M. le président. La parole est à M. Bruno Retailleau, pour la réplique.

M. Bruno Retailleau. Monsieur le Premier ministre, solidarité ne signifie pas aveuglement, y compris à l’égard de notre principal partenaire. (Protestations sur les travées du groupe socialiste et républicain.)

Respecter ce grand pays qu’est la Turquie, c’est aussi lui tenir un langage de vérité ! (C’est fini ! sur les travées du groupe socialiste et républicain.) Nous commettons une faute à l’égard tant de nos partenaires turcs, en leur faisant miroiter la perspective d’une adhésion à l’Union européenne,…

M. le président. Veuillez conclure, mon cher collègue !

M. Bruno Retailleau. … que du projet européen, la Turquie n’étant européenne ni par sa géographie, ni par son histoire, ni par sa civilisation ! Oui à une coopération renforcée, non à une adhésion future ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur certaines travées de l'UDI-UC.)

M. le président. La parole est à M. le Premier ministre, au titre de son horloge spéciale…

M. Manuel Valls, Premier ministre. Monsieur le président, je vous remercie ; la Constitution de la Ve République est décidément formidable ! (Exclamations amusées sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. le président. Vous avez bien raison, monsieur le Premier ministre !

M. Manuel Valls, Premier ministre. Alignement sur l’Allemagne, jamais ; solidarité, oui, totale et sur tous les sujets : défense, diplomatie, économie.

Mesdames, messieurs les membres de la majorité sénatoriale, d’ordinaire, c’est sur vos travées que l’on invoque l’exemple allemand ! Nous ne sommes alignés sur personne !

M. Roland Courteau. Très bien !

M. Manuel Valls, Premier ministre. Oui, il faut faire preuve de la plus grande lucidité, mais attention aux mots que nous prononçons, qu’il s’agisse de la Turquie ou des autres pays de la région !

Mme Nicole Bricq. Exactement !

M. Manuel Valls, Premier ministre. Il ne s’agit pas d’un choc de civilisations : il y a un combat des civilisations contre le terrorisme et la barbarie. Avec la Turquie et les autres pays, nous devons être capables de bâtir des partenariats sur la base de valeurs qui sont universelles !

M. Bruno Retailleau. C’est ce que j’ai dit !

M. Manuel Valls, Premier ministre. Il ne s’agit pas d’engager une confrontation ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain et du groupe écologiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

aide juridictionnelle

M. le président. La parole est à M. Jacques Bigot, pour le groupe socialiste et républicain.

M. Jacques Bigot. Ma question s’adresse à Mme la garde des sceaux, ministre de la justice. Elle concerne la solidarité entre les justiciables et l’accès des plus défavorisés à la justice.

Madame la garde des sceaux, en ces temps de difficultés budgétaires et de recours croissant à la justice judiciaire, mais aussi à la justice administrative, vous avez eu le courage d’entreprendre une réforme de l’accès au droit, qui est de plus en plus complexe.

Nous aurons l’occasion d’aborder la question de l’aide juridictionnelle lors de l’examen du projet de loi portant application des mesures relatives à la justice du XXIe siècle et du projet de loi de finances.

Aujourd'hui, des avocats sont en grève. À mon sens, ce mouvement répond à une double motivation.

D’une part, les organes dirigeants de la profession sont inquiets. Ils craignent un accroissement des prélèvements sur les fonds des caisses autonomes de règlements pécuniaires des avocats, les CARPA, par lesquelles transitent les encaissements effectués pour le compte des clients. Les intérêts diminuent et les charges augmentent. La profession redoute un appauvrissement si l’on prélève trop sur ces fonds, et, de ce fait, une incapacité à assumer les missions prévues par le décret de 1991.

D’autre part, cette mobilisation est aussi celle des avocats – ce ne sont pas les plus nombreux – qui pratiquent l’aide juridictionnelle au quotidien.

Selon le rapport sénatorial auquel M. Mézard a fait référence, seulement 400 avocats, sur 45 000, remplissent la majorité des missions de l’aide juridictionnelle. Ces professionnels, qui connaissent des difficultés, car les rétributions ne sont pas suffisantes, ont parfois le sentiment d’être seuls à faire vivre une solidarité qui devrait être celle de la nation.

Par conséquent, madame la garde des sceaux, je vous prie de bien vouloir nous rassurer sur l’engagement financier de l’État, dont je sais qu’il est au rendez-vous, ainsi que sur vos intentions et leur traduction dans la réforme de l’aide juridictionnelle. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain et du groupe écologiste.)

M. le président. La parole est à Mme la garde des sceaux.

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux, ministre de la justice. Monsieur le sénateur, la solution de facilité aurait été de ne rien faire, de ne même pas augmenter le budget de l’aide juridictionnelle, voire d’instaurer une taxe de 35 euros, qui aurait entravé l’accès à la justice ; et après moi, le déluge ! (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.) Certaines protestations bruyantes de solidarité que l’on entend actuellement ont quelque chose de désopilant !

Nous avons fait, au contraire, le choix de relever le défi de la réforme de l’aide juridictionnelle.

M. François Grosdidier. Payez les avocats !

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. Le plafond de ressources est porté à 1 000 euros, ce qui permet à 100 000 personnes supplémentaires d’accéder à l’aide juridictionnelle à 100 %. Le montant de l’unité de valeur, qui n’avait pas évolué depuis 2007, passe de 22 % à 24 %, et pourra même atteindre par ajustement 26 %, 27 % ou 30 %, selon les territoires.

Vous m’interrogez sur l’engagement de l’État. Le budget de l’aide juridictionnelle, qui était de 275 millions d’euros en 2010, a été augmenté chaque année, pour atteindre 345 millions d’euros en 2014, 375 millions d’euros en 2015 et 405 millions d’euros en 2016 ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.)

Nous avons voulu engager cette réforme dans la concertation avec les représentants des avocats. Nous dialoguons avec eux depuis trois ans. Ce sont eux qui ont proposé qu’il n’y ait pas de contribution directe de la part des avocats. En effet, ainsi que vous l’avez rappelé, 16 % des avocats assurent 84 % des missions de l’aide juridictionnelle ! C’est un facteur de précarisation de la profession.

M. le président. Il va falloir conclure, madame la ministre !

M. David Assouline. M. Retailleau a bien eu droit à vingt secondes de plus !

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. Les relations ne sont donc pas rompues avec les avocats. D’ailleurs, je recevrai de nouveau demain les représentants nationaux de la profession. Je suis certaine que nous trouverons un chemin pour moderniser l’aide juridictionnelle. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain, ainsi que sur certaines travées du groupe écologiste et du RDSE.)

communes nouvelles

M. le président. La parole est à M. Philippe Bas, pour le groupe Les Républicains.

M. Philippe Bas. Ma question s’adresse à Mme la ministre de la décentralisation et de la fonction publique.

Nos communes rurales sont désemparées. Je fais ici référence non pas au problème de leurs ressources ou à celui des charges nouvelles qui se sont accumulées ces dernières années, mais au mouvement pressant de regroupement qu’on leur impose. Les préfets ont produit les projets de cartes de coopération intercommunale. Or, alors que la loi avait arrêté le seuil de 15 000 habitants, avec des dérogations pour les zones de sous-densité, les communes ont eu la grande surprise de constater que certaines cartes prévoient des regroupements de 75 000, 100 000, voire 200 000 habitants, s’étendant bien au-delà des limites naturelles des bassins de vie.

Par ailleurs, elles disposent d’un instrument nouveau, issu des réflexions de l’Association des maires de France : la commune nouvelle.

Madame la ministre, il faut desserrer le calendrier de création des nouvelles intercommunalités et celui des communes nouvelles, afin que l’on puisse les coordonner. Il faut que nous puissions créer des communes nouvelles l’année prochaine avec les mêmes avantages que cette année. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur de nombreuses travées de l'UDI-UC.) Il faut aussi laisser un peu plus de temps à la création des nouveaux regroupements intercommunaux, pour que le processus puisse se poursuivre dans des conditions normales. À défaut, il y aura de grandes difficultés. Je vous demande instamment de permettre le desserrement des calendriers et leur coordination. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et de l'UDI-UC.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre de la décentralisation et de la fonction publique.

Mme Marylise Lebranchu, ministre de la décentralisation et de la fonction publique. Monsieur le sénateur, nous avons demandé aux préfets de présenter les cartes les plus ambitieuses possible. (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Alain Fouché. Les plus autoritaires !

Mme Marylise Lebranchu, ministre. Une discussion s’engagera ensuite au sein des commissions départementales de la coopération intercommunale, sur la base des bornes de population fixées par la loi.

La loi qui avait été élaborée sur l’initiative de M. Pélissard, alors président de l’Association des maires de France, et de Mme Pires Beaune permet la création d’une commune nouvelle dans deux types de situations : soit pour s’opposer à une intercommunalité – le cas est assez peu fréquent –, soit parce que les communes concernées sont trop petites pour répondre à la demande de services de la population.

La question du délai pour procéder à une telle création est liée à celle du maintien de la dotation globale de fonctionnement. Si l’on prolonge le délai, cela entraînera une dépense supplémentaire l’an prochain au bénéfice des communes nouvelles, à l’intérieur d’une enveloppe normée : cela signifie donc moins de ressources pour les autres communes. Le Parlement a tout à fait le droit de faire ce choix dans le cadre de l’examen du projet de loi de finances,…

M. le président. Il faut conclure !

Mme Marylise Lebranchu, ministre. … mais il faut prendre en compte l’ensemble des éléments, sans oublier qu’il s’agit d’une enveloppe normée. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.)

M. le président. La parole est à M. Philippe Bas, pour la réplique.

M. Philippe Bas. Madame la ministre, je crains que vous n’ayez pas compris la question. (Protestations sur les travées du groupe socialiste et républicain.)

Si l’on crée de grandes intercommunalités, il faut rétablir de la proximité, avec les communes nouvelles.

M. Philippe Bas. Laissez donc le temps aux maires des communes rurales de créer des communes nouvelles pour pouvoir faire évoluer intelligemment les intercommunalités ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et de l'UDI-UC.)

avis de la Commission européenne sur le plan très haut débit

M. le président. La parole est à M. Patrick Chaize, pour le groupe Les Républicains.

M. Patrick Chaize. Ma question s'adresse à M. le ministre de l'économie, de l'industrie et du numérique.

La généralisation du très haut débit sur les territoires fait partie des priorités partagées entre le Gouvernement et les collectivités. Le plan gouvernemental « France Très Haut débit pour tous » a été mis à jour au printemps dernier, avec une modification des critères de subvention, rentrant dans le cadre des aides d’État. Le cahier des charges a fait l’objet d’une transmission pour avis à la Commission européenne.

Aujourd'hui, les collectivités sont très inquiètes de la position récente de la Commission, qui met en cause le dispositif. Certes, on peut regretter que celui-ci lui ait sans doute été notifié un peu tard…

Le point de blocage, c’est le dispositif de « montée en débit sur cuivre ». Le passage à la fibre jusqu’à l’abonné n’est pas remis en cause.

Selon la Commission, l’aide apportée pourrait être illégale, étant entendu que les subventions publiques ont pour effet d’améliorer le réseau cuivre, propriété de l’opérateur historique.

Il en résulte que les déblocages de crédits du Fonds national pour la société numérique ne sont pas effectués, alors que de nombreuses collectivités ont déjà réalisé les travaux. En outre, la Direction générale des finances publiques ne permet plus le remboursement de la TVA sur ces travaux, ce qui renchérit leur coût de 20 %, le dispositif de récupération par le biais du Fonds de compensation pour la TVA ayant été supprimé au 31 décembre 2014.

Aussi des collectivités, principalement rurales, vont-elles devoir suspendre des travaux pour des questions de trésorerie et de budget, voire rembourser les subventions perçues, considérées comme des aides d’État illégales.

Dans ces conditions, le Gouvernement envisage-t-il un aménagement des règles relatives à la montée en débit sur les réseaux filaires et hertziens, en concertation avec l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes, les opérateurs, mais aussi les collectivités ? Proposera-t-il de rétablir l’intervention du Fonds de compensation pour la TVA ? Plus globalement, quand espère-t-il recevoir l’accord de la Commission sur le plan France Très Haut débit et le déblocage des crédits, afin que les objectifs affichés deviennent réalité pour notre pays, en vue d’un véritable aménagement du territoire ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État chargé des relations avec le Parlement.

M. Jean-Marie Le Guen, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement. Monsieur le sénateur, il convient de noter que notre politique d’aménagement du territoire fait une priorité de la généralisation du haut débit, conformément à l’un des engagements du Président de la République (Exclamations ironiques sur les travées du groupe Les Républicains.), qui s’est traduit par la mise en place du plan France Très Haut débit, en vue d’équiper tous les Français d’ici à 2022.

La mobilisation de tous les territoires est réelle : ils accomplissent un important travail aux côtés de l’État pour démocratiser le numérique.

M. Roger Karoutchi. Les collectivités s’investissent davantage que l’État !

M. Jean-Marie Le Guen, secrétaire d'État. Quatre-vingt-neuf départements se sont dotés d’un plan de redéploiement : cela correspond à l’équipement en fibre optique de 7 millions de foyers en zones rurales. Ces résultats montrent l’intérêt de la mobilisation des collectivités territoriales et de l’État ! (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. François Grosdidier. Ce n’est pas la question ! Répondez à la question !

M. Jean-Marie Le Guen, secrétaire d'État. Il importe maintenant d’obtenir l’accord de la Commission européenne afin que nous puissions continuer à soutenir le développement de la filière haut débit sur nos territoires. Nous nous y employons, monsieur le sénateur : la polémique n’est pas de mise !

M. François Grosdidier. Il n’y a pas de polémique, c’est une question !

M. Jean-Marie Le Guen, secrétaire d'État. La Commission européenne ne remet pas en cause la pertinence du plan France Très Haut débit, mais elle entend vérifier que nous le déployons selon les critères définis à l’échelon européen.

M. le président. Veuillez conclure, monsieur le secrétaire d'État !

M. Jean-Marie Le Guen, secrétaire d'État. Telle est l’action du Gouvernement. Vous aurez tout loisir, au cours du prochain débat budgétaire, d’avancer des propositions qui, j’imagine, seront gagées sur les 150 milliards d’euros de baisses d’impôts que votre formation politique promet aux Français ! (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains. – Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain et sur certaines travées du RDSE.)

indemnités des élus dans les syndicats de communes

M. le président. La parole est à M. Yannick Botrel, pour le groupe socialiste et républicain.

M. Yannick Botrel. Ma question s'adresse à Mme la ministre de la décentralisation et de la fonction publique.

Dans son rapport annuel consacré aux finances publiques locales, publié il y a quelques jours, la Cour des comptes rappelle l’enjeu que représente l’action publique territoriale. C’est souvent grâce aux collectivités et aux syndicats qui en sont issus que beaucoup d’investissements sont engagés et que l’on prépare l’avenir de nos territoires.

Dans ce contexte, je veux aborder les conséquences de l’adoption de l’article 42 de la loi NOTRe portant nouvelle organisation territoriale de la République. Ce dernier dispose que « les fonctions de délégués sont exercées à titre bénévole » dans les syndicats de communes et dans les syndicats mixtes. Cette disposition fait aujourd’hui l’objet d’interrogations.

Il est établi, concernant les modifications des conditions d’exercice des mandats électifs, que l’on ne change pas les règles durant la partie.

En ce sens, l’article 42 précité ne prévoyant pas de date d’application, je souhaiterais connaître la position du Gouvernement à l’égard des trois options logiquement possibles : une application immédiate, qui est de droit ; une application en 2020, après les prochaines élections municipales ; une application dès 2017, du fait de la loi NOTRe, avec la mise en œuvre des nouveaux schémas départementaux de coopération intercommunale.

Je poserai une seconde question, d’ordre juridique : quelle est précisément la portée de cette disposition ? Il semble en effet exister des divergences d’interprétation à cet égard. S’agit-il uniquement d’interdire les indemnités de fonction, ou les remboursements des frais engagés dans le cadre des fonctions de délégué sont-ils aussi visés ? Les indemnités perçues au titre de l’exercice de responsabilités exécutives sont-elles également concernées ?

La formulation adoptée ne permet pas, à ce stade, de lever toutes les incertitudes. L’analyse du Gouvernement permettrait des éclaircissements très attendus.

M. le président. Veuillez conclure, mon cher collègue !

M. Yannick Botrel. La question de l’indemnisation des élus locaux est un sujet important, notamment dans les territoires ruraux, qui ont aujourd’hui un fort besoin d’élus de proximité, confortés dans leur engagement personnel au service de l’action publique, au plus près de nos concitoyens. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre de la décentralisation et de la fonction publique.

Mme Marylise Lebranchu, ministre de la décentralisation et de la fonction publique. Je voudrais dire en préambule à M. Bas que j’avais parfaitement compris sa question relative aux communes nouvelles. (Sourires sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Éric Doligé. Ça nous rassure…

Mme Marylise Lebranchu, ministre. J’ai répondu qu’il reviendrait au Parlement de décider s’il convient d’opérer à leur profit un prélèvement sur l’enveloppe normée.

J’en viens à votre question, monsieur Botrel.

Le Gouvernement tient à l’indemnisation des élus. Lors de l’examen de la proposition de loi de M. Sueur et de Mme Gouraud visant à faciliter l’exercice, par les élus locaux, de leur mandat, nous avons d’ailleurs réaffirmé un certain nombre de principes, dont celui de l’attribution automatique d’indemnités aux élus. Nous avons besoin d’élus de qualité, et le bénévolat a ses limites.

Un article de la loi NOTRe a effectivement rappelé que les fonctions de délégué sont exercées à titre bénévole. Lors de l’élaboration de cette loi, le Gouvernement s’était engagé auprès du président Larcher à ne déposer aucun amendement après la commission mixte paritaire. Or une erreur s’était glissée dans le texte entre les lectures à l’Assemblée nationale et au Sénat : la date d’application a été supprimée. Si les anciens syndicats peuvent être portés par les établissements publics de coopération intercommunale, tant mieux. Mais on peut aussi opter pour la convention de services ou d’autres formes de prestations. Il existe en effet plusieurs manières de gérer de petits syndicats infracommunaux.

Le Gouvernement ne manquera pas de corriger cette erreur par voie d’amendement au projet de loi de finances rectificative, afin de régler la difficulté au moins jusqu’au 1er janvier 2017, avec effet rétroactif. L’ensemble des circulaires et instructions nécessaires ont été adressées aux ordonnateurs comme aux préfets. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain et du RDSE. – M. Michel Mercier applaudit également.)

M. Marc Daunis. Parfait !

système judiciaire

M. le président. La parole est à M. David Rachline, pour la réunion administrative des sénateurs ne figurant sur la liste d’aucun groupe.

M. David Rachline. Ma question s'adresse à Mme la garde des sceaux, ministre de la justice.

La révolte gronde, madame la ministre, contre votre politique pénale. La manifestation de policiers devant votre ministère ou la grogne des avocats n’en sont que la partie visible. On évoque un divorce entre la police et la justice ; craignez que ce ne soit un divorce, beaucoup plus grave, entre le peuple et la justice !

Alors que les affaires retentissantes et scandaleuses mettant en cause des récidivistes se multiplient, alors que des malfaiteurs dont les peines n’ont pas été purgées retrouvent la liberté et en profitent pour blesser grièvement un policier ou violer une jeune femme – pour ne faire état que des deux dernières affaires les plus spectaculaires –, votre responsabilité est plus que jamais mise en avant.

Votre responsabilité, c’est d’avoir, depuis que vous êtes en poste, donné un très fort sentiment d’impunité aux voyous de toute sorte ! (Protestations sur les travées du groupe socialiste et républicain et du groupe CRC.)

Mme Catherine Tasca. C’est faux !

M. David Rachline. Vous avez renforcé les pouvoirs des juges de l’application des peines, et ces derniers sont devenus des super-juges, qui ont le pouvoir de défaire des condamnations prononcées, je le rappelle, au nom du peuple français.

J’ose le dire : en cas de récidive d’une personne libérée avant que sa peine n’ait été totalement effectuée, que ce soit à la suite d’une remise de peine ou d’une permission de sortie, la responsabilité du juge qui a décidé de cette libération totale ou partielle doit être engagée.

Vos services ont expliqué que 240 détenus ont profité d’une permission de sortie pour s’évader. Avez-vous demandé une enquête sur le travail des magistrats qui avaient octroyé ces permissions ?

Ma question, madame la ministre, est simple : quand votre politique pénale défendra-t-elle enfin les victimes, et non les bourreaux ? (Protestations sur les travées du groupe socialiste et républicain et du groupe CRC.) Quand mettrez-vous fin aux remises de peine pour tous ? Quand les parquets se soucieront-ils du bien commun, plutôt que d’appliquer votre idéologie libertaire ou d’attaquer, sur vos ordres, vos adversaires politiques ? Bref, quand serez-vous ministre de la justice, et non de l’injustice ? (M. Stéphane Ravier applaudit.)

M. le président. La parole est à Mme la garde des sceaux.

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux, ministre de la justice. Monsieur le sénateur, où avez-vous lu que nous aurions renforcé les pouvoirs des juges de l’application des peines ? On est en droit d’attendre d’un membre de cette assemblée une exacte connaissance des lois ! Cela étant, je ne m’étonne plus de votre ton, de vos inexactitudes délibérées, de vos raccourcis, qui font florès y compris sur les réseaux sociaux ! On me dit d’ailleurs que votre page Facebook héberge avec grande complaisance des propos qui mériteraient une sanction pénale. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain, du groupe CRC et du groupe écologiste, ainsi que sur de nombreuses travées du RDSE.)

Cela n’a rien de surprenant : vous appartenez à une famille politique paranoïaque, qui passe son temps à chercher des boucs émissaires, qui voit des envahisseurs partout !

Je constate que je tiens une place privilégiée dans votre entreprise de diffamation. Lorsque votre parti est en délicatesse avec la justice, vous m’accusez de donner des consignes aux juges d’instruction. En fait, vous ignorez la loi du 25 juillet 2013. Votre credo est, manifestement, sévérité pour tous et impunité pour vous !

Compte tenu de vos réflexes, de votre culture et de vos pratiques, on imagine aisément ce que deviendrait la justice si vous parveniez au pouvoir ; mais nous nous battrons pour que cela n’arrive pas ! (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain, du groupe CRC et du groupe écologiste, ainsi que sur de nombreuses travées du RDSE.)

Vous évoquez les victimes, monsieur le sénateur : nous avons doublé le budget de l’aide aux victimes et mis en place un suivi personnalisé et individualisé. Nous respectons les victimes, nous les accompagnons. À cette fin, nous avons prévu une prise en charge pluridisciplinaire. Un réseau national a été créé et un budget d’aide aux victimes a été ouvert à l’échelon de chaque tribunal de grande instance. Ne venez pas parler de laxisme ou de complaisance à l’égard des voyous ! Le laxisme, monsieur le sénateur, c’est de s’accommoder d’un leader qui cumule condamnations judiciaires et responsabilités politiques.

M. le président. Veuillez conclure !

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. Le laxisme, c’est de ne pas condamner la violence lorsque des individus, au sein ou en marge de vos manifestations, molestent des journalistes ou attaquent des personnes et les jettent à la Seine ! (Mmes et MM. les sénateurs du groupe socialiste et républicain, du groupe CRC et du groupe écologiste, ainsi que de nombreux membres du RDSE, se lèvent et applaudissent longuement.)

M. le président. La parole est à M. David Rachline, pour la réplique.

M. David Rachline. C’est la solidarité des médiocres ! (Protestations sur les mêmes travées.)

Votre réponse pleine de mépris, voire de haine, ne me surprend évidemment pas. (Mmes et MM. les sénateurs du groupe socialiste et républicain, du groupe CRC et du groupe écologiste, ainsi que de nombreux membres du RDSE, quittent l’hémicycle.)

Vous n’avez que faire de la France et des Français. Nous ne voyons aucune once de changement dans votre politique. Nos concitoyens n’ont plus qu’une chose à espérer : votre départ, madame la ministre !

M. le président. Nous en avons terminé avec les questions d’actualité au Gouvernement.

Je rappelle que les prochaines questions d’actualité au Gouvernement auront lieu jeudi 29 octobre 2015, à quinze heures, et seront retransmises en direct par France 3 et Public Sénat, ainsi que sur le site internet du Sénat.