Discussion générale (suite)
Dossier législatif : proposition de loi visant à renforcer la coopération transfrontalière, transnationale et interrégionale par la mise en conformité du code général des collectivités territoriales avec le règlement communautaire relatif à un groupement européen de coopération territoriale
Article unique (fin)

Article unique

I. - Le code général des collectivités territoriales est ainsi modifié :

1° Les articles L. 1115-2 et L. 1115-3 sont abrogés ;

2° L'article L. 1115-4 est ainsi modifié :

a) Le premier alinéa est ainsi rédigé :

« Les collectivités territoriales et leurs groupements peuvent, dans les limites de leurs compétences et dans le respect des engagements internationaux de la France, adhérer à un organisme public de droit étranger ou participer au capital d'une personne morale de droit étranger auquel adhère ou participe au moins une collectivité territoriale ou un groupement de collectivités territoriales d'un État membre de l'Union européenne ou d'un État membre du Conseil de l'Europe. » ;

b) La première phrase du deuxième alinéa est remplacée par deux phrases ainsi rédigées :

« Cette adhésion ou cette participation est autorisée par arrêté du représentant de l'État dans la région. Elle fait l'objet d'une convention avec l'ensemble des membres adhérant à l'organisme public en cause ou participant au capital de la personne morale en cause. » ;

c) Le troisième alinéa est ainsi rédigé :

« La convention prévue à l'alinéa précédent entre en vigueur dès sa transmission au représentant de l'État dans les conditions fixées aux articles L. 2131-1, L. 2131-2, L. 3131-1, L. 3131-2, L. 4141-1 et L. 4141-2. Les articles L. 2131-6, L. 3132-1 et L. 4142-1 sont applicables à cette convention. » ;

3° L'article L. 1114-4-1 devient l'article L. 1115-4-1 et, dans la première phrase du troisième alinéa de cet article, le mot : « juridique » est remplacé par le mot : « morale » ;

4° Il est inséré un article L. 1115-4-2 ainsi rédigé :

« Art. L. 1115-4-2. - Dans le cadre de la coopération transfrontalière, transnationale ou interrégionale, les collectivités territoriales, leurs groupements et, après autorisation de leur autorité de tutelle, les organismes de droit public au sens de la directive 2004/18/CE du Parlement européen et du Conseil, du 31 mars 2004, relative à la coordination des procédures de passation des marchés publics de travaux, de fournitures et de services peuvent, dans les limites de leurs compétences et dans le respect des engagements internationaux de la France, créer avec les collectivités territoriales, les groupements de collectivités territoriales et les organismes de droit public des États membres de l'Union européenne, ainsi qu'avec les États membres de l'Union européenne ou les États frontaliers membres du Conseil de l'Europe, un groupement européen de coopération territoriale de droit français, doté de la personnalité morale et de l'autonomie financière.

« Cette création est autorisée par arrêté du représentant de l'État dans la région où le groupement européen de coopération territoriale a son siège. La personnalité morale de droit public lui est reconnue à partir de la date d'entrée en vigueur de la décision de création. Les dispositions du titre II du livre VII de la cinquième partie qui ne sont pas contraires aux règlements communautaires en vigueur lui sont applicables.

« Un groupement européen de coopération territoriale de droit français peut être dissous par décret motivé pris en Conseil des ministres et publié au Journal officiel.

« Les collectivités territoriales, leurs groupements et, après autorisation de leur autorité de tutelle, les organismes de droit public au sens de la directive 2004/18/CE du Parlement européen et du Conseil, du 31 mars 2004, précitée peuvent, dans les limites de leurs compétences, dans le respect des engagements internationaux de la France et sous réserve de l'autorisation préalable du représentant de l'État dans la région, adhérer à un groupement européen de coopération territoriale de droit étranger. » ;

5° L'article L. 1115-5 est ainsi rédigé :

« Art. L. 1115-5. - Aucune convention, de quelque nature que ce soit, ne peut être passée entre une collectivité territoriale ou un groupement de collectivités territoriales et un État étranger, sauf si elle a vocation à permettre la création d'un groupement européen de coopération territoriale. Dans ce cas, la signature de la convention doit être préalablement autorisée par le représentant de l'État dans la région. »

II. - Les groupements d'intérêt public créés en application des articles L. 1115-2 et L. 1115-3 du code général des collectivités territoriales restent régis, pour la durée de leur existence, par ces articles dans leur rédaction antérieure à leur abrogation par la présente loi.

M. le président. L'amendement n° 1, présenté par M. Biwer et les membres du groupe Union centriste - UDF, est ainsi libellé :

Après le troisième alinéa du texte proposé par le 4° du I de cet article pour l'article L. 1115-4-2 du code général des collectivités territoriales, insérer un alinéa ainsi rédigé :

« Le groupement européen de coopération territoriale peut, pour la réalisation de ses investissements, recourir à un contrat de partenariat conclu sur le fondement des dispositions de l'ordonnance n° 2004-559 du 17 juin 2004 sur les contrats de partenariats modifiée par la loi n°   du ... relative aux contrats de partenariats.

La parole est à M. Claude Biwer.

M. Claude Biwer. Ce débat témoigne de l'unanimité qui peut se dégager dans cet hémicycle, que ce soit sur ce sujet ou sur celui qui a été évoqué par M. le président de la commission des lois ; les engagements de M. le secrétaire d'État sur cette question démontrent que nous avons eu raison de l'aborder.

Le seul regret que nous pouvons exprimer est que cette unanimité s'explique par le fait que les sénateurs présents et, surtout, les intervenants sont bien souvent des élus directement concernés par la coopération transfrontalière. Les difficultés rencontrées sont donc les mêmes.

Bien que certains éléments de réponse aient déjà été formulés, j'ai souhaité déposer un amendement portant sur le contrat de partenariat public-privé, qui vise à permettre à une personne publique de confier à une entreprise privée une mission globale relative au financement d'investissements immatériels, d'ouvrages ou d'équipements, ou encore la construction, la transformation d'ouvrages ou d'équipements, leur entretien, leur maintenance, leur exploitation ou leur gestion.

Cet amendement a pour objet d'autoriser les groupements européens de coopération territoriale à faire appel à ce type de contrat.

Tout à l'heure, au cours de la discussion générale, je me suis déclaré très favorable à l'adoption de cette proposition de loi, qui permettra, je l'espère, d'élargir la coopération transfrontalière actuellement en vigueur, que ce soit en Lorraine ou ailleurs, notamment en l'étendant, pour ce qui concerne ma région, au nord de la Meurthe-et-Moselle et de la Meuse. Comme je l'indiquais précédemment, la tendance est de concentrer toutes les actions sur l'entente SaarLorLux. Or d'autres affinités existent et méritent d'être soulignées.

Dans votre intervention, monsieur Mauroy, vous avez évoqué les autoroutes s'arrêtant à quelques kilomètres de la frontière, difficulté que vous avez réussi à régler aujourd'hui grâce à l'activité que vous pouvez déployer dans une métropole de l'importance de la vôtre. Demain, il en sera probablement de même à Strasbourg.

Mais dans les zones rurales, le problème n'est toujours pas résolu. Le train s'arrête à la gare précédant la frontière et les voyageurs doivent en prendre un autre à la gare située au-delà de cette frontière ; entre les deux, ils faut faire de l'autostop ! La situation est sensiblement la même pour ce qui concerne les routes.

Monsieur le secrétaire d'État, j'ai pris acte de vos souhaits d'orienter la politique menée en la matière dans le bon sens. Je retiens de nombreux éléments positifs dans vos propos. Je ne peux que souhaiter que nous puissions développer davantage les possibilités qui s'offrent à l'intercommunalité, voire aux communes directement concernées, de manière que la situation puisse évoluer, même à un rythme peut-être moins rapide que dans les grands centres.

Dans ma région, la véritable métropole est non pas une grande ville française, mais Luxembourg. Le port du nord de la Lorraine, c'est Rotterdam ou Anvers. Si, aujourd'hui, par chance, la population augmente un peu, y compris en zone rurale, c'est en raison de la présence d'entreprises situées au-delà de la frontière. C'est pourquoi je demande qu'il soit possible d'instaurer des zones franches. Or, dans l'état actuel de la réglementation et de la législation françaises, c'est impossible.

Pour toutes ces raisons, mes chers collègues, je vous demande de bien vouloir adopter l'amendement n° 1.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Catherine Troendle, rapporteur. Monsieur Biwer, je vous remercie d'avoir déposé cet amendement très pertinent. Cela me donne l'occasion de faire part au Sénat de ma conviction : les contrats de partenariat seront des outils de choix pour le développement de certains projets dans le cadre des GECT ; vous l'avez très bien illustré tout à l'heure par des exemples concrets.

Quoi qu'il en soit, cet amendement aurait eu davantage sa place dans le projet de loi relatif aux contrats de partenariat, que nous avons adopté hier soit.

En effet, l'article 13 de ce texte ouvre déjà la possibilité de recourir à de tels contrats à l'ensemble des pouvoirs adjudicataires et des entités adjudicatrices, au sens de l'ordonnance du 6 juin 2005 relative aux marchés passés par certaines personnes publiques ou privées non soumises au code des marchés publics.

Le groupement européen de coopération territoriale en fera partie, assurément, puisqu'il pourra être composé de collectivités territoriales, de groupements de collectivités territoriales d'États membres de l'Union européenne, d'États membres de l'Union européenne et d'États frontaliers membres du Conseil de l'Europe et d'organismes de droit public, au sens d'une directive du 31 mars 2004.

Pour toutes les règles que le règlement communautaire du 5 juillet 2006 n'aurait pas prévues, le GECT sera soumis au statut des syndicats mixtes ouverts.

De ce fait, aucun doute ne subsiste en ce qui concerne la qualité de pouvoir adjudicataire des GECT.

L'amendement n° 1 étant satisfait, je vous demande, mon cher collègue, de bien vouloir le retirer.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Alain Marleix, secrétaire d'État. Mon argumentation sera très proche de celle de Mme le rapporteur.

Monsieur Biwer, votre amendement vise à ouvrir aux GECT la possibilité de recourir à des contrats de partenariat. Or son examen intervient alors que le Sénat vient de voter - la discussion de ce texte s'est achevée hier soir - le projet de loi relatif aux contrats de partenariat.

L'article 13 dudit texte, tel qu'il a été adopté, répond, comme l'a indiqué Mme le rapporteur, à votre attente, puisqu'il prévoit d'autoriser les pouvoirs adjudicateurs non soumis au code des marchés publics à recourir aux contrats de partenariat.

C'est pourquoi je vous saurais gré de bien vouloir retirer votre amendement.

M. le président. Monsieur Biwer, l'amendement n° 1 est-il maintenu ?

M. Claude Biwer. Il est heureux que le projet de loi que nous avons adopté cette nuit ouvre une voie, qui n'est pas encore complètement dégagée. Comme l'a fait remarquer M. le président de la commission, ce texte doit être examiné par l'Assemblée nationale. Encore faut-il qu'il soit inscrit à son ordre du jour ! Je ne reviendrai pas sur les propos de M. Hyest, que je partage.

Monsieur le secrétaire d'État, vous vous êtes engagé à nous aider à progresser dans cette voie ; j'en prends acte. Néanmoins, j'aurais préféré que certaines dispositions figurent dans la proposition de loi que nous étudions aujourd'hui, et non qu'elles soient rattachées à un autre texte.

Évidemment, je partage le souci exprimé par les uns et les autres en la matière : l'essentiel est que des mesures soient prises et que nous puissions avancer sur ce sujet aussi vite que possible.

Pour toutes ces raisons, je retire l'amendement n° 1, en espérant qu'il ne sera pas mis aux oubliettes, car quelques éléments nous manquent encore pour bien réussir nos opérations.

M. le président. L'amendement n° 1 est retiré.

La parole est à M. le président de la commission.

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Nous avons adopté hier soir, en première lecture, le projet de loi relatif aux contrats de partenariat. Mme le rapporteur a levé le doute : les groupements européens pourront participer à des contrats de partenariat public-privé, comme d'ailleurs certaines communautés urbaines, monsieur Mauroy, pour des projets importants. Il s'agit donc d'une ouverture !

Notre objectif, tout le monde en est conscient, est que les groupements européens de coopération territoriale puissent être mis en place le plus rapidement possible. Par conséquent, le Sénat doit adopter le texte conforme. Sinon, la proposition de loi fera l'objet d'une deuxième lecture, alors que le problème est déjà résolu.

Monsieur Biwer, lors de la deuxième lecture du projet de loi relatif aux contrats de partenariat par le Sénat ou lors de son examen par l'Assemblée nationale, certains collègues pourraient relayer votre souhait de préciser les choses en cas de doute. Mais, comme je l'ai déjà indiqué, le doute a été levé.

Puisque vous êtes convaincu de l'intérêt des groupements européens de coopération territoriale, je vous remercie de permettre qu'ils soient mis en place très rapidement : le Sénat et l'Assemblée nationale ayant adopté le même texte, la loi pourra être promulguée dans les meilleurs délais.

M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...

Je mets aux voix l'article unique de la proposition de loi.

(La proposition de loi est adoptée définitivement.)

M. le président. Je constate que ce texte a été adopté à l'unanimité des présents.

Mes chers collègues, l'ordre du jour de ce matin étant épuisé, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quinze heures.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à onze heures dix, est reprise à quinze heures, sous la présidence de M. Christian Poncelet.)

PRÉSIDENCE DE M. Christian Poncelet

M. le président. La séance est reprise.

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Questions d'actualité au Gouvernement

M. le président. L'ordre du jour appelle les réponses à des questions d'actualité au Gouvernement.

Je rappelle que l'auteur de la question, de même que la ou le ministre pour sa réponse, disposent chacun de deux minutes trente.

politique économique et budgétaire de la France

M. le président. La parole est à M. Guy Fischer.

M. Guy Fischer. Ma question s'adressait à M. le Premier ministre, qui a annoncé lundi que le Gouvernement fera des « économies partout ».

Mme Nicole Bricq. Des économies d'énergie !

M. Guy Fischer. Il a martelé que « tout le monde doit faire des efforts » pour limiter les dépenses publiques.

En son absence, c'est vous que, d'emblée, j'interroge, monsieur le ministre du budget : est-ce aux retraités, aux chômeurs, aux jeunes sans boulot, aux précaires, aux salariés qui ne joignent déjà plus les deux bouts, que vous vous adressez ?

C'est bien une nouvelle politique de rigueur qui est ainsi annoncée, avec l'habituel refrain : « Préparez-vous à vous serrer la ceinture, surtout si vous avez des ressources modestes ! »

Confirmez-vous un plan d'économies supplémentaires de 5 milliards à 10 milliards d'euros par an, reposant essentiellement sur la mise à mal des services publics, puisque 35 000 suppressions de postes sont prévues dans la fonction publique ?

La grande majorité des Français voient non seulement leurs revenus et retraites régresser, mais, de surcroît, leurs conditions de vie se dégradent rapidement. L'heure est à la réduction des dépenses publiques au détriment de ceux qui en ont le plus besoin.

La suppression de plus de 11 000 postes dans l'éducation nationale montre bien que le dogmatisme libéral fait du service public une variable d'ajustement des crises qui secouent régulièrement les places financières.

Monsieur le ministre, si « tout le monde doit faire des efforts », n'est-ce pas au tour des plus riches de mettre la main à la poche ? (Exclamations sur les travées de l'UMP.)

M. Robert Hue. Absolument !

M. Guy Fischer. Comment comptez-vous associer les bénéfices du CAC 40, soit 41 milliards d'euros de dividendes, à l'effort national ?

Quand allez-vous remettre en cause la pratique outrageusement inégalitaire des stock-options ? Allez-vous définitivement proscrire les parachutes dorés ? M. Zacharias, ex-P-DG de Vinci, réclame 81 millions d'euros de stock-options ; M. Forgeard, initié d'EADS, a atterri avec un parachute de 8 millions d'euros !

Allez-vous donner du sens à l'impôt sur la fortune en créant les conditions pour que les vraies fortunes y soient réellement assujetties ?

Enfin, allez-vous abandonner ce scandaleux bouclier fiscal instauré l'été dernier ?

Monsieur le ministre, ce sont les plus démunis qui doivent être protégés et non pas les plus riches ! (Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste. - Protestations sur les travées de l'UMP.)

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Éric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique. Monsieur le sénateur, vous entonnez la ritournelle...

M. Robert Hue. Vous aussi !

M. Éric Woerth, ministre. ... que l'on entend actuellement (Exclamations sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.) sur le plan de rigueur que le Gouvernement aurait l'intention de mettre en place.

Je tiens à vous dire une chose : lorsque c'est la gauche qui est au pouvoir, les plans de rigueur consistent, bien souvent, à laisser filer les dépenses et à augmenter les impôts ! (Applaudissements sur les travées de l'UMP. - Protestations sur les travées du groupe socialiste.)

Nous, nous faisons exactement le contraire : nous voulons maîtriser la dépense publique ...

M. Paul Raoult. Et l'endettement de la France ?

M. Éric Woerth, ministre. ... sans augmenter les impôts des Français, ....

M. Paul Raoult. Cela fait sept ans que la droite est au pouvoir !

M. Éric Woerth, ministre. ...qui, aujourd'hui, sont trop élevés. Nous devons donner à notre société les moyens de croître. Ce sont la croissance et la production de richesses qui permettront de créer des emplois et, par voie de conséquence, de lutter efficacement contre la pauvreté, ainsi que d'augmenter le pouvoir d'achat.

M. Paul Raoult. On ne s'en est pas rendu compte ! Cela fait sept ans que vous êtes au pouvoir : pourquoi ne l'avez-vous pas fait ?

M. Éric Woerth, ministre. Monsieur le sénateur, le Gouvernement s'attache à mettre en oeuvre le programme du Président de la République. Peut-être cela vous surprend-il qu'il essaie de tenir les promesses qu'il a faites ? Il faut, me semble-t-il, le mettre à son crédit.

M. Jacques Mahéas. Plutôt à son débit !

M. le président. S'il vous plaît !

M. Éric Woerth, ministre. Le programme du Président de la République, quel est-t-il ?

Dans le domaine de l'économie, il consiste à étudier les déficits publics avec beaucoup de lucidité et d'attention, afin de les combattre efficacement et de parvenir à la maîtrise de la dépense publique et à l'équilibre des finances publiques en 2012.

M. Paul Raoult. Vous disiez la même chose en 2002 !

M. Éric Woerth, ministre. Croyez-moi, tant que subsisteront des déficits publics en France, ce seront les plus faibles qui s'affaibliront encore. Il faut donc rembourser la dette et relancer la compétitivité du pays. En effet, l'existence d'une lourde dette et l'absence de compétitivité concourent à l'affaiblissement des Français, notamment de ceux qui sont les plus démunis.

Le retour à l'équilibre des finances publiques permettra de redonner des marges de manoeuvre à notre pays et du pouvoir d'achat à chaque Français. Le Gouvernement, je le répète, a donc l'intention de réduire la dépense publique pour parvenir à cet équilibre.

M. Jean-Marc Pastor. Toujours des leçons !

M. Éric Woerth, ministre. Il pourrait y parvenir par une augmentation des impôts, mais telle n'est pas la voie qu'il prend : il a choisi une voie beaucoup plus difficile, beaucoup plus contraignante, beaucoup plus exigeante, celle de la révision générale des politiques publiques.

Demain, le Président de la République, lors du conseil de modernisation des politiques publiques, annoncera un certain nombre de mesures. D'autres suivront, d'ici à l'été. Elles concourront évidemment à cet équilibre, si nécessaire aussi pour les plus démunis, que vous défendez, monsieur le sénateur, tout comme le Gouvernement. Le retour à un pouvoir d'achat fort, à la croissance, à la richesse de notre pays passe par là. (Bravo ! et applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

application de la loi Leonetti sur la fin de vie

M. le président. La parole est à M. Gilbert Barbier.

M. Gilbert Barbier. Ma question s'adresse à Mme la ministre de la santé, de la jeunesse, des sports et de la vie associative.

Madame la ministre, la récente et vive émotion suscitée par le cas douloureux de Chantal Sébire, qui s'est donné la mort après avoir vu sa demande d'euthanasie rejetée par la justice, relance le débat sur l'accompagnement en fin de vie dans notre pays.

On aurait pourtant pu croire que cette question avait été tranchée par la loi du 22 avril 2005, fruit d'une réflexion longue et approfondie menée par M. Jean Leonetti, et dans laquelle sont posés des principes clairs : interdiction de l'obstination déraisonnable dans la dispense des soins, droit du patient d'interrompre ou de refuser un traitement, accès aux soins palliatifs.

Elle vise, en quelque sorte, à autoriser le « laisser-mourir » dans des conditions décentes. Faut-il, aujourd'hui, aller plus loin, en légalisant « l'aide à mourir » ou le suicide assisté ?

On ne peut, sous le coup de l'émotion, adhérer à un tel projet, et ce pour deux raisons. D'abord, parce que la demande d'euthanasie est, en réalité, bien souvent liée à la peur de la souffrance et de la déchéance, au souci de ne pas peser trop longtemps sur ses proches, au manque de dialogue, parfois. Ensuite, parce que donner la mort ne saurait en aucun cas constituer un projet médical ; ce serait contraire au serment d'Hippocrate et source de dérives possibles.

Alors, que faire pour répondre aux situations les plus douloureuses ? Appliquons déjà la loi actuelle et menons une véritable politique de prise en charge de la douleur.

En effet, qu'en est-il aujourd'hui ?

La psychologue Marie de Hennezel, auteur d'un rapport sur l'état des soins palliatifs en France qui vous a été remis à la fin de 2007, madame la ministre, dresse un constat sévère : inégalités profondes dans l'accès aux soins palliatifs, hétérogénéité des pratiques, insuffisance de moyens, sous-effectifs et, surtout, déficit d'information. Selon elle, les possibilités ouvertes par la loi Leonetti sont, en particulier, mal connues et incomprises.

Finalement, la tentation de répondre au voeu de mort par un geste létal est révélatrice d'un défaut de formation et d'une solitude des soignants. Que comptez-vous faire pour remédier à cette situation, au-delà de la mission que vous avez confiée à M. Jean Leonetti ?

Il restera toujours des cas de détresse, ceux de malades dont l'espérance de vie n'est pas menacée, et auxquels il sera difficile de répondre.

Cependant, ce n'est pas une loi sur l'euthanasie qui amendera les consciences. En revanche, on peut craindre qu'elle ne vienne freiner les efforts des soignants pour améliorer leur pratique, pour la penser, pour inventer une manière d'être humble et humaine auprès de ceux qu'on ne peut plus guérir. (Applaudissements sur certaines travées du RDSE et de l'UMP.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé, de la jeunesse, des sports et de la vie associative. Monsieur le sénateur, vous venez de poser une question extrêmement délicate. Le souvenir poignant de Chantal Sébire nous invite à être responsables et à donner une réponse qui parte de la tête, sans doute, mais aussi beaucoup du coeur.

Le problème de l'accompagnement en fin de vie est régi, dans notre pays, par la loi Leonetti, qui - faut-il le rappeler, mesdames, messieurs les sénateurs ? - a été adoptée à l'unanimité. (Protestations sur les travées du groupe CRC.)

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Elle l'a été, en tout cas, à l'unanimité à l'Assemblée nationale et à la quasi-unanimité ici même ! (Protestations sur les mêmes travées.)

M. François Autain. Non ! C'est faux !

M. le président. S'il vous plaît ! Il s'agit d'un sujet douloureux : il convient d'écouter en silence les orateurs !

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Dans la loi Leonetti, sont rappelés un certain nombre de principes éthiques qui régissent notre République, notamment celui-ci : la personne qui souffre a droit à notre attention, à notre solidarité. Si ces gestes de vie sont, avant tout, prodigués par la communauté soignante, il n'en demeure pas moins qu'ils s'imposent évidemment à tous.

La loi Leonetti dispose que la volonté du malade doit être respectée et que l'acharnement thérapeutique n'est pas de mise, que chaque malade a droit à un accompagnement et à une sédation de sa douleur, et, enfin, que la culture des soins palliatifs doit être développée.

M. François Autain. C'est un voeu pieu !

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Quelle est la situation ?

Vous avez évoqué à juste titre, monsieur le sénateur, le rapport que m'a remis Marie de Hennezel. Il en ressort que de nombreux médecins méconnaissent la démarche palliative...

M. François Autain. Nous, nous ne connaissons pas le rapport !

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. ...et que les soins palliatifs sont très mal répartis. Elle a pu le constater après avoir participé à un certain nombre de colloques et procédé à des expertises et à des évaluations.

M. le Premier ministre a demandé à M. Jean Leonetti d'évaluer sa loi.

M. François Autain. Il n'était pas le mieux placé pour le faire !

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Il a, en effet, été constaté qu'une demande d'euthanasie n'était pas maintenue si des soins palliatifs de qualité étaient proposés.

À la demande du Président de la République, j'entends donc développer la culture palliative, à savoir les unités et les réseaux de soins palliatifs, ainsi que des lits identifiés comme tels.

M. François Autain. Il faut des moyens pour cela !

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. En effet, monsieur le sénateur, le fait de donner la mort ne peut en aucun cas constituer une démarche de soins. Cet acte peut, certes, résulter d'une sédation extrême offerte par la culture palliative, mais il ne saurait être assimilé à un geste soignant.

Telle est la pratique éthique que je vous propose. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

l'avenir des relations france-gabon

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Cantegrit.

M. Jean-Pierre Cantegrit. Ma question s'adresse à M. le secrétaire d'État chargé de la coopération et de la francophonie. Elle porte sur les relations franco-africaines et, plus particulièrement, sur nos relations avec le Gabon ; je vous rappelle que je préside le groupe d'amitié France-Gabon du Sénat.

Depuis l'indépendance réussie des pays d'Afrique noire, réalisée sous l'égide du général de Gaulle (Murmures ironiques sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.), la France a maintenu avec ces derniers des liens étroits et harmonieux.

La présence française y est encore forte. Actuellement, près de 10 000 Français résident au Gabon, pays avec lequel nous avons des échanges économiques considérables et où les investissements français sont importants.

Le président Omar Bongo Ondimba est un grand ami de la France. (Rires et exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.) Qui pourrait le nier ? À chaque fois que nous avons eu besoin du Gabon, notamment lorsque la vie de Français était en jeu, comme ce fut récemment le cas au Tchad, ce pays a su accueillir nos compatriotes sans discussion et sans visa.

M. Paul Raoult. Combien cela coûte ?

M. Jean-Pierre Cantegrit. Dès lors, comment expliquer, monsieur le secrétaire d'État, que la télévision publique française, en l'occurrence France 2, relayée par d'autres chaînes publiques, s'en prenne aux résidences immobilières du président Bongo, comme si elle était chargée d'une commission d'enquête sur un sujet qui n'est ni d'actualité ni une nouveauté ? ((Nouvelles exclamations sur les mêmes travées.)

M. Jean-Marc Todeschini. Non, ce n'est pas nouveau !

M. Jean-Pierre Cantegrit. Comment se fait-il que l'on expulse des étudiants gabonais qui font des études en France, alors que M. Brice Hortefeux a conclu un accord sur la gestion concertée des flux migratoires ?

Comment se fait-il que votre prédécesseur, M. Jean-Marie Bockel, homme sympathique, (Rires sur les travées du groupe socialiste.) ...

M. François Autain. Un socialiste ! (Sourires sur les mêmes travées.)

M. Jean-Pierre Cantegrit. ...s'en prenne aux accords qui nous lient avec les pays africains amis de la France, reprenant à son compte ce qu'avait fait M. Jean-Pierre Cot, ministre délégué à la coopération de François Mitterrand, subissant ensuite le même sort que lui ?

M. François Autain. Deux socialistes ! (Sourires.)

M. Jean-Pierre Cantegrit. Les résultats ne se sont pas fait attendre : les relations se sont tendues, les deux chambres du Parlement gabonais se sont réunies en session extraordinaire, stigmatisant les actions qui violent la souveraineté des États et déstabilisent les pouvoirs établis ; des manifestations ont eu lieu devant l'ambassade de France, qui a été couverte de graffitis.

Le représentant des Français du Gabon, M. Michel Auguste, et les entrepreneurs français m'expriment leurs inquiétudes sur les conséquences du sentiment anti-français et du durcissement des conditions de délivrance des visas.

Il est grand temps, monsieur le secrétaire d'État, de reprendre sereinement les relations anciennes et amicales que nous avons avec le Gabon et avec son président Omar Bongo. (Applaudissements sur quelques travées de l'UMP.)

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)

M. Alain Joyandet, secrétaire d'État chargé de la coopération et de la francophonie. Monsieur le sénateur, les relations bilatérales entre la France et le Gabon restent vivaces et confiantes.

M. Charles Gautier. Encore la langue de bois !

M. Alain Joyandet, secrétaire d'État. Elles ont été marquées par la visite officielle du Président de la République le 27 juillet dernier à Libreville. De nombreuses visites ministérielles réciproques continuent de ponctuer nos échanges dans les domaines de l'économie, de la santé, de l'environnement...

M. Robert Hue. Et du pétrole !

M. Alain Joyandet, secrétaire d'État. J'envisage moi-même de me déplacer au Gabon à la fin du mois, ainsi d'ailleurs que dans d'autres pays africains, notamment au Sénégal et au Togo.

Les autorités gabonaises sont très impliquées dans le suivi de notre coopération, qui se définit en fonction des accords signés en 2005. Celle-ci est très active au Gabon et concerne trois secteurs : la forêt et l'environnement, les infrastructures et l'éducation.

Monsieur le sénateur, l'importance de notre action, la qualité des projets et le grand intérêt manifesté par les autorités gabonaises sont un gage de la durabilité de notre coopération, que, me semble-t-il, vous appelez de vos voeux, monsieur le sénateur.

Dans votre question, vous avez fait référence à différents malentendus ou incompréhensions, qui ont été levés à ce jour.

S'agissant de l'immigration, l'accord relatif à la gestion des flux migratoires doit être prochainement ratifié par le Parlement, ce qui constitue un point très positif. Cet accord facilite l'accès à l'emploi des étudiants gabonais ; nous ferons tout pour qu'ils puissent être diplômés en France. Le flux migratoire concernera également certaines catégories de salariés.

En 2007, la France a délivré 11 105 visas à des Gabonais, pour 12 697 demandes, soit un taux d'acceptation de 87 %. Comme vous pouvez le constater, la situation est donc très positive.

L'enquête préliminaire que vous évoquez a été classée le 15 novembre 2007...

M. Alain Joyandet, secrétaire d'État. ... et vous comprendrez qu'il n'appartient pas au Gouvernement de commenter les décisions prises par les autorités judiciaires.

M. Alain Joyandet, secrétaire d'État. La France et le Gabon entretiennent donc un dialogue serein, qui caractérise habituellement leurs échanges.

Le discours prononcé par le Président de la République au Cap, à la fin du mois de février, a tracé la direction de nos échanges. Il ne reste plus au Gouvernement qu'à appliquer l'ensemble des orientations évoquées. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)