M. Gilbert Barbier. Il s’agit d’un amendement rédactionnel.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Alain Milon, rapporteur. C’est en effet un amendement rédactionnel, qui vise à une inversion de mots. Pour autant, l’expression « identification par ses empreintes génétiques » est celle qui figure actuellement à divers endroits du code de la santé publique et dans le code civil. Pour cette raison, je demande le retrait de cet amendement ; à défaut, j’émettrai un avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Nora Berra, secrétaire d'État. Le Gouvernement s’en remet à la sagesse du Sénat.

M. le président. Monsieur Barbier, l'amendement n° 57 rectifié est-il maintenu ?

M. Gilbert Barbier. Monsieur le président, j’ai noté que la rédaction différait suivant les articles et que, un peu plus loin dans le texte, l’expression en question était utilisée dans l’autre sens. La cohérence ne me paraissant pas totalement respectée, je maintiens cet amendement.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 57 rectifié.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. L'amendement n° 87, présenté par M. Fischer, Mmes David et Pasquet, M. Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :

I. - Alinéa 11

Supprimer les mots :

ou en dehors d’une mesure d’enquête ou d’instruction diligentée lors d’une procédure de vérification d’un acte de l’état civil entreprise par les autorités diplomatiques ou consulaires dans le cadre des dispositions de l’article L. 111-6 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile

II. - Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

... - Les alinéas 2 et suivants de l’article L. 111-6 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile sont supprimés.

La parole est à Mme Marie-Agnès Labarre.

Mme Marie-Agnès Labarre. Voilà un peu plus de trois ans, le Parlement a voté le recours aux tests génétiques pour les étrangers candidats au regroupement familial. Nous nous étions alors indignés de cette mesure rétrograde, honteuse et discriminatoire. Notre opinion, vous vous en doutez, n’a pas varié.

Mais, plus étonnant, il semble que la majorité elle-même soit divisée sur cette question des tests ADN, car, depuis trois ans, plus de nouvelles ! Éric Besson, alors ministre de l’immigration, de l’intégration, de l’identité nationale et du développement solidaire, les a même « enterrés » en septembre 2009. Selon lui, le dispositif entraînait « trop de contraintes ». À la bonne heure ! Il aurait certainement préféré pouvoir créer un fichier génétique des demandeurs, voire – encore mieux – pouvoir automatiser le test sans leur accord exprès.

Automatiser le test ? Quelle idée saugrenue, contraire à nos principes, n’est-ce pas ? Et pourtant, aujourd’hui, si la mesure s’appliquait, soyons réalistes, quel demandeur refuserait un test ADN ?

La suspicion généralisée qui entoure désormais chaque demandeur de visa l’oblige à prouver méticuleusement tout ce qu’il avance. Les dossiers sont si lourds, si complexes, que la simple preuve de la filiation est très difficile à mettre en œuvre. Vous pourriez m’objecter qu’après tout il faut du contrôle, et donc des dossiers « sérieux ». Ce serait même en accord avec certaines autres de vos mesures. La suspicion s’est même étendue à nos compatriotes et beaucoup d’entre eux ont aujourd’hui des difficultés à prouver leur nationalité pour renouveler leurs papiers. Là aussi, acte de naissance, anciens passeports, livrets de famille ne suffisent plus. À ceux-là aussi demanderez-vous un jour un test ADN ?

Pour le dire clairement, le test ADN est, dans l’esprit de la loi de 2007, l’argument ultime et, à vrai dire, le seul qui compte dans l’établissement de la filiation. Exit les passeports, les actes de naissance, les documents d’état civil, exit le principe selon lequel la filiation de cœur est la plus importante.

Outre cette question, à la vérité, ce qui est particulièrement pernicieux dans cette loi de 2007, c’est le fait que l’on ne peut pas prouver sa véritable filiation sans le test génétique. Dans cette optique, il est évident que le consentement du demandeur est tout simplement inexistant. Certes, le demandeur n’est pas formellement obligé de demander un test mais, cessons l’hypocrisie, il n’obtiendra pas son visa.

Devant cette absence de consentement, comment, mes chers collègues, ne pas lier cette question à nos discussions sur la loi de bioéthique ? Oui, il est un principe que nous partageons tous ici, j’en suis sûre, selon lequel les tests génétiques ne peuvent être réalisés qu’avec l’accord du demandeur, tout simplement pour respecter son choix, sa dignité en tant qu’être humain. Un consentement « imposé » par nécessité, tel que le prévoit cet article, n’est pas un consentement.

Tout concourt à dire qu’une telle méthode, foncièrement discriminante, de par une catégorisation entre « bons » et « mauvais » étrangers, est fondamentalement contraire à nos principes au regard de la dignité de la personne humaine et de son libre arbitre. Elle est contraire au principe du choix, du consentement à l’exécution de tests génétiques. De plus, le caractère inapplicable de cette mesure, restée lettre morte depuis trois ans, nous invite à nous poser la question de sa pertinence.

Ainsi, au regard de cette absence de pertinence, et de l’hypocrisie qui consiste à faire croire que le demandeur de visa aurait le choix de refuser le test génétique, il me paraît tout à fait opportun, aujourd’hui, de supprimer cette disposition.

Mme Marie-Thérèse Hermange. C’est un autre débat !

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Alain Milon, rapporteur. Je reviens très brièvement sur l’amendement n° 57 rectifié, en signalant à notre collègue Gilbert Barbier que rien qu’à l’article 3 l’expression « identification par empreintes génétiques » est utilisée six fois.

L’amendement n° 87 vise à revenir sur une disposition qui figure aujourd'hui dans le code pénal et qui est simplement reprise dans l’article L. 1133–4 du code de la santé publique, lequel est dit le « code suiveur ». Cet amendement ne peut avoir de véritable portée s’il ne modifie pas parallèlement l’article 226–28 du code pénal. Il s’agit de toute façon d’un autre débat. Aussi, la commission émet un avis défavorable.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis.

M. François-Noël Buffet, rapporteur pour avis. La commission des lois n’ayant pas été saisie de cet amendement, elle n’a pas eu à se prononcer sur celui-ci.

En revanche, à titre personnel, je souhaite simplement indiquer à Mme Labarre que, très objectivement, cet amendement n’a rien à faire aujourd'hui dans ce projet de loi sur la bioéthique. Il trouverait davantage sa place dans le projet de loi relatif à l’immigration, à l’intégration et à la nationalité puisqu’il est issu du texte de 2007. Personnellement, je suis donc défavorable à cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Nora Berra, secrétaire d'État. Même avis que M. le rapporteur.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 87.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. La parole est à Mme Patricia Schillinger, pour explication de vote sur l'article.

Mme Patricia Schillinger. Cet article a trait au régime d’autorisation des laboratoires réalisant des activités de génétique. Le texte original était ambivalent sur le régime des sanctions pénales envers les officines effectuant des examens dans l’illégalité. La modification par un amendement en commission a permis de rendre ce texte plus lisible. C’est à mon avis une bonne chose.

En effet, rien n’était inscrit implicitement dans cet article pour réserver l’examen des caractéristiques génétiques d’une personne ou son identification par empreintes génétiques à des fins uniquement médicales ou judiciaires. Or il s’agit d’une mesure de précaution républicaine.

En novembre 1992, lors de la première lecture à l’Assemblée nationale du texte qui est devenu la loi de 1994 dite de bioéthique, les députés avaient demandé une suspension de la séance de nuit afin de s’accorder sur un point. Il s’agissait de différencier, parmi les tests génétiques, ceux qui étaient à usage médical, par exemple la détection d’une prédisposition génétique à une maladie, et ceux dont la finalité était l’identification d’un individu ou la détermination d’une filiation grâce aux empreintes d’ADN.

Indépendamment de leur appartenance partisane, les élus décidèrent que ce dernier type de tests ne pouvait être entrepris en France qu’en vertu d’une saisine judiciaire. Ce consensus était lié à une réflexion sur la nature des liens familiaux. La voici : en règle générale, les enfants procèdent biologiquement de la mère et du père.

Cependant, il n’en est pas toujours ainsi. La femme peut être inséminée avec un sperme de donneur ; les enfants peuvent être adoptés ; le père légal peut être différent du père biologique sans que cela remette en question le lien familial. Les généticiens le savent et estiment que, suivant les régions, 3 % à 8 % des enfants de souche ne procèdent pas biologiquement de la mère et du père.

Notre parlement, après d’importants débats avec les experts, les associations familiales et des membres de la société civile, a considéré que le lien de filiation ne devait pas se réduire à sa dimension biologique. On peut être père ou mère par le cœur, par le désir, par la transmission de valeurs, sans rien avoir légué de ses gènes à ses enfants.

Il importe d’éviter que cette relation, sanctionnée par la loi, ne puisse être remise en cause par un homme qui, après une dispute, un cauchemar ou une lecture, se mettrait à douter de sa paternité biologique et qui, après avoir prélevé quelques cheveux de sa progéniture, les ferait analyser. Voyez comment des firmes américaines prospèrent déjà sur l’investigation génétique ! C'est pourquoi nous voterons cet article.

M. le président. Je mets aux voix l'article 3, modifié.

(L'article 3 est adopté.)

Article 3
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Article 4 bis

Article 4

I. – À l’intitulé du titre III du livre Ier de la première partie du même code, les mots : « génétique et recherche génétique » sont remplacés par les mots : « par empreintes génétiques et profession de conseiller en génétique ».

II. – L’article L. 1131–6 du même code est ainsi modifié :

1° Au 1°, après le mot : « personne », sont insérés les mots : « ou son identification par empreintes génétiques » ;

2° Sont ajoutés des 3° et 4° ainsi rédigés :

« 3° Les conditions d’application de l’article L. 1131–1–2, après avis de l’Agence de la biomédecine ;

« 4° Les conditions que doivent remplir les laboratoires de biologie médicale mentionnés à l’article L. 1131-2-1 pour être autorisés à pratiquer l’examen des caractéristiques génétiques d’une personne ou son identification par empreintes génétiques à des fins médicales. » – (Adopté.)

Article 4
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Article 4 ter

Article 4 bis

(Supprimé)

Article 4 bis
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Article 4 quater

Article 4 ter

Après le premier alinéa de l’article L. 1131–3 du code de la santé publique, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Nul ne peut demander l’examen des caractéristiques génétiques le concernant ou concernant un tiers sans prescription médicale et sans recourir à un laboratoire autorisé dans les conditions fixées à l’article L. 1131–2–1. »

M. le président. La parole est à M. Guy Fischer, sur l'article.

M. Guy Fischer. Cet article, tel qu’il résulte de l’amendement déposé par notre rapporteur et adopté par la commission des affaires sociales, vise à inscrire dans le code de la santé publique le principe de l’interdiction du recours à des tests génétiques à finalité médicale, pour soi-même ou pour un tiers, sans prescription médicale ni appel à un laboratoire autorisé par l’Agence de la biomédecine.

Cette disposition, que nous soutenons, tend donc à préserver ce qu’il est convenu d’appeler aujourd’hui « l’intimité génétique », et à éviter ou, à tout le moins, tenter d’éviter que ne se développe la pratique des tests génétique à des fins d’établissement de filiation en dehors du protocole actuellement prévu par la loi.

En effet, comme le Conseil d’État le rappelle dans l’étude qu’il a réalisée sur la révision des lois de bioéthique, « le caractère restrictif de cette législation s’explique par la volonté du législateur de ne pas favoriser la banalisation des tests génétiques de paternité, pratique qui porte potentiellement atteinte au principe de stabilité et d’indisponibilité de la filiation ».

Au-delà de cette question naturelle de la filiation, d’autres problématiques émergent actuellement, comme la question de la réalisation des tests ADN dans le cadre de l’activité professionnelle.

Bien qu’étant théoriquement impossible en France aujourd'hui, certaines personnes sont tentées d’y recourir, y compris en avançant des arguments fallacieux tels que la prévention des maladies professionnelles dans l’intérêt – cela va de soi ! – du salarié. Mais en réalité, on voit bien que, derrière tout cela, se profile la volonté de dépister des sensibilités potentielles afin de mieux sélectionner les salariés sur un motif naturellement discriminatoire. On peut même craindre que, finalement, cela ne permette aux employeurs de se dispenser de respecter leurs obligations en matière de santé. En effet, le problème est moins une présupposée prédisposition génétique à des maladies résultant de l’exposition à certains facteurs que l’exposition elle-même.

Comme le souligne le docteur Briard du service de génétique médicale de l’hôpital Necker-Enfants malades, « nul n’a le désir de considérer la réalisation d’un test génétique comme un moyen de prévention dès lors qu’il conduit à une sélection en milieu du travail ».

L’article 4 ter tel qu’il résulte du travail de la commission permettra justement, semble-t-il, d’éviter cet écueil. C’est la raison pour laquelle le groupe CRC-SPG votera en faveur de son adoption.

M. le président. L'amendement n° 58 rectifié, présenté par MM. Barbier, Collin, Baylet, Bockel et Detcheverry, Mmes Escoffier et Laborde et MM. Mézard, Milhau, Tropeano et Vall, est ainsi libellé :

Alinéa 2

Après le mot : 

tiers

insérer les mots :

dont il a la responsabilité légale

La parole est à M. Gilbert Barbier.

M. Gilbert Barbier. Je comprends bien la volonté de M. le rapporteur d’interdire le recours à des tests génétiques pour soi-même ou pour un tiers sans prescription médicale et sans recours à un laboratoire autorisé. A contrario, si une personne dispose d’une prescription médicale, soit elle concerne elle-même, et cela ne me paraît pas poser problème, soit elle a trait à un tiers, et la situation est alors, me semble-t-il, beaucoup plus compliquée. Nous avons vu qu’il était possible de s’adresser à un laboratoire situé dans un autre pays de l’Union européenne, lorsque la prescription ne précise pas si le médecin doit être français ou d’un autre pays.

Tout en respectant ce texte, il serait possible de demander les caractéristiques génétiques d’un tiers quel qu’il soit en présentant une prescription médicale et en s’adressant à un laboratoire autorisé. C’est pourquoi j’ai déposé le présent amendement visant à préciser qu’il s’agit d’un tiers dont on a la responsabilité légale.

En effet, cette disposition pose un véritable problème juridique : dès lors que l’on réussit à obtenir une prescription médicale – c’est envisageable –, on pourra faire pratiquer des tests génétiques sur toute personne de son entourage.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Alain Milon, rapporteur. Cet amendement de précision vise à indiquer que la demande d’un test génétique pour un tiers ne peut concerner qu’un tiers dont le demandeur a la responsabilité légale, c’est-à-dire un enfant ou un incapable majeur.

La commission se demande s’il est utile de le préciser ici, sachant que le recours à un test génétique ne pourra de toute façon se faire que sur prescription médicale. Elle souhaite donc recueillir l’avis du Gouvernement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Nora Berra, secrétaire d'État. Le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement. La référence à un tiers soulève un véritable problème de compréhension et peut induire un effet a contrario.

Dans ces conditions, je propose de supprimer la mention « le concernant ou concernant un tiers » et de nous en tenir à la formulation suivante : « Nul ne peut demander un examen des caractéristiques génétiques sans prescription médicale et sans recourir à un laboratoire autorisé dans les conditions fixées par l’article L. 1131–2–1. ».

M. le président. Qu’en pense la commission ?

M. Alain Milon, rapporteur. Elle accepte cette proposition, monsieur le président.

M. le président. Madame la secrétaire d'État, pouvez-vous me faire parvenir une version écrite du texte que vous proposez ?

Mme Nora Berra, secrétaire d'État. Bien sûr, monsieur le président.

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Godefroy.

M. Jean-Pierre Godefroy. Madame la secrétaire d'État, cette rédaction me paraît vague…

M. le président. La parole est à Mme Marie-Thérèse Hermange.

Mme Marie-Thérèse Hermange. La formulation présentée par Mme la secrétaire d’État me paraît vague. Que se passe-t-il lorsqu’il faut procéder à un examen génétique sur un enfant ou un incapable majeur ? Puisqu’ils ne peuvent le demander eux-mêmes, il faut bien que la personne qui assume leur responsabilité légale soit citée.

La suppression proposée ne règle pas les choses. La disposition ne peut s’appliquer que si la personne dispose de la capacité de demander cet examen. Si tel n’est pas le cas, il est normal que le tuteur qui dispose de la responsabilité légale puisse le demander en son nom.

M. Gilbert Barbier. Très bien !

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Mme Nora Berra, secrétaire d'État. Madame Hermange, la situation que vous décrivez entre bien évidemment dans le cadre du droit commun. Effectivement, la personne qui exerce l’autorité sur un enfant mineur ou sur une personne en incapacité a l’autorité pour demander l’examen en question.

M. le président. La parole est à Mme Annie David.

Mme Annie David. La rédaction proposée m’amène à soulever une nouvelle question : est-il possible de demander un examen des caractéristiques génétiques dès lors que je dispose d’une prescription médicale et que je recoure à un laboratoire autorisé ? Ainsi, une personne au tempérament dictatorial pourrait, dès lors qu’elle obtient une prescription médicale, faire pratiquer d’autorité un examen génétique sur un membre de sa famille, sans l’en informer. Madame la secrétaire d'État, une telle hypothèse est-elle envisageable ?

Mme Nora Berra, secrétaire d'État. Vous voulez dire pour un membre de sa famille ?

Mme Annie David. Par exemple. En effet, votre rédaction ne précise pas les personnes concernées : s’agit-il du demandeur, d’un enfant ou d’un majeur incapable ? Une telle disposition ne concerne plus personne en particulier. Elle fait naître le doute : qui pourra demander un tel examen et, surtout, pour qui ?

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Mme Nora Berra, secrétaire d'État. Madame David, il faut disposer d’une prescription médicale et recourir à un laboratoire autorisé, mais il faut également le consentement exprès de la personne qui va subir le test. En l’absence de précision, le droit commun s’applique : il s’agit de la personne concernée par le test ou d’une personne qui exerce une autorité légale sur celle-ci.

Le terme « tiers » est trop flou. Il n’est évidemment pas possible de demander de tels tests pour des membres de sa famille au deuxième degré, par exemple des frères et sœurs. Il ne peut s’agir que d’une autorité exercée dans le cadre légal.

M. le président. La parole est à M. Gilbert Barbier.

M. Gilbert Barbier. Je voudrais reprendre l’argumentation de Mme Hermange. Je conçois bien que l’on simplifie la rédaction, mais il faut évoquer le cas des mineurs et des incapables majeurs.

Je veux bien que le droit commun s’applique, mais il serait tout de même préférable de préciser que l’article concerne uniquement les tiers placés sous la responsabilité de la personne qui demande les tests.

M. le président. Je viens d’être saisi de l'amendement n° 172, présenté par le Gouvernement et ainsi libellé :

Alinéa 2

Remplacer les mots :

l'examen

par les mots :

un examen

Supprimer les mots :

le concernant ou concernant un tiers

Je rappelle que la commission a émis un avis favorable.

Je mets aux voix l'amendement n° 172.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Quel est maintenant l’avis de la commission sur l'amendement n° 58 rectifié ?

M. Alain Milon, rapporteur. La commission s’en remet à la sagesse de notre assemblée.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 58 rectifié.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je constate que cet amendement a été adopté à l’unanimité des présents.

Je mets aux voix l'article 4 ter, modifié.

(L'article 4 ter est adopté.)

Article 4 ter
Dossier législatif : projet de loi relatif à la bioéthique
Article additionnel après l'article 4 quater

Article 4 quater

(Supprimé)

M. le président. L'amendement n° 11 rectifié, présenté par MM. Godefroy et Cazeau, Mme Le Texier, M. Michel, Mmes Cerisier-ben Guiga, Alquier, Printz et Schillinger, MM. Kerdraon et Le Menn, Mmes Demontès et Jarraud-Vergnolle, M. Mirassou, Mmes Blondin, Bourzai et Lepage, MM. C. Gautier, Collombat, Guérini, Madec, Marc, Massion, Yung et les membres du groupe Socialiste et apparentés, est ainsi libellé :

Rétablir ainsi cet article dans la rédaction suivante :

L'ordonnance n° 2010–49 du 13 janvier 2010 relative à la biologie médicale est abrogée.

La parole est à M. Jean-Pierre Godefroy.

M. Jean-Pierre Godefroy. Cet amendement vise à rétablir l’article 4 quater adopté par l’Assemblée nationale qui supprime l’ordonnance du 13 janvier 2010 relative à la biologie médicale, mais pas pour les mêmes raisons que les députés.

Lors de l’examen de la loi portant réforme de l’hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires, dite « loi HPST », dans laquelle le Gouvernement avait demandé l’habilitation pour rédiger cette ordonnance, les sénateurs socialistes avaient dénoncé la remise en cause du modèle français de biologie médicale, c’est-à-dire une biologie médicale praticienne, rendant un réel service de proximité aux patients, avec des laboratoires qui restent à taille humaine.

Maintenant que l’ordonnance est publiée, nous craignons encore plus l’industrialisation, le gigantisme et l’avènement d’une biologie déshumanisée avec d’énormes plateaux techniques et des sites satellites qui seraient de simples centres de prélèvements sans aucune activité technique réelle.

Nous craignons d’importantes restructurations qui entraîneraient la fermeture de 1 000 à 2 000 laboratoires de proximité à taille humaine – qui aujourd’hui font un travail de qualité et qui garantissent un maillage territorial efficace en termes de santé publique –, ainsi que des pertes d’emplois considérables pour les biologistes, les techniciens, les secrétaires et le personnel de l’industrie du réactif, soit un contresens et une erreur politique majeure à l’heure actuelle.

Il suffit d’ailleurs de lire la presse locale pour constater que les fermetures et regroupements de certaines petites et moyennes structures ont déjà commencé, suscitant la consternation des patients devant la mise en danger de leur santé.

Nous craignons la financiarisation de la biologie médicale via la constitution de grands groupes diffus, incontrôlables, échappant à toute éthique et toutes règles déontologiques, dans lesquels les biologistes ne seraient que des exécutants, ayant perdu la maîtrise de leur outil de travail et leur indépendance intellectuelle.

Force est de constater que l’ordonnance du 13 janvier 2010 n’apporte pas les garanties nécessaires pour préserver la qualité et l’intérêt de notre système de biologie médicale. Au contraire, elle crée les conditions permettant à quelques investisseurs, par le biais de montages juridiques complexes, de prendre le contrôle du secteur.

C’est pourquoi cette ordonnance est si impopulaire tant chez les biologistes concernés que chez les patients qui sont déjà 275 000 à avoir signé la pétition « Touche pas à mon labo ».

Nous demandons par conséquent son abrogation.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Alain Milon, rapporteur. L’article 69 de la loi du 21 juillet 2009 portant réforme de l’hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires, dite loi HPST, a habilité le Gouvernement à légiférer par voie d’ordonnance pour réformer les conditions de création, d’organisation et de fonctionnement des laboratoires de biologie médicale.

M. Guy Fischer. Eh oui !

M. Alain Milon, rapporteur. Élaborée en concertation avec les différents acteurs concernés et conformément à l’habilitation, l’ordonnance prise le 13 janvier 2010 a entièrement redéfini le statut de la biologie médicale.

Elle a, en particulier, réaffirmé le statut médical de la discipline, donné une définition du biologiste médical – un médecin ou un pharmacien spécialiste en biologie médicale –, harmonisé les règles de fonctionnement des laboratoires de biologie médicale entre les secteurs public et privé, cherché à garantir la continuité de l’offre de biologie médicale sur un même territoire de santé, maintenu une limite territoriale de l’activité d’un laboratoire, garanti la pluralité de l’offre de biologie médicale sur un territoire donné, institué un mécanisme d’accréditation obligatoire de tous les laboratoires de biologie médicale.

Depuis sa publication, trois points font l’objet de vives critiques par un certain nombre d’acteurs : d’abord, l’impossibilité de recruter en centres hospitaliers universitaires des biologistes médicaux ne disposant pas du diplôme d’études spécialisées, ou DES, de biologie médicale…

M. Gilbert Barbier. C’est bien normal !

M. Alain Milon, rapporteur. … et la réorganisation des laboratoires de biologie médicale dans les centres hospitaliers universitaires sous la forme de laboratoire unique d’établissement ; ensuite, l’impossibilité de ristournes sur les examens de biologie médicale ; enfin, l’autorisation de prélèvements d’échantillons biologiques en cabinet d’infirmier.

Le principal grief des députés auteurs de l’amendement ayant conduit à abroger l’ordonnance est lié à la première de ces critiques, expliquant que le texte actuel « interdit à d’éminents professeurs de continuer d’occuper une chaire, faute d’avoir fait des études qui mènent directement à la biologie », ce qui, au Sénat ne fait pas problème. Nous avons beaucoup discuté, en commission, avec Gilbert Barbier en particulier, et nous étions d’accord sur ce sujet.

La commission estime que les difficultés soulevées ne justifient pas, à elles seules, l’abrogation de l’ordonnance tout entière alors même que celle-ci a commencé à être appliquée.

Par ailleurs, parmi les points critiqués, l’un peut être réglé par décret, à savoir le prélèvement en cabinet d’infirmier, ce que prévoit, d’ailleurs, l’ordonnance, les deux autres sont susceptibles de faire l’objet de négociations entre les organisations professionnelles concernées et le Gouvernement, celui-ci s’est d’ailleurs engagé à le faire.

Ainsi, la commission a décidé de revenir sur l’abrogation votée par l’Assemblée nationale, tout en interpellant le Gouvernement sur la manière dont il envisage de régler les problèmes soulevés par certains professionnels.

En conséquence, nous émettons un avis défavorable sur l’amendement n° 11 rectifié.