M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Ce n’est pas ce que cela veut dire !

M. Yvon Collin. … ce que je ne peux évidemment accepter, en ma qualité de président d’un groupe qui est de nouveau présent sur tous les fronts et intervient dans tous nos débats.

Donner la pleine mesure à la transformation radicale du travail parlementaire résultant de la révision constitutionnelle, c’est aussi tirer les conséquences pratiques du rôle central désormais dévolu aux commissions.

Dans ces nouvelles conditions, la sérénité et le sérieux du travail parlementaire rendent nécessaires une transparence maximale des travaux des commissions. La nature même des réunions des commissions a changé et nous ne pourrons plus très longtemps nous dérober à une pleine et entière publicité de ces travaux, car ces réunions sont appelées à devenir de véritables séances publiques en miniature, drapées des mêmes attributs que nos séances publiques : comptes rendus intégraux des débats, présence de certains de nos collaborateurs pour faciliter le travail des groupes, retransmission en direct et présence de la presse.

Qu’on le veuille ou non, cette évolution est inéluctable et s’inscrit pleinement dans l’avènement d’une démocratie parlementaire de plein exercice. Je le crois vraiment. On ne saurait tempérer ce processus de fond par des considérations purement logistiques. Je dois vous avouer, monsieur le rapporteur, que le seul argument que vous m’avez donné lors de mon audition, à savoir l’absence d’une salle suffisamment grande, ne m’a pas convaincu. C’est pourquoi, avec certains collègues présidents de groupe et dans le prolongement d’un courrier que nous avions adressé à M. le président du Sénat le 18 février dernier, nous proposerons à la Haute Assemblée d’amorcer l’accompagnement de cette évolution, en présentant notre amendement n° 40 rectifié.

Monsieur le président, mes chers collègues, le règlement de notre Haute Assemblée n’est pas un « règlement intérieur » qui n’aurait vocation qu’à définir les droits et devoirs des parlementaires. Il est au contraire le bien commun de l’ensemble du Sénat et l’indispensable support de la libre expression des sensibilités de notre pays et de ses territoires. Le fait majoritaire est la règle de base de toute vie démocratique, mais il ne peut conduire à rendre invisibles ou inaudibles les minorités, a fortiori lorsqu’il n’y a pas, comme c’est le cas aujourd’hui au sein de notre assemblée, de majorité absolue, cela a été rappelé. Les majorités sont à construire en permanence et au coup par coup sur chaque texte et sur chaque amendement : c’est le débat qui en sort grandi !

Monsieur le président, mes chers collègues, il est temps que notre règlement prenne acte de toutes ces évolutions et de ce besoin de renforcer la diversité et les minorités au sein des assemblées parlementaires. C’est d’ailleurs le sens de nos amendements.

Aussi, pour toutes ces raisons, les membres de mon groupe et moi-même ne pourrons voter en faveur de la proposition de résolution dans sa rédaction actuelle.

En revanche, notre vote dépendra du sort qui sera réservé à nos propositions et à nos amendements.

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. C’est du chantage !

M. Yvon Collin. Un Parlement plus fort et une démocratie parlementaire rénovée, c’est d’abord un règlement qui assure des droits substantiels à l’opposition,…

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. C’est le cas !

M. Yvon Collin. … confère des prérogatives réelles aux minorités et permet la transparence de tous les débats. C’est à ce prix que nous entrerons alors peut-être dans l’ère, trop vite annoncée sans doute, de « l’hyper-Parlement ». (Applaudissements sur certaines travées du RDSE et certaines travées socialistes. – M. Nicolas About applaudit également.)

M. le président. La parole est à Mme Alima Boumediene-Thiery.

Mme Alima Boumediene-Thiery. Monsieur le président, mes chers collègues, il m’est difficile en trois minutes d’exposer la totalité des positions des Verts sur cette proposition de résolution tendant à modifier le règlement du Sénat, je m’en tiendrai donc à l’essentiel et je demande par avance l’indulgence de la présidence.

Selon nous, ce règlement est avant tout la codification fidèle d’une réforme constitutionnelle, réforme que nous avions refusée, mais qui est certes adoptée aujourd’hui.

Le Sénat a donc une compétence liée dans l’élaboration de ce règlement, il ne faut pas l’oublier, et cela se ressent à la lecture du texte qui nous est présenté aujourd'hui.

Je ne reviendrai pas sur les acquis de cette réforme, le partage de l’ordre du jour, le développement du contrôle de l’action du Gouvernement, ni même sur les droits – partiels – acquis par les groupes parlementaires.

C’est là le fruit du consensus qui a émergé des travaux du groupe de travail sur la révision constitutionnelle et la réforme du règlement, d’autres intervenants l’ont dit.

Mes premières remarques concernent la prétendue amélioration des droits du Parlement et la qualité du processus législatif.

À l’évidence, la nouvelle procédure a permis, en particulier au Sénat, de mieux affirmer ses positions et ainsi de mieux défendre son point de vue sur plusieurs textes d’une importance capitale, comme le projet de loi pénitentiaire.

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. C’est vrai !

Mme Alima Boumediene-Thiery. Nous avons souhaité bénéficier de plus de temps pour élaborer nos lois. Néanmoins, depuis le mois de mars, le temps s’est accéléré, les travaux des commissions n’ont jamais été aussi intenses !

Sur un travail accru en commission, s’est greffée une pratique abusive de la procédure accélérée, devenue le mode opératoire classique d’un gouvernement plus soucieux du nombre de textes que de leur qualité.

Il est vrai que le chef de l’État a une obsession : faire du chiffre, partout faire du chiffre !

Comment expliquer que l’amélioration de la procédure législative se traduise par un recours accru à la procédure accélérée ? N’est-ce pas là un paradoxe, qui vide de tout son sens l’objectif premier de cette réforme : donner au Parlement un pouvoir de maîtrise du processus législatif ?

Notre sentiment est justement que le premier perdant est le Parlement : l’urgence est aujourd’hui le maître mot de toute réforme. L’émotion est toujours, si ce n’est plus, la motivation première du Gouvernement pour légiférer et la qualité des lois s’en ressent de manière encore plus forte.

Nous n’avons pas plus qu’hier le temps de légiférer, ni plus de liberté : le Gouvernement reste, par l’entremise d’une majorité faisant allégeance, le véritable architecte de la procédure législative.

L’autre point important concerne le fonctionnement démocratique de la Haute Assemblée.

On ne trouve aucune trace, dans ce règlement, de toute référence à l’absentéisme, ni même au mode de votation. C’est pourtant là le cœur même de la démocratie parlementaire : nous sommes élus pour siéger, c’est-à-dire pour exercer notre mandat de manière effective.

Pas un mot sur l’absentéisme, qui est, à mon sens, l’une des raisons majeures de la défiance du public à l’égard de nos travaux en particulier, et des politiques en général. (M. Nicolas About applaudit.)

M. Michel Charasse. Quand on est 300, on ne peut pas travailler !

Mme Alima Boumediene-Thiery. Aucune référence à toute sanction financière, pourtant, et malheureusement, seul outil propre à assurer la présence effective des parlementaires, et donc à rompre avec les pratiques abusives du cumul des mandats.

Pas un mot non plus sur les abus du recours au scrutin public, qui permet, aujourd’hui, à un parlementaire de voter pour l’ensemble de ses collègues, ou au Gouvernement d’étouffer les dissidences au sein de sa majorité, ou encore de faire croire aux citoyens qu’une large majorité a adopté une loi, alors que ce ne sont que des fauteuils qui ont voté... (Applaudissements sur quelques travées du groupe socialiste. – M. le président de la commission des lois s’exclame.)

Tel est là, me semble-t-il, le défaut majeur de cette proposition de résolution : elle évite soigneusement d’ouvrir la boîte de Pandore ! Et pour cause, nous le savons tous, le Conseil constitutionnel veille au respect du principe constitutionnel du caractère personnel du vote. Selon ce principe, le vote ne peut être délégué qu’à une seule personne, nommément désignée.

C’est d’ailleurs la raison pour laquelle l’Assemblée nationale, sous la présidence de Philippe Séguin, avait choisi de se conformer à ce principe en modifiant son règlement intérieur.

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Il a eu tort !

Mme Alima Boumediene-Thiery. Il lui a fallu du courage pour imposer ce principe, aujourd’hui largement respecté.

Au Sénat, on nous propose de maintenir le mode de scrutin public en l’état.

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Très bien !

Mme Alima Boumediene-Thiery. Pire encore, on évite soigneusement d’en parler dans le règlement, pour une raison simple : la peur du Conseil constitutionnel, qui examinera ce règlement, et aurait pu relever l’inconstitutionnalité d’une telle pratique.

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Mais non !

Mme Alima Boumediene-Thiery. On nous propose donc de nous en tenir aux principes non écrits et d’avaliser ce qui n’est rien d’autre qu’une pratique contraire à la Constitution !

Si l’objet de cette réforme est d’améliorer le fonctionnement démocratique de notre assemblée, la moindre des choses aurait été de respecter la Constitution, ce qui n’est pas le cas avec le système de votation actuel. Nous verrons qui, au sein de la Haute Assemblée, aura le courage de rompre avec ces pratiques et votera en faveur de l’amendement que nous présenterons sur ce sujet.

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Si les débats étaient moins longs, ce serait plus facile !

Mme Alima Boumediene-Thiery. Pour toutes ces raisons, nous avons déposé des amendements visant à remédier à ces carences, et ce dans le strict respect de la Constitution.

C’est pourquoi je vous encourage, mes chers collègues, à être plus ambitieux pour notre assemblée et pour notre démocratie. (Applaudissements sur quelques travées du groupe socialiste.)

M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...

La discussion générale est close.

Nous passons à la discussion des articles du texte élaboré par la commission des lois.

Discussion générale (suite)
Dossier législatif : proposition de résolution tendant à modifier le Règlement du Sénat pour mettre en oeuvre la révision constitutionnelle, conforter le pluralisme sénatorial et rénover les méthodes de travail du Sénat
Articles additionnels avant l'article 2

Article 1er

Composition du Bureau du Sénat

I. - L'article 3 du Règlement est ainsi modifié :

1° Au 1, les mots : « respectivement élus pour trois ans, » sont supprimés et le mot : « nommés » est remplacé par le mot : « désignés » ;

1° bis (nouveau) Au début du 5, les mots : « Des scrutateurs tirés au sort » sont remplacés par les mots : « Les secrétaires d'âges » ;

2° Les alinéas 7 à 13 sont remplacés par cinq alinéas ainsi rédigés :

« 7. - Après l'élection du Président, les présidents des groupes se réunissent pour établir les listes des candidats aux fonctions de vice-président, de questeur et de secrétaire selon la représentation proportionnelle des groupes au plus fort reste. La représentation proportionnelle est calculée d'abord pour les postes de vice-président et de questeur, compte tenu de l'élection du Président, puis pour l'ensemble du Bureau. Ces listes sont remises au Président qui les fait afficher.

« 8. - Pendant un délai d'une heure, il peut être fait opposition à ces listes pour inapplication de la représentation proportionnelle. L'opposition, pour être recevable, doit être rédigée par écrit, signée par trente sénateurs au moins ou le président d'un groupe, et remise au Président.

« 9. - À l'expiration du délai d'opposition, s'il n'en a pas été formulé, les listes des candidats sont ratifiées par le Sénat et le Président procède à la proclamation des vice-présidents, des questeurs et des secrétaires.

« 10. - Si, à l'inverse, le Président a été saisi d'une opposition, il la porte à la connaissance du Sénat qui statue sur sa prise en considération, après un débat où peuvent seuls être entendus un orateur pour et un orateur contre, disposant chacun d'un temps de parole ne pouvant excéder cinq minutes.

« 11. - Le rejet de la prise en considération équivaut à la ratification de la liste présentée, dont les candidats sont sur-le-champ proclamés par le Président. La prise en considération entraîne l'annulation de la liste litigieuse. Dans ce cas, les présidents des groupes se réunissent immédiatement pour établir une nouvelle liste sur laquelle il est statué dans les mêmes conditions que pour la première. »

II (nouveau). - Au 5 de l'article 6 du Règlement, la référence : « alinéa 9 » est remplacée par la référence : « alinéa 7 ».

M. le président. L'amendement n° 41, présenté par Mmes Borvo Cohen-Seat, Assassi, Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :

Après la deuxième phrase du deuxième alinéa (7) du 2° du I de cet article, insérer une phrase ainsi rédigée :

Chaque groupe a droit à au moins un poste de vice-président ou de questeur.

La parole est à M. Guy Fischer.

M. Guy Fischer. Notre amendement, qui n’est pas le fruit de la seule réflexion de mon groupe, reprend la proposition formulée par le groupe de travail présidé par M. Larcher, laquelle était retranscrite noir sur blanc dans le document de synthèse dudit groupe.

La reconnaissance, dans le règlement même, du principe selon lequel chaque groupe politique du Sénat détiendrait un poste de vice-président ou de questeur constituait, selon nous, une application claire et précise de la reconnaissance, par la Constitution, du rôle des groupes politiques.

On me dira de faire les comptes : le système proposé par le texte de la proposition de résolution nous donne satisfaction.

Certes, toutefois, nous légiférons non pas pour le seul instant présent, mais également pour un avenir plus ou moins lointain. Surtout, il s’agit d’inscrire dans le règlement un principe qui devrait être incontestable et incontesté.

En effet, il ne serait pas acceptable de demander plus encore aux groupes de participer à une activité croissante, que nous estimons parfois inefficace, sans les associer à l’organisation des travaux et à la vie du Sénat.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Patrice Gélard, rapporteur. Le groupe de travail sur la réforme du règlement a relevé que le nombre de groupes n’était pas fixé par le règlement du Sénat et que quinze sénateurs suffisaient pour former un groupe.

Par conséquent, une règle permettant à chaque groupe d’avoir droit à au moins un poste de vice-président ou de questeur pourrait, en cas de multiplication des groupes, aboutir à un nombre particulièrement important de vice-présidents et de questeurs, à savoir vingt-deux selon la composition actuelle.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Vous êtes pessimiste ! (Sourires.)

M. Patrice Gélard, rapporteur. Il semble préférable d’en rester à l’équilibre fixé par la résolution du 29 octobre 2008, qui a porté de six à huit le nombre de vice-présidents, pour assurer une meilleure représentation des groupes au sein du bureau.

En conséquence, la commission a émis un avis défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 41.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. L'amendement n° 17 rectifié, présenté par MM. Charasse, Chevènement et Vall, est ainsi libellé :

I. - Compléter le 2° du I de cet article par un alinéa ainsi rédigé :

« 12. - Si, pour l'élection des vice-présidents et des questeurs, le nombre des candidats, en sus de ceux figurant sur la liste visée au 7, est supérieur au nombre de sièges à pourvoir, le Sénat statue au scrutin secret par bulletins plurinominaux. »

II. - En conséquence, dans le premier alinéa du même 2°, remplacer le mot :

cinq

par le mot :

six

La parole est à M. Michel Charasse.

M. Michel Charasse. Cette disposition, qui concerne l’élection du bureau du Sénat, prévoit que, désormais, la liste des candidats sera établie par les présidents de groupe, et qu’il ne sera pratiquement plus possible de s’y opposer.

Si n’importe quel sénateur conserve le droit d’être candidat à la présidence du Sénat, il lui sera désormais interdit d’être candidat à un autre poste au bureau du Sénat, puisque toute candidature sera subordonnée à l’accord des présidents de groupe.

Pour ma part, je considère que cette disposition est inconstitutionnelle en tant qu’elle introduit un mandat impératif, fait se substituer les groupes au droit individuel des sénateurs, et donne une interprétation extensive de l’article 4 de la Constitution selon lequel « les partis et groupements politiques concourent à l’expression du suffrage », mais ils ne font qu’y concourir ! Si, comme l’a dit tout à l'heure Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, la révision constitutionnelle a conforté le rôle des groupes, elle ne leur a pas donné le monopole, et ceux-ci ne sauraient se substituer au droit individuel des sénateurs.

Mes chers collègues, à l’heure actuelle, le système de l’accord des présidents de groupe existe. Toutefois, si un sénateur n’est pas d’accord, il peut toujours se porter candidat, ce qui donne lieu à un scrutin. Dans le système futur, outre le fait de pouvoir librement être candidat à la présidence du Sénat, il sera impossible à un sénateur qui n’est pas d’accord d’être ensuite candidat à un poste de vice-président ou de questeur, étant entendu que ce système existe déjà pour les secrétaires.

Je considère que cette disposition n’est pas conforme à la Constitution, car elle introduit au plus profond de la Constitution de 1958 ce que celle-ci avait voulu rejeter, à savoir le régime des partis.

Par conséquent, je propose de donner la possibilité à un sénateur qui ne figure pas sur la liste retenue par les présidents de groupe, mais souhaite être candidat au poste de vice-président ou de questeur de déposer sa candidature, afin d’obtenir un vote du Sénat. Qu’il soit élu ou pas, c’est une autre paire de manches…

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Patrice Gélard, rapporteur. La proposition de résolution, conformément aux dispositions de l’article 51-1 de la Constitution, issu de la révision du 23 juillet 2008, renforce le rôle des groupes.

M. Michel Charasse. Pas du monopole !

M. Patrice Gélard, rapporteur. Ainsi, la désignation des membres du bureau, à l’exception du président, procéderait de listes établies par les groupes, afin d’assurer le respect de la représentation proportionnelle. Ce dispositif, qui est déjà appliqué pour les secrétaires du Sénat, ne paraît en rien contraire à la Constitution, laquelle reconnaît désormais le rôle des groupes.

De plus, les listes présentées peuvent faire l’objet d’opposition. Il s’agit en fait d’un régime de désignation par consensus et d’un domaine qui relève de la libre organisation des assemblées parlementaires.

En conséquence, la commission a émis un avis défavorable sur cet amendement.

M. le président. La parole est à M. Michel Charasse, pour explication de vote.

M. Michel Charasse. Je veux répondre à notre estimable rapporteur que, si une formule d’opposition est effectivement prévue, les présidents des groupes se réunissent pour établir les listes des candidats aux fonctions de vice-président, de questeur et de secrétaire et, s’ils confirment leur liste, cela vaut ratification. Jusqu’à nouvel ordre, je sais lire, et j’ai le texte sous les yeux !

Par conséquent, je le répète, il s’agit là de l’introduction dans la Constitution de 1958 du régime des partis, ce qui est contraire aux principes républicains selon lesquels tout sénateur, ou tout député, a parfaitement le droit d’être candidat à n’importe quelle fonction au sein de son assemblée.

M. le président. La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, pour explication de vote.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Cet amendement est incompatible avec la reconnaissance des groupes introduite dans la Constitution et, surtout, avec l’application de la proportionnelle pour la désignation des membres du bureau du Sénat.

M. Patrice Gélard, rapporteur. Évidemment !

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. L’amendement de notre collègue aurait pu être acceptable dans l’ancien règlement, mais on ne voit pas comment l’actuelle représentation proportionnelle des groupes pourrait ne pas conduire de facto à la représentation de l’importance des groupes.

M. Michel Charasse. Il peut y avoir une liste concurrente !

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Certes, mais il faudrait qu’elle soit présentée au niveau du groupe. Pour que le texte constitutionnel trouve une application pratique dans notre règlement, il ne saurait y avoir de candidatures individuelles qui s’opposeraient à la liste des membres désignés par les présidents de groupe, car cela reviendrait à nier la représentation des groupes.

M. le président. La parole est à M. le président de la commission.

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Si cette disposition est inconstitutionnelle, le règlement de l'Assemblée nationale est inconstitutionnel depuis très longtemps ! En effet, la désignation des candidats au poste de vice-président a toujours été faite à la proportionnelle, et ce sur proposition des groupes. Il est bien évident que chacun fait ce qu’il veut au sein des groupes !

M. Michel Charasse. Et que fait celui qui n’appartient à aucun groupe ?

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Le fait de n’appartenir à aucun groupe ne vous donne pas tous les droits !

M. Michel Charasse. Si, tous les droits d’un sénateur !

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Monsieur Charasse, comment fonctionnerait un Parlement sans groupes parlementaires ? Voilà une bien curieuse conception !

M. Michel Charasse. On est sénateur avant d’être membre d’un groupe !

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Quoi qu’il en soit, cette disposition n’est pas anticonstitutionnelle dans la mesure où, je le répète, le règlement de l'Assemblée nationale la prévoit, et personne n’a jamais trouvé à y redire !

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Chevènement, pour explication de vote.

M. Jean-Pierre Chevènement. J’interviens en faveur de cet amendement.

La question est non pas de savoir si cet amendement est constitutionnel, mais de faire la part entre, d’une part, le groupe politique, qui est reconnu dans la Constitution, et, d’autre part, chaque sénateur, qui est l’expression de la souveraineté nationale.

Le groupe n’a pas un poids tel que chaque sénateur disparaît derrière lui !

M. Patrice Gélard, rapporteur. En la matière, si !

M. Jean-Pierre Chevènement. Il faut trouver un certain équilibre. Si un sénateur se porte candidat, le Sénat décidera, car c’est lui qui aura, en définitive, le dernier mot !

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Il faudrait modifier la Constitution !

M. le président. La parole est à M. François Fortassin, pour explication de vote.

M. François Fortassin. Mes chers collègues, cet amendement me paraît être frappé du sceau de l’esprit républicain. On ne peut empêcher un sénateur d’être candidat à un poste quelconque, même s’il est bien entendu souhaitable qu’un consensus se dégage autour des candidatures.

Si l’on va jusqu’au bout du raisonnement, on doit dire que le président du Sénat ne peut être issu que du groupe le plus important, …

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois et M. Patrice Gélard, rapporteur. Non !

M. François Fortassin. … les autres ne pouvant pas être candidats !

M. Jean-Louis Carrère. C’est souvent le cas ! (Rires.)

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Cela n’a pas toujours été le cas !

M. François Fortassin. Mais ce n’est pas pour autant que l’esprit républicain est pleinement respecté !

En conséquence, cet amendement me paraît parfaitement équilibré.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Il y a des candidats officiels et des candidats officieux !

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 17 rectifié.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 1er.

(L'article 1er est adopté.)