compte rendu intégral

PRÉSIDENCE DE Mme Michèle André

vice-présidente

Mme la présidente. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à onze heures.)

1

PROCÈS-VERBAL

Mme la présidente. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.

Il n'y a pas d'observation ?...

Le procès-verbal est adopté sous les réserves d'usage.

2

Art. additionnels avant l'art. 9 (interruption de la discussion)
Dossier législatif : projet de loi portant engagement national pour le logement
Art. additionnels avant l'art. 5 ou avant l'art. 9 ou après l'art. 11

Engagement national pour le logement

Suite de la discussion d'un projet de loi

Mme la présidente. L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi portant engagement national pour le logement (nos 57, 81, 85, 86).

Dans la discussion des articles, nous en sommes parvenus à l'examen des amendements nos 204 rectifié, 394 et 470, tendant à insérer un article additionnel.

Discussion générale
Dossier législatif : projet de loi portant engagement national pour le logement
Mise au point au sujet d'un vote

Articles additionnels avant l'article 5 ou avant l'article 9 ou après l'article 11

Mme la présidente. Je suis saisie de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 204 rectifié, présenté par MM. Dallier et Demuynck, Mme Procaccia, MM. Balarello et Cambon, est ainsi libellé :

Avant l'article 9, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Les deuxième, troisième et quatrième alinéas de l'article L. 302-7 du code de la construction et de l'habitation sont remplacés par un alinéa ainsi rédigé :

« Ce prélèvement est fixé à 20 % du potentiel fiscal par habitant défini à l'article L. 2334-4 du code général des collectivités territoriales multiplié par la différence entre 20 % des résidences principales et le nombre de logements sociaux existant dans la commune l'année précédente, comme il est dit à l'article L. 302-5, sans pouvoir excéder 25 % de l'épargne nette de la commune, telle que définie par la nomenclature M 14, constatée dans le compte administratif afférent au pénultième exercice. »

La parole est à M. Philippe Dallier.

M. Philippe Dallier. Cet amendement vise à rectifier un dispositif inefficace et à mettre fin à une injustice.

Il avait été décidé que les communes n'ayant pas atteint l'objectif des 20 % de logements sociaux et dont le potentiel fiscal se situait dans la moyenne paieraient une somme forfaitaire - qui est aujourd'hui de 152,45 euros par logement manquant -, la pénalité devenant proportionnelle au-dessus de cette moyenne.

Voilà qui me paraît bien injuste ! Imaginez que nous appliquions les mêmes règles en matière d'impôt sur le revenu. Je suis certain que l'opposition crierait à l'injustice !

En l'occurrence, les communes qui connaissent le plus de difficultés, du moins celles dont le potentiel fiscal est le plus faible, paient toutes le même montant, des moins riches jusqu'à celles qui se situent dans la moyenne. C'est, de mon point de vue, une aberration !

Par conséquent, la première partie de mon amendement tend à ce que la pénalité soit proportionnelle au potentiel fiscal - à hauteur de 20 % - pour toutes les communes.

La deuxième partie porte sur le plafonnement de la pénalité, qui était, jusqu'à présent, fixé à 5 % des recettes de fonctionnement de la commune.

Je souhaiterais disposer de statistiques, parce que je suis certain qu'un tel plafonnement n'est jamais atteint, tant le montant en est important.

Ainsi, dans la commune dont je suis maire, sachez que 5 % des dépenses de fonctionnement représentent 1 million d'euros, soit l'équivalent de 30 % du produit de la taxe d'habitation !

Or certains amendements tendent à augmenter encore ce plafonnement, qui est parfaitement inutile, puisqu'il ne sert à personne !

Par conséquent, je propose de remplacer ce plafonnement par un indicateur prenant en compte la capacité contributive de la commune, à savoir l'épargne nette. C'est ce qui permet d'évaluer combien il reste, une fois que la commune a payé ses dépenses de fonctionnement et qu'elle a remboursé l'annuité de sa dette.

Je vous propose donc de plafonner le montant de la pénalité, en précisant qu'il ne peut excéder 25 % de l'épargne nette de la commune. La logique en est toute simple : on ne peut pas demander à une commune de construire des logements - et donc d'accueillir des habitants supplémentaires -, tout en lui ôtant la capacité d'investir et de créer les équipements publics nécessaires à la population.

Permettez-moi d'évoquer de nouveau le cas de la commune dont je suis maire. Pendant quasiment dix années, l'autofinancement, du moins l'épargne nette de la commune, ont été négatifs ou proches de zéro.

Dès lors, avec le montant actuel de la pénalité, je suis contraint d'emprunter pour rembourser le capital de la dette. Et après, on me demande de créer des équipements publics !

Tel est, madame la présidente, l'esprit de cet amendement.

Mme la présidente. L'amendement n° 394, présenté par MM. Repentin,  Raoul,  Caffet et  Bel, Mme Y. Boyer, MM. Courteau,  Desessard et  Dussaut, Mmes Herviaux,  Hurel et  Khiari, MM. Krattinger,  Lejeune,  Pastor,  Piras,  Raoult,  Reiner,  Ries,  Saunier,  Teston,  Trémel,  Lise,  Vézinhet,  Picheral et  Madec, Mme San Vicente, MM. Plancade,  Gillot et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Avant l'article 9, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article L. 302-7 du code de la construction et de l'habitation est ainsi modifié :

1° Dans le premier alinéa, après les mots : « à l'exception de celles qui » sont insérés les mots : «, tout en ayant sur leur territoire une zone urbaine sensible définie au 3 de l'article 42 de la loi n° 95-115 du 4 février 1995 d'orientation pour l'aménagement et le développement du territoire, ».

2° Dans le deuxième alinéa, la somme : « 152,45 euros» est remplacée par la somme : « 762,25 euros ».

3° Dans le troisième alinéa, les mots : « ce prélèvement est fixé à 20 % du potentiel fiscal par habitant multipliés » sont remplacés par les mots : « ce prélèvement est égal au potentiel fiscal par habitant multiplié ».

4° Dans le cinquième alinéa, la somme : « 3 811,23 euros » est remplacée par la somme : « 3 000 euros ».

La parole est à M. Jean-Pierre Caffet.

M. Jean-Pierre Caffet. Cet amendement tend à renforcer les conditions d'application du prélèvement de solidarité effectué au titre de l'article 55 de la loi SRU.

Le 1° modifie la disposition permettant aux communes en déficit de logement social qui perçoivent la dotation de solidarité urbaine, la DSU, de n'avoir que 15 % de logements locatifs sociaux.

En effet, plusieurs communes bénéficient de la DSU, avec des sommes certes assez faibles, sans être pour autant confrontées à de graves difficultés économiques ou sociales justifiant une exception au principe des 20 % de logements sociaux.

C'est pourquoi cet amendement tend à ce que les communes percevant la DSU et ayant sur leur territoire une zone urbaine sensible soient les seules à bénéficier de l'exonération.

Le 2° et le 3° multiplient par cinq le prélèvement effectué par logement social manquant dans les communes soumises à l'obligation des 20 % de logements sociaux.

Une telle hausse sera de nature à inciter les communes qui ne jouent pas le jeu de la mixité sociale à participer à l'effort national de construction de logements locatifs sociaux et sera neutre pour les communes qui respectent l'esprit de l'article 55 de la loi SRU.

À titre d'exemple, la ville de Paris était soumise, pour l'année 2004, à un prélèvement brut de 19,3 millions d'euros, mais avait des dépenses déductibles de ce prélèvement de 118,2 millions, soit un prélèvement net nul.

Par conséquent, si cet amendement était adopté, le prélèvement serait toujours nul, dans la mesure où le prélèvement brut serait porté à 96,8 millions d'euros, un montant toujours inférieur aux dépenses déductibles exposées par la capitale.

Enfin, le 4° ramène à 3 000 euros le seuil en deçà duquel le prélèvement n'est pas effectué.

Mme la présidente. L'amendement n° 470, présenté par M. Desessard, Mmes Blandin,  Boumediene-Thiery et  Voynet, est ainsi libellé :

Après l'article 11, ajouter un article additionnel ainsi rédigé :

L'article L. 302-7 du code de la construction et de l'habitation est ainsi modifié :

I - Dans le deuxième alinéa, le montant : « 152,45 euros » est remplacé par le montant: « 1 500 euros ».

II - Dans les deuxième et troisième alinéas, les mots : « sans pouvoir excéder 5 % » sont remplacés par les mots : « sans pouvoir excéder 10 % ».

III - Après le deuxième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Il sera déduit de cette pénalité un montant de 750 euros multiplié par la différence entre le nombre de logements sociaux de la période de référence et le nombre de logements sociaux de l'année précédente. »

La parole est à M. Jean Desessard.

M. Jean Desessard. Cet amendement tend à multiplier par dix le montant du prélèvement opéré par logement manquant sur les communes ne respectant pas l'obligation de réaliser 20 % de logements locatifs sociaux.

Le montant de ce prélèvement n'apparaît pas pour l'heure suffisamment incitatif, puisque certaines communes, notamment celles qui n'ont pratiquement pas de logements sociaux, préfèrent payer la pénalité, plutôt que de répondre à la demande de nombreux ménages d'avoir accès à un logement social.

Tant qu'il sera moins cher de payer une amende que de construire des logements sociaux, les maires qui n'en veulent pas continueront à ne pas respecter la loi SRU.

Construire des logements sociaux coûte cher. Par conséquent, le prélèvement dont nous débattons actuellement doit être à la hauteur. Aujourd'hui, la participation d'une commune au logement social se fait en offrant du foncier, souvent à un tarif inférieur - il est globalement inférieur de 20 % à 50 % - au prix du marché.

Par ailleurs, les communes et l'ensemble des collectivités locales et des établissements publics de coopération intercommunale, les EPCI, contribuent à l'équilibre des opérations de logement social. Selon les statistiques actuelles, les autres collectivités locales et les EPCI y contribuent entre 15 % et 25 % du total.

Ainsi, aujourd'hui, les contributions des communes varient de facto, sans tenir compte des contributions des autres collectivités locales et des EPCI. On peut évaluer la participation d'une commune au logement social entre 3 000 euros et 10 000 euros.

Plus précisément, je me permets de mentionner les chiffres diffusés par l'Union sociale pour l'habitat. Il s'agit du montant moyen des subventions des collectivités locales - départements, régions et surtout communes - estimés à partir des plans de financement présentés avec les agréments prêt locatif aidé d'intégration, PLAI, prêt locatif à usage social, PLUS, prêt locatif social, PLS et prêt locatif intermédiaire ,PLI.

Les collectivités locales ont ainsi versé 5 500 euros pour chaque logement social PLUS, 10 000 euros pour un PLAI et 2 000 euros pour un PLS, ainsi que pour un PLI.

Je vous laisse comparer ces chiffres avec le montant ridicule - 152,45 euros - du prélèvement par logement social manquant actuellement prévu par l'article 55 de la loi SRU.

M. Philippe Dallier. Propos effrayants ! Cela ne tient pas debout !

M. Jean Desessard. Les collectivités qui réalisent du logement social investissent 10 000 euros ; celles qui n'en construisent pas versent seulement une pénalité de 152,45 euros !

M. Philippe Dallier. N'importe quoi !

M. Jean Desessard. Vous vous rendez compte ! Cela signifie que, avec une pénalité de 152,45 euros, il faut plus de vingt-cinq ans pour construire un logement social.

M. Philippe Dallier. Vous ne savez pas ce qu'est une commune. Vous n'avez pas le bonheur d'être maire.

M. Jean Desessard. Et encore, je ne prends pas en compte les pertes de recettes subies par les collectivités locales et leurs groupements au titre de l'exonération de taxe sur le foncier bâti dont bénéficient les logements locatifs sociaux pendant quinze ans.

De telles exonérations sont souvent très peu compensées, mais cette question fait l'objet d'autres amendements, qui, je pense, ont été acceptés.

La proposition de porter le montant de la pénalité à 1 500 euros par logement manquant est encore, me semble-t-il, intéressante pour les communes qui refusent la solidarité et qui sont également les plus riches.

M. Philippe Dallier. Et ça recommence !

M. Jean Desessard. Certes, j'ai entendu dire qu'il ne fallait pas « matraquer » financièrement les communes soumises à l'article 55 de la loi SRU.

Mais les communes qui sont les plus « matraquées » sont précisément celles qui respectent la loi et réalisent des logements sociaux, ne serait-ce que parce qu'elles doivent financer les logements que les communes les plus riches refusent souvent de construire.

En outre, les communes qui investissent dans les logements sociaux ont d'autres frais. Je pense notamment aux frais de cantine et aux frais scolaires.

M. Philippe Dallier. On le sait !

M. Jean Desessard. Certes, la situation est différente selon la population accueillie.

Lorsque l'on accueille des populations de PLAI, cela revient non seulement plus cher - 10 000 euros pour construire du logement social -,...

M. Philippe Dallier. Je le sais, je l'ai fait dans ma commune !

M. Jean Desessard. ... mais il faut également assumer des frais supplémentaires en termes de fonctionnement.

Vous avez évoqué les flux, monsieur Dallier.

Je sais bien que la réalité des communes qui ont un retard de logements sociaux est diverse.

C'est pourquoi, afin de ne pas pénaliser les maires qui sont en train de rattraper ce retard, mon amendement vise à prendre en compte l'effort fourni durant l'année.

Cette disposition, qui prend en compte les flux de construction - et non seulement les stocks -, viendra compenser l'augmentation du prélèvement à 1 500 euros.

La pénalité est de 1 500 euros, mais elle est déduite de 750 euros par logement effectué la dernière année.

Ainsi, on tient assez fortement compte des stocks - mais ce n'est rien par rapport aux 10 000 euros investis dans les PLAI - et on diminue cette pénalité de moitié pour les communes qui ont réalisé des logements dans l'année précédente.

Cet amendement tient donc compte non seulement des stocks et du retard, mais également du flux.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

M. Dominique Braye, rapporteur de la commission des affaires économiques et du Plan. S'agissant de l'amendement n° 204 rectifié, notre collègue M. Philippe Dallier évoque un véritable problème de justice sociale.

En effet, au titre de la loi SRU, nous imposons de façon plus importante les communes les plus pauvres. Cela n'est pas un dispositif très performant. Nous devrons donc examiner ce problème.

Pour autant - je l'ai dit hier et je le répète aujourd'hui -, la commission des affaires économiques a décidé d'émettre un avis défavorable sur tous les amendements relatifs à la loi SRU, afin de pouvoir mener, entre la première et la deuxième lecture, une véritable réflexion de fond.

Notre but est de proposer un mécanisme et des changements équilibrés sur cette loi SRU. Nous ne voulons pas détricoter petit à petit ses dispositions actuelles, sans savoir exactement ce qu'il ressortira de l'examen en première lecture du présent projet de loi.

C'est pourquoi, mon cher collègue, je vous prie de bien vouloir retirer votre amendement, faute de quoi je serais contraint d'émettre un avis défavorable.

Enfin, la commission émet un avis défavorable sur l'amendement nos 394 et 470 pour les raisons que j'ai exposées hier.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Gérard Larcher, ministre délégué à l'emploi, au travail et à l'insertion professionnelle des jeunes. Madame la présidente, mesdames, messieurs les sénateurs, M. Jean-Louis Borloo étant retenu par M. le Premier ministre, il m'a demandé de le remplacer. Nous sommes, lui et moi, en complète harmonie sur le sujet que nous évoquons ce matin.

Comme M. le rapporteur l'a rappelé hier, la commission des affaires économiques a engagé depuis trois ans une réflexion en profondeur sur ce sujet et a identifié un certain nombre de problèmes, qui ne peuvent être résolus de façon parcellaire. Nous ne pouvons donc pas nous contenter d'un « détricotage ».

Nous avons la responsabilité d'examiner la situation. En 2001, 700 communes étaient en retard, aujourd'hui, seules un tiers d'entre elles ont atteint moins de 50 % de leur objectif.

Nous avons tous à l'esprit certaines communes qui font face à des recours contentieux à répétition, d'autres qui connaissent de véritables difficultés (Mme Marie-France Beaufils s'exclame), quelques-unes, enfin, qui ne veulent pas s'engager dans la mixité sociale.

Le Gouvernement entend bien mettre à profit la navette parlementaire - la contribution du Sénat, de ses commissions, en particulier celle des affaires économiques, mais également les réflexions de l'Assemblée nationale - pour trouver, lors de la prochaine lecture du présent projet de loi par la Haute Assemblée, des réponses réelles aux problèmes qui ont été abordés ici.

J'en viens maintenant aux amendements qui viennent de nous être présentés.

Les communes à faible potentiel fiscal, monsieur Dallier, posent un réel problème. En revanche, la réponse est-elle, monsieur Caffet, monsieur Desessard, la multiplication par cinq ou par dix - pourquoi pas par cent ? - du prélèvement effectué par logement social manquant ?

M. Christian Demuynck. Sûrement pas !

M. Gérard Larcher, ministre délégué. La mixité sociale est un sujet essentiel. Si, comme l'a déclaré M. le Premier ministre, nous entendons donner aux maires plus de responsabilités, c'est parce que nous considérons qu'ils sont les mieux à même de les exercer. Nous devons donc trouver une réponse à la fois globale et positive aux problèmes que soulève l'article 55.

Telles sont les raisons pour lesquelles je demande aux auteurs des amendements nos 204 rectifié, 394 et 470 de bien vouloir les retirer. À défaut, j'émettrai un avis défavorable. Néanmoins, cet avis n'est pas un renvoi à la case départ, au contraire.

En effet, une solution devrait être trouvée d'ici à la fin du mois de février prochain. M. Jean-Louis Borloo s'y est engagé. Il a par ailleurs souhaité m'associer à la réflexion sur ce problème, qui engage tout le pôle de cohésion sociale. Je prends donc devant vous, aujourd'hui, au nom du Gouvernement, un engagement tout à fait solennel.

Mme la présidente. Monsieur Dallier, l'amendement n° 204 rectifié est-il maintenu ?

M. Philippe Dallier. J'ai accepté hier de retirer un amendement visant à corriger le périmètre du dispositif, comme j'accepterai de retirer le dernier de mes amendements, qui tend à modifier la logique du système.

Les autres amendements que je défends ne visent qu'à rectifier des aberrations de la loi telle qu'elle a été votée en 2000. Je suis navré, mais je ne les retirerai pas !

Chers collègues de l'opposition, je le répète, vous n'accepteriez pas de taxer tous les contribuables au même niveau, notamment ceux dont les revenus sont les plus faibles, alors que tous n'ont pas les mêmes revenus. Or, en admettant une mesure forfaitaire pour toutes les communes se situant en dessous de la moyenne du potentiel fiscal, c'est ce que vous faites. Si cette mesure concernait les contribuables, vous lutteriez vent debout contre elle et vous auriez raison. En la circonstance, cette mesure s'applique aux collectivités locales et vous la trouvez normale ! Je ne peux pas l'accepter !

Quant au plafonnement des pénalités à 5 % des recettes de fonctionnement, il n'a pas de sens. La capacité contributive doit être prise en compte. Elle est mesurée par l'épargne nette, monsieur Desessard. Vous n'avez peut-être jamais dirigé une collectivité locale, mais moi, c'est mon cas depuis dix ans. La capacité contributive de la commune, il n'y a que cela ! Votre marge de manoeuvre, c'est elle !

Lorsque vous évoquez la somme de 10 000 euros pour un PLAI, je ne sais pas de quoi vous parlez.

J'ai essayé de vous démontrer hier soir que, que la commune respecte ou non ses engagements triennaux, elle paie tout de même.

Ainsi, dans ma commune, j'ai respecté mes engagements triennaux à 119 %. Pourtant, en 2005, on me prélève 3 % de la taxe d'habitation au titre de l'année 2003, qui fait partie de la période triennale, au motif que je n'ai pas engagé de dépenses cette année-là.

Je vous rappelle tout de même - je l'avais déjà dit - que les collectivités locales ne doivent pas nécessairement mettre de l'argent au pot. Il est possible de construire des logements sociaux grâce à la garantie d'emprunt. C'est d'ailleurs ce que nous faisons, nos finances étant à sec. Réfléchissez-y ! Ne nous imposez pas des pénalités ou des dépenses démentielles que nous ne pouvons pas supporter. Admettez que l'on engage des opérations grâce à la garantie d'emprunt.

Je reviendrai tout à l'heure sur ce sujet à l'occasion de l'amendement de M. Repentin, mais je défie quiconque ici de me démontrer que ce que je dis est faux. Si ce n'est pas faux, c'est donc que c'est juste ; si c'est juste, votez mon amendement !

Mme la présidente. La parole est à M. Thierry Repentin, pour explication de vote sur l'amendement n° 204 rectifié.

M. Thierry Repentin. M. Dallier n'en sera pas surpris, nous ne voterons bien évidemment pas son amendement.

Nous pensons, nous aussi, qu'il faut mettre fin à une certaine injustice. Le dispositif dont nous débattons n'est pas assez efficace pour la promotion du logement social. L'amendement n° 394 tend d'ailleurs à faire évoluer celui-ci.

Vous le savez aussi bien que moi, monsieur Dallier, la pénalité tient compte du potentiel fiscal de la commune.

M. Philippe Dallier. Pour les plus riches !

M. Thierry Repentin. Monsieur Dallier, si vous étiez membre d'un EPCI à fiscalité propre, ce qui est le cas de nombreuses communes soumises à l'article 55, les maires de ces communes vous diraient que, lorsqu'on leur annonce qu'ils vont devoir payer 152 euros par logement social manquant, cela les fait doucement rigoler !

En effet, aux termes de l'article 57 de la loi SRU, dont nous allons d'ailleurs demander l'abrogation, l'EPCI reverse à la commune au moins 50 % de ce qu'elle a payé. Dans les faits, le montant de la pénalité est donc plus proche de 80 euros !

M. Philippe Dallier. Mais on légifère aussi pour ma commune !

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 204 rectifié.

Je suis saisie d'une demande de scrutin public émanant de la commission des affaires économiques.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.

(Le scrutin a lieu.)

Mme la présidente. Personne ne demande plus à voter ?...

Le scrutin est clos.

(Il est procédé au comptage des votes.)

Mme la présidente. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 30 :

Nombre de votants 322
Nombre de suffrages exprimés 288
Majorité absolue des suffrages exprimés 145
Pour l'adoption 5
Contre 283

Le Sénat n'a pas adopté.

M. Jean Desessard. Vous allez bientôt battre des records, monsieur Dallier !

M. Philippe Dallier. S'il n'en reste qu'un...

Mme la présidente. La parole est à M. Thierry Repentin, pour explication de vote sur l'amendement n° 394.

M. Thierry Repentin. L'amendement n° 394 vise à faire évoluer le dispositif et à le rendre plus incitatif.

Comme je l'ai dit hier, le logement social exige des évaluations, des bilans.

Monsieur le ministre, vous l'avez rappelé, la commission des affaires économiques a engagé une réflexion voilà trois ans sur le dispositif de la loi SRU. Dans les mois qui viennent, elle en tirera des conclusions.

Ainsi, lorsqu'il est question du logement social, trois ans de réflexion sont nécessaires, alors que trois jours suffisent pour prendre des décisions visant à favoriser la construction de logements libres ou de logements non conventionnés, c'est-à-dire ceux qui sont les moins accessibles à nos concitoyens.

Cette ligne de conduite est constante depuis lundi matin. Les ministres qui se sont succédé au banc du Gouvernement depuis lundi ne se sont pas contredits sur ce point !

L'amendement n° 394 a de multiples objets. En fixant à 3 000 euros le seuil en deçà duquel le prélèvement ne serait pas effectué, on dispenserait de paiement toutes les petites communes rurales qui seraient déficitaires d'une vingtaine de logements sociaux. Vingt fois cent cinquante euros, cela fait trois mille euros. Rassurez donc ces communes !

Comme M. Jean-Pierre Caffet l'a bien montré en citant des exemples, même en augmentant la contribution volontaire des communes qui ne remplissent pas totalement leur contrat et qui ne construisent pas suffisamment de logements sociaux, comme y tend le présent amendement, elles ne seront pas plus imposées que dans le passé.

Les communes vertueuses auxquelles vous faites référence, les uns ou les autres, ne seront donc pas concernées. En revanche, celles qui ont choisi de ne pas construire de logements sociaux y seront sans doute davantage incitées.

Mme la présidente. La parole est à M. Philippe Dallier, pour explication de vote sur l'amendement n° 394.

M. Philippe Dallier. Notre collègue Thierry Repentin est un sénateur de province et je suis un sénateur de banlieue ; nous devrions, l'un et l'autre, nous méfier de l'exemple parisien.

En effet, comme je l'ai déjà dit hier, nous légiférons pour les quelque 60 millions de Français et pour les quelque 36 000 communes de France. Alors, utiliser l'exemple de Paris pour nous prouver qu'il n'y a pas de problème, je trouve quand même que c'est un peu fort de café !

M. Jean-Pierre Caffet. Merci, monsieur le sénateur ! (Sourires.)

M. Philippe Dallier. Les jeux de mots involontaires sont toujours les plus opportuns !

Monsieur Repentin, vous avez tenté de nous rassurer en nous donnant l'exemple des plus petites communes de France. Permettez-moi de vous parler de toutes celles qui se situent entre ces plus petites communes et Paris, et, encore fois, de celle des Pavillons-sous-Bois.

Ainsi, si l'on se réfère au potentiel fiscal par habitant, celui de Paris est de 1 516 euros, celui des Pavillons-sous-Bois de 728 euros et celui de Coubron, en Seine-Saint-Denis - 4 500 habitants -, de 501 euros. Si l'on additionne la DGF, la DSU et l'ensemble des dotations d'État, le montant, par habitant, s'élève à 514 euros à Paris, à 297 euros aux Pavillons-sous-Bois et à 209 euros à Coubron. Cela signifie que, si ma commune disposait, par habitant, du même potentiel fiscal et des mêmes dotations d'État que Paris, elle percevrait 16 millions d'euros en plus par an, ce qui représente 75 % de mon budget de fonctionnement.

Monsieur Desessard, vous qui n'avez pas eu le bonheur d'être à la tête d'une collectivité locale, vous rendez-vous compte de ce que cela signifie de voir tout d'un coup son budget de fonctionnement augmenter de 75 %, 16 millions d'euros ?

M. Jean Desessard. Non, je ne vois pas... (Sourires.)

M. Philippe Dallier. C'est bien le problème parce que, si vous vous en rendiez compte, peut-être changeriez-vous d'avis en ce qui concerne vos amendements !

Avec 16 millions d'euros de plus, les pénalités peuvent être multipliées par dix, par cent, voire par deux cents sans que ce soit un problème pour ma collectivité. Je pourrais, soit payer la pénalité si j'étais un mauvais élu, soit consacrer cette somme à des dépenses de logement, car, je vous rappelle - et vous n'allez pas jusqu'au bout du raisonnement - que nous avons le choix.

Donc, le vrai problème, c'est de savoir si l'on peut se permettre cette dépense, ce qui n'est pas possible en ce qui concerne ma commune, dont l'autofinancement net a été négatif pendant dix ans. Envisager une dépense de cette ampleur implique d'emprunter pour rembourser le capital de la dette. Pouvez-vous le comprendre ? Peut-être mes explications n'ont-elles pas été assez claires, mais, je le répète, votre amendement aurait pour conséquence d'imposer à des communes comme la mienne d'emprunter pour rembourser le capital de leur dette, ce qui ne ferait que creuser leur déficit.

Alors, vos exemples à 10 000 euros par PLAI, c'est de la littérature que vous avez trouvée dans les documentations ! C'est très bien, monsieur Desessard, mais cela ne correspond pas à la réalité !

De grâce, revenez sur terre, prenez le cas concret des collectivités comme la mienne. Vous ne légiférez pas pour Paris, vous légiférez pour les 36 000 communes de France ! (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)

Mme la présidente. La parole est à M. Jean Desessard, pour explication de vote sur l'amendement n°394.

M. Jean Desessard. Siégeant à la commission des finances de la ville de Paris, je ne peux qu'être d'accord avec M. Dallier quand il dit que Paris est une situation exceptionnelle. M'ayant fait remarquer à plusieurs reprises que je n'avais pas le bonheur d'être à la tête d'une collectivité locale, vous saurez donc, monsieur Dallier, que je suis d'assez près les finances de Paris pour reconnaître que cette ville a un potentiel fiscal intéressant par rapport à d'autres communes françaises.

Cela étant, monsieur Dallier, pourquoi ne transposez-vous pas votre plaidoyer en faveur des communes qui ne sont pas riches aux personnes dont les finances sont à sec et qui n'arrivent pas à boucler leur budget, à rembourser leurs emprunts ?

M. Philippe Dallier. C'est la taxe d'habitation qui doit les prendre en compte !

M. Jean Desessard. Donc, monsieur Dallier, pour les gens qui ont vu leur pouvoir d'achat baisser, qui sont en situation de précarité, au chômage, il faut des PLAI, c'est-à-dire du logement très social. Et le fait d'imposer aux communes qui sont en dessous des 20 % l'obligation d'avoir des PLAI permet d'assurer à ces personnes un logement.

Je vois très bien ce que signifie le doublement d'un budget - apparemment, vous n'aviez pas compris que j'ironisais -, mais il faut que les communes qui ne veulent pas de logements sociaux soient imposées. C'est une obligation.

S'il existe des cas particuliers - et j'ai l'impression que les Pavillons-sous-Bois dont il a souvent été question dans cet hémicycle en fait partie -, pourquoi, depuis trois ans que vous réfléchissez avec M. le ministre et M. le rapporteur de la commission des affaires économiques sur ces questions, n'avez-vous pas trouvé de solution satisfaisante ?

M. Philippe Dallier. C'est le sens de mes amendements !

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 394.

Je suis saisie d'une demande de scrutin public émanant du groupe socialiste.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.

(Le scrutin a lieu.)

Mme la présidente. Personne ne demande plus à voter ?...

Le scrutin est clos.

(Il est procédé au comptage des votes.)

Mme la présidente. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 31 :

Nombre de votants 323
Nombre de suffrages exprimés 323
Majorité absolue des suffrages exprimés 162
Pour l'adoption 128
Contre 195

Le Sénat n'a pas adopté.

La parole est à M. Jean Desessard, pour explication de vote sur l'amendement n° 470.

M. Jean Desessard. Au motif que mon amendement a pour objet de multiplier par dix le montant de la pénalité, M. le ministre l'a balayé d'un revers de main en disant : « pourquoi ne pas multiplier par cent ? ».

M. Philippe Dallier. Il a raison, c'est n'importe quoi !

M. Jean Desessard. Je cite les chiffres de la revue de l'Union sociale pour l'habitat : en ce qui concerne les PLAI, la contribution moyenne des communes est de 10 000 euros.

M. Philippe Dallier. Ce n'est pas la Bible !

M. Jean Desessard. Cela signifie que, si l'on appliquait une pénalité de 150 euros, il faudrait soixante-dix ans à la commune pénalisée pour égaler le coût investi par une commune qui ne s'est pas soustrait à ses obligations.

Nous proposons justement 1 500 euros pour qu'elle puisse le faire en sept ans. Ainsi, au bout de sept ans, jugeant qu'elle a été suffisamment pénalisée, qu'il ne serait pas rentable de recommencer, elle peut choisir de réaliser des logements PLAI.

Je n'ai pas dit que les maires se refusaient à investir. Le problème est que la pénalité est trop faible par rapport à l'investissement PLAI pour être dissuasive. Il faut montrer aux citoyens qui n'ont pas envie de voir s'installer des logements sociaux à côté de chez eux et qui veulent rester entre eux que la mixité sociale est nécessaire, d'où l'intérêt d'accroître les pénalités.

Qui plus est, les logements PLAI coûtent cher aux communes : ils accroissent la prise en charge des repas à la cantine, des centres aérés, des colonies, etc. C'est une des raisons pour lesquelles nous proposons de multiplier la pénalité par dix.

Mais, en réalité, on ne multiplie pas par dix, parce que si l'on tient compte des flux, on ne multiplie que par cinq. En effet, mon amendement prévoit d'exonérer de la pénalité, à raison de 750 euros par an, les communes qui ont réalisé des logements sociaux au cours de l'année précédente.

J'aurais souhaité que M. le ministre me dise que cette notion des flux est intéressante et que, dans la mesure où l'on tient compte des stocks, de l'évolution des flux et de la construction, on doit faire ensemble les calculs. Je ne vois pas pourquoi on refuse une disposition sur les flux, alors que c'est ce que vous demandez, monsieur Dallier, depuis longtemps. Les communes qui réalisent des équipements pourraient peut-être obtenir une déduction, non pas de 750 euros, mais de 800 ou 1 000 euros, ce qui supprimerait toute pénalité pour elles.

Il n'y a pas eu assez de propositions par rapport aux flux. Que l'on parle de « stocks » ou de « flux », cela ne va pas ! De toute évidence, malgré trois ans de réflexion intense, ce que l'on souhaite c'est que rien ne bouge !

Mme la présidente. La parole est à M. Philippe Dallier, pour explication de vote sur l'amendement n° 470.

M. Philippe Dallier. Monsieur Desessard, vous êtes un sénateur de Paris qui est à l'ISF ; je suis un sénateur de Seine-Saint-Denis, maire d'une commune au SMIC ; alors ne nous faites pas la leçon !

Trop c'est trop, vos chiffres, c'est n'importe quoi ! Du PLAI, j'en ai fait. Si le PLAI coûtait 10 000 euros, cela se saurait et j'aurais été incapable d'en faire, compte tenu de l'épargne nette de ma commune. Donc, vos chiffres ne tiennent pas la route ! L'épargne nette est le seul critère.

Votre proposition prend en compte les flux ; c'est ce que nous demandons. Mais, dans ce cas, vous proposez de multiplier la pénalité par cinq, ce qui, dans ma commune, représenterait une augmentation de 15 % de la taxe d'habitation.

Des gens, comme vous dites, qui viennent me demander un boulot, un logement, j'en reçois toutes les semaines. Si, à ces « vrais gens », pour employer une expression que l'on entend dans certaines émissions de télévision, j'expliquais que leur taxe d'habitation allait augmenter de 15 % parce que vous avez augmenté les pénalités des villes qui n'arrivent déjà plus à boucler les fins de mois, que me répondraient-ils ? Je doute qu'ils vous approuveraient !

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 470.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mise au point au sujet d'un vote

Art. additionnels avant l'art. 5 ou avant l'art. 9 ou après l'art. 11
Dossier législatif : projet de loi portant engagement national pour le logement
Art. additionnels avant l'art. 9 (début)

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur.

M. Dominique Braye, rapporteur. Madame la présidente, je souhaite signaler qu'hier soir, lors du scrutin public n° 27 sur le vote de l'amendement n° 179, une erreur matérielle s'est produite, qui est d'ailleurs parfaitement compréhensible dans le contexte de nos débats de cette nuit.

Ainsi, mon nom a été mentionné dans la liste de ceux qui n'ont pas pris part au vote (Exclamations amusées sur certaines travées.) ...

M. Jean Desessard. Quelle déception !

M. Dominique Braye, rapporteur. ... -  je n'en fais pas une affaire personnelle : il ne s'agit pas de moi, mais de Dominique Braye en tant que rapporteur - alors même que j'avais clairement pris position, au nom de la commission des affaires économiques, contre cet amendement n° 179.

Il m'importe donc qu'il soit officiellement pris acte de cette erreur matérielle.

Mme la présidente. Il en est pris acte, monsieur le rapporteur.