contrats d'agriculture durable, les CAD.

Je souhaite, plus particulièrement, vous interroger sur le devenir des parcelles engagées dans les anciens programmes « opérations locales agri-environnementales », les OLAE, qui ont été contractualisées dans des contrats territoriaux d'exploitation, ou CET.

Ces surfaces engagées par les exploitants sont quelquefois importantes - elles représentent 42 hectares en moyenne -, et les montants de rémunération sont élevés puisqu'ils atteignent 170 euros par hectare et par an.

Dans ces conditions, deux schémas sont envisageables pour les intégrer dans un CAD.

Il est possible de le faire soit en respectant la moyenne départementale de 27 000 euros par dossier et, dans ce cas-là, on réduit les financements prévus dans le cadre des CTE qui atteindraient 50 000 euros par dossier, soit en respectant le contrat CTE, et alors on crée un déséquilibre budgétaire. C'est une question qui inquiète les directions départementales de l'agriculture.

Je n'insiste pas sur les effets bénéfiques qu'ont pu avoir les exigences formulées au titre des opérations OLAE depuis plus de dix ans, et qui seraient abandonnées à court terme.

Il conviendrait donc que le montant de ces mesures prévues souvent en secteur Natura 2000 n'entrent pas dans la moyenne départementale.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Dominique Bussereau, ministre de l'agriculture et de la pêche. Monsieur Signé, vous avez raison de poser cette question sur l'agriculture et l'environnement, car, depuis une quinzaine d'années, quels que soient les gouvernements, des mesures soutenant des activités agricoles respectueuses de l'environnement sont mises en place dans notre pays.

C'est ainsi que des exploitations agricoles ont pu engager une partie ou la totalité de leurs surfaces dans différents programmes qui contribuent à améliorer l'insertion dans l'environnement : les opérations locales agro-environnementales, la prime au maintien des systèmes d'élevage extensif, qui est important dans le Morvan, les contrats territoriaux d'exploitation, et, maintenant, la prime herbagère agro-environnementale, la mesure rotationnelle ou le contrat d'agriculture durable.

Vous m'avez interrogé plus spécialement sur les opérations locales agri-environnementales, qui ont été mises en place depuis, l'Etat prenant le soin d'accorder des crédits permettant leur renouvellement dans le cadre des CAD pour les agriculteurs qui le souhaitent. Les enveloppes que nous avons engagées en contrats d'agriculture durable prennent en compte ces besoins financiers.

Le montant moyen des OLAE arrivant à échéance en 2005 est de 73 euros par hectare et par an ; la masse financière impliquée en crédits de paiement de mon ministère est de 3,4 millions d'euros, ce qui fait que la surface moyenne d'hectares engagés par exploitation est de 21 hectares. Ainsi, ces contrats présentent des montants moyens sur cinq ans de 7 600 euros.

Cela signifie, monsieur Signé, qu'en tenant compte d'une revalorisation de leur montant ils restent nettement en dessous de la moyenne de 27 000 euros par contrat prévue pour les CAD.

Toutefois, et vous l'avez signalé dans votre question, sur des sites Natura 2000, ces opérations locales peuvent atteindre des montants plus importants.

C'est pourquoi il a été décidé de ne pas inclure dans le calcul du montant moyen des CAD par département la majoration de 20 % accordée aux actions agro-environnementales retenues dans les sites Natura 2000.

Enfin, il faut rappeler qu'en l'absence d'encadrement des montants moyens très différents pourraient apparaître entre les régions. C'est la raison pour laquelle, après concertation avec les représentants du milieu professionnel, la mise en place d'un montant moyen national apparaît comme étant la meilleure réponse pour assurer un traitement juste et équitable des exploitants agricoles sur l'ensemble du territoire, quelles que soient les régions concernées.

M. le président. La parole est à M. René-Pierre Signé.

M. René-Pierre Signé. Je vous remercie, monsieur le ministre, de souligner que cette question n'est pas sans intérêt.

Depuis plus de dix ans, les mesures agro-environnementales ont, comme vous l'avez souligné vous-même, protégé les zones Natura 2000, en particulier dans le Val de Loire, le Val d'Allier, et ont freiné l'implantation du maïs irrigué, grand consommateur de nitrates. C'est dire que l'arrêt des aides, après ces dix années d'efforts financiers, entraînerait en un ou deux ans la perte d'un bénéfice enregistré et indiscutable.

Beaucoup d'argent a déjà été engagé, et l'arrêt des financements, outre les méfaits agro-environnementaux et écologiques entraînés, se traduirait par un gaspillage des crédits fâcheux et fort pénalisant pour le but recherché.

Si j'ai bien compris, monsieur le ministre, nous n'arriverons pas, même en moyenne nationale, au niveau de ce qui était prévu dans les CTE et nous serons même en deçà de ce qui était prévu dans les CAD. Je regrette que ce financement soit plutôt en baisse, compte tenu de l'intérêt que présentait cette mesure.