Administration générale et territoriale de l'État
Dossier législatif : projet de loi de finances  pour 2010
Sécurité civile

M. le président. Nous allons procéder à l’examen des crédits de la mission « Administration générale et territoriale de l’État », figurant à l’état B.

État B

(En euros)

Mission

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

Administration générale et territoriale de l'État

2 598 224 001

2 596 413 439

Administration territoriale

1 733 570 353

1 734 039 308

Dont titre 2

1 437 683 064

1 437 683 064

Vie politique, cultuelle et associative

270 895 844

268 519 420

Dont titre 2

35 647 535

35 647 535

Conduite et pilotage des politiques de l'intérieur

593 757 804

593 854 711

Dont titre 2

318 049 837

318 049 837

M. le président. L'amendement n° II-48, présenté par MM. P. Dominati et Milon, est ainsi libellé :

Modifier comme suit les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

+

-

+

-

Administration territoriale

Dont titre 2

 

 

 

 

Vie politique, cultuelle et associative

Dont titre 2

 

2.407.932

 

2.280.000

Conduite et pilotage des politiques de l'intérieur

Dont titre 2

 

 

 

 

TOTAL

 

2.407.932 

 

2.280.000 

SOLDE

- 2.407.932

- 2.280.000

La parole est à M. Philippe Dominati.

M. Philippe Dominati. Les partis politiques, ainsi que les syndicats, sont évidemment essentiels à la vie de la nation.

L’année dernière, j’avais proposé un amendement de même inspiration que celui-ci. Ce dernier tend à associer tous les organismes qui dépendent des fonds publics, du budget de l’État, aux efforts qu’impose la conjoncture économique du pays.

Cette année, le budget est historique par l’ampleur de son déficit. Le PIB français est en régression. La crise est mondiale. Or, si la France souffre, certains organismes d’État se portent assez bien. Les dépenses publiques ne diminuent pas, ainsi que je l’ai indiqué dans la discussion générale.

J’ai donc déposé, reprenant l’idée avancée l’année dernière par un grand nombre de parlementaires, divers amendements qui vont tous dans le même sens et affectent certains organismes publics ou agences extérieures de l’État.

Cette année, la mobilisation est plus faible, sans doute dans l’attente de la concertation annoncée par Mme Michèle Alliot-Marie, concertation qui devait concerner les formations politiques sur le plan national pour ne pas déséquilibrer les plus faibles d’entre elles. Qu’est-il donc advenu de cette concertation attendue depuis l’an dernier par une quarantaine de mes collègues ?

Mon amendement vise à baisser de 3  % la dotation publique de financement des formations politiques : 3  %, c’est à peu près la perte du PIB de notre pays. Je demande finalement, au nom d’une sorte de similitude, aux agences extérieures de l’État et à un certain nombre d’organismes publics de faire un effort. J’ai lu dans la presse que le ministre du budget avait appelé à une réduction de 10 % sur les frais de fonctionnement. Or, dans les partis politiques, ces frais sont élevés. Demander une réduction de 3 % de la dotation publique de financement des formations politiques me paraît tout à fait raisonnable !

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Michèle André, rapporteur spécial. C’est vrai que, l’an passé, Mme la ministre s’était engagée à une concertation.

L’article  8 de la loi de 1988 relative à la transparence financière de la vie politique précise que le montant des crédits inscrits dans le projet de loi de finances de l’année pour être affecté au financement des groupements politiques peut faire l’objet, de la part des bureaux de l’Assemblée nationale et du Sénat, de propositions conjointes au Gouvernement.

L’amendement déposé à l’automne dernier aurait dû entraîner au cours de l’année une réflexion au sein du ministère. Qu’en est-il, monsieur le secrétaire d’État ?

J’ai mûrement réfléchi. Alors que l’on parle beaucoup de la nécessaire exemplarité des partis politiques – elle n’est pas vraiment convaincante s’agissant de la parité entre les hommes et les femmes –, on constate que, cette année, 5,4 millions d’euros n’ont pas été distribués au titre de cette fraction. En conséquence, je suivrai M. Dominati sur cette question et voterai l’amendement. J’aimerais néanmoins connaître l’avis du Gouvernement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Alain Marleix, secrétaire d'État. Je pense qu’on ne peut pas vouloir une chose et son contraire, c’est-à-dire souhaiter une véritable transparence financière de la vie politique et supprimer les moyens accordés aux partis politiques !

L’aide publique d’État a été créée dès 1988 en vue d’apporter un soutien nécessaire aux partis politiques pour permettre leur expression politique, conformément à l’article 4 de la Constitution : «  Les partis politiques concourent à l’expression de la démocratie. »

Malgré l’inflation, le montant inscrit en loi de finances au titre de l’aide publique – 40 millions d’euros pour chacune des deux fractions – n’a pas varié depuis quinze ans. Les partis politiques ont donc contribué ainsi directement à l’effort budgétaire.

Quant à la concertation évoquée par Mme Michèle Alliot-Marie, nous allons y procéder au début de l’année 2010, avec M. le ministre de l’intérieur.

Le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur l’amendement n° II-48.

M. le président. La parole est à M. le président de la commission des finances.

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. La démocratie n’a pas de prix. Le financement de la vie politique répond à une nécessité, et il faut préserver les partis politiques de toutes les contributions qui mettraient en péril leur indépendance.

Toutefois, dans le contexte financier que nous traversons, peut-être serait-il bon de donner un signal et de suivre la voie tracée par M. Dominati. Les partis politiques ne sont-ils pas les premiers à requérir une maîtrise de la dépense publique ? À titre personnel – la commission n’en a pas délibéré –, je voterai cet amendement.

M. le président. La parole est à M. Robert del Picchia, pour explication de vote.

M. Robert del Picchia. Je trouve la démarche de notre collègue très sympathique. Mais je suis extrêmement ennuyé parce que je devine que tous les partis politiques, de droite comme de gauche, vont avoir besoin d’un peu plus d’argent !

Ainsi, compte tenu de la révision constitutionnelle, il y aura bientôt onze députés pour représenter les Français de l’étranger à l’Assemblée nationale.

Mme Nathalie Goulet. La belle affaire !

M. Robert del Picchia. Les partis politiques auront donc besoin, pour les élections, de plus d’argent.

Je suis par conséquent d’accord sur le principe et conviens qu’un geste serait bienvenu. Mais, dans le cas précis, l’argent retiré risque de manquer. Et les Français de l’étranger, qui ne sont pas physiquement présents ici, me reprocheraient de ne pas être intervenu pour défendre leurs intérêts. Ma position est un peu difficile, mais je suis obligé de parler en leur nom, quitte à susciter le mécontentement des autres !

Voilà pourquoi je ne voterai pas cet amendement, tout en reconnaissant que l’intention est bonne.

M. Alain Marleix, secrétaire d'État. On peut aussi suggérer les élections à un tour ! (Sourires.)

M. le président. La parole est à M. Philippe Dominati, pour explication de vote.

M. Philippe Dominati. Je maintiens cet amendement pour des raisons symboliques, même si je ne m’attends pas à ce qu’il rencontre beaucoup plus de succès que mes précédentes propositions tendant à réaliser des économies !

Je ne focalise pas sur les formations politiques. Comme l’ensemble des membres de cette assemblée, je les considère comme absolument nécessaires à la démocratie. Mais ma démonstration vise l’ensemble du train de vie d’un certain nombre d’organismes.

Je suis heureux, monsieur le secrétaire d'État, d’apprendre qu’un calendrier est enfin fixé : au moins a-t-on pris conscience de la nécessité de faire quelque chose en cette année exceptionnelle.

Cependant, j’ai présenté en première partie du projet de loi de finances un autre amendement, déposé par Charles Revet, qui visait à donner aux parlementaires la possibilité de faire, en fonction de leurs convictions personnelles et sans être automatiquement encadrés par la lourde machine de l’État, un geste d’économie pour participer au financement de leur parti politique.

L’abondement étant automatique pour une liste officielle de douze formations politiques, un parlementaire aurait par exemple pu décider de faire personnellement une économie de 5 % ou de 10 % de la dotation.

Cette liberté, pourtant proclamée dans notre devise nationale, a été refusée aux élus, ainsi privés de la faculté d’adapter l’effort en fonction de la conception individuelle qu’ils ont de leur mandat.

Si tel n’avait pas été le cas, j’aurais peut-être pu attendre la concertation ; mais, les choses étant ce qu’elles sont, je maintiens l’amendement n° II-48.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° II-48.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Nous allons procéder au vote des crédits de la mission « Administration générale et territoriale de l’État », figurant à l’état B.

Je n’ai été saisi d’aucune demande d’explication de vote avant l’expiration du délai limite.

Je mets aux voix ces crédits.

(Ces crédits sont adoptés.)

M. le président. Nous avons achevé l’examen des crédits de la mission « Administration générale et territoriale de l’État ».

Sécurité civile

Article 35 et état B
Dossier législatif : projet de loi de finances  pour 2010
Article 35 et état B (début)

M. le président. Le Sénat va examiner les crédits de la mission « Sécurité civile ».

La parole est à M. le rapporteur spécial.

M. Claude Haut, rapporteur spécial de la commission des finances. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, en 2010, la mission « Sécurité civile » sera dotée de 420,4 millions d’euros en autorisations d’engagement et de 427,3 millions d’euros en crédits de paiement, soit une hausse modérée de 1,8 % par rapport à 2009.

Le programme « Intervention des services opérationnels » s’appuiera sur 265,4 millions d’euros, tandis que le programme « Coordination des moyens de secours » bénéficiera de 161,8 millions d’euros.

Ce budget vise à remplir la feuille de route fixée à la fois par le Livre blanc sur la défense et la sécurité nationale et par la révision générale des politiques publiques.

Le Livre blanc a arrêté quatre grandes orientations : le renforcement des capacités de lutte face aux menaces de type nucléaire, radiologique, biologique, chimique et explosif ; la rénovation du système d’alerte et d’information des populations ; la mise en place d’un dispositif d’alerte pour faire face au risque de tsunami, avec la création du Centre national d’alerte pour la zone de l’Atlantique du Nord-Est et en Méditerranée ; enfin, le renforcement de l’échelon zonal en matière de gestion interministérielle des crises.

Par ailleurs, dans le cadre de la RGPP, la direction de la sécurité civile s’est vue assigner l’objectif d’optimiser ses moyens aériens, en rationalisant notamment la maintenance des avions par la passation de nouveaux marchés.

En outre, la RGPP vise à mutualiser les fonctions support des flottes hélicoptères, ainsi qu’à optimiser l’implantation des bases héliportuaires.

L’examen de cette mission amène, bien évidemment, à évoquer la question de son articulation avec les collectivités territoriales.

En effet, le budget prévisionnel des SDIS, les services départementaux d’incendie et de secours, pour 2009 représente plus de dix fois celui de la mission « Sécurité civile », avec 5,4 milliards d’euros de crédits.

Faut-il rappeler que les collectivités, et notamment les départements, financent plus de 95 % des dépenses de fonctionnement des SDIS ?

Dans le même temps, le FAI, le fonds d’aide à l’investissement des SDIS diminue de 4,7 % en 2010. Bien que cette baisse soit inférieure à ce qui avait été constaté les années précédentes, les crédits du FAI ont quand même été divisés par trois depuis 2006.

On ne peut que vivement regretter cette diminution permanente des crédits, d’autant qu’elle entraîne une charge supplémentaire pour les départements.

L’argument avancé par l’État – les crédits ne sont pas intégralement consommés – n’est pas recevable et ne peut pas servir à justifier ces nouvelles diminutions. Les SDIS sont d’ailleurs demandeurs de plus d’aide à l’investissement.

Par ailleurs, comme en 2009, une partie du fonds contribuera à la mise en place d’ANTARES ou « adaptation nationale des transmissions aux risques et aux secours », réseau de communication partagé entre les différents services qui concourent aux missions de sécurité, dont les SDIS, les services de police et le SAMU.

Ce programme est entré dans sa phase de généralisation à l’ensemble du territoire, mais la question est de savoir si les moyens seront suffisants et s’ils seront répartis sur tout le territoire.

Enfin, la restructuration de l’Ecole nationale supérieure des officiers de sapeurs-pompiers – c’est une question qui vient régulièrement en discussion en commission des finances – s’est poursuivie en 2009, et l’installation de l’ENSOP à Aix-les-Milles deviendra définitive dès 2010.

En conclusion, la majorité de la commission des finances vous propose, mes chers collègues, d’adopter sans modification les crédits de la mission « Sécurité civile ». (Applaudissements au banc des commissions.)

M. le président. La parole est à Mme le rapporteur pour avis.

Mme Catherine Troendle, rapporteur pour avis de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, permettez-moi, en préliminaire à mon propos, de rendre hommage à tous les personnels de la sécurité civile, aux sapeurs-pompiers volontaires et professionnels, à tous les secouristes, à tous ces acteurs incontournables qui s’engagent au quotidien, au péril de leur vie, à sauver celle des autres.

Je pense à ceux qui ont été blessés et, plus particulièrement encore, à ceux qui sont décédés : neuf sapeurs-pompiers ont ainsi perdu la vie au cours de l’année 2009.

Monsieur le secrétaire d'État, je ne reviendrai pas en détail sur les éléments strictement budgétaires puisqu’ils ont été très précisément exposés par l’excellent rapporteur spécial, notre collègue Claude Haut.

Les crédits inscrits à la mission « Sécurité civile » sont en hausse de 1,8 % par rapport à l’exercice 2009, mais je ne peux que regretter que cette mission ne reflète qu’imparfaitement les crédits consacrés en France à la protection des populations, puisque d’autres ministères y participent et que les collectivités territoriales y jouent un rôle majeur. Je pense tout spécialement aux budgets des SDIS, qui, en 2008, ont été dix fois supérieurs au montant imputé à la mission.

Néanmoins, les budgets des SDIS devraient à présent pouvoir se stabiliser, voire baisser quelque peu dans la mesure où le ministre de l’intérieur a assuré les représentants des SDIS d’une « trêve » des normes.

En abordant le budget des SDIS, il y a lieu d’évoquer celui du FAI, qui accuse une diminution continue depuis 2007 pour s’établir, en 2010, à un montant de 22,34 millions d’euros. S’y ajoutent, bien sûr, les crédits consacrés à la réalisation de l’infrastructure ANTARES.

Je voudrais cependant rappeler, monsieur le secrétaire d'État, que les crédits inscrits pour le FAI ont baissé en raison de grosses difficultés de consommation, faute d’une véritable définition des projets prioritaires qui devaient porter sur les investissements structurants. Pourquoi, monsieur le secrétaire d'État, le décret qui devait précisément définir les projets prioritaires n’est-il toujours pas paru à ce jour ?

J’en viens à deux problématiques qui méritent à mon sens une attention toute particulière dans la mesure où elles reprennent les questions que j’avais exposées lors de la présentation de mon rapport sur cette même mission en 2008, questions qui n’ont toujours pas trouvé de réponse satisfaisante. Aussi, je me permets d’insister.

Monsieur le secrétaire d'État, je souhaite ainsi attirer d’abord votre attention sur l’obligation d’emploi de travailleurs handicapés dans la fonction publique territoriale pour les métiers soumis à des conditions d’aptitudes physiques particulières, dont les sapeurs-pompiers.

Je voudrais exprimer une véritable incompréhension face aux réponses successives des ministres de l’intérieur aux demandes réitérées concernant les difficultés rencontrées par les SDIS pour remplir leur obligation en matière d’emploi des travailleurs handicapés.

Ces services offrent en effet peu de postes permettant d’atteindre le taux légal de 6 % ; ils sont par conséquent assujettis au versement d’une contribution annuelle au Fonds pour l’insertion des personnes handicapées dans la fonction publique, ce qui grève lourdement leur budget.

Le fait que la majorité des sapeurs-pompiers reclassés pourraient désormais être considérés comme travailleurs handicapés ne répond que partiellement au problème posé.

Pourquoi les SDIS ne pourraient-ils pas, à l’instar des entreprises privées, bénéficier d’un régime modérateur spécifique par le biais d’un coefficient de minoration ?

Dès 2008, un bilan devait être dressé par le ministre de la fonction publique. Qu’en est-il ?

Enfin, il est un autre sujet qui me tient d’autant plus à cœur que je l’avais déjà abordé dans le contexte des projets de loi de finances pour 2008 comme pour 2009 : je veux parler de la culture de la sécurité civile.

La loi du 13 août 2004 de modernisation de la sécurité civile a imposé, dans ses articles 4 et 5, une obligation claire de formation scolaire à la prévention des risques et aux missions des services de secours, avec comme objectif de « faire du citoyen le premier acteur des secours ».

L’objectif majeur que nous devons rechercher est la diffusion de la culture de la sécurité civile, grâce à une réelle sensibilisation de la population aux risques ainsi qu’à un apprentissage de la conduite à tenir en cas de crise, afin de parvenir à une configuration optimale de tous les intervenants dans la chaîne de la sécurité civile.

Pourquoi ce qui est possible aux États-Unis, en Allemagne ou encore au Canada, où les actions de sensibilisation sont dispensées dès l’école maternelle, n’est-il pas réalisable en France ?

Une véritable prise en considération de cette démarche pourrait nous conduire à terme à développer sensiblement le volontariat et le recrutement de jeunes sapeurs-pompiers.

Le sujet est majeur et transversal, certes ; il émarge sur plusieurs ministères, comme toutes les missions dévolues à la sécurité et à la défense civiles ; mais, monsieur le secrétaire d'État, permettez-moi d’exprimer un vœu : un secrétariat d’Etat dévolu à cette mission serait une juste reconnaissance de l’importance de l’ensemble des actions menées dans le cadre de la sécurité civile qui, au-delà de l’implication sécuritaire, ont un réel impact sur la citoyenneté.

Cependant, cette dernière remarque dépasse sans doute ma mission de rapporteur, mission qui me conduit, monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, à vous indiquer que la commission des lois a donné un avis favorable à l’adoption des crédits de la mission « Sécurité civile » pour 2010. (Applaudissements sur les travées de lUMP.)

M. le président. J’indique au Sénat que la conférence des présidents a fixé pour cette discussion à cinq minutes le temps de parole dont chaque groupe dispose et à trois minutes celui dont dispose la réunion des sénateurs n’appartenant à aucun groupe.

Je vous rappelle également que l’intervention générale vaut explication de vote pour cette mission.

Par ailleurs, le Gouvernement dispose au total de vingt minutes pour intervenir.

La parole est à Mme Anne-Marie Escoffier.

Mme Anne-Marie Escoffier. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, avec la mission « Sécurité civile », nous entrons dans un domaine d’actions multi-partenariales, au sein même de l’État mais aussi avec les collectivités territoriales et le monde des entreprises.

Ce multi-partenariat complexifie assurément la lisibilité du budget de la mission « Sécurité civile ». Dès lors, relever une augmentation de 1,8 % de son budget ne traduit pas pleinement la réalité des efforts faits par les uns et les autres au bénéfice de la sécurité civile.

Je voudrais, à mon tour, souligner combien sont nécessaires ces efforts en faveur de personnes et de services dont la vocation unique est l’aide et le secours aux personnes et aux biens et qui font don sans compter de leur disponibilité, de leur compétence, parfois de leur vie, pour remplir cette mission. L’altruisme poussé jusqu’à l’extrême mérite bien notre hommage.

Je ne veux pas revenir ici sur les enveloppes budgétaires réservées à chacun des deux programmes, sauf à relever les difficultés supplémentaires que ne manqueront pas de supporter les conseils généraux, compte tenu de la modestie des dotations du Fonds d’aide à l’investissement. (M. le rapporteur spécial acquiesce.)

Je n’ignore pas que ce fonds d’aide, après avoir été réorienté, a désormais prioritairement pour objet le financement de moyens lourds ou/et structurants : améliorer la coordination interservices, mettre en place des plates-formes communes d’appels d’urgence, généraliser le réseau ANTARES, soit autant de domaines d’intervention « fléchés », en quelque sorte, pour l’obtention d’une aide en provenance de ce fonds. Or, du fait de la baisse de 4,7 % de ce fonds en 2010 et des contraintes techniques imposées par l’État, les SDIS n’auront d’autre ressource que de quémander auprès des collectivités les moyens financiers indispensables pour répondre à leurs obligations.

Je voudrais évoquer, monsieur le secrétaire d’État, au-delà des problèmes strictement budgétaires – même si mes questions auront ou ont des incidences budgétaires ! –, un problème structurel et un problème opérationnel.

L’organisation territoriale de l’État s’est faite autour de trois niveaux, définis par la loi : la région, le département et l’arrondissement. Néanmoins, les services chargés de la sécurité des personnes et des biens dépassent, pour des raisons de gestion et de bon exercice de leurs missions, ces périmètres, et adoptent plus généralement le périmètre zonal, qu’ils partagent avec les militaires de la défense.

Une question très concrète se pose : comment concilier, avec la meilleure efficacité, l’exercice de missions complémentaires assumées par des personnels de ressorts géographiques très différents ? Se posent, en effet, des problèmes de responsabilité, de prise en charge d’indemnités de déplacement, de commandement …

Je veux soulever un autre problème, celui des centres opérationnels. La « gestion de crise » est devenue une thématique récurrente, tant se sont multipliées les crises de toute nature, d’origine météorologique, sociétale ou environnementale.

Le ministère de l’intérieur, en tant que chef de file, s’est donné pour objectif non seulement d’équiper toutes les préfectures d’un centre opérationnel adapté à cette nouvelle forme de gestion, mais aussi d’intensifier la sensibilisation des populations sur les différents risques, par exemple le risque NRBCE, c’est-à-dire nucléaire, radiologique, biologique, chimique et explosif.

L’effort à conduire dans ce domaine est considérable, et tant financier qu’humain. Il s’est déjà traduit par l’adoption d’un principe, celui de la création du Centre national d’alerte aux tsunamis pour l’Atlantique Nord-Est et la Méditerranée occidentale, qui va mobiliser des sommes conséquentes sur plusieurs années.

Il s’est traduit aussi par la création d’un centre opérationnel interministériel dans les locaux mêmes du ministère de l’intérieur, place Beauvau, une implantation qui se substitue au site tout récent, me semble-t-il, d’Asnières.

Je sais, monsieur le secrétaire d’État, tout l’intérêt que vous portez à la sécurité civile, et votre attachement à ses personnels. Avec mes collègues du RDSE, nous sommes confiants dans votre volonté d’accompagner la modernisation et l’efficacité de ce service. C’est pourquoi nous voterons ce budget. (Applaudissements sur les travées du RDSE, de lUnion centriste et de lUMP.)

M. le président. La parole est à Mme Éliane Assassi.

Mme Éliane Assassi. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le budget de la sécurité civile, crédité à hauteur de 427 millions d’euros, est bien faible en comparaison de l’ensemble des missions qui lui incombent.

Ce budget n’est pas ambitieux ; je dirai même qu’il est faible. Pourquoi ? Tout simplement parce que ce sont les collectivités territoriales qui supportent l’essentiel des crédits d’une mission qui, pourtant, est éminemment régalienne.

La sécurité civile illustre parfaitement le désengagement de l’État, qui transfère des compétences vers des collectivités, pourtant déjà en phase d’asphyxie avancée, sans bien évidemment leur donner les moyens financiers de les assurer, voire de les assumer.

Vous avez donc une certaine audace lorsque vous mettez en avant la maîtrise des dépenses de cette mission, tout en pointant du doigt les erreurs de gestion des collectivités territoriales. Le plus surprenant, c’est que ces collectivités n’ont pas leur mot à dire, puisque les décisions sont prises au niveau de l’État. Vous ne respectez même pas le principe « qui paie commande » ! Le fait que les départements ne soient pas associés à la prise de décision peut pourtant nuire, du fait d’un manque de coordination, à la cohérence du dispositif, et surtout avoir des conséquences directes sur les finances des collectivités.

Vous soulignez les problèmes de gestion des SDIS en rappelant que, depuis l’achèvement de la départementalisation de ces services en 2001, leurs budgets ont augmenté de 50 %, alors que le nombre d’interventions ne connaît une hausse que de 10 % seulement. Or ce problème résulte de la loi du 3 mai 1996 relative aux services d’incendie et de secours et de la loi du 13 août 2004 de modernisation de la sécurité civile, mais encore et surtout du désengagement de l’État.

Les crédits du programme « Coordination des moyens de secours » sont en baisse de 21 % en autorisations d’engagement, avec un budget de 146 millions d’euros.

De même, le Fonds d’aide à l’investissement des services départementaux d’incendie et de secours diminue une nouvelle fois : il ne reçoit plus que 22,35 millions d’euros, sous les prétextes fallacieux d’une situation budgétaire difficile et de la sous-consommation chronique des crédits de ce fonds. Or il faut, au contraire, augmenter significativement ces crédits et instaurer un véritable programme d’investissement en matière d’équipements et de matériels, car ceux-ci font cruellement défaut.

Nous ne cautionnons pas l’idée, qui trouve bien évidemment sa source dans la RGPP, d’un regroupement des casernes et d’un gel du recrutement, dans l’optique d’une réduction des dépenses. La sécurité civile ne doit pas pâtir de votre croisade contre la baisse des dépenses publiques.

Cela s’inscrit, en effet, dans la suite des regroupements, et donc des fermetures, de casernes militaires, d’hôpitaux et de tribunaux, qui sont le symbole du désengagement de la présence de l’État sur l’ensemble du territoire, ce que démontre, par ailleurs, la future « réforme » des collectivités territoriales que nous allons bientôt examiner.

Nous souhaitons, pour notre part, que l’État assume sa responsabilité en matière de sécurité civile sur l’ensemble du territoire.

En conclusion de mon intervention, je voudrais vous interpeller, monsieur le secrétaire d’État, sur le malaise des sapeurs-pompiers, qui subissent une dégradation de leurs conditions de travail. C’est le cas, notamment, des pompiers volontaires, qui représentent 79,5 % de l’effectif total des sapeurs-pompiers et assurent 60 % des interventions, et dont la situation est de plus en plus précarisée. La vacation horaire est ainsi rétribuée entre 7 et 10 euros. C’est tout simplement intolérable !

Comment s’étonner, dans ces conditions, de la baisse du nombre de volontaires ? Mais qu’importe ! Vous vous acharnez à ne rien inscrire dans votre budget pour remédier à cette situation, en particulier pour améliorer leur statut et leur formation.

La réduction des dépenses publiques, qui semble bien être votre unique objectif, ne doit se faire ni au détriment des sapeurs-pompiers, qui assument courageusement des missions périlleuses et auxquels je tiens à rendre hommage ce soir, ni au détriment de la sécurité de nos concitoyens.

Pour toutes ces raisons, nous voterons contre ce budget, qui est bien loin de répondre aux attentes des acteurs assumant ces missions.