M. le président. La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin, sur l’article.

Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, l’augmentation des ressources de la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie était le moyen, pour l’État, de se libérer d’une partie de ses obligations à l’égard des départements, gestionnaires des dépenses liées à l’autonomie des personnes âgées.

Un fonds spécial trouve donc place dans le présent collectif. Il est doté de 170 millions d’euros, dont une moitié serait attribuée sur des critères objectifs – nombre d’allocataires, population, dépenses sociales du département, revenus des ménages – et l’autre selon des critères plus subjectifs, pour répondre aux situations les plus complexes, concernant les départements confrontés à la fois à une forte demande d’allocation et à la faiblesse de leurs facultés contributives.

Ce choix nous semble être sujet à débat, puisque, si l’on peut être convaincu de l’usage de la première part, la plus grande incertitude demeure sur la seconde, celle-ci procédant plus du droit de tirage utilisé en vertu des besoins exprimés, en quelque sorte, au fil de l’eau. Il est alors évident que le fonds risque de devenir une sorte de chapitre réservoir...

L’examen de l’article 17 duodecies est pour nous l’occasion de rappeler une évidence. Le mode actuel de prise en charge de la dépendance par distribution d’allocations à l’échelon départemental n’est pas satisfaisant pour deux raisons.

D’une part, la prestation ne présente aucun caractère totalement universel, les pratiques en cours dans bien des départements tendant à réduire le nombre de demandes déposées pour éviter la dérive des prestations servies.

D’autre part, le caractère de la prestation devrait précisément être universel et seule l’adoption d’un principe mettant en jeu la mutualisation et la solidarité intergénérationnelle et interprofessionnelle est susceptible d’offrir une solution à la fois humaine et acceptable au problème posé.

Avec l’allocation personnalisée d’autonomie, l’APA, versée par les départements, nous sommes de nouveau confrontés à un dispositif imparfait qui entraîne de lui-même la conception d’éléments de correction, notamment des inégalités d’accès aux allocations.

C’est bel et bien parce que certains départements n’ont pas les moyens d’assurer l’essentiel aux allocataires et que, de surcroît, leur propre équilibre financier est remis en cause, que nous avons déposé des amendements sur l’article 17 duodecies.

Face à un dispositif par nature insuffisant, il convient de faire en sorte que les correctifs dont nous le dotons soient pertinents et atteignent l’objectif fixé.

Il s’agit donc aujourd’hui d’éviter que les départements ne soient mis en situation de cessation de paiement, tout en gardant à l’esprit la nécessaire transformation du circuit de financement des allocations.

M. le président. Je suis saisi de sept amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

Les deux premiers sont identiques.

L’amendement n° 157 est présenté par Mme Beaufils, MM. Foucaud, Bocquet et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.

L’amendement n° 223 rectifié est présenté par MM. Fortassin, Collin, C. Bourquin, Requier, Tropeano et Vall.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

I. - Alinéa 3

Remplacer le montant :

85 millions

par le montant :

102 millions

II. - Alinéa 13, première phrase

Remplacer le montant :

85 millions

par le montant :

68 millions

La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin, pour présenter l’amendement n° 157.

Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Avec cet article, nous sommes dans une sorte de partie de colin-maillard, où tout le monde doit définir une voie sans simulation, sans éléments d’analyse des conséquences de tel ou tel choix.

Pour notre part, nous proposons d’accroître la quotité des ressources de la première part du fonds, en vue de permettre aux départements de disposer, en tant que de besoin, des moyens de faire face à la situation.

Le relèvement, qui est de 10 %, va notamment permettre de mieux répondre aux situations les plus dramatiques, dont les moindres ne sont pas celles de certains de nos départements à faible potentiel de ressources fiscales et dont la population est âgée.

Il convient aussi d’adapter l’indice synthétique en en majorant la part qui dépend du niveau de revenu des habitants, ce qui le conduira clairement à représenter un peu plus que les autres les ménages percevant le RSA, signe assez évident de la pauvreté et de l’exclusion.

Il faut noter que la situation est particulièrement critique outre-mer.

Pour toutes ces raisons, nous ne pouvons que vous inviter, mes chers collègues, à adopter cet amendement.

M. le président. La parole est à M. Yvon Collin, pour présenter l’amendement n° 223 rectifié.

M. Yvon Collin. L’article 17 duodecies crée un fonds de soutien exceptionnel en faveur des départements en difficulté.

Ce fonds est bienvenu au regard de la situation financière extrêmement préoccupante de nombre de départements qui ne peuvent plus faire face aux dépenses considérables et croissantes que représentent les différentes allocations qu’ils versent, en particulier l’APA.

La proposition de loi du groupe RDSE visant à autoriser le recours sur succession des sommes versées au titre de l’allocation personnalisée d’autonomie pour les successions supérieures à 150 000 euros avait également pour objet de venir en aide à ces départements, car il y a urgence.

Ce ne sont malheureusement pas les 170 millions d’euros du fonds de soutien proposé par le Gouvernement qui changeront fondamentalement les choses, car, nous le savons tous dans cette enceinte, la situation est excessivement grave. Nous sommes donc, monsieur le ministre, dans l’attente de réelles solutions pour les départements.

Je referme cette parenthèse et j’en viens à l’amendement n° 223 rectifié. Il a pour objet non pas de modifier le fonds de soutien aux départements ou son financement – actuellement, il est réparti en deux sections de 85 millions d’euros chacune –, mais de suggérer une répartition interne différente de son enveloppe. Nous proposons ainsi de doter la première section de 102 millions d’euros et la seconde de 68 millions.

L’objectif poursuivi est de renforcer l’efficacité de l’aide aux départements les plus en difficulté. Je vous invite, par conséquent, mes chers collègues, à adopter cet amendement.

M. le président. L'amendement n° 242 rectifié bis, présenté par MM. Arthuis, Roche, Jarlier, J.L. Dupont et de Montesquiou, Mme Morin-Desailly et MM. Namy, Guerriau, Marseille, Delahaye, J. Boyer, Bockel et Merceron, est ainsi libellé :

I. - Alinéa 3

Remplacer le montant :

85 millions

par le montant : 

100 millions

II. - Alinéa 13, première phrase

Remplacer le montant :

85 millions

par le montant :

70 millions

La parole est à M. Jean Arthuis.

M. Jean Arthuis. Cet amendement est quasiment défendu à la suite des interventions de Mme Gonthier-Maurin et de M. Collin. En effet, les sommes visées sont pratiquement les mêmes.

Il est inspiré par la même exigence, à savoir répartir ces fonds exceptionnels sur des critères aussi objectifs que possible. C’est l’objet de la première section, la seconde étant laissée à la discrétion du Gouvernement. Et je ne doute pas de l’objectivité de ce dernier. Toutefois, je pense qu’il serait bon de préciser clairement dans la loi l’orientation de ces fonds.

M. le président. L’amendement n° 188 rectifié ter, présenté par M. Miquel et les membres du groupe socialiste et apparentés, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 3

Remplacer le montant :

85 millions

par le montant :

95 millions

II. – Alinéa 7

Remplacer les mots :

bénéficiaires de l’allocation personnalisée pour l’autonomie mentionnée à l’article L. 232-1 du code de l’action sociale et des familles

par les mots :

personnes âgées de soixante-quinze ans et plus

III. – Alinéa 12

Remplacer les mots :

en fonction de son indice synthétique

par les mots :

pour 90 %, en fonction de l'indice synthétique, et pour 10 % en fonction d'un indice de répartition démographique, fonction du rapport entre la population du département, et la population de l'ensemble des départements de métropole, sur la base de la population DGF de l’année n-1

IV. – alinéa 13, première phrase

Remplacer le montant :

85 millions

Par le montant :

75 millions

La parole est à M. Gérard Miquel.

M. Gérard Miquel. Le Gouvernement a décidé de créer un fonds de 170 millions d’euros pour soutenir les départements en difficulté.

Qu’entend-on par départements en difficulté ? Voilà la première question que l’on doit se poser.

M. Jean Desessard. Le Lot et le Lot-et-Garonne ! (Sourires.)

M. Yvon Collin. Le Tarn-et-Garonne ! (Nouveaux sourires.)

M. Gérard Miquel. Quel est le niveau d’endettement ? Quelle est la capacité de désendettement ? Quelle est la capacité d’autofinancement ? Quel est l’effort fiscal ? Il me semble que sur la base de tels critères, une liste de départements peut être déterminée.

Mais tel n’est pas le choix qui a été fait. Je le regrette, car un certain nombre de départements sont dans des situations dramatiques sur le plan financier.

On parle bien de ce que l’on connaît bien. J’évoquerai donc mon département, le Lot. Pour boucler mon budget, je dois trouver 7 millions d’euros pour faire face à l’augmentation de l’APA, du RSA, de la PCH, la prestation de compensation du handicap, et de la protection de l’enfance. J’ai 1 million d’euros de droits de mutation à titre onéreux, ou DMTO, en moins, autant pour les dotations du fonds de péréquation et un supplément de 1 million d’euros pour le transport scolaire. Voilà la situation !

M. Albéric de Montgolfier. Et avec la semaine de quatre jours et demi ?

M. Gérard Miquel. Par conséquent, je devrais augmenter les impôts de 28 % pour équilibrer mon budget et surtout garder une capacité d’investissement, sans laquelle les entreprises du département n’ayant plus de travail, je contribuerai à augmenter le chômage !

Un certain nombre de départements connaissent ainsi des situations qui deviennent catastrophiques.

Dans la répartition proposée, pour ce qui concerne la première partie, seront aidés quarante-huit, et non plus trente départements, comme dans le mécanisme antérieur.

En cet instant, je souhaite modifier mon amendement et renoncer à l’ajustement que je propose, afin de garder la dotation de 85 millions d’euros envisagée pour la première section du fonds.

Je veux aussi, mes chers collègues, vous faire quelques propositions de répartition de cette enveloppe.

Je suggère de revenir aux critères proposés initialement par le Gouvernement. Monsieur le ministre, je ne peux pas faire mieux ! (Sourires.) Mais vous allez voir la suite…

Ainsi conçu, ce fonds permettrait de cibler les départements confrontés à des situations financières tendues en réintroduisant un critère démographique dans le calcul du versement du fonds aux départements éligibles : le critère de la population à hauteur de 10 %. La répartition serait alors un peu plus favorable aux petits départements.

Mais j’ai trouvé mentionnés des départements que je ne savais pas en difficulté et qui vont bénéficier de plusieurs millions d’euros – cela me gêne un peu ! – alors que leur effort fiscal est très faible.

J’espère que, avec cette démonstration, vous serez, mes chers collègues, convaincus du bien-fondé d’un rééquilibrage acceptable par tous et permettant aux petits départements dans la difficulté de ne pas se retrouver avec une somme dérisoire pour tenter d’équilibrer leur budget, ce qui sera extrêmement difficile !

M. le président. L’amendement n° 288, présenté par M. Marc, au nom de la commission, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 7

Remplacer les mots :

bénéficiaires de l’allocation personnalisée pour l’autonomie mentionnée à l’article L. 232-1 du code de l’action sociale et des familles

par les mots :

personnes âgées de soixante-quinze ans et plus

II. – Alinéa 11

Remplacer le taux :

40 %

par le taux :

30 %

et le taux :

10 %

par le taux :

20 %

La parole est à M. le rapporteur général.

M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. La commission des finances estime que l’amendement proposé par Gérard Miquel permet une évolution utile.

Pour sa part, elle avait simplement souhaité s’en tenir à la doctrine qui est habituellement celle du Sénat, à savoir une répartition des fonds entre collectivités reposant autant que faire se peut sur des données objectives sans prise en compte des comportements des collectivités.

S’agissant de l’APA, le Gouvernement avait proposé que l’on intègre le paramètre du vieillissement en prenant en compte, dans chaque département, le nombre de personnes âgées de plus de soixante-quinze ans, donnée statistique incontestable et mesurable selon des critères identiques sur l’ensemble du territoire.

En revanche si l'on retient comme paramètre le nombre de bénéficiaires de l’APA, comme certains députés l’ont proposé, on abandonne alors cette idée d’identité de critères, puisque les pratiques d’évaluation du degré de dépendance diffèrent d’un département à l’autre.

Une telle solution aurait même un effet pervers surprenant et redoutable : ce sont naturellement les départements les plus riches qui ont tendance à être les plus généreux dans la distribution de ces prestations. Dès lors, si l'on retenait comme critère le nombre de bénéficiaires de l’APA, ce sont indirectement les départements les plus riches qui bénéficieraient de ce fonds de soutien exceptionnel.

Pour notre part, très simplement, nous voulons en revenir aux paramètres qu'avait initialement proposés le Gouvernement, à savoir, pour 30 %, le nombre de personnes âgées de soixante-quinze ans et plus et, pour 20 %, la proportion de bénéficiaires de l’allocation de compensation du handicap.

J’ajoute, pour conclure, que cet amendement est complémentaire de celui qu’a déposé Gérard Miquel.

M. le président. L'amendement n° 142, présenté par MM. Vergès, Bocquet et Foucaud, Mme Beaufils et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Alinéa 11

Remplacer le taux :

40 %

par le taux :

30 %

le taux :

30 %

par le taux :

35 %

et le taux :

20 %

par le taux :

25 %

La parole est à Mme Marie-France Beaufils.

Mme Marie-France Beaufils. Notre collègue Paul Vergès n’ayant pu être présent ce soir, il m’a priée de défendre son amendement.

Le département de la Réunion est aujourd’hui dans une situation critique, qui découle notamment de la hausse brutale des dépenses liées au RSA. C’est la résultante d’un déséquilibre croissant entre les recettes de financement des allocations et le coût réel de cette prestation versée par ce département.

Bien évidemment, cette situation s’est encore détériorée avec la dégradation de la situation économique et financière, ce qui induit une augmentation notable du nombre de personnes percevant le RSA.

Cet amendement a pour objet d’adosser l’indice synthétique à la réalité de la situation réunionnaise, en pondérant à 35 %, au lieu de 30 %, le rapport entre le revenu moyen par habitant de l’ensemble des départements et le revenu moyen par habitant du département, en pondérant à 25 %, au lieu de 20 %, le rapport entre la proportion de bénéficiaires du revenu de solidarité active et la population, en diminuant de 40 % à 30 % le rapport basé sur la proportion de bénéficiaires de l’allocation personnalisée pour l’autonomie et la population du département, et ce sans changer le taux de pondération lié à l’alinéa d).

Ainsi, estime notre collègue, on répondrait mieux aux difficultés du département de la Réunion.

M. le président. L'amendement n° 297, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Alinéa 12

Compléter cet alinéa par les mots :

multiplié par sa population

La parole est à M. le ministre délégué.

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Cet amendement a pour objet d'introduire une pondération du calcul des attributions du fonds exceptionnel de soutien au département par la population.

À ce stade du débat, il me paraît nécessaire de clarifier un peu les choses.

Nous nous accordons tous sur le montant de ce fonds de soutien exceptionnel, à savoir 170 millions d'euros, et sur la nécessité d’aider certains départements. D'ailleurs, la majorité précédente avait dressé le même constat et avait débloqué une enveloppe de 150 millions d'euros, ce qui démontre bien que le principe même de ce fonds n’est pas contesté. En le majorant d'une vingtaine de millions d'euros, nous en modifions simplement le montant. Cet abondement supplémentaire, je le pense, ne choquera personne quand on sait la situation objectivement difficile dans laquelle se trouvent certains départements.

En réalité, le débat porte sur deux points. D’une part, quelle est la part de l'enveloppe qui doit être attribuée selon des critères objectifs et mécaniques ? D’autre part, sur cette part, selon quels critères répartir, auprès de chaque département, les fonds disponibles ?

Mesdames, messieurs les sénateurs, le Gouvernement souhaite que cette enveloppe globale de 170 millions d'euros soit répartie en deux sections égales. Des amendements ont été déposés visant à majorer la première section, dont les ressources sont réparties au bénéfice de la moitié des départements métropolitains classés en fonction d’un indice synthétique. Le cas échéant, les ressources de la seconde section s’en trouveraient minorées à due concurrence.

Le Gouvernement n'y est pas favorable. Il estime que cette répartition en deux sections égales permet de distribuer ces fonds selon des critères objectifs, tout en lui laissant la possibilité d'aider certains départements en fonction de critères qui sont difficilement identifiables à ce jour, mais qui pourront s'avérer parfaitement légitimes en cours d'exécution budgétaire.

Le Gouvernement doit pouvoir disposer d'un volant de sécurité en faveur des départements qui pourraient, à l’avenir, rencontrer des difficultés qui ne sont pas perceptibles aujourd'hui.

Je note que le gouvernement précédent avait tenu le même raisonnement en réservant pour moitié cette enveloppe à des aides dont les critères d’attribution aux départements ont été fixés en cours d'exécution et non pas lors de l’examen de la loi de finances initiale ou de la loi de finances rectificative.

C’est la raison pour laquelle je demande au Sénat de rejeter les amendements tendant à augmenter la section du fonds de soutien attribuée automatiquement selon un indice synthétique calculé suivant des critères qui restent maintenant à définir.

Monsieur le rapporteur général, vous suggérez de modifier les règles de répartition du fonds exceptionnel de soutien telles que les a définies l’Assemblée nationale et de substituer le nombre de personnes âgées de plus de soixante-quinze ans à celui du nombre de bénéficiaires de l’APA. Le Gouvernement est sensible à votre argument selon lequel plus les départements sont riches, plus ils sont enclins à accéder aux demandes d’attribution de cette allocation, et comprend votre souci de définir des critères de répartition de cette première section du fonds qui correspondent autant que possible aux besoins des départements.

C’est pourquoi, s’agissant de votre amendement, le Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat.

Monsieur Miquel, monsieur le président du conseil général du Lot, devrais-je dire, j'ai vous ai écouté attentivement. Néanmoins, je suggère que nous en restions à la clef de répartition telle que l’a votée l’Assemblée nationale. Le critère objectif de population qui a été retenu permettra d'ailleurs d'aider également les départements très peuplés, dont on pouvait initialement penser qu’ils n’auraient pas été a priori les principaux bénéficiaires de cette première section du fonds.

Nous avons tous en tête des exemples de départements – il est inutile de les citer, chacun les identifiera – qui bénéficient d'une trésorerie florissante – et pourquoi les aider ? – ou dont la population est soumise à une fiscalité locale particulièrement douce – auquel cas, pourquoi la solidarité nationale s'exercerait-elle dans ces départements alors même que l'effort fiscal auquel doivent consentir nos concitoyens qui y vivent est bien loin d'être comparable à celui qui est demandé par d'autres départements, qui connaissent pourtant des situations au moins aussi difficiles ?

C'est d'ailleurs l'une des raisons pour lesquelles le Gouvernement souhaite s’en tenir à une répartition par moitiés entre ces deux sections et ne pas majorer la part réservée, sur ces 170 millions d'euros, à ces distributions automatiques ; une telle mesure renforcerait cette distribution en apparence étonnante.

L’introduction du critère de population conduirait à ce que les départements, dont je viens de dresser à gros traits la typologie, tirent un plus grand bénéfice de la solidarité nationale qu’actuellement, puisque c’est bien de cela qu’il s'agit, alors même qu’il est permis de penser qu’ils ne sont pas nécessairement les plus prioritaires.

Mesdames, messieurs les sénateurs, je vous propose que nous en restions à cette répartition par moitiés de ce fonds de soutien, pour éviter une distribution déséquilibrée de ces ressources.

Je vous propose également que nous conservions le critère de population tel que l’avait proposé initialement le Gouvernement avant que l’Assemblée nationale ne le modifie.

Enfin, acceptons tranquillement et sereinement le principe de cette enveloppe de 85 millions d'euros grâce à laquelle le Gouvernement pourra venir en aide aux départements en difficulté selon des critères qui ne sont peut-être pas parfaitement compréhensibles aujourd'hui, mais dont la légitimité apparaîtra sans doute à l’avenir. Cette soupape de sécurité est indispensable pour aider certaines de ces collectivités locales.

Au final, le Gouvernement étant défavorable à toute modification de la clé de répartition du fonds de soutien, il émet un avis défavorable sur les amendements nos 157, 223 rectifié, 242 rectifié bis et 188 rectifié ter.

S’agissant de l’amendement n° 288 de la commission, qui vise à substituer le critère du nombre de personnes âgées de plus de soixante-quinze ans à celui du nombre de bénéficiaires de l’APA, le Gouvernement s’en remet à la sagesse du Sénat.

Quant à l’amendement n° 142, il y est défavorable.

M. le président. Monsieur le ministre, vous avez réussi le tour de force de nous présenter à la fois l’amendement n° 297 du Gouvernement et de nous donner l’avis de celui-ci sur les autres amendements, avant que M. le rapporteur général ne s’exprime ! (Sourires.)

Quel est donc l’avis de la commission ?

M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. Les amendements identiques nos 157, 233 rectifié et l’amendement n° 242 rectifié bis visent à modifier la clé de répartition des 170 millions d'euros entre la première et la seconde section du fonds exceptionnel, au bénéfice de la première.

Je souscris globalement aux arguments du ministre, qui a dit préférer s’en tenir à une répartition par moitiés. La seconde section du fonds permettra de venir en aide à des départements rencontrant de grandes difficultés dans la gestion des trois allocations de solidarité. À mon sens, il est donc souhaitable de préserver l'équilibre tel qu’il a été initialement prévu.

Par conséquent, je demande à leurs auteurs de bien vouloir retirer ces amendements.

S’agissant de l'amendement n° 188 rectifié ter de Gérard Miquel, son I n’a plus d’objet dès lors qu’on en reste à cette clé de répartition par moitiés, de même que son II, qui est identique au I de l’amendement de la commission. Restent le III, sur lequel la commission a émis un avis favorable, et le IV, auquel la commission est défavorable.

Au final, j’invite notre collègue à rectifier son amendement en ne maintenant que son III.

La commission est défavorable à l'amendement n° 142, qui tend à pondérer excessivement, selon nous, le critère du nombre de bénéficiaires du RSA, ce qui est incompatible avec l’amendement de la commission, qui propose d’en revenir aux critères initialement proposés par le Gouvernement.

J’opposerai également un argument de fond : il serait quelque peu incongru de porter à 25 % le taux de pondération du RSA dans la mesure où le taux de couverture de cette prestation, à savoir 80 %, est le plus élevé parmi les trois allocations de solidarité, taux bien supérieur à ce qu’il est pour l’APA et la PCH.

Enfin, la commission s’étant prononcée en faveur de l’amendement de M. Miquel, qui réintroduit le critère de répartition démographique à hauteur de 10 %, elle est bien entendu défavorable à l’amendement du Gouvernement, qui est incompatible avec la position qu’elle a prise.

M. le président. Monsieur Miquel, que pensez-vous de la suggestion de M. le rapporteur ?

M. Gérard Miquel. J’y suis favorable et je rectifie mon amendement en ce sens, monsieur le président.

M. le président. Je suis donc saisi d’un amendement n° 188 rectifié quater, présenté par M. Miquel et les membres du groupe socialiste et apparentés, ainsi libellé :

Alinéa 12

Remplacer les mots :

en fonction de son indice synthétique

par les mots :

pour 90 %, en fonction de l’indice synthétique, et pour 10 % en fonction d’un indice de répartition démographique, fonction du rapport entre la population du département, et la population de l’ensemble des départements de métropole, sur la base de la population DGF de l’année n-1

Je mets aux voix les amendements identiques nos 157 et 223 rectifié.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. La parole est à M. Jean Arthuis, pour explication de vote sur l’amendement n° 242 rectifié bis.

M. Jean Arthuis. Je souhaite interroger M. le ministre sur la deuxième section, destinée à rétablir une solidarité entre les départements sur des critères aussi objectifs que possible, notamment l’allocation personnalisée d’autonomie et le RSA.

Monsieur le ministre, je voudrais attirer votre attention sur la présence, dans les départements, de mineurs étrangers isolés, de plus en plus nombreux. Aux termes du code de l’action sociale et des familles, lorsque ces jeunes sont appréhendés par les services de police et confiés à l’autorité judiciaire, ils sont placés dans les départements. Les dépenses qui en résultent pour les conseils généraux augmentent considérablement. Nous sommes confrontés en l’espèce à une carence du contrôle des flux migratoires, dont les conditions varient d’un secteur géographique à l’autre en fonction des filières existantes.

Par conséquent, monsieur le ministre, je souhaiterais que, avec le pragmatisme qui vous anime, vous dégagiez une ligne de crédit afin d’aider les départements à supporter de telles dépenses.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Monsieur Arthuis, je suis extrêmement sensible à votre argumentation, d’autant qu’elle conforte mes propos ; le Gouvernement doit pouvoir bénéficier d’une enveloppe suffisante pour répondre à des besoins qu’il nous est difficile de pressentir au moment où nous examinons un projet de loi de finances initiale ou rectificative.

L’exemple que vous citez est parfaitement emblématique de cette nécessaire marge de manœuvre dont le Gouvernement doit pouvoir disposer pour aider les départements qui seraient, par exemple, confrontés aux difficultés que vous venez d’indiquer.

Le Gouvernement est ainsi soutenu dans sa volonté de répartir cette enveloppe de 170 millions d’euros strictement par moitiés entre une part qui dépendrait des critères dont nous venons de débattre et une autre, non modulable, destinée à apporter une aide aux départements soumis à des impératifs difficiles à anticiper mais néanmoins tout à fait réels lors de l’exécution budgétaire.