compte rendu intégral

Présidence de M. Thierry Foucaud

vice-président

Secrétaires :

M. Philippe Adnot,

M. Jackie Pierre.

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à dix heures.)

1

Procès-verbal

M. le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.

Il n’y a pas d’observation ?…

Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.

2

Article 39 nonies (nouveau) (interruption de la discussion)
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2016
Seconde partie

Loi de finances pour 2016

Suite de la discussion d’un projet de loi

Discussion générale
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2016
Articles non rattachés

M. le président. L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi de finances pour 2016, adopté par l'Assemblée nationale (projet n° 163, rapport général n° 164).

SECONDE PARTIE (SUITE)

MOYENS DES POLITIQUES PUBLIQUES ET DISPOSITIONS SPÉCIALES

Articles non rattachés (suite)

Seconde partie
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2016
Article 39 decies (nouveau)

M. le président. Nous poursuivons, au sein de la seconde partie du projet de loi de finances, l’examen des articles non rattachés.

TITRE IV (suite)

DISPOSITIONS PERMANENTES

I. – MESURES FISCALES ET BUDGÉTAIRES NON RATTACHÉES (suite)

M. le président. Nous en sommes parvenus à l’article 39 decies.

Articles non rattachés
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2016
Article 39 undecies (nouveau)

Article 39 decies (nouveau)

I. – L’article 1518 A ter du code général des impôts est ainsi rétabli :

« Art. 1518 A ter. – I. – Les communes sur les territoires desquelles sont situés un ou plusieurs quartiers prioritaires de la politique de la ville, au sens de l’article 5 de la loi n° 2014-173 du 21 février 2014 de programmation pour la ville et la cohésion urbaine, peuvent, par une délibération prise dans les conditions prévues au I de l’article 1639 A bis, instituer un abattement de 30 % appliqué à la valeur locative des locaux affectés à l’habitation situés dans des immeubles collectifs et issus de la transformation de locaux industriels ou commerciaux évalués conformément aux articles 1498 à 1500.

« Les établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre peuvent également délibérer, dès lors qu’une telle délibération a été adoptée par la commune membre.

« II. – Le conseil municipal de la commune sur le territoire de laquelle ces biens sont situés adresse, avant le 1er octobre 2016, la liste des adresses des biens susceptibles d’être concernés pour l’établissement des impositions au titre de l’année 2017. Pour les années suivantes, il communique avant le 1er octobre de l’année qui précède l’année d’imposition les modifications apportées à cette liste.

« Pour bénéficier de l’abattement prévu au I du présent article, le contribuable porte à la connaissance de l’administration, dans les conditions prévues à l’article 1406, les éléments justifiant que les conditions prévues au I du présent article sont remplies. Les propriétaires des biens qui bénéficiaient déjà de l’abattement prévu au I avant le 1er janvier 2015 sont dispensés de la fourniture de ces éléments justificatifs. »

II. – Le présent article est applicable à compter des impositions établies au titre de 2017. Il s’applique également, par voie de dégrèvement, aux impositions établies au titre de 2016 si les collectivités territoriales et les établissements publics de coopération intercommunale ont délibéré et communiqué la liste mentionnée au II de l’article 1518 A ter du code général des impôts avant le 1er février 2016. Ces dégrèvements sont à la charge des collectivités territoriales et de leurs établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre. Ils s’imputent sur les attributions mentionnées à l’article L. 2332-2 du code général des collectivités territoriales.

À titre exceptionnel, les contribuables qui ont bénéficié de l’abattement prévu à l’article 1518 A ter du code général des impôts au titre de l’année 2014 en bénéficient au titre de l’année 2015, par voie de dégrèvement. Ce dégrèvement est à la charge des collectivités territoriales et des établissements de coopération intercommunale à fiscalité propre. Il s’impute sur les attributions mentionnées à l’article L. 2332-2 du code général des collectivités territoriales.

M. le président. Je suis saisi de quatre amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° II-531, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 1

Remplacer cet alinéa par trois alinéas ainsi rédigés :

I. – Le code général des impôts est ainsi modifié :

1° Au second alinéa de l’article 1409, la référence : « 1518 A bis » est remplacée par la référence : « 1518 A ter » ;

2° L’article 1518 A ter est ainsi rétabli :

II. – Alinéa 2

1° Rédiger ainsi le début de cet alinéa :

« Art. 1518 A ter. – I. – Les collectivités territoriales et les établissements publics de coopération intercommunale dotés d’une fiscalité propre peuvent, par une délibération concordante prise …

2° Compléter cet alinéa par les mots :

et dans des communes sur le territoire desquelles sont situés un ou plusieurs quartiers prioritaires de la politique de la ville au sens de l’article 5 de la loi n° 2014-173 du 21 février 2014 de programmation pour la ville et la cohésion urbaine

III. – Alinéa 3

Supprimer cet alinéa.

IV. – Alinéa 4, première phrase

Remplacer les mots :

adresse, avant le 1er octobre

par les mots :

communique à l’administration des impôts avant le 15 février

et remplacer l’année :

2017

par l’année :

2016

V. – Alinéa 6

Rédiger ainsi cet alinéa :

II. – Par dérogation à l’article 1639 A bis du code général des impôts, les collectivités territoriales et les établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre peuvent délibérer jusqu’au 1er février 2016 afin d’instituer l’abattement prévu à l’article 1518 A ter du code général des impôts pour les impositions dues au titre de 2016.

VI. – Alinéa 7 :

1° Au début, insérer la référence :

III. –

2° Dernière phrase

Remplacer la référence :

à l’article L. 2332-2

par la référence :

aux articles L. 2332-2 et L. 3332-1-1

VII. – Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

IV. – Les I et II s’appliquent à compter des impositions dues au titre de 2016.

La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Christian Eckert, secrétaire d'État auprès du ministre des finances et des comptes publics, chargé du budget. Monsieur le président, madame la présidente de la commission des finances, monsieur le rapporteur général, mesdames, messieurs les sénateurs, l’Assemblée nationale a rétabli la réduction de la valeur locative des lofts, dispositif supprimé par la loi de programmation pour la ville et la cohésion urbaine de 2014.

Le Gouvernement fait sien cet intérêt pour le réemploi des friches industrielles ou commerciales dans les quartiers ou les villes économiquement sinistrés. Aussi, il ne s’oppose pas à cette proposition, à condition que cet abattement soit sous la responsabilité des collectivités territoriales et des établissements publics de coopération intercommunale, les EPCI, qui peuvent l’instituer librement, et donc à leur charge.

Pour autant, l’article adopté par l’Assemblée nationale exige des aménagements techniques. Ainsi, contrairement à l’ancien dispositif, il exclut pour l’heure les départements, qui perçoivent également la taxe foncière. Le présent amendement tend à corriger cet oubli.

Par ailleurs, les modalités d’application de ce dispositif pour les impositions établies au titre de 2015 et de 2016 sont précisées.

M. le président. L'amendement n° II-374, présenté par M. de Montgolfier, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :

Alinéas 2 et 3

Remplacer ces alinéas par un alinéa ainsi rédigé :

« Art. 1518 A ter. – I. – Les collectivités territoriales et les établissements publics de coopération intercommunale dotés d'une fiscalité propre peuvent, par une délibération concordante prise dans les conditions prévues au I de l'article 1639 A bis, instituer un abattement de 30 % appliqué à la valeur locative des locaux affectés à l'habitation situés dans des immeubles collectifs issus de la transformation de locaux évalués conformément aux articles 1498 à 1500 et dans des communes sur le territoire desquelles sont situés un ou plusieurs quartiers prioritaires de la politique de la ville, au sens de l’article 5 de la loi n° 2014-173 du 21 février 2014 de programmation pour la ville et la cohésion urbaine.

La parole est à M. le rapporteur général.

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. La commission visait le même but que le Gouvernement à travers cet amendement rédactionnel. Toutefois, je le retire au profit de l’amendement n° II-531, que M. le secrétaire d’État vient de présenter.

M. le président. L’amendement n° II-374 est retiré.

L'amendement n° II-490, présenté par M. Foucaud, Mme Beaufils, M. Bocquet et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 6, troisième phrase

Supprimer cette phrase.

II. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

... – La perte de recettes résultant pour l’État du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

La parole est à M. Éric Bocquet.

M. Éric Bocquet. Monsieur le président, je défendrai par la même occasion l’amendement n° II-491.

Ces deux amendements ont pour objet la transformation de locaux inoccupés en logements.

L’article 39 decies attribue aux élus locaux une nouvelle faculté : celle de décider d’un abattement sur la valeur locative de locaux d’activité qui viendraient à être transformés en locaux d’habitation.

À nos yeux, ce dispositif pose problème, en ce sens que la charge de l’abattement reviendrait aux collectivités territoriales qui le décideraient. Une telle orientation serait évidemment dommageable pour les finances des collectivités.

Aussi, il nous paraît nécessaire de prévoir expressément la compensation intégrale d’un tel allégement fiscal, dont le bien-fondé ne fait pas de doute : il s’agit d’éviter la dégradation, pour cause d’inoccupation, de locaux souvent particulièrement bien placés.

Tel est l’objet de ces deux amendements.

M. le président. L'amendement n° II-491, présenté par M. Foucaud, Mme Beaufils, M. Bocquet et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 7, deuxième et dernière phrases

Supprimer ces phrases.

II. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

... – La perte de recettes résultant pour l’État du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

Cet amendement a été précédemment défendu.

Quel est l’avis de la commission sur les trois amendements restant en discussion ?

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. Je l’ai déjà indiqué, la commission émet un avis favorable sur l’amendement n° II-531.

Monsieur Bocquet, la commission des finances est favorable aux libertés locales. Elle souhaite que les collectivités territoriales soient libres d’instaurer ou non des abattements ou dégrèvements de cette nature, par exemple pour recourir à des exonérations au titre des lofts.

Certes, ce sujet ne concerne sans doute qu’un très petit nombre de villes. Néanmoins, si le vote de tels dégrèvements, abattements ou exonérations, est du ressort des collectivités territoriales, c’est à ces dernières d’en supporter le coût, et non à l’État. Tel est le principe général que nous retenons. Les collectivités territoriales doivent assumer les conséquences de leurs votes !

Aussi, la commission émet un avis défavorable sur les amendements nos II-490 et II-491.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Christian Eckert, secrétaire d'État. Le Gouvernement émet, lui aussi, un avis défavorable sur les amendements nos II-490 et II-491.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° II-531.

(L'amendement est adopté.)

M. Michel Bouvard. Très bien ! C’est un bon amendement !

M. le président. En conséquence, les amendements nos II-490 et II-491 n'ont plus d'objet.

Je mets aux voix l'article 39 decies, modifié.

(L'article 39 decies est adopté.)

Article 39 decies (nouveau)
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2016
Articles additionnels après l'article 39 undecies

Article 39 undecies (nouveau)

I. – Après l’article 1518 A bis du code général des impôts, il est inséré un article 1518 A quater ainsi rédigé :

« Art. 1518 A quater. – I. – Les collectivités territoriales et leurs établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre peuvent, par une délibération prise dans les conditions prévues au I de l’article 1639 A bis, instituer un abattement d’un tiers appliqué à la valeur locative des bâtiments affectés directement aux opérations mentionnées au a du II de l’article 244 quater B et évalués en application de l’article 1499.

« Le bénéfice de l’abattement est subordonné au respect de l’article 25 du règlement (UE) n° 651/2014 de la Commission du 17 juin 2014 déclarant certaines catégories d’aides compatibles avec le marché intérieur en application des articles 107 et 108 du traité.

« II. – A. – Pour bénéficier de l’abattement, le redevable de la cotisation foncière des entreprises déclare au service des impôts dont relève l’établissement bénéficiaire, dans les délais prévus à l’article 1477 et sur un modèle établi par l’administration, les éléments d’identification des biens concernés par l’abattement et les documents justifiant de leur affectation.

« B. – Pour bénéficier de l’abattement, le redevable de la taxe foncière sur les propriétés bâties déclare au service des impôts du lieu de situation des biens, avant le 1er janvier de l’année au titre de laquelle l’abattement est applicable et sur un modèle établi par l’administration, les éléments d’identification des immeubles et les documents justifiant de leur affectation. »

II. – A. – Par dérogation au I de l’article 1639 A bis du code général des impôts, les collectivités territoriales et leurs établissements de coopération intercommunale à fiscalité propre peuvent délibérer jusqu’au 21 janvier 2016 afin d’instituer l’abattement prévu à l’article 1518 A quater du même code pour les impositions dues à compter de 2016.

B. – Par dérogation au II de l’article 1518 A quater du code général des impôts, pour l’application au titre de 2016, les redevables de la cotisation foncière des entreprises et de la taxe foncière sur les propriétés bâties déclarent au plus tard le 15 février 2016 les éléments mentionnés au même II.

M. le président. L'amendement n° II-375, présenté par M. de Montgolfier, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 2

1° Remplacer les mots :

d’un tiers

par les mots :

de 50 %

2° Après les mots :

valeur locative des bâtiments

insérer les mots :

acquis ou achevés à compter du 1er janvier 2016,

II. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I ci-dessus, compléter cet article par deux paragraphes ainsi rédigés :

... – La perte de recettes résultant pour les collectivités territoriales de l’augmentation du taux de l’abattement est compensée à due concurrence par une majoration de la dotation globale de fonctionnement.

... – La perte de recettes résultant pour l’État du paragraphe précédent est compensée à due concurrence par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

La parole est à M. le rapporteur général.

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. Le présent article instaure un abattement fiscal sur la valeur locative des centres de recherche. L’intérêt, c’est de localiser des travaux de recherche en France en les faisant bénéficier d’une fiscalité locale adaptée.

À cet égard, le présent amendement tend à préciser et à étendre le dispositif élaboré.

Premièrement, son champ d’application doit être précisé. Ainsi, on s’assurera que l’abattement ne porte que sur les nouveaux investissements.

Deuxièmement, au titre de la quotité, les investissements en matière de recherche ont déjà fait l’objet d’un dispositif de suramortissement exceptionnel dont le taux s’élevait non à un tiers, mais à la moitié de l’investissement initial. Par parallélisme, il nous semble donc préférable de privilégier ce taux de 50 %. Le dispositif n’en serait que plus avantageux et devrait favoriser davantage encore la localisation des entreprises de recherche en France.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Christian Eckert, secrétaire d'État. Monsieur le rapporteur général, on pourrait certes envisager de porter ce taux de dégrèvement à 50 %. Néanmoins, je note que cette mesure obérerait encore plus les finances des collectivités territoriales.

Surtout, ne prendre en compte que les nouveaux investissements pourrait conduire à des délocalisations.

En conséquence, le Gouvernement préfère s’en tenir à un taux d’un tiers pour les constructions déjà existantes et émet un avis défavorable sur cet amendement.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° II-375.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. L'amendement n° II-528, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 6

Remplacer la date :

21 janvier 2016

par la date :

5 février 2016

II. – Alinéa 7

Remplacer la date :

15 février 2016

par la date :

31 janvier 2016

La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Christian Eckert, secrétaire d'État. Avec cet amendement, nous traitons du même sujet que précédemment.

Il s’agit de modifier, pour les impositions dues au titre de 2016, les dates dérogatoires de délibération et de dépôt de déclaration. Plus précisément, il convient d’inverser la chronologie, afin que les collectivités territoriales soient bien informées des éléments déclarés par les entreprises et puissent ainsi évaluer justement l’impact financier de leurs décisions.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. Cet amendement a été déposé tardivement vendredi dernier, après la réunion de la commission des finances. Aussi, cette dernière n’a pu l’examiner.

Néanmoins, il s’agit, selon toute apparence, d’un amendement de précision sans doute utile. Je m’en remets donc à la sagesse du Sénat !

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° II-528.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 39 undecies, modifié.

(L'article 39 undecies est adopté.)

Article 39 undecies (nouveau)
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2016
Article 39 duodecies (nouveau)

Articles additionnels après l'article 39 undecies

M. le président. L'amendement n° II-467 rectifié, présenté par M. Berson, Mme Conway-Mouret, M. Guillaume, Mme Lienemann, MM. Kaltenbach, Courteau, Jeansannetas, Delebarre et Roger, Mmes Campion et Bataille, MM. Raoul et F. Marc, Mme Blondin, MM. Labazée, Masseret, Raynal, Botrel, Vincent, Yung et les membres du groupe socialiste et républicain et apparentés, est ainsi libellé :

Après l’article 39 undecies

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le I de l’article 244 quater B du code général des impôts est ainsi modifié :

1° Le premier alinéa est ainsi modifié :

a) À la deuxième phrase, les mots : « et de 5 % pour la fraction des dépenses de recherche supérieure à ce montant » sont supprimés ;

b) À la troisième phrase, les mots : « Le premier de ces deux » sont remplacés par le mot : « Ce » ;

2° Sont ajoutés trois alinéas ainsi rédigés :

« Pour la fraction des dépenses de recherche supérieure à 100 millions d’euros, le taux du crédit d’impôt est de 5 %. Il est applicable aux entreprises :

« a) dont le recrutement de personnel de recherche salarié au cours de l’année comporte au moins 20 % de personnes titulaires d’un doctorat, au sens de l’article L. 612-7 du code de l’éducation, ou d’un diplôme équivalent, à condition que le contrat de travail de ces personnes soit à durée indéterminée et que l’effectif du personnel de recherche salarié de l’entreprise ne soit pas inférieur à celui de l’année précédente ;

« b) ou dont au moins 20 % du personnel de recherche salarié est composé de personnes titulaires d’un doctorat, au sens de l’article L. 612-7 du code de l’éducation, ou d’un diplôme équivalent, à condition que le contrat de travail de ces personnes soit à durée indéterminée et que l’effectif du personnel de recherche salarié de l’entreprise ne soit pas inférieur à celui de l’année précédente. »

La parole est à M. François Marc.

M. François Marc. Mes chers collègues, cet amendement a été déposé sur l’initiative de Michel Berson, rapporteur spécial de la commission des finances pour la mission « Recherche et enseignement supérieur ».

Nous nous sommes associés, assez nombreux, à cet amendement visant à conditionner, au-delà de 100 millions d’euros, l’octroi du crédit d’impôt recherche, le CIR, au recrutement de docteurs.

On mesure aujourd’hui l’importance que représente, pour une économie, la présence de personnels de très haut niveau. On salue également la qualité de la formation universitaire dispensée en France, dans le cadre des doctorats. Or, en la matière, l’offre et la demande ont quelque peine à se rencontrer.

En conséquence, les docteurs subissent un taux de chômage assez élevé. Une enquête consacrée à l’insertion professionnelle des docteurs et publiée en 2013 démontre que « l’accès à l’emploi, et notamment à l’emploi stable, des diplômés de doctorat ne va pas de soi ». En particulier, malgré le rapprochement entre l’université et l’entreprise mis en œuvre depuis plusieurs années, « leur accès aux emplois du privé est limité ». Les docteurs se dirigent très largement vers la recherche publique et académique, à hauteur de 52 %. Parallèlement, seuls 25 % d’entre eux poursuivent des activités de recherche dans le secteur privé.

Ainsi, on constate la faiblesse persistante du nombre de docteurs recrutés en entreprises. Il paraît donc intéressant que la modulation actuelle de l’assiette du CIR en faveur de l’embauche de jeunes docteurs puisse être ajustée pour tenir compte de ce besoin.

Tel est l’objet de cet amendement, qui, sans modifier les fondamentaux du CIR, vise à conditionner l’application du seuil de 5 % à l’embauche de docteurs ou à un effectif important de docteurs au sein du personnel de recherche salarié.

Je précise que cette disposition n’imposerait aucun coût supplémentaire à l’État : elle ne ferait pas entrer de nouveaux bénéficiaires dans le dispositif ni n’élargirait la base du crédit d’impôt. En revanche, elle permettrait d’envoyer un signal fort au monde scientifique et aux jeunes docteurs, qui sont nombreux en France. Ces derniers doivent être recrutés, autant que possible, dans les entreprises privées ! Tel est l’objet de cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. Monsieur Marc, vous soulignez que cette mesure ne créerait pas de coût supplémentaire… Mais elle fixerait une condition supplémentaire – c’est l’objet même de cet amendement –, qui, à nos yeux, complexifierait le dispositif.

Le but du CIR est d’encourager la localisation de la recherche des entreprises en France. Or tel n’est pas exactement l’objet de cet amendement, qui tend plutôt à aider les jeunes docteurs.

Au reste, le plafond des dépenses de fonctionnement éligibles au CIR est déjà doublé lorsqu’une entreprise embauche des jeunes docteurs. Ce crédit d’impôt comprend donc déjà un dispositif d’incitation à ce titre.

M. Michel Bouvard. Tout à fait !

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. Nous en sommes tous convaincus, et il en est d’ailleurs souvent question dans cet hémicycle : il faut garantir la stabilité et la lisibilité fiscales. Pourquoi complexifier encore un dispositif en vigueur en y ajoutant une condition supplémentaire ?

Le CIR représente des montants importants : les chiffres en témoignent. Cela étant, les résultats sont là. Mme la présidente de la commission et moi-même avons pu nous en convaincre lors de notre déplacement à Toulouse, où nous avons rencontré des représentants d’entreprises, notamment de PME, ayant recours à ce dispositif. Nos interlocuteurs nous ont dit combien le CIR était utile pour la localisation de la recherche.

En la matière, la France peut compter sur un dispositif compétitif. Ne le complexifions pas en y ajoutant telle ou telle condition. En l’occurrence, le but visé est sans doute louable, mais il diffère de la vocation même du CIR : la localisation de la recherche des entreprises en France.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Christian Eckert, secrétaire d'État. Le Gouvernement souscrit à l’analyse que vient de développer M. le rapporteur général. Il craint qu’une telle mesure ne constitue un frein à l’utilisation du CIR.

Premièrement, les entreprises doivent rester libres de déterminer, en fonction de leurs besoins, le profil de leurs recrutements, qu’il s’agisse de l’importance du personnel de recherche ou, au sein de celui-ci, des titulaires d’un doctorat.

Deuxièmement, le rapporteur général l’a rappelé, les dépenses engagées pour le salaire et l’accompagnement des jeunes doctorants sont prises en charge pour le double de leur valeur pendant vingt-quatre mois. Cette disposition semble avoir produit ses effets, si l’on en croit le rapport publié par le ministère de l’éducation, de l’enseignement supérieur et de la recherche en décembre 2014, dans lequel il est relevé que le nombre de docteurs a été multiplié par trois, pour atteindre 1 305 emplois.

Les dépenses déclarées en 2012 ont donné lieu à un crédit d’impôt de 90 millions d’euros. Comme vous le voyez, l’incitation est déjà forte, et la mesure qui nous est proposée pourrait, à l’inverse, introduire un frein. Je crains que le choix et la nature des emplois nécessaires aux entreprises ne relèvent aussi de leur propre arbitrage, en fonction de leurs besoins.

Si cet amendement était maintenu, le Gouvernement n’y serait pas favorable.