Mme Mireille Jouve. Très bien !

Mme la présidente. La parole est à M. Jacques Bigot.

M. Jacques Bigot. Madame la présidente, monsieur le président de la commission, madame la rapporteur, mes chers collègues, comme l’a dit tout à l’heure Jean-Pierre Sueur, le groupe socialiste et républicain ne votera pas cette proposition de loi, dont l’utilité est très relative.

L’article 54 de la loi MAPTAM, fruit d’un compromis entre le Sénat et l’Assemblée nationale qui avait été suggéré à l’époque par notre collègue René Vandierendonck, rapporteur du texte, est lui aussi d’une utilité relative – Alain Richard a eu raison de le souligner.

Effectivement, pour le Sénat, il n’était pas question d’avaliser une élection au suffrage universel direct, tandis qu’à l’Assemblée nationale, le groupe écologiste, dont était membre François de Rugy, l’actuel président de l’Assemblée nationale, souhaitait une élection au suffrage universel direct dans les métropoles. Vous le voyez, madame la ministre, la sagesse ne sera peut-être pas la même au Palais-Bourbon…

Grâce à un amendement du Gouvernement, un compromis complexe a finalement été dégagé, qui envisageait deux collèges, l’un composé de représentants des communes directement élus par les maires, l’autre formé de représentants élus au suffrage universel direct. Il prévoyait aussi un rapport du Gouvernement pour éclairer sur l’organisation de la future élection.

Entre-temps, grâce au texte sur le Grand Paris, le principe de cette loi a été reporté à 2019, mais rien ne dit que le Gouvernement déposera finalement un projet de loi ou que les députés déposeront une proposition de loi.

Il résulte surtout de nos débats d’aujourd’hui une volonté de sanctuariser le fléchage pour les métropoles, sachant que, pour les autres intercommunalités, le fléchage est acquis et personne ne le remet en cause.

M. Pierre-Yves Collombat. Pour l’instant ! Pour l’instant !

M. Jacques Bigot. Ne s’agit-il pas finalement d’une régression par rapport à la loi MAPTAM et l’idée des métropoles ?

Je ne sais pas si le Sénat est composé de Girondins ou de Jacobins, mais, depuis la Révolution française, c’est toujours le même débat et, malheureusement, les Girondins se trompent parfois.

Nous sommes tous très attachés à l’organisation communale. J’ai moi-même été le maire d’une commune appartenant à une communauté urbaine devenue aujourd’hui l’eurométropole de Strasbourg, ainsi que le premier président de cette communauté urbaine à ne pas être maire de Strasbourg.

Les communes doivent être défendues. En même temps, elles se défendent mieux lorsqu’elles sont dans des intercommunalités renforcées, notamment face à État à qui l’on reproche aujourd’hui de prendre trop de décisions. Lors des questions d’actualité, il y a toujours un sénateur pour reprocher au Premier ministre d’imposer une charge supplémentaire pour les communes !

Dans ce contexte, l’idée est de donner l’occasion à de grandes agglomérations de se rassembler et de défendre une vraie stratégie d’aménagement du territoire et de développement économique.

Il est nécessaire d’avoir sur ce point un vrai débat de fond avec nos concitoyens. Objectivement, contrairement à ce que prétend Mme Delattre, il n’y a pas de discussions sur l’intercommunalité au moment de l’élection municipale.

Je le disais quand j’étais président de la communauté urbaine de Strasbourg : les métropoles sont aux communes ce que l’Europe est aux États. Quand la voirie est brillamment refaite, on remercie M. le maire. Quand il y a des trous dans la chaussée, c’est la faute de la métropole. (Exclamations.)

Mme Sylvie Goy-Chavent. Certainement pas en milieu rural !

M. Jean-Noël Guérini. Non, c’est toujours la faute du maire !

M. Jacques Bigot. Un jour – je ne sais pas quand –, la réalité nous conduira à trouver un autre système. Ce ne sera peut-être pas en 2019, ce ne sera peut-être pas pour les élections de 2020 – les consciences ne sont pas mûres dans l’ensemble des métropoles –, mais, un jour, cela viendra.

Dans ces conditions, n’est-il pas préférable de conserver l’article 54, plutôt que de vouloir figer le compromis accepté lors de la loi MAPTAM ?

M. Pierre-Yves Collombat. Persévérer dans l’erreur est diabolique !

M. Jacques Bigot. Le groupe socialiste votera donc contre cette proposition dépourvue de sens, sauf à ce que le Gouvernement ait l’intention de nous surprendre en proposant, sous la houlette du président de l’Assemblée nationale, un texte instaurant le suffrage universel direct pour 2020.

C’est sans doute la crainte que nourrissent certains de nos collègues, notamment après avoir entendu les propos de députés La République En Marche élus sur le territoire de la métropole d’Aix-Marseille. Quoi qu’il en soit, ce sujet méritera incontestablement d’autres réflexions. (M. Jean-Pierre Sueur applaudit.)

Mme la présidente. La parole est à M. Joël Guerriau. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Indépendants – République et Territoires et du groupe Union Centriste.)

M. Joël Guerriau. Madame la présidente, madame la ministre, madame la rapporteur, monsieur le président de la commission des lois, mes chers collègues, la proposition de loi que nous examinons aujourd’hui présente l’avantage de ménager une pause dans les réformes de l’organisation territoriale, pause qui est souhaitée par les élus locaux – et c’est le rôle du Sénat d’être à l’écoute de ces derniers.

Selon le droit en vigueur, les conseillers métropolitains sont désignés à l’occasion des élections municipales, soit par le système du fléchage dans les communes de 1 000 habitants et plus, soit selon l’ordre du tableau du conseil municipal dans les communes de moins de 1 000 habitants.

Ce mode de désignation permet de respecter les principes fondamentaux qui régissent la composition des conseils communautaires, comme la participation de toutes les communes membres ou la représentation des citoyens sur des bases essentiellement démographiques.

Par ailleurs, grâce au système de fléchage, plus de 95 % des conseillers métropolitains sont d’ores et déjà élus au suffrage universel direct.

La loi du 27 janvier 2014 de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles, ou loi MAPTAM, est source d’ambiguïté. En effet, son article 54 a créé l’incertitude en demandant au législateur de définir, avant le 1er janvier 2019, les modalités de l’élection des conseillers métropolitains au suffrage universel direct.

Le rapport remis par le Gouvernement trois ans après l’adoption de cette loi dégage trois pistes de réflexion.

Le premier scénario prévoit la coexistence de deux collèges distincts au sein d’un même conseil métropolitain.

Dans le deuxième scénario du Gouvernement, les conseillers métropolitains resteraient élus dans des circonscriptions communales, mais les élections municipales et métropolitaines seraient dissociées.

Enfin, le troisième scénario apparaît proche du scrutin existant pour les conseils régionaux : le conseil métropolitain serait élu à la représentation proportionnelle avec une prime majoritaire, dans une circonscription unique, mais avec des sections électorales communales. Que d’ambiguïté !

Madame la ministre, mes chers collègues, au système actuel d’élection des conseillers métropolitains, je préférais pour ma part le précédent, qui laissait la souplesse aux conseils municipaux de désigner de nouveaux représentants au sein des conseils communautaires en cours de mandat.

Par exemple, un maire nouvellement élu est dans l’impossibilité de siéger au conseil communautaire dans la mesure où il ne figurait pas dans le fléchage. Nous devons trouver une solution pour pallier cet inconvénient. J’ai été maire durant vingt-deux, ainsi que conseiller communautaire, et la souplesse de l’ancien système nous avait par exemple permis de remplacer facilement un adjoint souffrant de la maladie d’Alzheimer. Aujourd’hui, le fléchage de la désignation des conseillers communautaires rend les choses plus complexes.

Le système actuel présente toutefois deux avantages. D’une part, il écarte le risque d’assimiler les métropoles intercommunales à des collectivités territoriales. D’autre part, il conforte le principe selon lequel la commune est, et doit rester, la cellule de base de la démocratie locale. Pour répondre à mon collègue Jacques Bigot, je pense que le maire sera toujours le premier interpellé en cas de problème de voirie !

Mme la présidente. Il faut conclure, mon cher collègue.

M. Joël Guerriau. Aussi, considérant que le texte qui nous est soumis aujourd’hui a le mérite d’apporter une stabilité attendue, les membres du groupe Les Indépendants – République et Territoires approuvent l’abrogation de l’article 54 de la loi MAPTAM et voteront avec enthousiasme en faveur de cette proposition de loi. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Indépendants – République et Territoires, du groupe Union Centriste et du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Christine Lavarde. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

Mme Christine Lavarde. Madame la présidente, madame la ministre, madame la rapporteur, mes chers collègues, à ce stade de nos échanges, beaucoup a déjà été dit.

Si supprimer l’article 54 de la loi MAPTAM est effectivement avant tout un acte symbolique, celui-ci n’en a pas moins le mérite de rouvrir le débat sur les métropoles et l’élection des conseillers métropolitains.

Je remarque tout d’abord que les métropoles sont de nature très diverse. Comment comparer les onze métropoles de droit commun correspondant à des EPCI à fiscalité propre de 400 000 habitants dans une aire urbaine de 650 000 habitants – les trois dernières, Montpellier, Rouen et Nancy, sont nées de la volonté des ensembles intercommunaux préexistants – à la collectivité territoriale au statut particulier de Lyon, aux deux métropoles à statut particulier du Grand Paris et d’Aix-Marseille-Provence, ou encore aux sept dernières métropoles de taille plus modeste créées le 1er janvier 2018 ?

Le débat sur les mécanismes de désignation des conseillers métropolitains doit, me semble-t-il, tenir compte de cette différence fondamentale. Ainsi, Lyon, devenu une vraie collectivité territoriale, ne peut être traité de la même manière que les jeunes métropoles qui ont vu le jour en 2018.

Sophie Joissains nous a décrit le fonctionnement, voire les dysfonctionnements, de la métropole d’Aix-Marseille-Provence. En tant qu’élue de la métropole du Grand Paris au titre de mon mandat à Boulogne-Billancourt et dans l’établissement public territorial Grand Paris Seine Ouest, je vous parlerai de la métropole du Grand Paris.

Je le rappelle, cette « métropole » a été bâtie contre l’avis des maires et des élus locaux, qui se sont prononcés à deux reprises contre les textes MAPTAM et NOTRe au sein de la mission de préfiguration du Grand Paris : à plus de 75 % en octobre 2013 et à 94 % en octobre 2014.

J’ai bien entendu les propos d’Alain Richard, qui, reprenant les intentions du Président de la République, a évoqué des évolutions volontaires pour six ou sept grandes métropoles.

Aujourd’hui, évoquer la métropole du Grand Paris, c’est faire une sorte de « voyage en Absurdie », sur le plan institutionnel comme sur le plan financier. Elle n’exerce pas de véritables compétences opérationnelles, mais suscite 3,4 milliards d’euros de flux financiers, pour un budget primitif pour 2018 de 29,3 millions d’euros après retraitement des flux entre la métropole et les communes, soit moins de 4,3 euros par habitant pour fonctionner. L’épargne brute de cet ensemble de plus de 7 millions d’habitants est de seulement 5 millions d’euros.

Cela pourrait prêter à sourire si nous n’étions pas dans un contexte de crise, avec une baisse de l’investissement local « sans précédent », selon un récent rapport du groupe BPCE… Faute de projet, la métropole du Grand Paris a investi seulement 16 millions d’euros en 2017. Les territoires, qui ont dû transférer une partie de leur fiscalité économique à la métropole, auraient su mobiliser utilement la croissance de la CVAE du territoire francilien au bénéfice de l’économie nationale. Privés de leurs moyens financiers, ils ont dû geler des investissements programmés et proches des citoyens.

En l’état, une élection au suffrage universel direct des conseillers métropolitains du Grand Paris, détachée des communes, serait une catastrophe, sauf à vouloir en faire une sorte de « super-département » intercalé entre les blocs communaux et la région. Une nouvelle couche supplémentaire à un millefeuille déjà bien indigeste…

Madame la ministre, alors sénatrice du Loir-et-Cher, vous aviez justement fait remarquer, dans le cadre de l’examen d’un amendement déposé lors de la seconde lecture de la loi MAPTAM, qu’élire les conseillers métropolitains au suffrage universel direct reviendrait, de fait, à créer une nouvelle collectivité territoriale.

Par ailleurs, quelle cohérence y aurait-il à définir aujourd’hui les modalités d’élection d’élus dont on ne connaît toujours pas les attributions dans les prochaines années ?

Le Président de la République, qui a déjà repoussé à plusieurs reprises ses annonces sur la réforme du Grand Paris, prendra-t-il conscience que, tant qu’il ne se sera pas prononcé, l’incertitude et le flou institutionnel continueront de régner, rendant impossible toute action et toute gestion saine de nos collectivités ?

Le mode d’élection actuel des conseillers métropolitains par fléchage permet de maintenir un lien de proximité entre les citoyens, les élus locaux et leurs représentants au sein de l’échelon métropolitain. Pour être efficace, la construction des métropoles doit se faire au service des communes qui la composent, et non contre celles-ci.

Telles sont les raisons pour lesquelles je voterai en faveur de cette proposition de loi. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, du groupe Union Centriste et du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen.)

Mme Mireille Jouve. Très bien !

Mme la présidente. La parole est à M. Michel Forissier.

M. Michel Forissier. Madame la présidente, madame la ministre, monsieur le président de la commission des lois, madame la rapporteur, mes chers collègues, nous sommes réunis aujourd’hui pour parler de métropoles, des projets ambitieux ayant pour but de moderniser les territoires et d’assurer leur développement économique. Ce nouveau concept marque des points, mais il rencontre aussi des problèmes dans son application au quotidien.

La loi MAPTAM, promulguée le 27 janvier 2014, peine quelque peu à trouver sa conclusion, puisque son article 54 demande en quelque sorte une nouvelle rédaction législative.

Mme la ministre a choisi de faire appel à la sagesse de notre assemblée, le Gouvernement ayant sans doute quelques difficultés à appréhender cette situation nouvelle, qui soulève des problèmes différents sur chaque territoire.

Notre collègue Mathieu Darnaud, rapporteur de la mission de contrôle et de suivi de la mise en œuvre des lois de réforme territoriale de la commission des lois, a identifié un problème important de démocratie locale. En effet, la gouvernance métropolitaine ne doit pas être dissociée de la représentation communale, qui reste l’interlocuteur direct des administrés.

Or l’article 54 de la loi MAPTAM pourrait appauvrir les relations territoriales et amplifier les concurrences institutionnelles. Dans l’intérêt des habitants, il faut préserver l’équilibre structurel des collaborations horizontales qui existent actuellement entre les communes membres et les métropoles.

Conseiller métropolitain lyonnais, je suis attaché à une action publique plus efficace, plus rapide et plus cohérente pour la vie quotidienne de nos territoires.

Adopter des modes de désignation séparés aurait pour conséquence, il est vrai, dans les métropoles qui n’en ont pas l’obligation, de créer des situations peu cohérentes, où la majorité municipale ne serait pas représentée, alors que l’opposition municipale le serait. Dans ce cas, comment trancher ? Qui représenterait la commune ? Ce serait très ambigu.

Découpler les mandats ne serait pas non plus une solution, car la commune n’aurait plus de prise sur la décision et ne pourrait même pas donner un avis sur des travaux réalisés sur son territoire.

À l’occasion de ce débat, avec mes trois collègues sénateurs Les Républicains et apparentés du Rhône, François-Noël Buffet, Élisabeth Lamure et Catherine Di Folco, j’avais déposé un amendement qui n’a pas été retenu compte tenu de son rapport éloigné avec le texte en discussion. Nous voulions engager le débat sur les relations entre la métropole de Lyon, les maires et les conseils municipaux dans la nouvelle donne de 2020.

Si la métropole lyonnaise est une collectivité territoriale, c’est principalement parce qu’elle exerce les compétences du département. Dans ce cas, il est absolument indispensable de discuter en priorité d’un statut de maire métropolitain. En effet, l’élu qui a du poids sur un territoire, celui qui est connu et reconnu, c’est, aujourd’hui encore, le maire. Au sein d’un ensemble métropolitain, les maires doivent donc être les représentants de la métropole.

Mme Sylvie Goy-Chavent. C’est logique !

M. Michel Forissier. C’est pourquoi, à nos yeux, ils doivent pouvoir recevoir des délégations de cette dernière.

Ces délégations doivent être fixées dans le cadre du pacte de cohérence métropolitain qui est rédigé à chaque début de mandat, et les dispositions en question doivent être garanties par la loi. Les discussions que nous allons engager avec le Gouvernement doivent permettre de leur donner un cadre clairement défini.

M. Michel Forissier. Selon moi, la métropole est une belle collectivité, et elle doit perdurer. Mais si, demain, le maire n’est plus crédible, qui défendra les valeurs de la République dans les territoires les plus fragiles de nos métropoles ?

Mme Françoise Laborde. Tout à fait !

M. Michel Forissier. Il faut mettre un terme à cette situation : le maire doit trouver sa place dans ce cadre, car les communes métropolitaines ne sauraient être réduites à des mairies d’arrondissement ! (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains, du groupe Union Centriste et du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen. – M. Pierre Ouzoulias applaudit également.)

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.

Mme Jacqueline Gourault, ministre. Christine Lavarde l’a relevé il y a quelques instants : au fond, l’article 54 de la loi MAPTAM est symbolique.

Dès lors, je signale à Mireille Jouve, auteur de cette proposition de loi, que la suppression de cet article est elle-même assez symbolique ; le fait est que sa portée normative n’est pas évidente.

Toutefois, avec ce présent texte, un travail utile a été accompli pour la clarté des prochaines élections municipales. (Mme Mireille Jouve acquiesce.)

M. Philippe Bas, président de la commission des lois. Tout à fait !

Mme Jacqueline Gourault, ministre. Ces dispositions permettront peut-être de prévenir la multiplication des interrogations et de limiter les angoisses, notamment en évitant la diffusion de fausses nouvelles.

Avec la suppression de l’article 54, la situation sera claire, et ce sera parfait ainsi ! (Applaudissements sur des travées du groupe Union Centriste, du groupe Les Républicains, du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen et du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.)

Mme la présidente. La discussion générale est close.

Nous passons à la discussion du texte de la commission.

proposition de loi relative à l’élection des conseillers métropolitains

Discussion générale (suite)
Dossier législatif : proposition de loi relative à l'élection des conseillers métropolitains
Article additionnel après l'article unique - Amendements n° 1 et n° 2

Article unique

L’article 54 de la loi n° 2014-58 du 27 janvier 2014 de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles est abrogé.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Pierre Grand, sur l’article unique.

M. Jean-Pierre Grand. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, cette initiative parlementaire de nos collègues du groupe du RDSE ouvre le débat sur l’élection des conseillers métropolitains.

Le 1er janvier 2015, l’agglomération de Montpellier a cédé la place à une métropole. Cette expérience m’autorise aujourd’hui à porter ici, au Sénat, le témoignage d’un EPCI qui fonctionnait parfaitement jusqu’à sa transformation.

Pour ma part, j’avais appelé de mes vœux cette évolution, dès lors que le gouvernement précédent nous garantissait une transformation en métropole librement consentie par les communes, et non effectuée via un simple décret, une dotation financière spécifique pour les nouvelles métropoles et un mode de représentation des communes qui restait directement lié au résultat de l’élection municipale dans chaque commune.

Mon expérience de trente-cinq ans d’une intercommunalité urbaine me conduit, aujourd’hui, à dresser ce constat : trois ans après sa création, la métropole de Montpellier est devenue un boulet pour nos communes.

L’exercice des compétences transférées, comme celles, particulièrement sensibles, de la voirie et de l’espace public, devenues métropolitaines, pour ne citer que celles-là, ne répond plus aux impératifs de planification, de proximité, de réactivité et d’exécution qui étaient respectés jusque-là par nos communes.

Il convient également d’évoquer les tensions exercées sur l’épargne des communes de la métropole. Ces difficultés sont liées à l’imputation en section de fonctionnement de dépenses d’investissement à travers l’attribution de compensations. Bien sûr, une loi est censée résoudre les problèmes dont il s’agit : encore faut-il que les élus qui sont majoritaires au sein de la métropole, et qui, en conséquence, président cette dernière, acceptent de l’appliquer !

Le passage à la métropole a déstabilisé le fonctionnement de nos communes, mais ce sont les maires qui, en 2020, devront rendre des comptes à leur population. Aussi, chacun comprendra que je souscrive à l’objet de cet article unique.

J’avais déposé un amendement identique lors de l’examen, en novembre dernier, de la proposition de loi relative aux modalités de dépôt de candidature aux élections. Toutefois, cet amendement avait alors été déclaré irrecevable.

Dans son rapport de janvier 2017, le précédent gouvernement constatait l’absence de consensus politique en la matière. Il semblait néanmoins privilégier l’hypothèse d’une assemblée élue dans le cadre d’une circonscription unique dotée de sections électorales.

Ce mode de scrutin pose un problème majeur quant au respect de la démocratie. À titre d’exemple, dans les sections communales ne comportant qu’un seul siège, un candidat issu d’une liste arrivée en tête à l’échelle de la métropole pourrait être élu dans sa section communale, en application de la prime majoritaire, alors que, dans cette même commune, la liste arrivée en tête n’aurait pas de représentant.

Dans les communes disposant de peu de représentants, un par exemple – nombreuses sont celles qui se trouvent dans ce cas ! –, le conseiller métropolitain élu selon ce mode de scrutin…

Mme la présidente. Veuillez conclure, mon cher collègue.

M. Jean-Pierre Grand. … pourrait ne plus être le maire, mais un conseiller de l’opposition, voire une personne extérieure au conseil municipal. Or la logique de l’intercommunalité veut que le conseiller métropolitain soit un représentant de sa commune, issu de la liste qui a gagné les élections, et non d’une liste rejetée par les électeurs.

Un tel mode de scrutin modifierait donc totalement la nature et l’esprit de l’intercommunalité, laquelle deviendrait, de fait, une nouvelle collectivité territoriale de plein exercice. Cette évolution consacrerait la disparition de l’échelon communal sur le territoire de la métropole, ce que, naturellement, nous ne souhaitons pas ! (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains. – Mme Michèle Vullien applaudit également.)

Mme la présidente. La parole est à M. Arnaud Bazin, sur l’article unique.

M. Arnaud Bazin. Je ne reviendrai pas sur les conséquences de l’élection au suffrage universel supracommunal des conseillers métropolitains pour les communes : les précédents orateurs les ont abondamment développées, et, bien sûr, j’insiste moi aussi sur la nécessité de préserver l’entité communale, première brique de la République.

Pour ma part, j’entends attirer l’attention sur la menace qu’un tel changement représente pour l’existence des départements. La loi portant nouvelle organisation territoriale de la République, ou loi NOTRe, a tenté de les faire disparaître ; les baisses inouïes de dotations décidées pendant le précédent quinquennat les ont rudement malmenés ; enfin, la perte programmée de toute autonomie financière à la suite de la disparition de la taxe d’habitation, inexorablement suivie de la part départementale de la taxe sur le foncier bâti, n’est autre qu’une pierre tombale dans leur jardin…

Ce sont pourtant les départements qui assurent la nécessaire solidarité. Je pense non seulement à celle qu’ils exercent envers les plus faibles, mais aussi à celle qu’ils garantissent, dans leur ressort, entre les communes riches et les communes défavorisées.

Si les métropoles se saisissaient des compétences départementales dans leurs territoires, qu’adviendrait-il du reste ? L’espace départemental non métropolitain, cet arrière-pays vital pour les habitants des métropoles, serait abandonné à lui-même, sans ressources en proportion de ses besoins. Il ne serait plus que l’ultra-périphérie de la France périphérique ! Il suffit d’écouter le président du conseil départemental du Rhône pour s’en convaincre.

L’élection des conseillers métropolitains au suffrage supracommunal s’inscrit aussi dans cette funeste direction. C’est pourquoi je voterai le présent article et, plus largement, l’ensemble de cette proposition de loi. (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains, du groupe Union Centriste et du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen. – M. Pierre-Yves Collombat applaudit également.)

Mme la présidente. La parole est à M. Michel Forissier, sur l’article unique.

M. Michel Forissier. Mes chers collègues, je tiens à compléter ma précédente intervention par l’argument suivant : il est nécessaire de dresser le bilan des métropoles créées à ce jour. En effet, avant d’aller plus loin, il faut solidifier cette assise métropolitaine.

Au sein de la métropole lyonnaise, nous sommes convenus que ce premier mandat était un mandat de construction. Parmi les expérimentations menées, il faudra tenir compte de ce qui, au cours de cette période, a plus ou moins bien fonctionné.

Madame la ministre, je ne détaillerai pas ce soir les difficultés auxquelles nous nous sommes heurtés. Toutefois, j’insiste : aujourd’hui, la priorité, c’est bel et bien de dresser ces bilans. Parmi les graves problèmes auxquels fait face la métropole lyonnaise figure l’absence de représentation des maires de nombreuses communes pour le prochain mandat. Pour représenter toutes ces localités, le conseil métropolitain devrait compter 700 ou 800 conseillers, ce qui est impensable !

À mes yeux, cette proposition de loi va dans le bon sens : c’est pourquoi je la voterai avec conviction. Je suis heureux d’appartenir au Sénat et de voir que, en son sein, une large majorité défend les communes. (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains, du groupe Union Centriste et du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen.)