plan digue et protection des marais littoraux charentais

M. le président. La parole est à M. Michel Doublet, auteur de la question n° 1032, adressée à Mme la ministre de l’écologie, du développement durable, des transports et du logement.

M. Michel Doublet. Madame la ministre, permettez-moi tout d’abord de vous féliciter pour cette brillante promotion au ministère de l’écologie.

Ma question portera sur la protection des territoires ruraux charentais contre la submersion marine à la suite de la tempête Xynthia.

Les marais littoraux charentais, qu’ils soient salés ou doux, ont subi de nombreux dégâts. Pas moins de 30 000 hectares ont été submergés. Leurs ouvrages de protection à la mer ont été lourdement endommagés.

Nombre de ces derniers ont été réparés en urgence au cours de la phase 1 des travaux ; leur consolidation est actuellement en cours, le conseil général de la Charente-Maritime, présidé par notre ami Dominique Bussereau, ayant assuré la maîtrise d’ouvrage.

Cependant, ces opérations visaient exclusivement les ouvrages protégeant des « lieux bâtis », identifiés comme tels par les services de l’État.

Ainsi, une part de la protection du littoral charentais n’a fait l’objet d’aucun plan de réparation. Seuls les acteurs locaux – dans la plupart des cas, des associations syndicales – sont intervenus en urgence pour mettre en œuvre les réparations de première nécessité que leur autorisaient leurs modestes moyens.

Ces réparations sommaires sont insuffisantes pour assurer un niveau de protection ne serait-ce qu’équivalent à celui d’avant Xynthia.

De plus, le financement a été intégralement laissé à la charge de ces acteurs, obérant ainsi l’équilibre financier des associations de propriétaires. Celles-ci attendaient beaucoup du « plan digue » qui doit, à terme, assurer la protection du territoire. En préfiguration de ce plan, une proposition pour un plan de prévention des submersions marines et des crues rapides a été adoptée en conseil des ministres le 13 juillet dernier.

Une de ces propositions exclut explicitement les zones agricoles du plan digue : « Les zones importantes de polders historiques feront l’objet d’une attention particulière en cas d’exposition de la sécurité des personnes. En revanche, les zones agricoles protégées par des polders ne sont pas éligibles au plan digue ».

Pour les associations syndicales et l’Union des Marais de la Charente-Maritime, il est inconcevable que la protection du territoire soit catégoriquement exclue de la réflexion engagée au niveau national.

Dans la réflexion conduite jusqu’alors par les services de l’État, les sièges d’exploitation, qu’ils soient agricoles ou aquacoles, n’ont pas été considérés comme éligibles aux différents plans.

De même, les habitations qui ne constituent pas « une zone urbanisée significative » n’ont pas été prises en compte. Les propriétaires agricoles ont du mal à concevoir que la protection des zones bâties du littoral puisse être totalement financée par l’État, tandis que la protection des sièges d’exploitation et des terres agricoles ou aquacoles, outil de travail de nombreux marénaux, serait exclue du plan national de protection du territoire et laissée à leur charge financière exclusive.

Rappelons que ces territoires ruraux sont sillonnés par des infrastructures routières où la sécurité des personnes peut être mise en cause lors de submersions marines, comme nous avons pu le vérifier lors des dernières grandes tempêtes.

Par conséquent, madame la ministre, quelles mesures le Gouvernement compte-t-il mettre en œuvre pour que la situation des propriétaires, des exploitants et des habitants ruraux de nos marais littoraux soit prise en compte à la hauteur qu’elle mérite dans le futur plan digue ?

M. le président. Madame la ministre, avant de vous donner la parole, je tiens à mon tour à vous féliciter, au nom du Sénat et en mon nom personnel. Nous sommes très heureux de vous accueillir dans cet hémicycle.

Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, ministre de l’écologie, du développement durable, des transports et du logement. Je vous remercie, monsieur le président.

Monsieur Doublet, c’est une loi ancienne qui fixe les principes de la participation aux frais pour les digues : il s’agit précisément de l’article 33 de la loi du 16 septembre 1807 relative au dessèchement des marais, qui prévoit explicitement que la dépense des travaux d’établissement et d’entretien des ouvrages de protection est supportée par les propriétés protégées dans la proportion de leur intérêt aux travaux.

À la suite des événements exceptionnels qui ont dramatiquement marqué la façade atlantique, plus particulièrement la Charente-Maritime et la Vendée, le 28 février 2010, et le département du Var, le 15 juin 2010, le conseil des ministres a approuvé le 13 juillet 2010 les grands principes d’un projet de plan de prévention des submersions marines et des crues rapides, projet qui fait aujourd’hui même l’objet d’un large processus de concertation.

Ce plan est consacré avant tout à la prévention des risques pour les personnes et il donne donc priorité aux zones déjà urbanisées. Conformément à l’annonce faite par le Président de la République le 16 mars 2010 à La Roche-sur-Yon et confirmée le 21 juin 2010 à Draguignan, il est en particulier exclu de construire des ouvrages nouveaux pouvant favoriser la spéculation immobilière dans des zones non urbanisées et mettre en danger les activités agricoles que vous évoquez, monsieur le sénateur.

Par ailleurs, le financement de ce plan sera principalement assuré par le Fonds de prévention des risques naturels majeurs, le FPRNM, puisqu’il est prévu de consacrer 500 millions d’euros du fonds au plan sur la période 2011-2016.

Compte tenu de l’objectif assigné par la loi à ce fonds et du mode d’alimentation de ce dernier, qui se fait au travers des primes et des cotisations additionnelles relatives à la garantie contre les catastrophes naturelles, il est véritablement légitime de veiller à ce que le fonds finance prioritairement des ouvrages assurant la sécurité des personnes, comme cela est prévu.

Cependant, dans le même temps, le plan a vocation à fédérer les partenaires et les financeurs. Il conviendra de se prononcer sur les priorités et l’éligibilité des projets en fonction de leur nature, des financeurs potentiels et des disponibilités, en particulier pour les zones d’intérêt économique. Cela pourrait permettre de répondre à votre question, monsieur le sénateur.

M. le président. La parole est à M. Michel Doublet.

M. Michel Doublet. Je vous remercie de votre réponse, madame la ministre.

Si les zones concernées ne sont pas forcément très denses en habitation, elles présentent un intérêt écologique évident, puisque le marais charentais, compte tenu de ses spécificités, est déjà classé en Natura 2000. J’espère donc que la sauvegarde de l’environnement et celle des exploitations agricoles pourront être prises en compte.

diminution des moyens accordés par l'état à l'institut de radioprotection et de sûreté nucléaire

M. le président. La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin, auteur de la question n° 1038, adressée à Mme la ministre de l’écologie, du développement durable, des transports et du logement.

Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, le budget 2011 prévoit une diminution de 30 millions d’euros de la subvention d’État allouée à l’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire, l’IRSN, celle-ci chutant à 213 millions d’euros. Cette baisse aura une incidence directe sur le budget de l’expertise en sûreté nucléaire, réduit de près de 40 %.

Or, selon des estimations internes à l’IRSN, il faudrait à ce dernier, pour faire face à la demande croissante d’expertise, 15 millions d’euros supplémentaires.

Il était d’ailleurs indiqué, dans le fascicule bleu budgétaire de la mission « Recherche et enseignement supérieur » pour 2010, que « la stratégie de l’IRSN est de renforcer son expertise pour être plus en phase avec le redémarrage du programme électronucléaire français et de faire face aux nouvelles exigences réglementaires issues de la loi relative à la transparence et à la sécurité en matière nucléaire dite « loi TSN » […] ». Un an plus tard, l’État se désengage.

Pourtant, la demande d’expertise continue de croître. Elle porte notamment sur la création de nouvelles installations nucléaires, la modification des conditions d’exploitation et l’évolution des règles de sûreté nucléaire.

Madame la ministre, pour pallier ce désengagement, vous proposez une « redevance » que les exploitants nucléaires devraient verser à l’IRSN pour chaque dossier soumis à l’Autorité de sûreté nucléaire, l’ASN, et faisant l’objet d’une saisine de l’IRSN. Dans le projet de loi de finances pour 2011, le produit de cette redevance est estimé à 30 millions d’euros !

C’est une heureuse coïncidence, alors même que le projet de barème exigé fin juin des services de l’IRSN a été réalisé dans la précipitation, avec tous les risques d’erreurs et d’approximations que cela implique. Ce montant est donc loin d’être garanti.

Une telle décision, prise au seul motif d’afficher une baisse des dépenses publiques, suscite l’inquiétude et le désaccord des personnels de l’IRSN. Le comité d’entreprise a donné à ce sujet un avis négatif à l’unanimité des élus. Le conseil d’administration de l’IRSN a également voté contre ce projet de redevance.

Comment pourrait-il en être autrement ? En effet, ce que vous proposez aujourd’hui est un dangereux retour en arrière, madame la ministre.

Il est dangereux tout d’abord au regard de l’esprit même qui a prévalu à la création de l’Institut en 2002 : rendre l’expertise indépendante de tout exploitant. Cela n’allait pas de soi mais, en dix ans, l’IRSN a acquis une image d’indépendance maintenant reconnue.

Il est dangereux également parce que l’instauration d’une telle redevance bouleversera le cœur, le sens même du métier de l’expertise en sûreté nucléaire. L’ASN, qui a également émis un avis négatif, souligne ceci : « cette évolution remettrait en cause le principe du pilotage de l’expertise, conduisant, de fait, à un profond changement du système de contrôle de la sûreté nucléaire et à un affaiblissement de la robustesse et de la légitimité de la décision prise par l’ASN ».

Il est d’ailleurs impensable qu’un tel changement soit pris par décret et ne soit pas soumis au vote du Parlement.

Dès lors, comment comptez-vous garantir la qualité et l’indépendance de l’expertise en sûreté nucléaire si ce n’est en renonçant à diminuer les moyens de l’IRSN et à instaurer cette redevance, comme le souhaitent les personnels, dont certains sont présents ce matin dans les tribunes ?

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, ministre de l’écologie, du développement durable, des transports et du logement. Madame la sénatrice, le dispositif qui est proposé ne remet en cause ni le volume de financement ni, bien sûr et surtout, l’indépendance de la sûreté nucléaire, à laquelle je suis très attachée. Je tenterai de vous en convaincre.

Vous le savez, c’est au terme d’un processus de concertation, de dialogue et de réflexion engagé au cours des derniers mois qu’il est apparu opportun au Gouvernement de compléter le dispositif actuel de financement de l’établissement par le versement d’une redevance de la part des industriels, de manière à faire davantage participer financièrement ces derniers à un système qui contribue d’une certaine manière à leur activité.

Le principe d’une telle redevance figure par conséquent dans le projet de contrat d’objectifs pour la période 2010-2013, projet qui est actuellement examiné par l’IRSN et par les ministères de tutelle.

L’idée d’instaurer cette redevance a également été retenue lors de la préparation du projet de loi de finances pour 2011, et son rendement annuel a été évalué de manière prévisionnelle à 30 millions d’euros. Un décret actualisant sur différents points l’organisation de I’IRSN a été récemment soumis à l’examen du Conseil d’État, et ce texte prévoit notamment la possibilité pour l’établissement public de recevoir le produit de redevances versées par les bénéficiaires d’expertises de sûreté, selon des modalités qui seront fixées par arrêté conjoint des ministres de tutelle et du ministre du budget. Tout cela est en cours.

Les modalités concrètes de fonctionnement de cette redevance doivent rapidement être mises au point. Elles font d’ores et déjà l’objet de travaux très approfondis menés conjointement par I’IRSN, l’Autorité de sûreté nucléaire et les ministères de tutelle.

Compte tenu des inquiétudes exprimées à ce sujet, je serai extrêmement claire sur les travaux menés actuellement : je tiens à souligner très nettement que le nouveau dispositif ne remet nullement en cause l’indépendance de l’expertise en matière de sûreté nucléaire.

En effet, ce dispositif n’institue aucune relation de nature commerciale entre l’établissement public et les exploitants d’installations nucléaires. Je le dis ici publiquement, toute relation de cette nature serait naturellement prohibée, inacceptable.

La redevance perçue à l’avenir par l’IRSN constitue seulement la contrepartie des frais engagés par celui-ci pour expertiser les dossiers qui lui sont confiés par l’Autorité de sûreté nucléaire. Nous demandons aux industriels de financer sans leur donner aucun droit de regard ni moyen d’influence sur l’expertise.

Il s’ensuit que l’IRSN continuera à n’avoir pour commanditaire de ses expertises de sûreté dans le domaine des activités nucléaires civiles en France que la seule Autorité de sûreté nucléaire. Bien sûr, rien n’est modifié en la matière.

En outre, naturellement, les exploitants nucléaires présentant des dossiers de demande d’autorisation à l’ASN ne seront pas davantage qu’aujourd’hui fondés à choisir l’organisme expert auprès duquel celle-ci requiert un appui technique.

Les assujettis à la redevance n’établiront dans ce cadre absolument aucune relation contractuelle avec l’IRSN ; il leur incombera seulement de verser à l’établissement les sommes fixées par un barème préétabli, dans des conditions définies par un arrêté interministériel.

Par ailleurs – et il s’agit là d’un point important –, les ressources financières de l’IRSN sont globalement maintenues. Cela lui permet d’assurer pleinement son rôle d’expert auquel le Gouvernement est très attaché.

En d’autres termes, les principes de base qui régissent le domaine de la sécurité nucléaire et de la radioprotection ne seront en rien modifiés par la création de cette nouvelle ressource financière : l’ASN continuera à piloter l’ensemble du dispositif et à veiller sur la qualité et sur l’indépendance de l’expertise ; l’IRSN exécutera les tâches qu’elle lui aura confiées. La seule innovation tient au fait que les exploitants d’installations nucléaires seront dorénavant appelés à participer directement au financement des expertises rendues nécessaires pour répondre à leurs propres demandes, sans qu’aucune nouvelle influence particulière puisse leur être concédée de ce fait.

M. le président. La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin.

Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Madame la ministre, vous comprendrez que je demeure inquiète. Ce projet aura des incidences bien au-delà de la seule dimension budgétaire. À mon sens, sur ce point, rien n’est garanti.

Quand on paie, on décide ! Je tiens à rappeler une nouvelle fois le problème de la perte d’indépendance. Comment ne pas penser que ce lien financier direct avec les exploitants nucléaires n’influera pas sur la façon dont les expertises et les analyses seront menées ?

De plus, conditionner le financement d’une grande partie de l’expertise au versement de cette redevance, c’est imposer une priorité dans le traitement des dossiers, à la faveur des demandes des exploitations.

Cela signifiera donc beaucoup moins de temps pour le travail de fond, l’analyse et le traitement du retour d’expérience des « incidents ». Autant de sujets sur lesquels l’IRSN travaille afin de rendre à l’ASN des analyses sur la sûreté nucléaire, indépendamment de toute demande des exploitations. C’est ce travail qui permet de construire, dans le temps, une compétence interne à partir de laquelle se fonde une expertise en sûreté.

L’instauration de cette redevance mettra en place un système s’apparentant à la « tierce expertise ». La voie à la marchandisation est ouverte. Libre concurrence oblige, d’autres organismes techniques pourraient être choisis en lieu et place de l’IRSN.

Quid alors de l’obligation d’archivage et d’historique dans les expertises, si le marché est éclaté entre plusieurs experts ? Or nous savons bien que la question de la mémoire est fondamentale dans ce domaine.

Quid des missions de service public avec un tel désengagement de l’État ?

À toutes ces questions qui restent en suspens, le seul argument de réduction des dépenses publiques ne suffit pas à faire réponse. C’est pourquoi, madame la ministre, je vous demande de renoncer à ce projet de redevance et de réaffirmer l’engagement financier de l’État en faveur de la sûreté nucléaire.

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, ministre. Madame la sénatrice, vous avez employé une expression qui m’a frappée et sur laquelle j’entends revenir. Vous avez affirmé : « Quand on paie, on décide ! » Non, ce n’est pas toujours le cas ! Ainsi, quand on paie un timbre fiscal parce que c’est une obligation pour avoir accès à tel ou tel document, on ne décide pas pour autant !

Mme Brigitte Gonthier-Maurin. On ne parle pas de timbre fiscal, en l’occurrence !

Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, ministre. Il s’agit d’un barème, d’un montant forfaitaire : le paiement de cette redevance ne donne bien sûr aucun pouvoir de décision ou de négociation et ne crée aucun lien commercial entre les entreprises et l’autorité de sûreté.

Mme Brigitte Gonthier-Maurin. On verra !

conditions de mise en œuvre des dispositions de l'article 19 de la loi grenelle ii

M. le président. La parole est à Mme Anne-Marie Payet, en remplacement de Mme Nathalie Goulet, auteur de la question n° 1045, adressée à Mme la ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement.

Mme Anne-Marie Payet. Ma collègue Nathalie Goulet souhaite attirer l’attention de Mme la ministre sur les dispositions de l’article 19 de la loi n° 2010-788 du 12 juillet 2010, dite « Grenelle II », relatives au plan local d’urbanisme des collectivités membres d’un établissement public à coopération intercommunale, ou EPCI.

En effet, pour de très nombreuses communes, les objectifs du plan d’aménagement et de développement durable étaient encore au stade de l’élaboration à la date de publication de la loi Grenelle II.

Compte tenu de l’entrée en vigueur, le 12 décembre prochain, des dispositions de l’article 19 de la loi n° 2010-788 du 12 juillet 2010, conformément à l’alinéa 5, ces communes se trouvent aujourd’hui dans une situation très difficile. Elles se voient non seulement dans l’incapacité de réaliser dans les délais impartis un projet de qualité, les études n’étant pas assez avancées, mais également dans l’obligation de réunir des documents d’urbanisme dans un délai beaucoup trop court pour leur permettre de mener de front les concertations exigées par la loi et répondant aux attentes de leurs concitoyens.

Ma collègue Nathalie Goulet, qui est très active dans ce domaine, demande au Gouvernement s’il ne serait pas possible d’envisager un délai supplémentaire qui permettrait à ces communes d’arrêter un projet de plan local d’urbanisme de qualité.

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, ministre de l’écologie, du développement durable, des transports et du logement. Madame la sénatrice, l’article 19 de la loi portant engagement national pour l’environnement, d’une part, opère une réforme profonde des plans locaux d’urbanisme, ou PLU, et, d’autre part, prévoit que les PLU intercommunaux doivent couvrir l’intégralité du territoire de l’établissement public de coopération intercommunale.

La loi prévoit déjà des dispositions transitoires permettant d’achever les procédures d’élaboration et de révision très avancées. Toutefois, vous avez raison, compte tenu de l’importance de la réforme et de la complexité des procédures applicables aux PLU, le Gouvernement estime qu’il est nécessaire de laisser aux collectivités locales un délai supplémentaire non seulement pour achever les procédures d’élaboration ou de révision en cours, mais également pour appliquer l’ensemble des dispositions de l’article 19 de la loi.

Sans préjuger les débats parlementaires qui auront lieu à ce sujet, puisque la décision reviendra in fine au Parlement, il serait sans doute souhaitable de laisser un délai de dix-huit mois, au lieu de six, pour achever les procédures en cours et un délai de six ans, par exemple, pour appliquer l’ensemble des dispositions de l’article 19, y compris celles qui sont relatives au périmètre du PLU intercommunal. Telle est la position du Gouvernement.

En tout état de cause, quelle que soit la décision du Parlement à ce sujet et afin d’aider les élus locaux dans cette application, mon ministère élaborera un plan d’accompagnement des collectivités locales pour la mise en œuvre du Grenelle II dans le domaine de l’urbanisme, en particulier s’agissant de ces dispositions.

M. le président. La parole est à Mme Anne-Marie Payet.

Mme Anne-Marie Payet. Madame la ministre, je vous remercie de votre réponse qui satisfera sans doute pleinement Nathalie Goulet. Il faut voir la réalité en face : de nombreuses communes étaient dans l’incapacité de réaliser ce projet de qualité dans le temps imparti. Elles accueilleront donc avec soulagement ce nouveau délai.

difficultés des classes moyennes à accéder à la propriété de leur logement

M. le président. La parole est à M. Adrien Gouteyron, auteur de la question n° 1015, adressée à M. le secrétaire d'État chargé du logement.

M. Adrien Gouteyron. Madame la ministre, permettez-moi, à l’instar de mes collègues, de vous féliciter de votre très remarquable promotion et de vous dire tout le plaisir que nous éprouvons à vous accueillir ce matin pour répondre à nos questions.

Je souhaite vous interroger sur les difficultés que rencontrent les classes dites « moyennes » pour accéder à la propriété.

L’accès à la propriété est capital : c’est souvent le projet de toute une vie de travail et un projet de vie familiale. En effet, on accède à la propriété non seulement pour soi mais également pour les enfants qu’on attend ou qu’on a.

L’accès à la propriété est aussi un facteur très important de cohésion sociale, ce qui est fondamental à une époque où la société s’éparpille et se fragmente.

Avec l’augmentation du prix du foncier des bâtiments, couplée à la crise financière qui sévit depuis deux ans, de nombreux Français, notamment les deux tiers dont les revenus se situent en dessous ou tout juste au niveau du salaire moyen – ouvriers, employés, etc. –, peuvent de nos jours très difficilement accéder à la propriété. Dans la région Auvergne, la part de ces catégories professionnelles ayant acquis un logement est passée de 42 % entre 1999 et 2002 à 37 % entre 2003 et 2006. Voilà qui ne manque pas de nous interroger.

En outre, la part de la dépense de consommation des ménages consacrée au logement, qui représentait 12 % en 1960, s’élève à 26 % aujourd'hui. Elle constitue l’un des postes de consommation les plus importants dans le budget des ménages. Ce phénomène rend ces derniers dépendants d’un logement locatif, privé ou social, et leur donne parfois un sentiment de « déclassement social ». En effet, l’accession à la propriété est un véritable statut et permet un ancrage dans la société.

La France se distingue des autres pays européens par son faible taux d’accès à la propriété : 58 % contre 84 % pour les Espagnols, 71 % pour les Britanniques et 74 % pour les Belges. Il convient donc de trouver des solutions afin d’améliorer et de faciliter l’accession à la propriété.

La situation est encore plus difficile pour les jeunes. Il leur est déjà très difficile d’accéder à la location, compte tenu des garanties qui leur sont demandées et qu’ils ne peuvent pas toujours fournir. L’accession à la propriété reste donc inabordable pour la plupart d’entre eux.

Par conséquent, madame la ministre, je souhaite connaître les intentions du Gouvernement sur ce sujet, qui me semble capital.

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, ministre de l’écologie, du développement durable, des transports et du logement. Monsieur le sénateur, ainsi que vous l’avez excellemment souligné, la propriété de la résidence principale constitue, pour les ménages, un facteur essentiel de sécurisation et de stabilité, notamment pour la préparation de leur retraite. L’accession à la propriété consacre également leur ascension sociale et la réussite de leur parcours résidentiel ; elle est parfois, aussi, un symbole de réussite.

Ces caractéristiques légitiment l’objectif d’une France de propriétaires porté par le Gouvernement et justifient le principe d’un soutien public important aux projets des ménages. La réforme des aides à l’accession à la propriété, avec la création du prêt à taux zéro plus, dit « PTZ + », par le projet de loi de finances pour 2011, renforce ce soutien de l’État.

En effet, l’aide apportée par le PTZ + est globalement revue à la hausse par rapport au dispositif de prêt à taux zéro qui préexistait, pour mieux répondre aux besoins criants de solvabilisation des ménages nés de la hausse des prix que vous évoquez. Cette augmentation de l’aide passe à la fois par une revalorisation des montants plafonds d’opération du PTZ +, afin qu’ils correspondent aux prix de marché, et par un allongement des durées de remboursement, qui peuvent atteindre trente ans et conduisent au maintien d’un taux d’effort bas pour les ménages.

L’aide du PTZ + est recentrée afin de cibler l’effort sur les ménages pour lesquels le bénéfice du PTZ + se révèle décisif pour la concrétisation d’un projet de première accession à la propriété.

Tout d’abord, l’aide associée au PTZ + est fortement différenciée en fonction des revenus. Comme c’est normal, les ménages aisés seront moins aidés que les ménages plus modestes : c’était l’une des forces du PTZ, qui est reprise avec le PTZ +.

Les classes moyennes seront les grandes gagnantes du nouveau dispositif. Dans le PTZ actuel, étant parmi les plus riches des ménages éligibles, elles bénéficient d’une aide substantiellement réduite par rapport aux ménages modestes. Avec le PTZ +, elles bénéficieront pleinement du barème universel, en se situant à un niveau d’aide intermédiaire, bien plus proche du niveau de l’aide accordée aux ménages modestes qu’aujourd’hui. Ces classes, avec le nouveau système, seront celles dont la progression de l’aide sera la plus grande.

Monsieur le sénateur, vous avez évoqué la famille. Le barème du PTZ + tient significativement compte de la composition des ménages : il favorise les familles et apporte une aide aux classes moyennes avec enfants. En effet, ce sont elles qui éprouvent le plus de difficultés pour accéder à la propriété, puisqu’elles doivent d’abord subvenir aux besoins de l’ensemble du ménage.

Enfin, le PTZ + favorise un meilleur équilibre territorial, en encourageant et en soutenant davantage la construction neuve en zone tendue, où le déficit de logements est le plus important. Il encourage et soutient la rénovation des logements anciens en zone plus détendue, pour revitaliser les centres-bourgs et lutter contre l’étalement urbain. C’est dans ces zones que les classes moyennes éprouvaient le plus de difficultés pour se loger.

Monsieur le sénateur, vous le constatez, avec cette réforme, le Gouvernement s’est attaché à concentrer ses efforts sur nos concitoyens que vous avez appelés « les classes moyennes ».