Mme Annie David. Ce n’est pas très sérieux !

M. Patrick Ollier, ministre. C’est l’application de la Constitution et du règlement, il n’y a rien là d’extraordinaire !

Sur l’amendement n° 46, je partage l’avis de M. le rapporteur, et ce pour deux raisons.

Tout d’abord, le COV ne peut concerner une variété préexistant dans le milieu naturel, car le critère de nouveauté, qui est indispensable pour obtenir ce certificat, ne serait alors pas respecté.

Ensuite, si je suis personnellement favorable aux pratiques paysannes traditionnelles, il n’en demeure pas moins qu’une telle terminologie, floue sur le plan juridique, ne pourrait qu’encourager dérives et abus.

Pour ces deux raisons, le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement.

M. le président. La parole est à M. Daniel Raoul, pour explication de vote.

M. Daniel Raoul. Je m’abstiendrai sur cet amendement. Celui-ci est en effet partiellement satisfait, puisqu’une variété existant dans la nature ne peut faire l’objet d’un COV.

M. le président. La parole est à Mme Marie-Christine Blandin, pour explication de vote.

Mme Marie-Christine Blandin. Je voterai cet amendement, au nom de mes amis écologistes, avec quelque malice néanmoins, puisque je considère que tout vient de la nature, qui résulte de 3,5 milliards d’années d’évolution, et des pratiques paysannes traditionnelles ou endémiques, qui se sont transmises au cours de 20 000 ans de protohistoire.

En conséquence, cet amendement montre bien qu’il peut y avoir tentative de confiscation, dès lors que la pratique des COV est confortée.

M. le président. Je confirme à Mme Blandin que le vote avec malice est un vote ! (Sourires.)

Je mets aux voix l'amendement n° 46.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 12, modifié.

(L'article 12 est adopté.)

Article 12
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Article 14 (réservé)

Article 13

L’article L. 623-24 du même code est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« L’article L. 611-7 est également applicable aux certificats d’obtention végétale, les inventions y étant entendues comme les obtentions, les brevets comme les certificats d’obtention végétale et la commission de conciliation comme celle instituée par un décret spécifique au domaine particulier des obtentions végétales. »

M. le président. La parole est à M. Daniel Raoul, sur l'article.

M. Daniel Raoul. Monsieur le ministre, mes chers collègues, je vous prie tout d’abord d’excuser l’absence de mon collègue Richard Yung, très attaché à la notion de propriété intellectuelle, en particulier pour ce qui concerne les salariés.

L’article 13 vise à étendre aux obtentions végétales les dispositions du code de la propriété intellectuelle relatives aux droits des inventeurs salariés. Nous soutenons cette disposition, car elle va dans le bon sens en mettant sur un pied d’égalité les salariés auteurs d’inventions et ceux qui créent et développent les variétés. Ces derniers pourront donc normalement bénéficier d’une rémunération supplémentaire, si la création de la nouvelle variété est réalisée dans le cadre d’une mission inventive, ou d’un juste prix, si elle est effectuée en liaison avec l’entreprise.

Cependant, il est à craindre que ce droit ne demeure théorique. Notre sentiment d’inquiétude provient du fait que les salariés auteurs d’inventions sont actuellement peu reconnus et mal rémunérés.

En effet, la loi du 26 novembre 1990 relative à la propriété industrielle a renvoyé aux conventions collectives, aux accords d’entreprise et aux contrats individuels de travail le soin de déterminer le mode de calcul. Or les dispositions prévues dans les conventions collectives, lorsque celles-ci existent, sont floues et incomplètes, voire irrégulièrement appliquées. Quant à celles qui figurent dans les accords d’entreprise, elles sont quasiment inexistantes. Il en va de même pour les contrats individuels de travail.

Dans un contexte qui pourrait être défavorable à l’innovation, certains inventeurs salariés du secteur privé sont contraints de saisir, parfois d’ailleurs au prix de leur licenciement, la Commission nationale des inventions de salariés, la CNIS, ou le tribunal de grande instance, afin de faire appliquer leurs droits.

Une telle situation est inacceptable et nous souhaiterions que le Gouvernement prenne une initiative concrète, afin de mieux récompenser les inventeurs salariés. Il ne suffit pas de sauter dans son fauteuil, en criant « innovation » ; il faut aussi donner aux créateurs des moyens et une juste récompense de leur travail.

M. le président. Je mets aux voix l'article 13.

(L'article 13 est adopté.)

Article 13
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Articles additionnels après l'article 14

Article 14 (réservé)

M. le président. Je rappelle que l’article 14 a été réservé jusqu’à la fin du texte.

Article 14 (réservé)
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Article 15

Articles additionnels après l'article 14

M. le président. L'amendement n° 14, présenté par M. Raoul, Mme Blandin, M. Yung et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Après l’article 14, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

À la première phrase de l’article L. 632-1 du code rural et de la pêche maritime, les mots : « les plus » sont supprimés.

La parole est à M. Daniel Raoul.

M. Daniel Raoul. Il s’agit pratiquement d’un amendement rédactionnel.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Rémy Pointereau, rapporteur. Cet amendement vise à subordonner la reconnaissance d’une organisation interprofessionnelle à la présence de toutes les organisations professionnelles représentatives de la production agricole et non à la seule présence des organisations les plus représentatives.

Il s’agit de rouvrir un débat qui a déjà eu lieu lors de la discussion de la loi de modernisation de l’agriculture et de la pêche.

Soulignons également, monsieur Raoul, que vous préconisez l’adoption d’un tel principe pour toutes les interprofessions et pas seulement pour celle des semences.

Au demeurant, cet amendement s’apparente fortement à un cavalier législatif.

M. Rémy Pointereau, rapporteur. La mesure proposée n’entretient qu’un rapport lointain avec l’objet du texte, à savoir l’adaptation du système français de protection intellectuelle pour y intégrer les variétés végétales et non l’organisation générale de la profession agricole.

La commission émet donc un avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Patrick Ollier, ministre. La vigilance de M. le rapporteur n’a pas été trompée ! Cet amendement n’est absolument pas rédactionnel.

J’émettrai en même temps l’avis du Gouvernement sur les amendements nos 14, 15 et 16, qui ont le même objet. Tous sont des cavaliers législatifs, monsieur Raoul, vous ne l’ignorez pas ! (M. Daniel Raoul sourit.) Votre sourire me démontre que j’ai raison…

M. Le Maire a toujours veillé à ce que l’ensemble des organisations professionnelles représentatives soient associées aux travaux qu’il engage. Il s’agit d’organisations de droit privé régies par la loi de 1901 relative au contrat d’association. En l’état actuel du droit, la représentation pluraliste des organisations professionnelles au sein des interprofessions est permise, à condition qu’il y ait un accord entre les professions concernées pour travailler sur des actions communes.

Par ailleurs, je rejoins tout à fait les arguments de M. le rapporteur. Pour toutes ces raisons, le Gouvernement est défavorable aux amendements nos 14, 15 et 16.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 14.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. L'amendement n° 15, présenté par M. Raoul, Mme Blandin, M. Yung et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Après l’article 14, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

À la première phrase de l’article L. 632-4 du code rural et de la pêche maritime, après les mots : « est subordonnée », sont insérés les mots : « à la représentation de l'ensemble des organisations syndicales d'exploitants agricoles à vocation générale habilitées à siéger nationalement et ».

La parole est à M. Daniel Raoul.

M. Daniel Raoul. Je suppose que cet amendement va subir le même sort que le précédent. Les mêmes arguments vont probablement être avancés.

J’ai essayé de passer en douceur,…

Mme Françoise Laborde. C’était bien essayé !

M. Daniel Raoul. … mais cela ne marche pas !

Je considère donc que cet amendement est défendu.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Rémy Pointereau, rapporteur. La commission est défavorable à cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Patrick Ollier, ministre. Le Gouvernement s’est déjà exprimé : il émet un avis défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 15.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. L'amendement n° 16, présenté par M. Raoul, Mme Blandin, M. Yung et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Après l’article 14, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après le premier alinéa de l'article L. 632-6 du code rural et de la pêche maritime, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Le prélèvement de ces cotisations est subordonné à la représentation, dans les organisations interprofessionnelles concernées par des accords étendus, de l'ensemble des organisations syndicales d'exploitants agricoles à vocation générale habilitées à siéger nationalement. » ;

La parole est à M. Daniel Raoul.

M. Daniel Raoul. L'article L. 632-6 du code rural et de la pêche maritime habilite les interprofessions à prélever sur tous les membres des professions les constituant, que ces membres soient adhérents ou non, des cotisations résultant des accords étendus.

Cet amendement vise à conditionner le prélèvement des cotisations à la représentation dans l'interprofession de l’ensemble des syndicats agricoles à vocation générale. Comme vous pouvez le constater, je suis fidèle à ma logique ! Je tiens à le redire, les engagements qui avaient été pris concernant la pluralité de la représentation syndicale n’ont pas été tenus. Cette question faisait l’objet de l’amendement n° 15, que je n’ai pas défendu pour faire gagner un peu de temps à notre assemblée.

Monsieur le ministre, je souhaiterais que les engagements pris par M. Le Maire ici même, au banc des ministres, lors de l’examen de la loi de modernisation de l’agriculture et de la pêche, soient tenus ! Il faut que les dispositions soient mises en application, ce qui permettra de faire évoluer les choses.

Mme Françoise Laborde. Ne peut-on pas attendre M. Le Maire ?

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Rémy Pointereau, rapporteur. Monsieur Raoul, vous allez encore plus loin que tout à l’heure ! (M. Daniel Raoul s’exclame.) Cet amendement prévoit en effet que le prélèvement des cotisations résultant d’accords étendus n’est possible que si les interprofessions concernées comprennent l’ensemble des organisations représentatives des exploitants agricoles au niveau national.

Il faut savoir que la notion de « représentativité » est définie au sein des chambres d’agriculture, ce qui permet aux uns et aux autres d’être représentés.

La commission émet donc un avis défavorable sur cet amendement, qui, comme le précédent, ne présente pas de lien direct avec l’objet du texte.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Patrick Ollier, ministre. Monsieur Raoul, pour les raisons que j’ai déjà évoquées, je suis défavorable à cet amendement.

Cependant, la question que vous posez s’adresse au ministre de l’agriculture. Par conséquent, je demande aux membres de son cabinet de faire en sorte qu’il vous réponde tout à l’heure, lorsqu’il sera arrivé.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 16.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. L'amendement n° 17, présenté par M. Raoul, Mme Blandin, M. Yung et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Après l’article 14, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Au premier alinéa de l'article L. 632-8-1 du code rural et de la pêche maritime, après les mots : « autorités administratives compétentes », sont insérés les mots « et à tous les cotisants qui en font la demande ».

La parole est à M. Daniel Raoul.

M. Daniel Raoul. Contrairement à ce que prétend M. le rapporteur, je ne fais pas de surenchère ! Cet amendement vise en effet à faire respecter la pluralité, non pas au sein de l’interprofession, mais au regard des autorités administratives.

Toutefois, j’imagine que M. le rapporteur et M. le ministre vont m’apporter la même réponse.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Rémy Pointereau, rapporteur. Il paraît légitime de devoir transmettre les justifications de l’utilisation des fonds prélevés. Ce débat a déjà eu lieu lors de la discussion de la loi de modernisation de l’agriculture et de la pêche.

Quoi qu’il en soit, la commission est défavorable à cet amendement, dont les dispositions sont éloignées de l’objet de la proposition de loi.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Patrick Ollier, ministre. Monsieur Raoul, cet amendement n° 17 est aussi un cavalier législatif !

Par ailleurs, il est satisfait : soit le cotisant est membre d’une organisation membre de l’interprofession et, dans ce cas, il peut s’adresser à l’organisation qui le représente pour avoir accès aux documents ; soit il ne l’est pas et il a alors la possibilité d’accéder aux documents auprès des pouvoirs publics.

Je vous demande donc de bien vouloir retirer cet amendement.

M. le président. Monsieur Raoul, l’amendement n° 17 est-il maintenu ?

M. Daniel Raoul. Oui, monsieur le président, je le maintiens.

On peut toujours, il est vrai, s’adresser à la Commission d’accès aux documents administratifs, la CADA, mais il serait plus simple que chacun ait accès, d’une façon normale, à ces documents.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 17.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Articles additionnels après l'article 14
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Article 15 bis (nouveau)

Article 15

Les trois premiers alinéas de l’article L. 623-25 sont remplacés par les deux alinéas ainsi rédigés :

« Sous réserve des dispositions de l’article L. 623-24-1, toute atteinte volontaire portée aux droits du titulaire d’un certificat d’obtention végétale tels qu’ils sont définis à l’article L. 623-4 constitue une contrefaçon qui engage la responsabilité civile de son auteur. Au sens du présent article, sont également considérées comme une atteinte au droit du titulaire d’un certificat d’obtention végétale les utilisations incorrectes ou abusives de la dénomination de la variété qui fait l’objet d’un certificat d’obtention.

« Le titulaire d’une licence d’office visée aux articles L. 623-17 et L. 623-20, le titulaire d’une licence obligatoire visée à l’article L. 623-22-3 et, sauf stipulation contraire, le bénéficiaire d’un droit exclusif d’exploitation peuvent exercer l’action prévue au premier alinéa si, après mise en demeure, le titulaire du certificat n’exerce pas cette action. » – (Adopté.)

chapitre Ier bis

CONSERVATION DES RESSOURCES PHYTOGÉNÉTIQUES FRANCAISES POUR L'AGRICULTURE ET L'ALIMENTATION

(Division et intitulé nouveaux)

Article 15
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Article 16

Article 15 bis (nouveau)

Le chapitre préliminaire du titre VI du livre VI du code rural et de la pêche maritime est complété par trois articles ainsi rédigés :

« Art. L. 660-2. – La conservation des ressources phytogénétiques françaises pour l'agriculture et l'alimentation est organisée, dans l'intérêt général, pour les besoins de la recherche scientifique, de l'innovation et de la sélection variétale appliquée, et notamment pour éviter la perte irréversible de ressources phytogénétiques stratégiques.

« Pour être enregistrée comme ressource phytogénétique française pour l'agriculture et l'alimentation, une ressource phytogénétique doit satisfaire aux conditions suivantes :

« 1° Présenter un intérêt particulier pour la recherche scientifique, l'innovation ou la sélection variétale appliquée ;

« 2° Ne pas figurer au catalogue officiel des espèces et variétés de plantes cultivées ;

« 3° Ne pas faire l'objet d'un certificat d'obtention végétale.

« Art. L. 660-3. – Est identifiée comme ressource phytogénétique patrimoniale française toute ressource phytogénétique satisfaisant aux conditions d'enregistrement définies à l'article L. 660-2 et bénéficiant d'une reconnaissance en tant qu'élément du patrimoine agricole et alimentaire national vivant, notamment en raison du fait qu'elle est représentative de l’agriculture française, présente ou passée, qu’elle a été diffusée sur le territoire ou qu’elle est emblématique d’une région.

« La conservation des ressources phytogénétiques patrimoniales françaises est organisée, dans l'intérêt général, dans des conditions de nature à faciliter l'accès des citoyens et de la communauté internationale à des échantillons de ces ressources compte tenu de leur intérêt global pour l’agriculture et l’alimentation.

« Ces ressources sont intégrées dans la collection nationale des ressources phytogénétiques mentionnée à l'article L. 660-1.

« Art. L. 660-4. – Les conditions d'enregistrement et de reconnaissance des ressources phytogénétiques définies aux articles L. 660-2 et L. 660-3 ainsi que les modalités de conservation et de valorisation des échantillons de ces ressources sont précisées par décret. »

M. le président. Je suis saisi de six amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 56 rectifié, présenté par M. Demuynck, est ainsi libellé :

Rédiger ainsi cet article :

Le chapitre préliminaire du titre VI du livre VI du code rural et de la pêche maritime est ainsi modifié :

1° Son intitulé est ainsi rédigé :

« La conservation des ressources phytogénétiques pour l'agriculture et l'alimentation » ;

2° Il est complété par trois articles L. 660-2 à L. 660-4 ainsi rédigés :

« Art. L. 660-2. - La conservation des ressources phytogénétiques pour l'agriculture et l'alimentation est organisée, dans l'intérêt général en vue de leur utilisation durable, en particulier pour la recherche scientifique, l'innovation et la sélection variétale appliquée, dans le but d’éviter la perte irréversible de ressources phytogénétiques stratégiques.

« Pour être enregistrée comme ressource phytogénétique pour l'agriculture et l'alimentation, une ressource phytogénétique d’une espèce végétale cultivée ou bien d’une forme sauvage apparentée doit satisfaire aux conditions suivantes :

« 1° Présenter un intérêt actuel ou potentiel pour la recherche scientifique, l'innovation ou la sélection variétale appliquée ;

« 2° Ne pas figurer au catalogue officiel des espèces et variétés de plantes cultivées, sauf dans des cas précisés par arrêté du ministre chargé de l'agriculture, notamment en cas de variétés de conservation

« 3 ° Ne pas faire l'objet d'un certificat d'obtention végétale.

« Art. L. 660-3. - Est identifiée comme ressource phytogénétique patrimoniale toute ressource phytogénétique satisfaisant aux conditions d'enregistrement définies à l'article L. 660-2 et notoirement connue comme faisant partie de l’histoire agricole, horticole, forestière et alimentaire nationale, sur le territoire national, notamment du fait qu'elle est représentative de cette histoire, qu'elle a été diffusée ou est présente sur le territoire ou qu'elle est emblématique d'une région.

« La conservation des ressources phytogénétiques patrimoniales est organisée, dans l'intérêt général, dans des conditions de nature à faciliter l'accès des citoyens et de la communauté internationale à des échantillons de ces ressources compte tenu de leur intérêt global pour l'agriculture et l'alimentation.

« Ces ressources sont intégrées dans la collection nationale des ressources phytogénétiques mentionnée à l'article L. 660-1.

« Art. L. 660-4. – Les conditions d'enregistrement et de reconnaissance des ressources phytogénétiques définies aux articles L. 660-2 et L. 660-3 ainsi que les modalités de conservation et de valorisation des échantillons de ces ressources sont précisées par décret. »

La parole est à M. Christian Demuynck.

M. Christian Demuynck. L’article 15 bis, introduit par la commission, était nécessaire, puisqu’il permet de définir la manière dont la France va constituer, conserver et mieux partager ses ressources phytogénétiques.

Par ailleurs, il nous met en mesure de respecter nos obligations internationales contractées dans le cadre du traité international sur les ressources phytogénétiques pour l’alimentation et l’agriculture, le TIRPAA, ainsi que dans le cadre de la Convention sur la diversité biologique.

Par cet amendement, il s’agit de répondre à certaines préoccupations qui se sont exprimées visant à élargir l’ensemble des ressources phytogénétiques inscrites au catalogue des collections et partagées. Plusieurs objectifs sont visés.

Le premier concerne la caractérisation française. En effet, après des années de débats, un consensus s’est fait jour, dans la communauté internationale, pour considérer que l’attribution d’une nationalité aux ressources phytogénétiques n’a pas de sens, notamment en raison de la circulation historique de ces ressources depuis les débuts de l’agriculture.

Le deuxième objectif répond au souci de ne pas restreindre les collections aux espèces végétales cultivées, en y associant les formes sauvages apparentées.

Le troisième objectif revient à ne pas limiter les ressources conservées à celles dont on connaîtrait déjà l’intérêt. Il convient d’y inclure celles qui possèdent un intérêt éventuel ou, comme précisé, potentiel, ainsi que l’ont proposé certains de mes collègues.

Le quatrième objectif tend à retenir l’hypothèse que des variétés anciennes de ces collections peuvent être remises en marché grâce, notamment, aux lois consécutives au Grenelle de l’environnement, qui ont ouvert un plus grand nombre de possibilités en la matière. J’ai donc proposé qu’une variété inscrite au catalogue officiel, sur des listes particulières, puisse conserver sa place dans les collections, s’il en était ainsi décidé par M. le ministre.

Enfin, pour être totalement conforme aux objectifs du TIRPAA, il me semble important d’utiliser la notion de développement durable au titre des objectifs de conservation de cette ressource et de définir ce que nous entendons par « ressource patrimoniale ». Selon moi, cette qualification suppose que la ressource en question est notoirement connue comme faisant partie de l’histoire agricole, horticole, forestière et alimentaire nationale.

M. le président. Le sous-amendement n° 60, présenté par MM. Le Cam et Danglot, Mmes Didier, Schurch, Terrade et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :

Amendement n° 56, alinéa 6

Après les mots :

dans l'intérêt général

insérer les mots :

pour garantir que les générations futures pourront disposer des ressources nécessaires à leur alimentation, y compris celles dont on ignore aujourd'hui l'éventuel intérêt futur, pour leur intérêt patrimonial, culturel et gastronomique, et

La parole est à Mme Annie David.

Mme Annie David. Mon intervention vaudra également pour le sous-amendement n° 61 rectifié, monsieur le président.

Selon nous, il est nécessaire de compléter l’amendement n° 56 rectifié, afin d’assurer la cohérence du dispositif : en effet, l’un des objectifs affichés est d’éviter la perte irréversible de « ressources phytogénétiques stratégiques » ; mais que recouvre une telle qualification a priori ?

On trouve régulièrement de nouveaux intérêts à des espèces qui auraient pu être qualifiées, à d’autres moments, de « mauvaises herbes ». En vérité, de même que nous ne connaissons qu’une infime partie des espèces peuplant ce monde, nous ignorons l’essentiel des propriétés de celles qui sont recensées. Nous ne pourrons accéder à cette connaissance que si ces espèces sont conservées, toute perte de ressource phytogénétique étant en effet, par nature, irréversible.

Que savons-nous des besoins que ressentiront les générations futures ? Bien sûr, ces dernières subissent un évident problème de représentation. Mais le concept de développement durable, tel qu’il a été développé par Mme Brundtland en 1987, et auquel vous êtes si attachés, mes chers collègues, inscrit au cœur de nos préoccupations ces générations futures dont nous ne devons pas compromettre la capacité à répondre à leurs propres besoins.

En outre, la conservation des ressources phytogénétiques françaises n’est jamais qu’un des aspects de la politique de protection de la biodiversité. Celle-ci constitue, dois-je le rappeler, un patrimoine précieux adossé à nos terroirs et notre culture, sans oublier notre gastronomie, qui font notre réputation à travers le monde !

L’objet de ce sous-amendement est de rappeler ces objectifs, qui dépassent les besoins économiques immédiats de la recherche ou de la sélection.

M. le président. Le sous-amendement n° 65 rectifié, présenté par Mme Blandin, MM. Raoul, Yung et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Amendement n° 56 rectifié, alinéa 6

Après les mots :

sélection variétale appliquée,

insérer les mots :

pour leur intérêt patrimonial, culturel et gastronomique,

La parole est à Mme Marie-Christine Blandin.

Mme Marie-Christine Blandin. L’article 15 bis vise à inscrire enfin dans la loi le concept de collection nationale, qui comprend la somme des collections identifiées par des certificats d’obtention végétale et favorise la pérennité des variétés anciennes.

Comme l’a dit Christian Demuynck, ce concept est l’un des fruits du long travail effectué dans le cadre du Grenelle de l’environnement, qu’une heureuse initiative de la commission a permis de valider juridiquement dans ce texte.

J’en profite pour préciser qu’il existe non seulement des variétés anciennes, mais aussi des variétés locales, tout aussi rares, mais d’apparition plus récente. Pour dire les choses plus simplement, ces collections ne sont pas muséales, elles représentent aussi la biodiversité dans tout son dynamisme.

Néanmoins, tant le texte de l’article 15 bis que celui de l’amendement de Christian Demuynck donnent un cadre beaucoup trop étroit aux ressources concernées. Par exemple, le fait de « présenter un intérêt pour la recherche scientifique ou l’innovation » constitue un critère laissant supposer que la société, à un temps t, sait ce qui sera ou non utile pour la recherche. Or il est impossible de le deviner.

Permettez-moi de prendre un exemple dans le règne animal pour vous montrer que tout n’est pas aussi simple : quand l’académicien des sciences Yvan Le Maho se penche, durant des années, sur la vie et les pérégrinations des manchots empereurs, qui peut imaginer qu’il fera une découverte scientifique collatérale très importante, en isolant un peptide présent dans l’estomac des pères manchots privés de nourriture par leur immobilité pendant la garde des œufs, qui empêche la dégradation du dernier bol alimentaire pour en faire la première bouchée du poussin ?

Parions qu’avant lui, s’il y avait eu un registre des animaux pouvant présenter une utilité pour la recherche, le manchot empereur n’en aurait sans doute pas fait partie !

Pourtant, cette substance offre d’ores et déjà de nombreuses possibilités pour la conservation des aliments. C’est donc l’ensemble du patrimoine génétique végétal qui mérite d’être sauvegardé. N’en limitons pas les possibilités par la loi !

Au-delà des imprévus, souhaitables au demeurant, de la démarche scientifique et de la recherche, pouvant conduire à la découverte de substances pharmaceutiques, et au-delà du principe même de patrimoine, qui est moins restrictif que celui qui a été retenu dans le texte de la commission, je souhaite, par ce sous-amendement, que soient mentionnés l’intérêt culturel et l’intérêt gastronomique en tant qu’il justifie la conservation des ressources phytogénétiques.

La notion d’intérêt culturel renvoie, par exemple, au gui des druides ou à la mythique mandragore. Quant à la mention de l’intérêt gastronomique permettra, elle permettra de garantir, notamment, la sauvegarde de la truffe noire, menacée par le défrichement, la monoculture et les engrais.

Cette disposition est, de surcroît, cohérente avec le classement de notre gastronomie au patrimoine immatériel de l’humanité et pourra bénéficier à de célèbres cuisiniers, heureux d’avoir retrouvé des herbes aromatiques oubliées.

Ce que les ouvriers de l’institut Vavilov ont su faire à Saint-Pétersbourg, en plein assaut des armées ennemies, pour sauver leurs collections de céréales, pommes de terre et autres légumes, alors que sévissait la famine, nous devons être capables de le faire en période de paix et d’alerte en matière de biodiversité.