M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement sur l’amendement n° 74 rectifié ?

M. François Lamy, ministre délégué. Le Gouvernement, de manière logique, est défavorable à l’amendement de M. Dallier. Cependant, puisqu’il n’existe aucun désaccord de fond entre nous, peut-être celui-ci acceptera-t-il de le retirer au profit de l’amendement du Gouvernement.

M. le président. La parole est à Mme Valérie Létard, pour explication de vote.

Mme Valérie Létard. Sur le fond, la nécessaire participation des habitants à ces instances ne fait pas débat. Pour autant, même si j’ai bien compris qu’un travail de concertation a été mené sur leur dénomination, je suis plutôt séduite par la suggestion de M. Dallier.

Pour ma part, je ne considère pas que le mot « développement » signifie nécessairement « développement économique ». Dans les agglomérations, il existe des conseils de développement qui sont en fait les instances consultatives des intercommunalités, sur le modèle des conseils économiques et sociaux régionaux, qui sont des instances consultatives dans les régions. Ces différentes structures ont pour objectif d’associer l’ensemble de la société civile, dans toutes ses composantes – associative, économique, environnementale –, en recueillant leurs avis, aux décisions qui sont finalement arrêtées par les élus.

Dès lors, la formule « conseils de développement de quartier » présente l’intérêt d’une sorte de parallélisme des formes ; elle permettrait d’ouvrir une large concertation dans les quartiers. Loin d’être restrictive, cette référence à la loi Chevènement signifierait qu’on souhaite graver dans le marbre le principe d’une consultation large de la société civile sur toute une série de questions, et non pas seulement sur les aspects économiques.

C’est pourquoi, je le répète, je trouve plutôt sympathique et intéressant l’amendement n° 74 rectifié de M. Dallier, même si je ne veux en aucun cas remettre en cause la concertation qui a été menée avec l’ensemble des acteurs du champ associatif.

Trouver une dénomination pour un outil de cette nature n’est pas évident et cela mérite débat.

M. le président. La parole est à M. Daniel Raoul.

M. Daniel Raoul. Considérant qu’il convient effectivement d’éviter toute confusion avec des instances qui sont déjà en place dans les agglomérations, en particulier les conseils de développement, je suis très favorable à l’amendement n° 83 du Gouvernement. Ces conseils de développement regroupent l’ensemble des forces vives, à savoir les associations, les syndicats, etc. De fait, les habitants y sont très peu représentés.

M. Claude Dilain, rapporteur. Tout à fait !

M. Daniel Raoul. Au contraire, les conseils citoyens ont précisément pour objet d’assurer la représentation des habitants. Nous reviendrons sur la manière d’en désigner les membres lorsque nous aborderons l’article 5 bis, mais je peux dire que ceux qui siègent au sein des conseils dits « de quartier » de ma ville sont tirés au sort. En tout cas, cela donne une composition complètement différente de celle des conseils de développement.

Rien n’interdira à ces conseils citoyens de s’intéresser à la fois aux questions d’aménagement et à celles de développement. Mais faisons en sorte qu’il ne puisse y avoir aucune confusion, ne serait-ce qu’à travers leur dénomination, avec les conseils de développement qui existent actuellement dans nos agglomérations.

M. le président. La parole est à M. Michel Bécot, pour explication de vote.

M. Michel Bécot. Je voterai l’amendement n° 74 rectifié de Philippe Dallier. Tout en étant d’accord avec ce que disait à l’instant Mme Létard, il me semble que la notion de développement économique mérite d’être prise en compte, en particulier au regard de l’emploi. Adopter la formulation proposée par Philippe Dallier nous permettrait de bien mettre en avant ces deux dimensions, économie et emploi, qui, dans le texte en son état actuel, ne me paraissent pas figurer de manière suffisamment explicite parmi les objectifs de la politique de la ville.

M. le président. La parole est à M. Philippe Dallier, pour explication de vote.

M. Philippe Dallier. Je souhaite avancer quelques arguments supplémentaires à l’appui de mon amendement.

Bien sûr, ces futurs conseils – au moins, nous sommes d’accord sur ce terme-là ! – de développement de quartier, tels que nous les proposons, ne s’occuperont pas uniquement de développement économique. Je rappelle qu’il existe, par exemple, un indice de développement humain, notion également très intéressante. Ces conseils, je l’imagine, compteront non seulement des habitants, mais également des associations, y compris, pourquoi pas, des associations de chefs d’entreprise du quartier.

Afin de couvrir un champ aussi ample que possible, il me semble que la dénomination « conseils de développement de quartier » – « développement » devant être entendu ici au sens large – est plus appropriée que celle de « conseils citoyens ».

M. le président. La parole est à M. Dominique de Legge, pour explication de vote.

M. Dominique de Legge. On peut effectivement discuter à l’infini, mais les mots ont quand même un sens : dans l’expression « conseils citoyens », le mot « citoyens » est un adjectif qualificatif. Depuis quelque temps, on a un peu tendance à mettre les mots « citoyen » ou « républicain » à toutes les sauces ! Ainsi, l’autre jour, à l’occasion de la visite qu’a faite le ministre de l’intérieur en Ille-et-Vilaine, j’ai été invité à un « dîner républicain ». Moi, je me rends à un « dîner », et c’est pour y dîner ! (Sourires sur les travées de l'UMP.)

M. Claude Dilain, rapporteur. Ces repas républicains sont aussi anciens que la République elle-même !

M. Dominique de Legge. Je ne vois pas l’intérêt de toujours tout qualifier de « citoyen » ou de « républicain ».

En revanche, le mot « développement » me paraît ici judicieux. Ce texte porte sur la cohésion urbaine, concerne les quartiers sensibles et difficiles. Afficher clairement que les conseils que nous allons créer ont pour finalité le développement économique et social de ces quartiers, ce serait adresser un message beaucoup plus fort que celui du Gouvernement.

C’est la raison pour laquelle je me rallie à l’amendement de notre collègue Philippe Dallier.

M. le président. La parole est à M. Jean-Jacques Mirassou, pour explication de vote.

M. Jean-Jacques Mirassou. À mon sens, la notion de « conseils citoyens » a une acception beaucoup plus large : elle présente même un caractère d’universalité.

Tout à l’heure, il a été dit que ce projet de loi opérait un changement de braquet ; pour ma part, j’ai parlé d’un saut qualitatif. Il concerne non seulement les habitants des quartiers dont il est ici question, mais également ceux qui n’y résident pas. Cette démarche globale s’apparente véritablement à une démarche citoyenne au sens le plus littéral du terme – et non pas au sens du code civil, qui serait très restrictif. À cet égard, M. le ministre a eu raison d’établir un distinguo entre ce que serait un « conseil de citoyens » et ce que serait un « conseil citoyen », le second ayant une connotation beaucoup plus forte sur le plan de la démocratie locale.

Je souscris totalement à ce qu’a dit notamment Daniel Raoul. À la limite, cher Philippe Dallier, qui peut le plus peut le moins ! Puisque vous vous êtes montré soucieux qu’il soit question du développement non seulement économique, mais également social ou écologique du quartier, eh bien, autant parler d’un « conseil citoyen », de manière à viser toutes ces formes de développement !

M. le président. La parole est à M. Jean-François Husson, pour explication de vote.

M. Jean-François Husson. Nul n’en sera surpris, je me retrouve complètement dans la proposition de notre collègue Philippe Dallier.

J’étaierai cette explication de vote à l’aide d’un exemple tiré de réalités locales.

La communauté urbaine du Grand Nancy accueille en son sein un conseil de développement mariant des compétences multiples et diverses. Il compte quatre-vingts membres, dont un quart sont des citoyens tirés au sort dans les vingt communes membres de la communauté urbaine, et la parité est respectée puisqu’il y a autant d’hommes que de femmes. Eh bien, tout cela fonctionne parfaitement.

Alors j’ai envie de dire : banco ! Suivons la même logique et établissons un beau parallélisme des formes, aussi universel que citoyen.

Mme Valérie Létard. Exactement !

M. Jean-François Husson. Monsieur Mirassou, après avoir entendu votre explication de vote, je m’inquiète quelque peu, car vos propos pourraient donner à penser qu’un conseil de développement de quartier ne serait pas aussi citoyen que votre conseil citoyen de quartier. Je pense très honnêtement que, par souci de clarté et de lisibilité à l’égard de nos concitoyens, il conviendrait plutôt de retenir la proposition de notre collègue Philippe Dallier.

En outre, monsieur le ministre, je n’ai pas le sentiment que cet objectif de rassemblement nécessite de votre part un effort surhumain puisque le Président de la République, dont j’ai écouté une partie de l’intervention cet après-midi, a appelé à l’union, au rassemblement et à la convergence. (M. le ministre sourit.)

Si vous pouviez faire un pas en direction de l’opposition, les conseils de développement de quartier vous en sauraient gré.

M. le président. La parole est à Mme Esther Benbassa, pour explication de vote.

Mme Esther Benbassa. J’ai l’impression que c’est le mot « citoyen » qui pose problème…

À mes yeux, la dénomination « conseils de développement de quartier » proposée par M. Dallier a une connotation très bureaucratique. Elle donne le sentiment qu’il s’agit là d’un lieu inaccessible au peuple. C’est en tout cas ce que j’aurais tendance à penser si l’on me demandait de faire partie d’un tel conseil.

Il ne faut pas que le mot « citoyen » nous fasse peur !

M. Philippe Dallier. Rassurez-vous, tel n’est pas le cas !

Mme Esther Benbassa. C’est votre insistance qui attire mon attention, mon cher collègue.

Je me rallie à la dénomination « conseils citoyens ». Elle est très pédagogique, car elle permet à ceux qui sont considérés comme citoyens même s’ils n’ont pas la nationalité française de se sentir responsabilisés. Nous savons que, dans les quartiers, résident des populations mixtes. Il est très important de responsabiliser les uns et les autres. Il existe une différence entre « nationaux » et « citoyens » : on peut être citoyen sans être français. En outre, la notion de « conseil citoyen » fait sens pour ceux qui veulent prendre part à la vie de leur quartier.

Je ne vois aucun inconvénient à utiliser le mot « citoyen », au contraire. Si plus de gens se sentaient citoyens, nous le savons bien, on enregistrerait moins d’actes irresponsables dans ces quartiers.

M. le président. La parole est à Mme Mireille Schurch, pour explication de vote.

Mme Mireille Schurch. Je suis favorable à la dénomination « conseils citoyens ». Il existe déjà des conseils de développement et il y a donc un risque de confusion. Le mot « citoyen », y compris comme adjectif, me paraît en l’occurrence tout à fait approprié : « M’occupant de mon quartier, je mène des actions citoyennes très larges ». C’est une manière de signifier que l’on met l’humain au cœur de la politique de la ville, ce à quoi nous sommes très attachés. Il s’agit d’envisager toutes les facettes de la vie des quartiers et de faire en sorte que ce soient bien les citoyens qui s’en occupent.

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. François Lamy, ministre délégué. Pour des raisons pratiques, je n’ai pas pu assister à la prestation du Président de la République, mais je ne doute pas, monsieur Husson, qu’il ait appelé au rassemblement. Et je ne doute pas non plus que vos collègues et vous-même ayez été sensibles à cet appel ! Je note d’ailleurs que, avec cet amendement, au moins M. Dallier a-t-il réussi à rassembler l’ensemble de l’opposition au sein de la Haute Assemblée. (Sourires sur les travées du groupe socialiste.)

M. Philippe Dallier. C’est plus facile que de rassembler la majorité ! (Rires sur les travées de l'UMP.)

M. François Lamy, ministre délégué. Monsieur Dallier, ces conseils – puisque nous sommes tous d’accord sur ce mot – seront amenés, ainsi que vous l’avez-vous-même expliqué, à traiter des questions de développement économique, de cohésion sociale, des liens entre le monde associatif et les élus, des actions à l’intérieur de la cité, à organiser des fêtes de quartier, etc. – je laisse cela à leur imagination –, un peu à l’image des comités de développement créés par la loi Voynet. Mais le mot « développement » pose problème en ce qu’il est trop restrictif. Le mot « citoyen » est le plus beau des mots, vous l’avez dit vous-même. Les citoyens, ce sont les acteurs de la cité et le conseil citoyen, c’est le conseil des acteurs de la cité, de ce quartier.

Avec cette appellation, tout le monde comprendra ce dont il s’agit et il est donc inutile d’aller chercher des termes alambiqués. L’objectif est d’impliquer totalement les habitants du quartier, qu’ils soient membres on non d’une association, qu’ils soient ou non acteurs économiques, dans la coconstruction des contrats de ville.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 74 rectifié.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 83.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 46, présenté par Mme Benbassa et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :

Alinéa 8

Après le mot :

culture

insérer les mots :

, à un environnement sain et de qualité

La parole est à Mme Esther Benbassa.

Mme Esther Benbassa. Le droit à un environnement sain est reconnu par la Charte de l’environnement.

Les enjeux environnementaux sont très prégnants dans les quartiers prioritaires : en plus des « handicaps » socio-économiques, les populations de ces quartiers sont souvent exposées aux pollutions sonores et atmosphériques. D’ailleurs, ces quartiers dits « périphériques » se situent très rarement dans les centres-villes anciens, mais bien plus souvent à proximité des voies rapides, des aéroports et des zones industrielles nées en même temps qu’eux.

Le présent amendement vise à assurer la prise en compte d’objectifs environnementaux dans la politique de la ville. Tout autant que les objectifs sociaux, ceux-ci sont essentiels pour assurer le bien-être et l’amélioration des conditions de vie des habitants des quartiers défavorisés et pour garantir leur bonne santé physique et mentale.

L’objet de cet amendement, en mentionnant le droit à un environnement sain, est de garantir que la lutte contre les nuisances visuelles et sonores et autres pollutions soit prise en compte dans la politique de la ville rénovée.

M. le président. L'amendement n° 85, présenté par M. Dilain, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :

Alinéa 14

Rédiger ainsi cet alinéa :

8° Promouvoir le développement équilibré des territoires, la ville durable, le droit à un environnement sain et de qualité et la lutte contre la précarité énergétique ;

La parole est à M. le rapporteur, pour présenter l’amendement n° 85 et pour donner l’avis de la commission sur l’amendement n° 46.

M. Claude Dilain, rapporteur. Madame Benbassa, la commission partage les préoccupations que vous venez d’exprimer sur la qualité environnementale – je pense au bruit en particulier –, mais elle préférerait que cette mention figure non pas à l’alinéa 8, qui porte notamment sur la culture et les services publics, mais à l’alinéa 14, qui concerne la ville durable. En conséquence, je vous invite à retirer votre amendement au profit de celui de la commission.

M. le président. L'amendement n° 46 est retiré.

Quel est l’avis du Gouvernement sur l’amendement n° 85 ?

M. François Lamy, ministre délégué. Favorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 85.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. L'amendement n° 72 rectifié, présenté par MM. Vandierendonck et Delebarre, est ainsi libellé :

Alinéa 11

Compléter cet alinéa par les mots :

ainsi que l'adéquation des moyens du service public hospitalier aux enjeux et besoins du territoire

La parole est à M. René Vandierendonck.

M. René Vandierendonck. Il est toujours important de mobiliser les moyens de droit commun en matière hospitalière.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Claude Dilain, rapporteur. Nous comprenons les raisons pour lesquelles M. Vandierendonck a déposé cet amendement. Cependant, la commission considère qu’il est déjà satisfait. C’est pourquoi elle en demande le retrait ; à défaut, l’avis sera défavorable.

M. le président. Monsieur Vandierendonck, l'amendement n° 72 rectifié est-il maintenu ?

M. René Vandierendonck. Non, je le retire, mais je me permets toutefois de faire observer que quand on demande des postes en chirurgie dentaire parce que la PMI publie des chiffres alarmants sur les caries dentaires, l’hôpital public vous oppose la T2A pour vous dire que ce n’est pas possible.

Mme Valérie Létard. C’est vrai !

M. le président. L'amendement n° 72 rectifié est retiré.

La parole est à M. le ministre délégué.

M. François Lamy, ministre délégué. Le fait que les ARS – cette garantie figure dans la convention passée entre mon ministère et celui de la santé – signent les contrats de ville permettra de se doter d’outils d’évaluation et donc de résoudre ce type de problème bien réel.

Je précise, pour répondre à Mme Schurch, que je vais lancer prochainement une mission conjointe avec Mme Touraine sur le modèle économique des maisons de santé. Il faut que nous soyons à même de répondre à tous ceux – professionnels ou élus – qui auraient envie de conduire des projets sur le terrain. Nous sommes d’ailleurs d’accord avec Marisol Touraine pour dire que cette volonté ne peut venir que du terrain.

M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 34, présenté par Mme Létard et les membres du groupe Union des Démocrates et Indépendants - UC, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 17, première phrase

Supprimer les mots :

et contribue, de manière indépendante, à l'évaluation de la mise en œuvre des politiques en faveur de ces quartiers prioritaires. Il élabore une méthodologie nationale et apporte son concours aux structures locales d'évaluation.

II. – Après l'alinéa 19

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

Pour apprécier la pertinence des politiques publiques mises en œuvre en faveur des quartiers prioritaires de la politique de la ville, une instance d’évaluation indépendante est mise en place par extension, à budget constant, des missions du comité d’évaluation et de suivi de l’Agence nationale pour la rénovation urbaine. Elle s’appuie sur les données fournies par l’observatoire national et elle élabore chaque année, à l’attention du Gouvernement, un rapport d’évaluation qui sera remis au Parlement.

La parole est à Mme Valérie Létard.

Mme Valérie Létard. L’article 1er définit les grands principes et le cadre de la politique de la ville. Il institue également un observatoire national de la politique de la ville, en remplacement de l’ONZUS, l’Observatoire national des zones urbaines sensibles.

Cet observatoire mobilisera des données et des statistiques sur les résidents des quartiers afin de mesurer l’évolution de leur situation en termes de trajectoire résidentielle, d’inégalités et d’écarts de développement. Le texte prévoit également que cet observatoire mesurera l’atteinte des objectifs de la politique de la ville par rapport aux moyens mobilisés. L’amendement que je propose avec d’autres de mes collègues a pour objet de clarifier ces missions d’observation et d’évaluation. Je considère en effet que celles-ci relèvent de deux logiques différentes et ne sont donc pas assimilables.

Dans le domaine de la politique de la ville, l’observatoire actuel décrit les évolutions sociodémographiques des quartiers, tandis que le comité d’évaluation et de suivi de l’ANRU apprécie la pertinence et les effets de la politique publique. L’absence d’autonomie accordée à l’évaluation dans le nouvel observatoire annoncé ne rend pas celle-ci efficace, dans la mesure où une véritable évaluation doit être indépendante pour être réelle.

Avec l’adoption de cet amendement, l’évaluation pourra être conduite de manière certaine et impartiale, distincte des nécessaires missions d’observation. Il est en effet capital de disposer d’un outil d’évaluation d’une politique publique qui mobilise 5 milliards d’euros, et même bien plus puisque M. le ministre nous assure que ce n’est qu’un début.

M. Claude Dilain, rapporteur. Il ne l’a pas assuré, il l’a espéré !

Mme Valérie Létard. Certes, cet outil d’évaluation a un coût, mais, vu l’importance de cette politique, il nous semble nécessaire. Au reste, nous ne remettons nullement en cause les outils déjà existants.

M. le président. L'amendement n° 10, présenté par Mme Lienemann, est ainsi libellé :

Alinéa 17, première phrase

1° Après les mots :

au sein des unités urbaines

remplacer le mot :

et

par le mot :

. Il

2° Après les mots :

en faveur de ces quartiers prioritaires

insérer les mots :

, en association avec d’autres organismes tels que le comité d'évaluation et de suivi de l’Agence nationale pour la rénovation urbaine

Cet amendement n'est pas soutenu.

L'amendement n° 47, présenté par Mme Benbassa, M. Placé et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :

Alinéa 17, première phrase

Remplacer les mots :

contribue, de manière indépendante, à l'évaluation de la mise en œuvre des politiques en faveur de ces quartiers prioritaires

par les mots et une phrase ainsi rédigée :

évalue les progrès en matière de participation des habitants aux instances décisionnelles de la politique de la ville. Il contribue, de manière indépendante et en association avec d’autres organismes tels que le comité d’évaluation et de suivi de l’Agence nationale pour la rénovation urbaine, à l’évaluation de la mise en œuvre des politiques en faveur de ces quartiers prioritaires.

La parole est à Mme Esther Benbassa.

Mme Esther Benbassa. Le présent amendement poursuit un double objectif.

D’une part, il vise à compléter les missions de l'observatoire national de la politique de la ville en indiquant que celui-ci évalue notamment « les progrès en matière de participation des habitants aux instances décisionnelles de la politique de la ville ».

D'autre part, nous considérons, comme plusieurs collègues viennent de l’exposer, que le comité d’évaluation et de suivi de l’ANRU, fort d’une expérience de dix années consacrées au PNRU 1, doit être en mesure d’apporter au futur observatoire sa contribution à tout ce qui concerne la mise en œuvre du nouveau PNRU.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Claude Dilain, rapporteur. Nul ne conteste la qualité du travail accompli par le comité d’évaluation et de suivi de l’ANRU. D’ailleurs, tous ceux qui s’intéressent à la politique de la ville lisent avec attention les rapports qu’il publie. Pour autant, est-il normal que coexistent deux instances chargées d’évaluer la même politique ? Je ne le pense pas. On aurait donc tort, surtout dans le climat actuel, de refuser cette simplification.

Reste le problème soulevé par Mmes Létard et Benbassa de l’indépendance de l’évaluation.

Tout d’abord, le texte issu des travaux de la commission dispose que l’observatoire « contribue » à l’évaluation, ce qui veut dire que d’autres peuvent aussi le faire.

M. Philippe Dallier. Les parlementaires, par exemple !

M. Claude Dilain, rapporteur. Les parlementaires, effectivement, ou la Cour des comptes.

Ensuite, le comité d’évaluation et de suivi n’est pas supprimé, mais intégré à l’observatoire. Sa capacité de travail reste donc intacte.

Je le répète, les deux observatoires sont fusionnés. Cette évolution nous paraît aller dans le bon sens. C’est pourquoi la commission a émis un avis défavorable sur ces deux amendements.

Il faut que les deux entités soient indépendantes. Certes, l’indépendance est difficile à mesurer, mais il ne me semble pas acceptable qu’un observatoire soit indépendant et l’autre pas.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. François Lamy, ministre délégué. Je veux apporter quelques éléments pour compléter l’argumentation du rapporteur, que je partage.

Nous sommes en train de mettre en œuvre une réforme ambitieuse de la politique de la ville qui ne vise pas – en tout cas, je m’y suis efforcé – à rejeter tout ce qui s’est fait avant. Nous n’avons pas cherché à inventer pour inventer, mais à intégrer les choses petit à petit.

L’un des principes de cette réforme consiste à lier cohésion urbaine et cohésion sociale. Il serait donc assez étrange de créer deux observatoires : l’un qui s’occuperait des questions urbaines – à nouveau ! – et l’autre des questions sociales.

Je ne méconnais pas le travail accompli par le comité d’évaluation et de suivi de l’ANRU, avec lequel j’ai des échanges depuis vingt mois maintenant. J’ai lu l’ensemble de ses rapports, qui ont parfois emporté mon adhésion, parfois non. Reste qu’il faut avancer, notamment en matière d’indépendance.

Il faut savoir que les rapports d’évaluation de l’ANRU sont rédigés par deux agents de l’ANRU, payés par l’ANRU… En tout état de cause, on ne peut plus conserver un tel fonctionnement.

M. Claude Dilain, rapporteur. Eh oui !

Mme Valérie Létard. Demain, ils seront payés par l’État, cela ne changera rien !

M. François Lamy, ministre délégué. J’en viens aux personnalités. Parlons-nous franchement, si nous avons ce débat aujourd’hui, c’est parce que, à juste titre d’ailleurs, les membres du conseil de l’ANRU se posent la question de leur avenir dans le cadre de la politique de la ville. Je ne conteste pas leurs qualités, non plus d’ailleurs que l’indépendance de la plupart d’entre eux, mais cela n’empêche pas d’associer d’autres acteurs de la politique de la ville à une évaluation globale.

Voilà pourquoi je souhaite que nous ayons un observatoire unique, dont l’indépendance sera d’ailleurs renforcée par la réforme du conseil national des villes, dont le fonctionnement sera lui aussi totalement indépendant. Cet observatoire global disposera de moyens d’évaluation et d’analyse de la politique de la ville dans son ensemble, sans se restreindre à la problématique de la rénovation urbaine, comme le fait l’ANRU. Je souhaite en effet qu’on examine l’ensemble de la politique de la ville non seulement sur le plan national, mais également à l’échelle des territoires.

Je vous propose donc de ne pas nous crisper sur la situation actuelle, mais de passer à une nouvelle étape, tout à fait indispensable aux yeux du Gouvernement.