M. Yves Daudigny. Oui, madame la présidente.

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur pour avis.

M. Jean-Jacques Jégou, rapporteur pour avis. Madame la présidente, je vous remercie de me redonner la parole et je n’en abuserai pas.

Je voudrais seulement rassurer M. Gérard Longuet. Je tiens à dire au nom de la commission des finances, et sous le contrôle de M. Jean Arthuis, car je ne souhaite pas empiéter sur ses prérogatives, que la commission a toujours été cohérente sur ce sujet. Nous avons d’ailleurs pris toutes les dispositions nécessaires pour exclure cette opération du bouclier fiscal.

Sur les trois milliards d’euros de recettes prévus, nous envisageons d’affecter deux milliards d’euros à l’État et un milliard d’euros au Fonds de solidarité vieillesse.

Cette démarche me semble parfaitement cohérente. Le Fonds de solidarité vieillesse et l’État ont bien besoin de ces ressources. Je ne ferai pas l’injure au ministre du budget d’affirmer le contraire !

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur général de la commission des affaires sociales.

M. Alain Vasselle, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Les propos de notre collègue Yves Daudigny appellent quelques précisions.

Lorsque j’interviens du banc de la commission, c’est non pas en qualité de membre du groupe UMP, mais en tant que rapporteur général de la commission des affaires sociales. Il en est de même de M. Jégou, qui intervient non pas en qualité de membre du groupe de l’Union centriste, mais en tant que rapporteur pour avis de la commission des finances. Chacun de nous rapporte les positions de sa commission.

Cela m’amène à mettre en garde toutes celles et tous ceux qui seraient tentés de penser que, M. Jégou, au nom de la commission des finances, maintenant son amendement alors que le rapporteur général retire le sien, la commission des affaires sociales ne se soucie que des dépenses et non des recettes.

Je l’indique ici publiquement, car j’entends trop souvent dire, dans les couloirs, qu’il serait peut-être temps que la commission des finances récupère tout le volet recettes et que celle des affaires sociales se contente des dépenses. Cela n’est vraiment pas sérieux ! Restons-en là ! (Applaudissements sur certaines travées de lUMP.)

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.

M. François Baroin, ministre. Je tiens tout d’abord à remercier MM. Gérard Longuet et Alain Vasselle pour la pertinence de leur argumentation.

Si elle était adoptée, la majoration du taux de la CRDS par rapport au bouclier fiscal prendrait une dimension très largement supérieure à celle, qui est pourtant importante, du montant de la dette sociale.

M. Vasselle souhaite savoir – et son souci est parfaitement compréhensible – si l’État garantira les recettes de la branche famille à la suite du swap qui a été voté à l’Assemblée nationale et, d’une manière plus générale, du swap global accordé à la branche famille dans le projet de loi organique relatif à la gestion de la dette sociale.

En ma qualité de ministre des comptes publics, je le répète, dans la ventilation de l’excédent du panier fiscal que l’État abandonne à la sécurité sociale, la priorité sera donnée à la branche famille. En effet, compte tenu de l’évolution et de la durée de la gestion de la dette sociale, des priorités « affectataires » en matière de politiques publiques, la priorité sera évidemment de garantir la pérennité des recettes de cette branche.

Il s’agit non pas d’un simple engagement oral pris par la ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'État, mais d’un engagement écrit, figurant dans les textes, renouvelé à de nombreuses reprises par le Premier ministre. Je le confirme aujourd’hui encore à l’issue d’un débat important, de grande qualité et vertueux – il faut rendre cet hommage à la Haute Assemblée –, car il nous amène à nous interroger sur les modalités d’application d’une politique qui vise à réduire les dépenses de nature sociale et fiscale à travers la problématique des niches.

En effet, nous voyons bien l’intérêt qu’il y a à réfléchir de manière globale sur les modalités d’affectation des recettes. L’objectif est notamment de réduire le nombre des niches fiscales et sociales qui se sont accumulées au fil des années. Cette réduction nous donnerait des moyens substantiels pour garantir la pérennité des branches, notamment de la branche famille, et pour gérer la dette sociale, qui s’est fortement accrue du fait de la crise.

Voilà, monsieur Alain Vasselle, ce que je pouvais dire pour vous rassurer.

J’ajoute, à l’attention de M. Gérard Longuet, que tous les engagements pris par le Gouvernement en la matière seront respectés : ne pas augmenter les prélèvements obligatoires – engagement politique essentiel ! – et définir les priorités de la gestion de la dette sociale, c’est-à-dire la sanctuariser la politique de garantie pérenne des recettes affectées à la branche famille.

Mme la présidente. Mes chers collègues, à la demande du groupe socialiste, nous allons interrompre nos travaux pour cinq minutes.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à seize heures cinquante-cinq, est reprise à dix-sept heures.)

Mme la présidente. La séance est reprise.

La parole est à M. Yves Daudigny, pour explication de vote sur les amendements identiques nos 102 et 404.

M. Yves Daudigny. Madame la présidente, je confirme la position que nous avions prise avant la suspension de séance. Le groupe socialiste considère qu’il n’a pas vocation à jouer les arbitres ni à régler les contradictions qui s’expriment entre les différentes composantes de la majorité sénatoriale.

Mme la présidente. La parole est à Mme Annie David, pour explication de vote.

Mme Annie David. Madame la présidente, puisque notre sous-amendement n° 558 rectifié est devenu sans objet compte tenu du retrait de l’amendement n° 44 de la commission des affaires sociales, le groupe CRC-SPG dépose, à l’amendement n° 102 de la commission des finances, un sous-amendement identique.

Mme la présidente. Je suis donc saisie d’un sous-amendement n° 580, présenté par M. Fischer, Mmes David et Pasquet, M. Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe communiste, républicain, citoyen et des sénateurs du parti de gauche. Celui-ci est ainsi libellé :

I. Alinéa 2 de l'amendement n° 102

Rédiger ainsi cet alinéa :

À la première phrase de l'article 19 de l'ordonnance n° 96-50 du 24 janvier 1996 relative au remboursement de la dette sociale, la référence : « 14 » est remplacée par la référence : « 15 » et le taux : « 0,5 % » est remplacé par le taux : « 0,76 % ».

II. Compléter cet amendement par deux alinéas ainsi rédigés :

Compléter l'article 19 de l'ordonnance n° 96-50 du 24 janvier 1996 précitée par un alinéa ainsi rédigé :

« Le taux de la contribution instituée par l'article 14 est fixé à 0,5 %. »

Veuillez poursuivre, ma chère collègue.

Mme Annie David. Ce sous-amendement vise à limiter la hausse de la CRDS aux seuls revenus du patrimoine, afin de ne pas pénaliser les revenus du travail. S’il est adopté, nous pourrons voter l’amendement n° 102. Dans le cas contraire, nous maintiendrons notre opposition à toute majoration du taux de la CRDS, dans la mesure où cette contribution pèse, pour 80 % de son produit, sur les salaires, et pour 20 % seulement sur les revenus du capital.

L’amendement de la commission des finances vise à relever le taux de la CRDS, donc à demander un effort supplémentaire principalement aux salariés. Nous aurions pu accepter une légère augmentation de la CRDS si nos propositions – à tout le moins certaines d’entre elles – tendant notamment à taxer les stock-options et les retraites chapeaux avaient été acceptées, donc si les revenus du capital avaient été mis à contribution pour résoudre les difficultés de financement de notre protection sociale. Or, tel n’est pas le cas.

M. le rapporteur pour avis nous explique qu’une majoration de 0,26 % de la CRDS ne représente que trois euros par mois pour un salarié touchant le SMIC. Certes, monsieur Jégou, mais, fort heureusement d’ailleurs, tous les salariés ne sont pas payés au SMIC, et le coût de cette majoration sera plus élevé pour ceux qui perçoivent des salaires supérieurs.

En outre, ces trois euros viennent s’ajouter au coût des autres mesures prévues dans ce projet de loi de financement de la sécurité sociale : le déremboursement de plusieurs médicaments, une moindre prise en charge de certaines affections de longue durée, l’augmentation du forfait journalier hospitalier. Au total, chaque assuré social devra débourser, chaque mois, entre 15 et 20 euros supplémentaires.

L’ensemble de ces mesures, conjuguées au gel des salaires, dans la fonction publique comme dans le secteur privé, contribueront évidemment à réduire le pouvoir d’achat de l’ensemble de nos concitoyennes et de nos concitoyens.

Mme la présidente. Je mets aux voix le sous-amendement n° 580.

(Le sous-amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 102 et 404.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 303 rectifié bis.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Articles additionnels avant l'article 9 (précédemment réservés)
Dossier législatif : projet de loi de financement de la sécurité sociale de financement de la sécurité sociale pour 2011
Article additionnel après l'article 9

Article 9

(précédemment réservé)

I. – L’ordonnance n° 96-50 du 24 janvier 1996 relative au remboursement de la dette sociale est ainsi modifiée :

1° L’article 2 est ainsi rédigé :

« Art. 2. – La Caisse d’amortissement de la dette sociale a pour mission d’apurer la dette mentionnée à l’article 4 et d’effectuer les versements prévus par ce même article. » ;

2° L’article 4 est ainsi modifié :

a) Le dernier alinéa du II ter est remplacé par des II quater et II quinquies ainsi rédigés :

« II quater. – La couverture des déficits des exercices 2009 et 2010 des branches mentionnées aux 1° à 4° de l’article L. 200-2 du code de la sécurité sociale et du fonds mentionné à l’article L. 135-1 du même code, ainsi que des déficits prévisionnels pour l’exercice 2011 des branches mentionnées aux 1° et 4° de l’article L. 200-2 du même code, est assurée, au plus tard le 31 décembre 2011, par des transferts de la Caisse d’amortissement de la dette sociale à l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale dans la limite de 68 milliards d’euros.

« Dans le cas où le montant des déficits cumulés mentionnés à l’alinéa précédent excède 68 milliards d’euros, les transferts sont affectés par priorité à la couverture des déficits les plus anciens et, pour le dernier exercice, dans l’ordre des branches fixé à l’alinéa précédent.

« Les montants et les dates des versements correspondants ainsi que, le cas échéant, de la régularisation au vu des montants définitifs des déficits de l’exercice 2010 sont fixés par décret.

« II quinquies. – La couverture des déficits des exercices 2011 à 2018 de la branche mentionnée au 3° de l’article L. 200-2 du code de la sécurité sociale et du fonds mentionné à l’article L. 135-1 du même code est assurée par des transferts de la Caisse d’amortissement de la dette sociale à l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale dans la limite de 62 milliards d’euros sur la période et dans la limite de 10 milliards par an. Les versements interviennent au plus tard le 30 juin de chaque année à compter de 2012. Leurs dates et montants sont fixés par décret.

« Dans le cas où le montant des déficits cumulés mentionnés à l’alinéa précédent excède 62 milliards d’euros, les transferts sont affectés par priorité à la couverture des déficits les plus anciens et, pour le dernier exercice, en priorité à la branche mentionnée au 3° de l’article L. 200-2 du code de la sécurité sociale. » ;

b) Il est ajouté un VII ainsi rédigé :

« VII. – Sont considérées comme définitives les opérations de produits et de charges dans les comptes clos des branches du régime général et du fonds mentionné à l’article L. 135-1 du code de la sécurité sociale au titre des exercices ayant fait l’objet d’une ou plusieurs mesures de transfert mentionnées au présent article, sous réserve qu’il s’agisse d’opérations réciproques entre ces organismes et qu’aucune disposition législative ne prévoie qu’il s’agit d’acomptes. » ;

3° L’article 6 est ainsi rédigé :

« Art. 6. – Les ressources de la Caisse d’amortissement de la dette sociale sont constituées par :

« 1° Le produit des contributions instituées par le chapitre II de la présente ordonnance. Ce produit est versé à la caisse, dans des conditions fixées par décret, par l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale, s’agissant du produit correspondant à la contribution mentionnée à l’article 14, et par l’État, s’agissant du produit correspondant aux contributions mentionnées aux articles 15 à 18 ;

« 2° Une fraction du produit des contributions sociales mentionnées aux articles L. 136-1, L. 136-6, L. 136-7 et L. 136-7-1 du code de la sécurité sociale. Cette fraction est fixée au IV de l’article L. 136-8 du même code ;

« 3° à 5° (Supprimés)

« 6° Une fraction du produit des prélèvements mentionnés aux articles L. 245-14 et L. 245-15 du code de la sécurité sociale, fixée à l’article L. 245-16 du même code ;

« 7° Les versements du Fonds de réserve pour les retraites dans les conditions fixées au quatrième alinéa de l’article L. 135-6 du même code ;

« 8° (Supprimé) »

4° Le premier alinéa de l’article 7 est ainsi rédigé :

« L’annexe aux comptes de la Caisse d’amortissement de la dette sociale présente chaque année les dettes amorties en application de l’article 4 dans l’ordre chronologique des déficits à amortir. »

II. – Le code de la sécurité sociale est ainsi modifié :

1° Après le 10° de l’article L. 135-3, sont insérés des 10° bis à 10° sexies ainsi rédigés :

« 10° bis Les sommes issues de l’application du livre III de la troisième partie du code du travail et reçues en consignation par la Caisse des dépôts et consignations ou résultant de la liquidation des parts de fonds commun de placement par les organismes gestionnaires, des titres émis par des sociétés d’investissement à capital variable, des actions émises par les sociétés créées par les salariés en vue de la reprise de leur entreprise ou des actions ou coupures d’actions de l’entreprise, n’ayant fait l’objet de la part des ayants droit d’aucune opération ou réclamation depuis trente années ;

« 10° ter Les sommes acquises à l’État conformément au 5° de l’article L. 1126-1 du code général de la propriété des personnes publiques ;

« 10° quater Le produit des parts fixes des redevances dues au titre de l’utilisation des fréquences 1900-1980 mégahertz et 2110-2170 mégahertz attribuées pour l’exploitation d’un réseau mobile en métropole en application du code des postes et des communications électroniques ;

« 10° quinquies Une fraction égale à 35 % du produit de l’ensemble des parts variables des redevances payées chaque année au titre de l’utilisation des fréquences 880-915 mégahertz, 925-960 mégahertz, 1710-1785 mégahertz, 1805-1880 mégahertz, 1900-1980 mégahertz et 2110-2170 mégahertz attribuées pour l’exploitation d’un réseau mobile en métropole en application du code des postes et des communications électroniques ; 

« 10° sexies Le produit de la contribution instituée à l’article L. 137-5 du présent code. » ;

2° L’article L. 135-6 est ainsi modifié :

a) Le troisième alinéa est complété par les mots : « ainsi que du fonds mentionné à l’article L. 135-1 » ;

b) Le quatrième alinéa est ainsi rédigé :

« Les sommes affectées au fonds sont mises en réserve jusqu’au 1er janvier 2011. À compter de cette date et jusqu’en 2024, le fonds verse chaque année, au plus tard le 31 octobre, 2,1 milliards d’euros à la Caisse d’amortissement de la dette sociale afin de participer au financement des déficits, au titre des exercices 2011 à 2018, des organismes mentionnés à l’alinéa précédent. Le calendrier et les modalités de ces versements sont fixés par convention entre les deux établissements. » ;

3° Les 1°, 5°, 7°, 8° et 11° de l’article L. 135-7 sont abrogés ;

4° L’article L. 135-8 est ainsi modifié :

a) À la première phrase du troisième alinéa, les mots : « , d’une part, l’objectif et l’horizon d’utilisation des ressources du fonds et, d’autre part, les principes de prudence et de répartition des risques » sont remplacés par les mots : « les principes de prudence et de répartition des risques compte tenu de l’objectif et de l’horizon d’utilisation des ressources du fonds, notamment les obligations de versements prévues à l’article L. 135-6 » ;

b) La troisième phrase du dernier alinéa est complétée par les mots : «, et en particulier leur adéquation avec les obligations de versements prévues à l’article L. 135-6 » ;

4° bis (nouveau) Le IV de l’article L. 136-8 est ainsi modifié :

a) Au 1°, le taux : « 1,1 % » est remplacé par le taux : « 0,82 % » et le taux : « 1,08 % » est remplacé par le taux : « 0,8 % » ;

b) Au 5°, les mots : « 0,2 %, à l’exception de la contribution mentionnée au 3° du I » sont remplacés par le taux : « 0,48 % » ;

5° Au 1 de l’article L. 137-5, les mots : « fonds de réserve pour les retraites mentionné à l’article L. 135-6 » sont remplacés par les mots : « Fonds de solidarité vieillesse mentionné à l’article L. 135-1 » ;

5° bis (nouveau) L’article L. 241-6 est complété par des 5° à 7° ainsi rédigés :

« 5° Le produit de la taxe mentionnée au deuxième alinéa du 2° bis de l’article 1001 du code général des impôts ;

« 6° La taxe exceptionnelle sur les sommes placées sur la réserve de capitalisation des entreprises d’assurance ;

« 7° Le prélèvement résultant de l’aménagement des règles d’imposition aux prélèvements sociaux de la part en euro des contrats d’assurance vie multi-supports. » ;

6° Le II de l’article L. 245-16 est ainsi rédigé :

« II. – Le produit des prélèvements mentionnés au I est ainsi réparti :

« – une part correspondant à un taux de 0,3 % au fonds mentionné à l’article L. 135-1, dont une part correspondant à un taux de 0,2 % à la section mentionnée à l’article L. 135-3-1 ;

« – une part correspondant à un taux de 1,3 % à la Caisse d’amortissement de la dette sociale ;

« – une part correspondant à un taux de 0,6 % à la Caisse nationale d’assurance vieillesse des travailleurs salariés. »

III. – Le IV de l’article 45 de la loi n° 2005-1719 du 30 décembre 2005 de finances pour 2006 est abrogé.

Mme la présidente. La parole est à Mme Claire-Lise Campion, sur l'article.

Mme Claire-Lise Campion. Mes chers collègues, en votant cet article, vous ferez payer par les générations futures les dettes d’aujourd’hui qui, pour l’essentiel, sont dues non pas à la crise, comme on voudrait nous le faire croire, mais à des causes structurelles.

Depuis sa création, la CADES aura été prolongée de seize années. Les dépenses de 2010 seront payées par les actifs de 2021 et de 2025 ! Ce n’est pas acceptable. Une fois encore, on ne résout pas le problème de la dette sociale, on le reporte un peu plus sur la jeune génération.

Pour couvrir les 34 milliards d’euros de dette structurelle des branches maladie et famille, les 62 milliards d’euros de déficit de l’assurance vieillesse entre 2011 et 2018 et les 34 milliards d’euros de « dette de crise 2009-2010 », le Gouvernement est autorisé à emprunter 130 milliards d’euros, sans mettre en face des recettes nouvelles pour les rembourser. Nous sommes loin de la gestion de bon père de famille que le Président de la République appelait de ses vœux.

Mes chers collègues, en votant cet article, vous participez au démantèlement de la branche famille, vous la vouez au déficit en lui octroyant des ressources non pérennes, vous compromettez gravement la réalisation des objectifs affichés. En effet, comme l’a très bien relevé notre collègue André Lardeux dans son rapport, la branche sera « doublement perdante » dès 2014. Sur les quatre ressources censées compenser la perte de la CSG, une, et peut-être deux, aura un produit nul à partir de cette date, et les deux ressources provenant des assurances et du panier fiscal seront sujettes à modifications législatives. La perte pour la branche famille pourrait ainsi atteindre 4 milliards d’euros en 2014 !

Les beaux discours sur la volonté du Gouvernement en matière de politique familiale ne suffiront plus à cacher la réalité. Et quelle est-t-elle ? Des ressources fragilisées, un déficit qui progresse, des mesures inacceptables qui pénalisent les familles les plus modestes et les étudiants ! Nous aurons l’occasion d’y revenir.

Lorsque la branche famille n’aura plus la capacité de verser ses prestations, que fera le Gouvernement ? Lancera-t-il de nouveaux emprunts ?

Un récent rapport du Haut Conseil de la famille indiquait pourtant que, à législation et natalité constantes, la branche famille ne pourrait revenir à l’équilibre qu’en 2017 et, ainsi, n’effacer ses dettes qu’en 2023. Les dispositions que vous prenez reporteront encore ce délai et ne laisseront plus aucune marge de manœuvre à une politique en direction des familles.

Non, mes chers collègues, nous ne cautionnerons pas un endettement supplémentaire !

Mme la présidente. La parole est à M. Guy Fischer, sur l'article.

M. Guy Fischer. Que ce soit à l’occasion de l’examen par le Sénat du projet de loi organique relatif à la gestion de la dette sociale, du débat sur les conclusions de la commission mixte paritaire ou de la discussion du projet de loi portant réforme des retraites, nous n’avons cessé de dénoncer la réponse apportée par le Gouvernement à la question de la gestion de la dette sociale. Le transfert de la dette à la CADES est l’exemple même de ce qu’il ne faut pas faire : laisser gonfler la dette, l’accroître par une gestion calamiteuse de la politique sociale et tenter de tout faire disparaître, temporairement du moins.

Les sommes à transférer sont colossales, près de 130 milliards d’euros, c’est-à-dire presque autant que le total des dettes transférées à la CADES depuis sa création, en 1996.

Cette vérité permet à elle seule d’appréhender l’ampleur de la dégradation des comptes sociaux, une dégradation qui remonte à huit ans puisque, il faut le rappeler, jusqu’en 2001, les comptes étaient en équilibre.

La crise économique et financière a bien eu un coût financier important, proche de 34 milliards d’euros, ce qui correspond peu ou prou au montant de la dette cumulée depuis plusieurs années. Mais si vous insistez sur la part de la dette sociale résultant de la crise, vous êtes plus discret sur ce qu’il est convenu d’appeler la dette structurelle. Peut-être parce que vous en êtes pleinement responsables. Si nous sommes dans cette situation, c’est à cause de votre manque d’action.

Comme nous avons eu l’occasion de le dire au début de nos travaux, la mauvaise gestion de la dette sociale ne sera pas sans conséquence financière : elle coûtera 50 milliards d’euros aux générations futures.

Au total, si l’on additionne les 130 milliards d’euros transférés à la CADES par le projet de loi organique relatif à la gestion de la dette sociale et les 62 milliards d’euros qu’il lui reste déjà à rembourser depuis les premiers transferts, ce sont presque 200 milliards d’euros qu’il faudra payer un jour, et même 240 milliards d’euros si l’on ajoute les intérêts.

Face à ces sommes astronomiques, qui nous donnent à tous le tournis, votre seule réponse réside dans quelques prélèvements complémentaires sur le capital et sur les revenus qui échappent aux cotisations sociales, ainsi que dans l’accroissement des mécanismes de maîtrise de la dette, qui sont autant de mesures antisociales.

Au-delà de ces mesures, le Gouvernement ne propose rien d’autre que de laisser filer les déficits et il semble s’auto-interdire de prendre les seules dispositions qui s’imposent pour enrayer la dégradation des comptes sociaux.

Ce renoncement à agir se concrétisera par les 62 milliards d’euros de déficit à venir. Vous actez donc par avance, monsieur le ministre, les déficits futurs. Il s’agit, à nos yeux, d’un véritable dévoiement de la CADES, dont la mission consiste non pas à assumer par anticipation le manque de courage des gouvernements, mais bien à gérer des dettes déjà constituées.

Chers collègues de la majorité, vous qui répétez à l’envi qu’il serait intolérable que les générations futures supportent le poids de nos décisions politiques, comment pouvez-vous vous satisfaire de l’article 9, par lequel le Gouvernement propose, pour les deux ou trois prochaines années, de financer la sécurité sociale à découvert ? Comment pouvez-vous accepter que le Gouvernement, dont vous souteniez la volonté d’inscrire l’interdiction des déficits dans la Constitution, propose aujourd’hui de les aggraver progressivement ?

Rien ne justifie plus l’accroissement des déficits, si ce n’est votre refus d’opérer une véritable rénovation de votre politique sociale et fiscale. Pourtant, les mécontentements se font entendre jusque dans vos rangs ! Je pense en particulier aux propos tenus par les députés Yves Bur et Jean-Luc Warsmann, ou encore à l'amendement adopté à l'unanimité par la commission des finances de l'Assemblée nationale, puis retiré avant d’être repris par le groupe GDR, qui prévoyait d’augmenter de cinq points le taux des prélèvements sociaux sur les revenus du patrimoine et les produits de placement, sous la forme d'une contribution additionnelle.

Cet amendement, qui avait pour seul objet de réduire l'écart entre les prélèvements portant respectivement sur le travail et sur le capital, avait le mérite de poser clairement la question du partage des richesses et de mettre un terme à la dévalorisation du travail par le capital. C’est pourquoi nous avons déposé un amendement similaire. Vous serez donc tenus d’expliquer à nouveau votre refus de l’adopter, alors même que son application rapporterait un peu plus de 5 milliards d’euros en 2011.

Démonstration est faite que d'autres politiques sont possibles. Nous sommes face à une divergence politique de fond : d’un côté, les tenants du libre marché qui prônent la concurrence à tous crins, bien que celle-ci affecte les équilibres économiques de notre pays ; de l'autre côté, ceux, dont nous sommes, qui proposent des pistes de financement à la fois justes, courageuses, solidaires et pérennes. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG.)