M. François Patriat. J’entends bien, mais j’ai pour seule intention de défendre intelligemment le monde agricole, que je connais aussi un peu, comme la plupart d’entre nous.

La commission des affaires économiques a supprimé la demande d’habilitation du Gouvernement en vue de modifier les relations entre les sociétés coopératives agricoles et leurs associés-coopérateurs. Définir les conditions de départ, améliorer l’information et la transparence dans la redistribution des gains et prévoir des modalités de contrôle et des sanctions pour rendre les dispositions plus efficaces : il me paraît logique de prévoir ces mesures, et nous comprenons vos préoccupations et votre attachement au statut des coopératives – j’y suis moi-même très attaché –, car celles-ci sont essentielles au maillage de nos territoires. D’ailleurs, nous veillerons à respecter la particularité de ce mode d’organisation, que je connais très bien.

Pourtant, en l’état, la rénovation du cadre contractuel pour le secteur agricole, qui est la finalité principale de ce projet de loi, ne s’applique pas à nos 2 600 coopératives ; c’était là le cœur de l’article 8. En supprimant en commission l’habilitation du Gouvernement, la majorité sénatoriale a fait le choix d’exclure les agriculteurs associés-coopérateurs des bénéfices d’une rémunération plus juste, du partage plus équitable de la valeur ajoutée. La suppression de ce dispositif prive aussi les associés-coopérateurs d’une information plus transparente et de conditions de départ facilitées.

Nous prenons nos responsabilités. Oui, effectivement, durant les États généraux de l’alimentation, aucun atelier n’était, il est vrai, je le constate, dédié au secteur de la coopération. Mais c’est précisément pour cette raison que le Gouvernement nous demande d’adopter une habilitation à légiférer par ordonnances en vue d’appliquer toujours la même méthode, celle de la concertation de l’ensemble des parties prenantes, avant de proposer des mesures concrètes, qui seront évaluées au travers d’une étude d’impact.

Mes chers collègues, légiférer par ordonnances – j’entends bien ici un certain nombre de récriminations, et je les comprends parfois – n’est pas un déni de démocratie. Au contraire, nous débattons ce soir des termes de ces ordonnances, et nous devrons les ratifier le moment venu. Compte tenu de l’intérêt que nous portons aux coopératives, je pense que nous devrions suivre la démarche du Gouvernement.

M. le président. La parole est à Mme Marie-Noëlle Lienemann, sur l’article.

Mme Marie-Noëlle Lienemann. Notre groupe est tout à fait hostile à l’idée de voter une loi d’habilitation à légiférer par ordonnances pour remettre en chantier l’organisation des coopératives agricoles. Pourquoi ?

Premièrement, on ne donne de leçon à personne. Dès lors que l’on a adopté la motion, tous les amendements visant à fixer le cadre de l’habilitation ont été de fait déclarés irrecevables. Il ne s’agit en aucune façon de tuer le débat, mais nous disons que nous ne voulons pas de ces ordonnances.

Mme Cécile Cukierman. Et à l’article 10 ?…

Mme Marie-Noëlle Lienemann. Si l’on doit modifier le système des coopératives, c’est par la loi qu’on doit le faire. (MM. Martial Bourquin, Jean-Marc Boyer et Laurent Duplomb applaudissent.)

Deuxièmement, deux lois ont déjà modifié le statut des coopératives pour traiter les sujets qui sont aujourd’hui posés sur la table : d’une part, la question du départ des coopérateurs, qui vaut dans le domaine de l’agriculture, mais aussi dans d’autres secteurs, et, d’autre part, la question de l’information des associés, non seulement pour ce qui concerne les coopératives, mais aussi, dans le cadre de la loi relative à l’économie sociale et solidaire, dans les filiales. Le problème ne se pose pas que pour l’agriculture, le sujet des banques coopératives, par exemple, est compliqué à traiter. Deux lois ont donc fixé le cadre après de nombreux débats.

Par ailleurs, je vous rappelle, que la révision coopérative est opérée partout : elle doit justement permettre de vérifier que l’information des associés est conforme à la loi.

Les derniers textes fixant le statut des coopératives agricoles ont été élaborés à la fin de l’année 2017. Or, avant même que l’on ait mis en œuvre les nouveaux statuts, qui apportent des réponses aux questions posées et ont recueilli un large accord, on nous explique qu’il faudrait les modifier complètement par ordonnances, sans qu’un travail parlementaire ait été réalisé auparavant !

Mme Marie-Noëlle Lienemann. Le Gouvernement se trompe de méthode. Laissons la mise en œuvre de ce statut se poursuivre, faisons un bilan d’impact le moment venu, et, si des modifications doivent être apportées, c’est par la voie parlementaire, au regard de la complexité du sujet ainsi que de son impact sur l’agriculture et l’économie sociale et solidaire qu’elles devront se faire, et non pas au travers d’une loi d’habilitation !

C’est pourquoi notre groupe refuse cette demande d’habilitation et les modifications du statut des coopérants qui nous sont aujourd’hui proposées. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain et sur des travées du groupe Les Républicains.)

M. le président. Je vous rappelle, mes chers collègues, que seul est en discussion l’amendement n° 721 du Gouvernement, qui est ainsi libellé :

Alinéa 2

Rétablir le 1° dans la rédaction suivante :

1° D’adapter les dispositions de la section 1 du chapitre Ier et de la section 1 du chapitre IV du titre II du livre V relatives aux relations entre les sociétés coopératives agricoles et leurs associés coopérateurs, notamment pour simplifier les conditions de départ des associés coopérateurs, améliorer leur information, renforcer, d’une part, le rôle de l’ensemble des associés coopérateurs dans la détermination des éléments qui constituent la rémunération de l’associé-coopérateur et, d’autre part, la transparence dans la redistribution des gains des coopératives à leurs associés coopérateurs et prévoir des modalités de contrôle et des sanctions permettant d’assurer l’application effective de ces dispositions, en veillant à ne pas remettre en cause l’équilibre d’exploitation desdites sociétés ;

La parole est à M. le ministre.

M. Stéphane Travert, ministre. Permettez-moi auparavant de préciser ce que nous voulons faire dans le cadre de cet article.

Les États généraux de l’alimentation ont mis en avant la nécessité pour le producteur de disposer d’une information plus claire, la plus claire possible, sur les prix de cession des produits agricoles. Il est donc légitime à un moment donné que l’associé-coopérateur dispose d’éléments transparents sur la formation des prix, comme le producteur qui livre dans un cadre non coopératif.

L’ordonnance vise à envisager des dispositions pour améliorer l’accès à l’information des associés-coopérateurs sur les relations économiques qu’ils ont nouées avec la coopérative dont ils sont membres. Le système coopératif repose sur la détermination du prix en fin de campagne, en tenant compte de la restriction pour une coopérative à aller s’approvisionner au-delà de ses seuls membres. Il s’agit ici d’examiner la manière dont nous pouvons introduire une plus grande transparence dans les documents qui encadrent la vie d’une coopérative, le règlement intérieur, le rapport remis aux associés, le document unique récapitulatif. Il n’est bien évidemment en rien question – je l’ai démontré lors des débats à l’Assemblée nationale – de remettre en cause le système coopératif.

Nous sommes tous très attachés aux valeurs du système coopératif,…

Mme Marie-Noëlle Lienemann. C’est comme les HLM, vous y êtes aussi très attachés !

M. Stéphane Travert, ministre. … à ce qu’elles apportent en termes d’aménagement du territoire. Dans mon territoire et dans la circonscription dans laquelle je suis élu, il y a trois coopératives importantes. Je puis vous dire que, en termes d’emplois, d’aménagement du territoire, de retours au producteur, elles pèsent lourd dans le secteur agricole.

Je le répète, il s’agit ici de mettre en avant une plus grande transparence, qui est aussi demandée par des coopérateurs. Pour assister à des assemblées générales de différentes coopératives, je puis vous dire que les réunions y sont fort différentes : certaines coopératives fonctionnent comme elles doivent fonctionner, c’est-à-dire selon le principe « un homme, une voix », avec une véritable décentralisation des décisions et une véritable décision collective, alors que d’autres se comportent plutôt, nous le savons, comme des entreprises privées.

Mme Marie-Noëlle Lienemann. Il y a la révision coopérative !

M. Stéphane Travert, ministre. Nous devons donc ramener les choses là où elles doivent être,…

Mme Marie-Noëlle Lienemann. Saisissez le Haut Conseil de la coopération agricole !

M. Stéphane Travert, ministre. … c’est-à-dire à une plus grande transparence.

Je veux également souligner que les parlementaires participeront au travail. J’entends bien le débat sur le fait d’être pour ou contre le recours aux ordonnances. Mais nous avons précisément choisi cette méthode pour nous donner le temps de la concertation avec le mouvement coopératif…

M. Martial Bourquin. Votre méthode n’est pas la bonne !

M. Stéphane Travert, ministre. … et avec Coop de France. Nous allons prendre le temps de décider ensemble…

M. Stéphane Travert, ministre. … – les États généraux de l’alimentation ne nous ont pas permis de le faire suffisamment – la manière dont nous allons faire évoluer le statut du Haut Conseil de la coopération agricole, par exemple,…

M. Martial Bourquin. Il faut le faire !

M. Stéphane Travert, ministre. … et celle dont nous évaluons un certain nombre de données issues de la coopération.

Lors du débat à l’Assemblée nationale, j’ai proposé aux députés – cette proposition vaut aussi pour les sénateurs – de mettre en place un groupe de travail avec les parlementaires pour travailler ensemble au contenu des ordonnances. Aussi, pour celles et ceux qui le souhaitent, nous aurons l’occasion de nous revoir pour y réfléchir ensemble.

Cela ne signifie pas non plus qu’il ne faille rien faire évoluer. Tel est justement l’objet de cette ordonnance. Nous devons prendre le temps de la concertation avec l’ensemble des coopératives et Coop de France.

J’en viens maintenant à l’amendement n° 721.

Cet amendement vise à rétablir les dispositions du 1° dans le champ de l’ordonnance, c’est-à-dire le départ des associés, la transparence dans la détermination du prix et la répartition des résultats, et le tout, bien évidemment, sans porter atteinte au statut de la coopération auquel, je le rappelle, nous sommes très attachés. (MM. François Patriat, Didier Guillaume et Franck Menonville applaudissent.)

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Michel Raison, rapporteur. Monsieur le ministre, je ne relancerai pas le débat en répétant tout ce que j’ai dit précédemment. À cet égard, je remercie Marie-Noëlle Lienemann de nous avoir de nouveau donné quelques informations ; elle ne nous a pas donné de leçon : chacun ici donne son avis, sans être un professeur. Je déplore que François Patriat n’ait pu être présent lorsque nous avons dit un certain nombre de choses, car nos débats étaient très approfondis, mais il sait bien ce qu’est une coopérative.

Monsieur le ministre, vous avez parlé du Haut Conseil de la coopération agricole, mais la commission l’a laissé dans le champ de l’habilitation.

M. Stéphane Travert, ministre. Il n’y a pas que cela !

M. Michel Raison, rapporteur. Pour pouvoir vous donner une habilitation à légiférer par ordonnance, nous aurions aimé que vous nous disiez un petit peu ce qu’elle contient.

M. Bruno Retailleau. Oui, nous aurions aimé connaître le contenu !

M. Stéphane Travert, ministre. Travaillons ensemble !

M. Michel Raison, rapporteur. Mais il est trop tard ! On ne peut tout de même pas vous signer un chèque en blanc ! On ne connaît même pas la première phrase de l’ordonnance ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et du groupe Union Centriste, ainsi que sur des travées du groupe socialiste et républicain.) Ce n’est pas possible sur un sujet d’une telle importance.

Vous venez vous-même d’expliquer que la réforme ne servait à rien. Lorsque le président de la coopérative et son conseil d’administration appliquent les statuts, avez-vous dit, il y a transparence. Ce n’est donc pas notre faute, à nous législateurs, si, de temps en temps, certaines coopératives fonctionnent mal.

Mme Marie-Noëlle Lienemann. Absolument ! Il faut les déférer devant le Haut Conseil !

M. Michel Raison, rapporteur. Il y a certainement des coopératives qui ne fonctionnent pas comme elles le devraient, et vous en avez fait la démonstration. Mais, en matière de transparence, tout est prévu dans les statuts de la coopération.

Mme Marie-Noëlle Lienemann. Même des sanctions !

M. Michel Raison, rapporteur. C’est ainsi. Si certaines fonctionnent mal, nous n’y pouvons rien.

Dans la mesure où vous voulez responsabiliser plus les producteurs, responsabilisez aussi l’associé-coopérateur ! Il faut qu’il lève la main lors de l’assemblée générale lorsqu’il n’a pas compris quelque chose.

Concernant la manière de répartir le résultat ou de donner des compléments de prix ou des ristournes, tout est en général assez transparent : les modalités sont expliquées lors de toutes les assemblées générales.

Aussi, je ne vois pas en quoi il y aurait lieu de réformer le système de transparence dans une coopérative. Je ne reviendrai pas sur le départ des associés-coopérateurs : on a assez longuement expliqué de quelle façon on peut partir d’une coopérative et pourquoi il est nécessaire d’y rester un petit peu lorsque l’on a signé un engagement, la contrepartie étant – une contrepartie quand même forte – que la coopérative ne peut pas licencier le coopérateur. La moindre des choses, c’est donc que ce dernier assume son engagement pendant le temps prévu, aux termes du contrat qu’il a signé.

Telles sont les quelques précisions que je voulais ajouter, sans être trop long, car beaucoup a été dit précédemment.

En conséquence, l’avis est défavorable.

Mme Sophie Primas, présidente de la commission des affaires économiques. Très bien !

M. le président. La parole est à M. Laurent Duplomb, pour explication de vote.

M. Laurent Duplomb. Je suis tout à fait d’accord avec l’avis défavorable de la commission. Je n’arrive pas à comprendre que l’on puisse aujourd’hui mettre en accusation la transparence des coopératives.

Premièrement, nul n’est obligé d’adhérer à une coopérative. Deuxièmement, celle-ci est tenue de diffuser un maximum d’informations, qu’il s’agisse de réunions avec les producteurs, de l’assemblée générale, de l’établissement des comptes. La coopérative communique les résultats de l’exercice, propose la répartition aux coopérateurs, qui l’acceptent en assemblée générale. Mais enfin, monsieur le ministre, comment peut-on revenir sur tous ces points, sur cette règle de transparence, vous qui dites, comme l’a relevé M. Patriat, connaître l’agriculture et les coopératives !

À un moment donné, le sens de la coopérative, comme l’a très bien souligné Mme Lienemann, c’est le mutualisme et la solidarité, mais c’est aussi le sens de l’intérêt général. Or il me semble que ce que vous mettez aujourd’hui en avant, ce sont plus les intérêts personnels de certains que l’intérêt général !

M. Laurent Duplomb. La problématique, c’est que l’intérêt général ne se définit pas comme la somme des intérêts particuliers. Ce n’est pas parce que trois ou quatre agriculteurs refusent le système de la coopération, parce qu’ils n’ont jamais été coopérateurs – ils se sont peut-être retrouvés dans une coopérative malgré eux – et veulent aller ailleurs, qu’il faut tout déstabiliser, tout casser, pour faire plaisir à ces cas particuliers. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et du groupe Union Centriste.)

M. le président. La parole est à M. Martial Bourquin, pour explication de vote.

M. Martial Bourquin. Nous revenons ici sur la question des coopératives, qui a été largement abordée tout à l’heure. Monsieur le ministre, je pense que vous avez un problème avec nos coopératives, un problème qui devient grave. Vos interventions précédentes nous ont inquiétés. La volonté de légiférer par ordonnances sur cette question nous inquiète doublement.

Comment cela vient d’être souligné, on ne va pas vous donner un chèque en blanc sur une question aussi grave et aussi importante que celle-là.

Dans nos régions, des coopératives créent de la solidarité et de la valeur ajoutée.

M. Stéphane Travert, ministre. C’est ce que j’ai dit !

M. Martial Bourquin. Elles permettent au milieu agricole de continuer à se développer, y compris au travers de politiques très innovantes. Pourquoi voulez-vous y toucher ? Pourquoi parlez-vous de transparence ? Comme cela vient d’être dit, il n’y a pas de problème de dépôt des comptes : ceux-ci sont communiqués tous les ans en date et en heure.

Par ailleurs, les coopératives, c’est le mouvement coopératif, c’est un mouvement de solidarité exceptionnel. Vous donner la possibilité de légiférer par ordonnance sur une question comme celle-là, c’est vous donner un chèque en blanc extraordinaire ! Qu’allez-vous en faire ? Qu’est-ce que c’est que ces insinuations régulières dans vos interventions ? Les coopératives sont-elles le problème de l’agriculture ? Elles font la fierté de l’agriculture !

M. Jean-Marc Boyer. Absolument !

M. Martial Bourquin. Sur de telles questions, je crains le pire, parce qu’il y a des précédents : le Président de la République avait dit qu’il ne toucherait jamais au pouvoir d’achat des retraités, et il a augmenté la CSG. Peut-être viendrez-vous un jour nous dire que vous vouliez préserver les coopératives… Que préparez-vous là ?

Franchement, sur une question comme celle-là, dans l’unité, le Sénat affirme…

M. le président. Veuillez conclure, mon cher collègue !

M. Martial Bourquin. … que le Parlement est là pour légiférer. Si vous voulez aborder le problème des coopératives, nous sommes là. Il ne saurait y avoir d’ordonnances pour traiter cette question. (Applaudissements sur des travées du groupe socialiste et républicain et du groupe Les Républicains.)

M. le président. La parole est à M. Olivier Jacquin, pour explication de vote.

M. Olivier Jacquin. Je voudrais éclairer le débat sous un jour un petit peu différent.

Le premier à utiliser la transparence des coopératives, c’est le négoce, qui s’aligne sur les prix de la coopération agricole. Le négoce privé a la vie facile, puisqu’il choisit ses clients – plutôt des bons clients, faciles à livrer et à gérer –, alors que la coopérative accepte tout le monde, dans un grand principe démocratique – on devient adhérent en levant le doigt –, et tout est mutualisé.

La première vertu des coopératives dans un système économique mixte, où l’on a le choix entre le privé ou la coopération, est de permettre une régularisation du marché. Mais la coopérative présente un côté assez exaspérant : certaines coopératives sont très importantes, et, un peu à l’image de la démocratie, on n’est jamais satisfait, car cela ne va pas assez loin. Toutefois, elles assainissent complètement la situation. La relation existant entre les coopératives et le négoce s’apparente un peu aux relations entre les gendarmes et les voleurs. Je tenais à vous apporter cet éclairage particulier.

Il n’est pas possible de procéder par ordonnances sur ce sujet. On ne peut pas vous faire confiance, car on ne connaît pas véritablement votre intention, surtout après le débat que nous avons eu sur la question de la transparence du dépôt des comptes, que l’on n’a pas voulu nous accorder. Le Haut Conseil de la coopération agricole existe, saisissez-le si des coopératives font mal leur travail !

M. le président. La parole est à M. Daniel Gremillet, pour explication de vote.

M. Daniel Gremillet. Monsieur le ministre, je suis quelque peu surpris : j’avais imaginé et espéré – nous avons eu précédemment un long débat très intéressant sur la question de la coopération, anticipant presque sur l’article 8 – que vous alliez modifier votre propos à la suite des échanges très respectueux que nous avons eus dans cet hémicycle.

Je suis déçu parce que, non seulement, vous n’avez pas intégré la richesse des éléments de notre débat, mais qu’en plus vous y avez ajouté un élément supplémentaire, en évoquant ce que vous avez envie de faire, mais que vous ne voulez pas nous dire. Le texte, avez-vous dit textuellement tout à l’heure, permettrait aux coopérateurs de bénéficier aussi d’une montée en gamme.

Monsieur le ministre, vous dites avoir participé à de nombreuses assemblées générales, j’ai eu l’occasion de le faire aussi. Or c’est l’assemblée générale d’une coopérative qui clôture les comptes et donne le prix définitif payé aux coopérateurs. Ce n’est pas un acompte au mois le mois ; c’est l’assemblée générale qui, elle seule, est capable d’établir le compte final et le prix final payé aux producteurs – il est important de le préciser. Dans ce cadre, on ne se raconte pas d’histoires : c’est l’addition des plus et des moins, le constat des produits qui ont été bien vendus en fonction de la réalité du marché, et la reddition des charges pesant sur l’économie de nos entreprises agroalimentaires. Il s’agit effectivement d’un modèle assez extraordinaire.

Comme plusieurs de mes collègues l’ont évoqué, les coopératives se fondent sur le principe de la liberté. Des femmes et des hommes décident d’adhérer ou non à une coopérative. Ils décident en connaissance de cause, en fonction des statuts ; il y a des règles. Le débat a eu lieu précédemment : je ne voudrais pas que vous laissiez penser que l’on peut décider, lors d’une assemblée générale, de réaliser des investissements importants, puis estimer, à titre personnel, que la coopérative n’est plus le modèle auquel on adhère et laisser aux autres la responsabilité des investissements engagés collectivement. Ce n’est pas possible, monsieur le ministre, il faut être respectueux d’un engagement : c’est tout le sens de l’organisation des producteurs, de leur responsabilité. (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains. – Mme Dominique Vérien applaudit également.)

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 721.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’article 8.

(Larticle 8 est adopté.)

M. le président. Monsieur le ministre, mes chers collègues, il est bientôt minuit. Je vous propose de prolonger nos travaux jusqu’à une heure trente, car la séance reprend demain à dix heures trente. (Exclamations.) Je vous fais observer qu’il reste 560 amendements à examiner.

Mme Cécile Cukierman. De toute façon, on ne finira pas ce soir !

M. le président. La parole est à Mme la présidente de la commission.

Mme Sophie Primas, présidente de la commission des affaires économiques. En effet, il nous reste 560 amendements à examiner. Comme nous examinons en ce moment quinze amendements par heure, nous en avons encore pour un petit moment…

J’attire votre attention, mes chers collègues, sur le fait que nous ne reprendrons demain nos débats sur ce texte qu’en fin de matinée ou au début de l’après-midi. Je le répète, nous ne siégerons pas samedi. Aussi nous faut-il faire preuve d’un peu de patience ce soir et accepter la proposition de M. le président de siéger jusqu’à une heure trente.

M. le président. Il n’y a pas d’autre observation ?...

Il en est ainsi décidé.

Article 8
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Article 8 bis AA (nouveau)

Article additionnel après l’article 8

M. le président. L’amendement n° 581 rectifié, présenté par MM. Tissot, Cabanel et Montaugé, Mmes Bonnefoy et Artigalas, MM. Bérit-Débat et Joël Bigot, Mmes Cartron et M. Filleul, M. Jacquin, Mme Préville, M. Roux, Mmes Taillé-Polian et Tocqueville, MM. Kanner et Fichet, Mme Blondin et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

Après l’article 8

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l’article L. 522-2-1 du code rural et de la pêche maritime, il est inséré un article L. 522-2-… ainsi rédigé :

« Art. L. 522-2- – Lorsque sont créées des filiales de droit privé ou lorsque la prise de participations dans une société extérieure est décidée, le principe de transparence vis-à-vis des associés coopérateurs est assuré.

« Un décret définit les modalités d’application du présent article. »

La parole est à M. Jean-Claude Tissot.

M. Jean-Claude Tissot. Cet amendement vise à revenir à l’esprit coopératif d’origine, en assurant le respect du principe de transparence envers les associés coopérateurs.

Si le conseil d’administration ou les instances dirigeantes de la coopérative souhaitent diversifier le portefeuille d’activités de la coopérative, en créant une ou plusieurs filiales, ou en prenant des participations dans une société extérieure, ils doivent en référer à l’ensemble des associés. Ces choix stratégiques doivent a minima être connus et leurs conséquences comprises par l’ensemble des associés coopérateurs. La transparence des coopératives est un enjeu majeur de démocratie interne pour ces structures.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Michel Raison, rapporteur. Pour la commission, c’est simple : l’amendement est satisfait.

Comme on l’a expliqué au ministre tout à l’heure quand on a parlé de transparence, le conseil d’administration élabore un rapport annuel, dans lequel toutes les mesures prises, y compris la création de filiales, doivent figurer. Ce rapport doit être validé en assemblée générale.

La commission vous demande donc, monsieur Tissot, de bien vouloir retirer votre amendement ; faute de quoi, elle y sera défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Stéphane Travert, ministre. Défavorable.

M. le président. Monsieur Tissot, l’amendement n° 581 rectifié est-il maintenu ?

M. Jean-Claude Tissot. Oui, je le maintiens, monsieur le président.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 581 rectifié.

(Lamendement nest pas adopté.)

Article additionnel après l'article 8 - Amendement n° 581 rectifié
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Article 8 bis A (supprimé)

Article 8 bis AA (nouveau)

Le Gouvernement remet un rapport au Parlement avant le 1er janvier 2019, sur l’opportunité de mettre en place une prestation pour services environnementaux afin de valoriser les externalités positives de notre agriculture.

Ce rapport définit les modèles de rémunération qui pourraient valoriser les services écosystémiques rendus par les agriculteurs et ses conditions de mise en œuvre. Il identifie notamment les conditions nécessaires à la mise en place d’une expérimentation de cette prestation dans certains territoires, à commencer par ceux qui viennent d’être exclus du zonage des zones défavorisées simples.