M. le président. Je mets aux voix l'article 4.

(L'article 4 est adopté.)

Article 4
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Article 6

Article 5

Jusqu’en 2022, le Gouvernement présente chaque année au Parlement, préalablement au débat sur les orientations des finances publiques, un rapport sur l’exécution de la présente loi. – (Adopté.)

Chapitre II

MODERNISER LE SERVICE PUBLIC DE LA JUSTICE EN INNOVANT ET EN MAÎTRISANT LA RÉVOLUTION NUMÉRIQUE

Article 5
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Article 7

Article 6

I. – Le deuxième alinéa de l’article L. 111-13 du code de l’organisation judiciaire est ainsi rédigé :

« Les modalités de cette mise à disposition préviennent tout risque de ré-identification des magistrats, des greffiers, des avocats, des parties et de toutes les personnes citées dans les décisions, ainsi que tout risque, direct ou indirect, d’atteinte à la liberté d’appréciation des magistrats et à l’impartialité des juridictions. »

II. – Le troisième alinéa de l’article L. 10 du code de justice administrative est ainsi rédigé :

« Les modalités de cette mise à disposition préviennent tout risque de ré-identification des juges, des greffiers, des avocats, des parties et de toutes les personnes citées dans les décisions, ainsi que tout risque, direct ou indirect, d’atteinte à la liberté d’appréciation des juges et à l’impartialité des juridictions. »

M. le président. L'amendement n° 2 rectifié bis, présenté par M. Détraigne, Mme Loisier, MM. Laugier et Kern, Mme Férat et MM. Mizzon, L. Hervé, Cigolotti, Vanlerenberghe, Cadic et Longeot, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à M. Yves Détraigne.

M. Yves Détraigne. L’article 6 de la proposition de loi soumet la publication des jugements à des contraintes nouvelles ; en particulier, il prévoit l’anonymisation des noms des magistrats qui les ont rendus.

Le Conseil national des barreaux s’est opposé à l’unanimité à cette anonymisation. De même, le Premier président de la Cour de cassation et les premiers présidents de cour d’appel se sont prononcés contre cette mesure, qui ferait de la France une exception en Europe, la plaçant aux côtés de la Russie et de la Roumanie en matière de transparence. En outre, la Commission nationale de l'informatique et des libertés a déjà fait connaître son opposition à ce type de dispositions.

À la vérité, cette mesure donne l’impression que l’on va au rebours des exigences de transparence de notre société et du monde moderne. C’est pourquoi nous proposons de la supprimer.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jacques Bigot, corapporteur. L’avis est défavorable. Il y a là, me semble-t-il, une incompréhension.

La pratique de l’open data, c’est-à-dire la mise en ligne de toutes les décisions de justice, vise à aider les justiciables et les praticiens du droit à connaître l’état de la jurisprudence et, surtout, à appliquer celle-ci. De ce point de vue, ce qui importe, c’est la nature de la décision, pas nécessairement l’identité de ceux qui ont contribué à ce qu’elle soit prise. On saura de toute façon que c’est telle chambre de telle juridiction qui s’est prononcée.

La majorité des syndicats de magistrats nous ont confirmé qu’ils souhaitent l’anonymisation, ne fût-ce que pour éviter certains débordements de justiciables mécontents d’une décision. Les greffiers nous ont fait la même demande de protection. S’agissant des avocats, nous avons recueilli des avis un peu divergents. Le barreau de Paris, notamment, a fait valoir que l’absence d’anonymisation est une façon de susciter une forme de publicité indirecte en fonction de la jurisprudence obtenue.

C’est pourquoi la commission, sur la proposition des rapporteurs, a émis un avis défavorable sur l’amendement de M. Détraigne. Sans doute le débat parlementaire suivra-t-il son cours sur cette question de l’open data.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. Le Gouvernement est favorable à l’amendement, mais pas exactement pour les raisons exposées par M. Détraigne.

M. le rapporteur Bigot a bien décrit la complexité de la question de l’anonymisation des noms des magistrats participant à la délibération d’une décision de justice.

La Chancellerie a confié à M. Loïc Cadiet, professeur à l’université Paris 1 Panthéon-Sorbonne, le soin de réaliser une étude sur la préfiguration de la mise en œuvre des articles 20 et 21 de la loi du 7 octobre 2016 pour une République numérique. Ce rapport, qui me sera remis dans le courant du mois de novembre, apportera un éclairage sur l’ensemble des questions soulevées par le biais du présent amendement.

C’est dans l’attente de ce rapport que j’émets un avis favorable sur l’amendement.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 2 rectifié bis.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 6.

(L'article 6 est adopté.)

Article 6
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Article 8

Article 7

Après l’article 66-1 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques, il est inséré un article 66-1-1 ainsi rédigé :

« Art. 66-1-1. – Les personnes proposant, à titre professionnel, de manière rémunérée ou non, un service de communication au public en ligne fournissant des prestations d’information et de renseignement en matière juridique ou d’aide à la saisine des juridictions respectent des obligations d’information préalable du public et de déontologie définies par un décret en Conseil d’État.

« Elles ne peuvent réaliser, de quelque manière que ce soit, aucun acte d’assistance ou de représentation au sens de l’article 4 sans recourir à un avocat.

« Est puni d’un an d’emprisonnement et de 75 000 euros d’amende le fait, pour une personne physique ou le dirigeant de droit ou de fait d’une personne morale exerçant l’activité définie au premier alinéa, de ne pas avoir respecté les prescriptions de ce même premier alinéa.

« Les personnes morales peuvent être déclarées pénalement responsables de ces infractions dans les conditions prévues à l’article 121-2 du code pénal. Elles encourent une peine d’amende, suivant les modalités prévues à l’article 131-38 du même code, ainsi que les peines mentionnées aux 2° et 9° de l’article 131-39 dudit code. L’interdiction mentionnée au 2° du même article 131-39 est prononcée pour une durée maximale de cinq ans et porte sur l’activité professionnelle dans l’exercice ou à l’occasion de laquelle l’infraction a été commise. »

M. le président. L'amendement n° 25 rectifié, présenté par Mmes Costes, N. Delattre et M. Carrère, MM. Collin, Gabouty, Gold, Guérini et Labbé, Mme Laborde et MM. Menonville, Requier et Vall, est ainsi libellé :

Alinéa 2

Après le mot :

juridictions

insérer les mots :

actualisent régulièrement les contenus diffusés, en supprimant les informations obsolètes ou erronées de nature à entrainer des recours abusifs ou dilatoires. Elles

La parole est à Mme Josiane Costes.

Mme Josiane Costes. L’objet de cet amendement est de prévoir des obligations légales minimales s’imposant aux sites internet dispensant des informations et des renseignements juridiques, afin qu’elles prennent effet le plus rapidement possible. Il arrive en effet que certains projets de décret se perdent dans la mécanique gouvernementale…

Compte tenu de l’influence de ces informations disponibles en ligne sur les justiciables, apporter cette précision nous semble important. La mobilisation de tous les acteurs du droit est nécessaire pour lutter contre les recours abusifs ou irrecevables et désengorger nos tribunaux.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jacques Bigot, corapporteur. L’article 7 renvoie pour l’essentiel à un décret en Conseil d’État la définition des obligations d’information préalable et de déontologie qui devront être respectées. Ce que vous proposez, ma chère collègue, pourra parfaitement figurer dans le futur décret. Nous vous suggérons donc de retirer votre amendement ; s’il est maintenu, nous y serons défavorables.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. Il est également défavorable, pour la raison que M. le rapporteur vient d’exposer.

M. le président. Madame Costes, l’amendement n° 25 rectifié est-il maintenu ?

Mme Josiane Costes. Non, nous le retirons, monsieur le président.

M. le président. L'amendement n° 25 rectifié est retiré.

L'amendement n° 26 rectifié, présenté par Mmes Costes, N. Delattre et M. Carrère, MM. Collin, Gabouty, Gold, Guérini et Labbé, Mme Laborde et MM. Menonville, Requier et Vall, est ainsi libellé :

Alinéa 3

Supprimer les mots :

sans recourir à un avocat

La parole est à Mme Josiane Costes.

Mme Josiane Costes. Cet amendement vise à prévenir la confusion pouvant découler des dispositions de l’article 7 aux termes desquelles toute personne peut proposer, de manière rémunérée ou non, un service de communication au public en ligne fournissant des prestations d’information juridique ou d’aide à la saisine de juridictions.

L’alinéa 3 prévoit que ces sites peuvent proposer des actes d’assistance ou de représentation, à la condition de recourir à un avocat. Nous considérons qu’il sera difficile pour un justiciable de s’assurer qu’un avocat est associé aux actes mentionnés avant de souscrire un contrat de services, sauf à ce que le nom de l’avocat figure sur le site internet concerné, obligation qui n’est pas prévue par l’article. Ce dispositif est de nature à entraîner une confusion dans l’esprit des justiciables.

En outre, nous estimons que le développement d’une intermédiation de la relation entre justiciable et avocat est de nature à accroître les frais de justice, ce qui ne va pas dans le sens d’une meilleure accessibilité de la justice.

Pour ces raisons, nous souhaitons interdire strictement aux personnes n’exerçant pas la profession d’avocat de proposer des services d’assistance ou de représentation juridique au sens de l’article 4 de la loi du 31 décembre 1971.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jacques Bigot, corapporteur. La proposition de loi vise précisément à assurer le respect des dispositions de la loi du 31 décembre 1971 portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques en interdisant aux sociétés offrant ces services en ligne de faire des propositions d’assistance ou de représentation sans recourir à un avocat.

Faire respecter les règles fixées par la loi du 31 décembre 1971 est relativement compliqué, mais nous savons bien qu’il n’est pas possible d’interdire strictement la fourniture de ces services ni d’en réserver le monopole à des barreaux ou à des sociétés d’avocats.

Dans ces conditions, madame Costes, je sollicite le retrait de votre amendement ; nous y serons défavorables si vous le maintenez.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. Même avis que la commission.

M. le président. Madame Costes, l'amendement n° 26 rectifié est-il maintenu ?

Mme Josiane Costes. Non, nous le retirons, monsieur le président.

M. le président. L’amendement n° 26 rectifié est retiré.

Je mets aux voix l'article 7.

(L'article 7 est adopté.)

Article 7
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Article 9

Article 8

Après l’article 4 de la loi n° 2016-1547 du 18 novembre 2016 de modernisation de la justice du XXIe siècle, sont insérés deux articles 4-2 et 4-3 ainsi rédigés :

« Art. 4-2. – Les personnes proposant, de manière rémunérée ou non, un service de communication au public en ligne fournissant des prestations d’aide à la résolution amiable des litiges respectent des obligations d’information préalable, d’impartialité, de compétence, de diligence et, sauf accord contraire des parties, de confidentialité précisées par un décret en Conseil d’État.

« Est puni d’un an d’emprisonnement et de 75 000 euros d’amende le fait, pour une personne physique ou pour le dirigeant de droit ou de fait d’une personne morale exerçant l’activité définie au premier alinéa, de ne pas avoir respecté les prescriptions de ce même premier alinéa.

« Les personnes morales peuvent être déclarées pénalement responsables de ces infractions dans les conditions prévues à l’article 121-2 du code pénal. Elles encourent une peine d’amende, suivant les modalités prévues à l’article 131-38 du même code, ainsi que les peines mentionnées aux 2° et 9° de l’article 131-39 dudit code. L’interdiction mentionnée au 2° du même article 131-39 est prononcée pour une durée maximale de cinq ans et porte sur l’activité professionnelle dans l’exercice ou à l’occasion de laquelle l’infraction a été commise.

« Art. 4-3. – Il est institué un service public gratuit en ligne d’aide à la résolution amiable des litiges, conforme aux prescriptions du premier alinéa de l’article 4-1. »

M. le président. L'amendement n° 3, présenté par Mme Benbassa, M. Collombat et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à Mme Esther Benbassa.

Mme Esther Benbassa. À l’instar de l’article 7, l’article 8 de la proposition de loi tend à fixer un cadre juridique plus précis pour les services en ligne de règlement amiable des litiges. Il est ainsi prévu d’imposer des règles de déontologie et une obligation d’information du public aux personnes proposant en ligne une assistance juridique ou une aide à la saisine des juridictions.

Mes chers collègues, j’attire votre attention sur le fait que nous ignorons tout de ces règles de déontologie et obligations, dont la définition est simplement renvoyée à un décret en Conseil d’État. Les auteurs de la proposition de loi ne semblent pas avoir d’idée précise des mécanismes qui seraient susceptibles de constituer de véritables garanties en la matière, ce qui nous semble pour le moins inquiétant.

Par ailleurs, comme le souligne le Syndicat de la magistrature, dont nous avons entendu les représentants il y a peu, il semble, monsieur Bas, que vous considériez la résolution de litiges en ligne comme une solution miracle au problème majeur de l’engorgement des juridictions.

Nous ne sommes pas contre cette idée a priori ; cela mérite probablement une réflexion approfondie. Toutefois, de notre point de vue, l’objectif doit toujours être de maintenir un accès garanti à tous et gratuit à la justice de notre pays. Or nous parlons ici de services en ligne payants qui créeront, sans nul doute, de nouvelles inégalités entre justiciables.

Pour toutes ces raisons, les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste proposent la suppression de l’article 8.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jacques Bigot, corapporteur. Ma chère collègue, il faut mesurer que ces services commencent à naître ; nous sommes obligés d’en tenir compte et de réagir pour protéger le justiciable. C’est la raison pour laquelle l’alinéa 5 de l’article 8 prévoit l’institution d’un service public gratuit en ligne d’aide à la résolution amiable des litiges, conforme aux prescriptions précisées au même article. La création de ce service public vise à éviter un monopole des services payants.

Par ailleurs, je puis vous dire, par expérience personnelle, que les possibilités de recourir à un service public en ligne de transaction et de règlement des litiges, notamment dans le domaine du marché unique européen, ne sont pas négligeables.

En 1993, en tant que président de la chambre de consommation d’Alsace, j’ai créé, avec la Verbraucherzentrale du Bade-Wurtemberg, un lieu d’information des consommateurs. Nous avons très rapidement constaté que de nombreux petits litiges transfrontaliers de la consommation ne pouvaient pas trouver de solution judiciaire. La mise en place par cette structure, qui existe maintenant depuis plus de vingt ans, d’un service en ligne dédié au règlement de ces litiges s’est avérée tout à fait utile.

Soyons donc modernes et ouverts, mais protégeons le justiciable. Telle est l’ambition du dispositif de cet article. Sans doute des améliorations devront-elles lui être apportées à l’avenir, mais je ne comprends pas, madame Benbassa, que vous en proposiez la suppression pure et simple. L’avis est donc défavorable.

Mme Éliane Assassi. Notre logique est différente, voilà tout !

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. Comme vient de l’expliquer M. le rapporteur, l’article 8 de la proposition de loi vise à encadrer la résolution des litiges en ligne et à instaurer un service public gratuit en ligne d’aide à la résolution amiable des litiges.

Il paraît tout à fait souhaitable au Gouvernement de sécuriser le déroulement des résolutions de litige sur internet. Vous l’avez dit, monsieur le rapporteur, cette pratique se développe : il faut l’accepter, mais la sécuriser, en prévoyant que les conciliations ou médiations intervenant dans ce cadre doivent respecter les obligations d’information préalable, d’impartialité, de confidentialité et de compétence, sous peine de sanctions pénales.

Le Gouvernement est défavorable à l’amendement.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 3.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. L'amendement n° 27 rectifié, présenté par Mmes Costes, N. Delattre et M. Carrère, MM. Collin, Gabouty, Gold, Guérini et Labbé, Mme Laborde et MM. Menonville, Requier et Vall, est ainsi libellé :

Alinéa 5

Supprimer cet alinéa.

La parole est à Mme Josiane Costes.

Mme Josiane Costes. La modernisation des outils informatiques et bureautiques du ministère de la justice s’avère souvent particulièrement coûteuse, et parfois contre-productive.

Depuis l’origine, la mise en œuvre du système informatique de suivi des dossiers CASSIOPÉE suit une trajectoire chaotique et très onéreuse. Cette expérience négative s’ajoute à d’autres, la plus connue étant celle du système de paie du ministère de la défense, affecté de graves dysfonctionnements. Cela illustre la difficulté de nos services à passer des marchés d’équipement informatique et de logiciels à des prix raisonnables.

L’alinéa 5 de l’article 8 de la proposition de loi prévoit la création d’un service public gratuit en ligne d’aide à la résolution amiable des conflits. Compte tenu de la forte contrainte budgétaire pesant déjà sur le ministère et de l’obsolescence générale du matériel mis à disposition, cet investissement paraît secondaire.

En outre, si l’on considère que le coût de CASSIOPÉE s’élève au total à 142 millions d’euros, on peut s’interroger sur la prise en compte du coût du futur site internet dans le budget proposé, dès lors que les crédits du programme « Accès au droit et à la justice » n’augmenteront que de 17 millions d’euros sur cinq ans.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jacques Bigot, corapporteur. Ma chère collègue, n’oubliez pas que la proposition de loi vise au redressement de la justice et comporte, dans cette perspective, un volet financier fondamental destiné à donner à celle-ci davantage de moyens.

Je vous ferai observer qu’il n’est pas précisé dans le texte à quel rythme le service public en ligne sera mis en place. Cependant, il faut bien le prévoir dans la programmation pluriannuelle si l’on veut qu’il puisse s’organiser. Ce n’est pas parce que la justice connaît quelques difficultés en matière d’informatisation et de numérisation qu’il faut renoncer à mettre en œuvre cette idée !

D’ailleurs, quand nous les avons rencontrés, les représentants des conciliateurs de justice nous ont dit qu’ils étaient tout à fait intéressés par la mise en place d’un système de ce type. Il faut donc le maintenir dans la loi ; le supprimer serait dommageable pour les usagers, surtout s’agissant des petits litiges qui ne justifient pas que l’on este en justice.

L’avis de la commission est défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. Je m’en remets à la sagesse du Sénat. Au sein du ministère de la justice, nous développons actuellement un portail, justice.fr, qui va prendre une très grande ampleur et pourrait être le support de ce futur service public en ligne. Il faudrait toutefois savoir exactement quelles ressources humaines et financières nécessiterait la mise en œuvre de ce dernier. Plus généralement, je pense que nous devrons mener une réflexion plus approfondie sur la notion de service public en ligne.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 27 rectifié.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 8.

(L'article 8 est adopté.)

Article 8
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Article 10

Article 9

Après l’article L. 421-7 du code de l’organisation judiciaire, il est inséré un article L. 421-7-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 421-7-1. – Le premier président et le procureur général veillent à ce que la réutilisation des informations figurant dans les décisions mises à la disposition du public en application de l’article L. 111-13 favorise l’harmonisation des jurisprudences, prévienne le contentieux en matière civile, contribue à améliorer la qualité des décisions de justice et ne porte pas atteinte à la liberté d’appréciation des magistrats et à l’impartialité des juridictions. »

M. le président. L'amendement n° 28 rectifié, présenté par Mmes Costes, N. Delattre et M. Carrère, MM. Collin, Gabouty, Dantec, Gold, Guérini et Labbé, Mme Laborde et MM. Menonville, Requier et Vall, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à Mme Josiane Costes.

Mme Josiane Costes. Nous avions considéré, dans un premier temps, que l’harmonisation des jurisprudences, la gestion des flux et des stocks de contentieux et l’amélioration de la qualité des décisions relevaient du domaine de la loi. Nos échanges en commission des lois ce matin nous ont convaincus du contraire. Nous retirons donc cet amendement, non sans avoir exprimé l’inquiétude que nous inspirent l’utilisation qui pourrait être faite des données contentieuses mises à disposition du public et le développement possible de ce que l’on appelle la justice prédictive.

M. le président. L’amendement n° 28 rectifié est retiré.

L’amendement n° 21, présenté par M. Leconte, est ainsi libellé :

Alinéa 2

Remplacer les mots :

et le procureur général veillent

par le mot :

veille

La parole est à M. Jean-Yves Leconte.

M. Jean-Yves Leconte. Lors de l’élaboration de la loi pour une République numérique, nous n’avions eu aucune difficulté à voter l’open data en matière de décisions de justice, car la justice est rendue au nom du peuple français. Nous mesurions ce que pouvait emporter le vote d’une telle disposition en termes d’anonymisation des personnes ayant contribué à la décision.

Entre statistiques et algorithmes, des choses nouvelles pourraient apparaître, telle la justice prédictive évoquée par Josiane Costes, avec le risque d’une remise en cause profonde de la justice et d’une compréhension différente de certaines jurisprudences. Nous devons être très vigilants à cet égard.

C’est la raison pour laquelle la proposition de M. le président de la commission des lois de donner au Premier président de la Cour de cassation un rôle spécifique de contrôle de tout ce qui concerne l’open data judiciaire mérite d’être saluée.

Cependant, à la suite de l’adoption d’un amendement en commission, ce rôle se trouve dévolu à la fois à ce dernier et au procureur général près la Cour de cassation. Le Premier président de la Cour de cassation a exprimé la préoccupation que lui inspire cette modification dans un courrier dont vous avez probablement tous été destinataires. Il y rappelle que les décisions des cours et des tribunaux sont prises exclusivement par les magistrats du siège et que le procureur général près la Cour de cassation donne seulement des avis à la Cour, sans exercer aucune responsabilité en ce qui concerne les décisions juridictionnelles, contrairement à ce que laisse entendre l’exposé des motifs de l’amendement. C’est pourquoi, indique-t-il, la mission de tenir les bases de la jurisprudence et de la diffuser incombe au seul service de la documentation, des études et du rapport, dirigé par un président de chambre, composé exclusivement de magistrats du siège et placé sous l’autorité du seul Premier président.

En d’autres termes, le texte tel qu’issu des travaux de la commission rompt avec l’architecture d’ensemble de la Cour de cassation en confondant les fonctions du siège et celles du parquet.

M. le président. Veuillez conclure, mon cher collègue.

M. Jean-Yves Leconte. Compte tenu de l’importance de ce sujet et de la gravité du risque de voir se mettre en place une justice prédictive, il me semble raisonnable de réserver cette fonction de supervision de l’open data au Premier président de la Cour de cassation, ainsi que le prévoyait la version initiale de la proposition de loi.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. François-Noël Buffet, corapporteur. L’avis est défavorable.

L’article 9 tend à insérer dans le code de l’organisation judiciaire un article L. 421-7-1 disposant que « le Premier président et le procureur général veillent à ce que la réutilisation des informations figurant dans les décisions mises à la disposition du public en application de l’article L. 111-13 favorise l’harmonisation des jurisprudences, prévienne le contentieux en matière civile, contribue à améliorer la qualité des décisions de justice et ne porte pas atteinte à la liberté d’appréciation des magistrats et à l’impartialité des juridictions ».

Dans la rédaction initiale de la proposition de loi, seul le Premier président de la Cour de cassation était visé par cet article. À la suite d’une audition conjointe du Premier président et du procureur général, il a été demandé que le procureur général puisse également participer à cette mission. Jacques Bigot et moi-même avons donc soumis un amendement en ce sens à la commission des lois, qui l’a adopté.

Le 19 octobre, le Premier président de la Cour de cassation a écrit au président Larcher et au président Bas pour s’émouvoir de cette situation. Nous venons de recevoir copie de la réponse du procureur général près la Cour de cassation, datée du 20 octobre, qui conteste la position du Premier président.

Nous devons, en ce qui nous concerne, éviter d’entrer dans des conflits de personnes et nous en tenir aux principes. Ces deux personnalités étant chargées par la loi d’une mission d’harmonisation et de veiller au bon fonctionnement de la justice au plus haut niveau de la Nation, Jacques Bigot et moi-même souhaitons le maintien de la rédaction issue des travaux de la commission, afin qu’elles s’accordent pour assurer la mise en œuvre d’un open data efficace.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. Le Gouvernement s’en tient à l’avis de la commission.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 21.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 9.

(L'article 9 est adopté.)

Chapitre III

RENDRE L’INSTITUTION JUDICIAIRE PLUS PROCHE DES CITOYENS

Section 1

Créer le tribunal départemental unique de première instance

Article 9
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Article 11

Article 10

I. – Le livre Ier du code de l’organisation judiciaire est ainsi modifié :

1° Au premier alinéa de l’article L. 121-1, les mots : « , les tribunaux de grande instance et les tribunaux d’instance » sont remplacés par les mots : « et dans les tribunaux de première instance » ;

2° Au premier alinéa de l’article L. 121-4, les mots : « d’instance et de grande » sont remplacés par les mots : « de première » ;

3° Au premier alinéa de l’article L. 122-1 et à l’article L. 122-2, le mot : « grande » est remplacé par le mot : « première » ;

4° À l’article L. 123-1, les mots : « grande instance, les tribunaux d’instance, les tribunaux d’instance ayant compétence exclusive en matière pénale » sont remplacés par les mots : « première instance » ;

5° À la deuxième phrase de l’article L. 123-4, les mots : « d’instance, des tribunaux de grande instance et » sont supprimés.

II. – Le livre II du code de l’organisation judiciaire est ainsi modifié :

1° Le titre Ier est ainsi modifié :

a) Dans l’intitulé, le mot : « grande » est remplacé par le mot : « première » ;

b) À la première phrase de l’article L. 211-1, le mot : « grande » est remplacé par le mot : « première » ;

c) L’article L. 211-2 est ainsi rédigé :

« Art. L. 211-2. – Il y a un tribunal de première instance dans chaque département.

« Par dérogation au premier alinéa, un même département peut comporter deux tribunaux de première instance, lorsque son importance démographique ou sa configuration géographique le justifie. » ;

d) Dans l’intitulé de la sous-section 1 de la section 1 du chapitre Ier, le mot : « grande » est remplacé par le mot : « première » ;

e) Aux articles L. 211-3 et L. 211-4, le mot : « grande » est remplacé par le mot : « première » ;

f) Après l’article L. 211-4-1, sont insérés deux articles L. 211-4-2 et L. 211-4-3 ainsi rédigés :

« Art. L. 211-4-2. – Le tribunal de première instance connaît des demandes formées en application :

« 1° Du règlement (CE) n° 1896/2006 du Parlement européen et du Conseil du 12 décembre 2006 instituant une procédure européenne d’injonction de payer ;

« 2° Du règlement (CE) n° 861/2007 du Parlement européen et du Conseil du 11 juillet 2007 instituant une procédure européenne de règlement des petits litiges.

« Art. L. 211-4-3. – Le tribunal de première instance connaît des mesures de traitement des situations de surendettement des particuliers et de la procédure de rétablissement personnel. » ;

g) L’article L. 211-5 est abrogé ;

h) Aux articles L. 211-6, L. 211-7, L. 211-8 et L. 211-9-2, le mot : « grande » est remplacé par le mot : « première » ;

i) Dans l’intitulé de la sous-section 2 de la section 1 du chapitre Ier, le mot : « grande » est remplacé par le mot : « première » ;

j) Aux articles L. 211-10, L. 211-11, L. 211-11-1, L. 211-12, L. 211-13 et L. 211-14, le mot : « grande » est remplacé par le mot : « première » ;

k) À l’article L. 212-1, au premier alinéa de l’article L. 212-2, à l’article L. 212-3 et au premier alinéa des articles L. 212-4 et L. 212-6, le mot : « grande » est remplacé par le mot : « première » ;

l) Le chapitre II est complété par une section 4 ainsi rédigée :

« Section 4

« Les chambres détachées

« Art. L. 212-7. – Le tribunal de première instance peut comprendre des chambres détachées, dont les compétences matérielles minimales sont fixées par décret en Conseil d’État.

« Des compétences supplémentaires peuvent être attribuées à une chambre détachée, sur décision conjointe du premier président de la cour d’appel dans le ressort de laquelle se trouve le siège du tribunal et du procureur général près cette cour, prise sur proposition du président du tribunal et du procureur de la République près ce tribunal. » ;

m) À la fin de l’intitulé de la sous-section 1 de la section 1 du chapitre III, les mots : « de grande instance » sont supprimés ;

n) Aux articles L. 213-1 et L. 213-2, au premier alinéa et au 1° de l’article L. 213-3 et au premier alinéa de l’article L. 213-4, le mot : « grande » est remplacé par le mot : « première » ;

o) Après la sous-section 3 de la section 1 du chapitre III, est insérée une sous-section 3 bis ainsi rédigée :

« Sous-section 3 bis

« Le juge des tutelles des majeurs

« Art. L. 213-4-1. – Dans chaque tribunal de première instance, un ou plusieurs magistrats du siège sont délégués dans les fonctions de juge des tutelles des majeurs.

« Le juge des tutelles connaît :

« 1° De la sauvegarde de justice, de la curatelle, de la tutelle des majeurs et de la mesure d’accompagnement judiciaire ;

« 2° Des actions relatives à l’exercice du mandat de protection future ;

« 3° Des demandes formées par un époux, lorsque son conjoint est hors d’état de manifester sa volonté, aux fins d’être autorisé à passer seul un acte pour lequel le concours ou le consentement de ce dernier serait nécessaire, ou aux fins d’être habilité à le représenter ;

« 4° De la constatation de la présomption d’absence ;

« 5° De l’habilitation familiale prévue à la section 6 du chapitre II du titre XI du livre Ier du code civil. » ;

p) Aux premier et second alinéas de l’article L. 213-5 et au premier alinéa des articles L. 213-7 et L. 213-9, le mot : « grande » est remplacé par le mot : « première » ;

q) À la première phrase de l’article L. 214-1 et à la première phrase du premier alinéa de l’article L. 214-2, le mot : « grande » est remplacé par le mot : « première » ;

r) L’article L. 215-1 est ainsi modifié :

– au premier alinéa, le mot : « grande » est remplacé par le mot : « première » ;

– après les mots : « siège du tribunal », la fin du second alinéa est ainsi rédigée : « de première instance. » ;

s) À l’article L. 215-2, le mot : « grande » est remplacé par le mot : « première » ;

t) Le chapitre V est complété par des articles L. 215-3 à L. 215-6 ainsi rédigés :

« Art. L. 215-3. – Le greffe du tribunal de première instance, sous le contrôle du juge, tient les registres de publicité légale tenus au greffe du tribunal de commerce.

« Art. L. 215-4. – Les fonctions de tribunal pour la navigation du Rhin sont exercées par un tribunal de première instance spécialement désigné, conformément à la convention révisée pour la navigation du Rhin, signée à Mannheim le 17 octobre 1868.

« Les fonctions de tribunal de première instance pour la navigation de la Moselle sont exercées par un tribunal de première instance spécialement désigné, conformément à la loi n° 66-379 du 15 juin 1966 déterminant, en application de la convention franco-germano-luxembourgeoise du 27 octobre 1956, les juridictions compétentes pour la navigation de la Moselle.

« Art. L. 215-5. – Le service du livre foncier est assuré au sein du tribunal de première instance selon des modalités fixées par décret.

« Art. L. 215-6. – Le tribunal de première instance connaît :

« 1° De la tutelle, des administrations légales et des curatelles de droit local ;

« 2° Du partage judiciaire et de la vente judiciaire d’immeubles, des certificats d’héritier et des scellés ;

« 3° Des registres des associations et des registres des associations coopératives de droit local. » ;

u) Aux articles L. 216-1 et L. 216-2, le mot : « grande » est remplacé par le mot : « première » ;

v) Dans l’intitulé du chapitre VII, le mot : « grande » est remplacé par le mot : « première » ;

w) Aux articles L. 217-1 et L. 217-2, le mot : « grande » est remplacé par le mot : « première » ;

2° Le titre II est abrogé.

III. – Le code de commerce est ainsi modifié :

1° À la seconde phrase du premier alinéa de l’article L. 621-2, le mot : « grande » est remplacé par le mot : « première » ;

2° Le livre VII est ainsi modifié :

a) Aux première et seconde phrases du premier alinéa de l’article L. 722-4 et au dernier alinéa de l’article L. 722-7, à l’article L. 722-10, le mot : « grande » est remplacé par le mot : « première » ;

b) Le titre III est ainsi modifié :

– à l’article L. 731-1, le mot : « grande » est remplacé par le mot : « première » ;

– à la fin de l’article L. 731-2, les mots : « , à l’exception des affaires qui relèvent de la compétence du tribunal d’instance en application des dispositions du chapitre III du titre II du livre II du code de l’organisation judiciaire » sont supprimés ;

– à la première phrase de l’article L. 731-3, à la première phrase du premier alinéa de l’article L. 732-3 et à l’article L. 732-4, le mot : « grande » est remplacé par le mot : « première » ;

c) Au premier alinéa, deux fois, de l’article L. 743-4, à la troisième phrase du premier alinéa de l’article L. 743-6, aux premier, deuxième et troisième alinéas de l’article L. 743-7, au second alinéa de l’article L. 743-8, à la première phrase du premier alinéa de l’article L. 743-9, à l’article L. 743-10 et à l’article L. 744-1, le mot : « grande » est remplacé par le mot : « première ».

IV. – Le présent article entre en vigueur à une date fixée par décret, et au plus tard le 1er janvier 2022. Ce décret peut prévoir une entrée en vigueur à une date différente selon les départements.

À cette date, les procédures en cours devant les tribunaux d’instance et les tribunaux de grande instance sont transférées en l’état aux tribunaux de première instance territorialement compétents. Les convocations et citations données aux parties peuvent être délivrées avant la date d’entrée en vigueur du présent article pour une comparution postérieure à cette date devant la juridiction nouvellement compétente. Il n’y a pas lieu de renouveler les actes, formalités et jugements régulièrement intervenus antérieurement au transfert des procédures, à l’exception des convocations et citations données aux parties qui n’auraient pas été suivies d’une comparution devant la juridiction antérieurement compétente. Les parties ayant comparu devant la juridiction antérieurement compétente sont informées par l’une ou l’autre des juridictions qu’il leur appartient d’accomplir les actes de la procédure devant la juridiction à laquelle les procédures sont transférées. Les archives et les minutes du greffe des juridictions antérieurement compétentes sont transférées au greffe des tribunaux de première instance compétents. Les frais de transfert de ces archives et minutes sont imputés sur le crédit ouvert à cet effet au budget du ministère de la justice.