Mle président. La parole est à M. le secrétaire d’État auprès du ministre de l’action et des comptes publics. (Exclamations sur des travées du groupe Les Républicains. Un poids lourd ! sur les travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.)

MOlivier Dussopt, secrétaire dÉtat auprès du ministre de laction et des comptes publics. Madame la sénatrice Cukierman, comme l’a dit M. le président du Sénat, vous avez réussi à rejoindre Paris malgré un épisode neigeux, qui nous donne, aux uns et aux autres, l’occasion de saluer le travail des fonctionnaires.

Je saisis cette opportunité pour rappeler notre attachement, à la fois, au service public et aux fonctionnaires. (Exclamations sur plusieurs travées.) C’est justement parce que nous y sommes attachés que nous menons une réforme de transformation.

Cette réforme a pour objectif de simplifier le dialogue social, tout en garantissant la totalité des droits des agents. Nous sommes en effet convaincus qu’en simplifiant ce dialogue, nous pourrons donner plus d’opportunités de mobilité, plus de réactivité à l’administration, et rendre celle-ci plus performante pour faire face aux défis qui nous attendent et aux besoins de la population.

Nous ferons en sorte que soit mieux reconnu l’engagement de chacun des agents publics de ce pays en permettant une individualisation, un intéressement, individuel ou collectif. Nous pourrons ainsi mieux accompagner les agents publics dans la tâche qui est la leur au quotidien.

Nous donnerons aux employeurs publics plus de marge de manœuvre et plus de liberté pour choisir celles et ceux qu’ils doivent recruter pour mener à bien leur mission. Il s’agit ainsi de permettre l’élargissement des conditions de recrutement des contractuels, sans remettre en cause le principe général de l’occupation des emplois permanents par des agents titulaires.

Nous ferons en sorte, aussi, de mieux accompagner les transitions professionnelles et les mobilités, et de garantir une plus grande transparence des emplois publics.

Parce que les services et les besoins évoluent, parce que le numérique s’impose à la fonction publique comme à l’ensemble du pays, notre objectif est de former et d’accompagner les agents publics afin qu’ils aient un avenir et des perspectives d’emploi dans la fonction publique, et afin que ceux d’entre eux qui le souhaitent puissent rejoindre, sur la base du volontariat, le secteur privé.

Nous accompagnerons ces transformations d’une réorganisation du réseau territorial. Le Premier ministre nous a donné une consigne : privilégier l’échelon départemental comme moyen d’action. Vous le savez, à la suite d’interventions de nombreux élus de la Loire, nous avons notamment pris la décision de maintenir les trésoreries de Bourg-Argental et de Renaison. Nous savons en effet que la proximité compte, et c’est dans cet esprit que nous voulons travailler. (Applaudissements sur les travées du groupe La République En Marche. – M. Jean-Marc Gabouty applaudit également.)

Mle président. La parole est à Mme Cécile Cukierman, pour la réplique.

Mme Cécile Cukierman. Vous l’avez évoqué, monsieur le secrétaire d’État, cette nuit, nous avons manqué de fonctionnaires dans mon département. Cette nuit, des femmes et des hommes qui sont restés bloqués dans leur voiture n’ont vu personne venir à leur secours ou se soucier de la situation dans laquelle ils étaient.

Cette nuit, nous avons manqué de fonctionnaires d’État et de fonctionnaires départementaux. Voilà quelle est la réalité !

Avec votre réforme, vous voulez faire une fonction publique sans fonctionnaires, de même que vous voulez un Parlement sans parlementaires ! (Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste et sur des travées du groupe socialiste et républicain. – Des sénateurs du groupe Les Républicains frappent sur leur pupitre.)

pouvoir d’achat

Mle président. La parole est à M. Martial Bourquin, pour le groupe socialiste et républicain.

M. Martial Bourquin. Monsieur le ministre de l’action et des comptes publics, les augmentations des taxes sur le gazole, le fioul, l’essence, le gaz, ajoutées à la hausse du pétrole brut, entament dramatiquement le pouvoir d’achat des familles.

M. Martial Bourquin. Ces taxations sont violentes, aveugles, et représentent un poison pour leur pouvoir d’achat.

M. Julien Bargeton. C’est le diesel, le poison !

M. Martial Bourquin. Les taxes sur l’énergie rapportent 23 milliards d’euros au budget de l’État, mais, si l’on y regarde de plus près, elles sont bien loin de servir à mettre en place une fiscalité écologique ; il y a même des désengagements dans ce domaine. Elles servent plutôt à boucher les trous des cadeaux fiscaux donnés, dans la première année du quinquennat, aux plus riches. (Applaudissements sur des travées du groupe socialiste et républicain et du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.)

La fiscalité que vous déployez est injuste, elle est punitive. Ces taxes frappent indistinctement les plus fragiles. Or, souvent, ces personnes n’ont pas d’autre choix pour se déplacer que de se servir de leur voiture.

Monsieur le ministre, je vous poserai deux questions. Tout d’abord, renoncerez-vous aux futures augmentations de taxes qui sont prévues en janvier ? (M. Jackie Pierre applaudit.) Ensuite, avez-vous mis à l’étude une TICPE flottante, comme cela s’est fait il y a quelques années ? (Applaudissements sur des travées du groupe socialiste et républicain et du groupe communiste républicain citoyen et écologiste. – MM. Michel Raison et Jackie Pierre applaudissent également.)

Mle président. La parole est à M. le ministre d’État, ministre de la transition écologique et solidaire.

M. François de Rugy, ministre dÉtat, ministre de la transition écologique et solidaire. Je croyais, monsieur le sénateur Bourquin, que lorsque l’on avait votre sensibilité politique, la mienne ou celle de nombreux parlementaires siégeant au Sénat et à l’Assemblée nationale (Protestations sur les travées du groupe socialiste et républicain et du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.) – sensibilités partagées par les Français qui, à travers les élus locaux de France, vous ont élu –, on voulait agir contre le dérèglement climatique,…

MFrançois Grosdidier. Mais pas comme cela !

M. François de Rugy, ministre dÉtat. … avec constance et détermination, y compris face aux difficultés. Car cette action est difficile à mener !

M. François Grosdidier. Vous ne faites pas payer le transit international !

M. François de Rugy, ministre dÉtat. J’ai reçu vendredi dernier au ministère de la transition écologique et solidaire M. Jean Jouzel, un grand climatologue, qui était venu me présenter son livre intitulé Planète, climat, réveillez-vous ! Il m’a expliqué, comme il le fera bien volontiers pour d’autres, comment se dégraderaient concrètement nos conditions de vie si nous ne faisions rien, et quelle serait la destruction de valeur pour l’agriculture, dont nous venons de parler à propos de la sécheresse et des fortes précipitations (Protestations sur des travées du groupe socialiste et républicain et du groupe Les Républicains.), et pour nos infrastructures si des événements climatiques exceptionnels devaient se produire.

Quand on a dit qu’il fallait agir pour le climat, tout le monde était d’accord avec le principe d’une fiscalité écologique.

M. François Grosdidier. La taxe poids lourds, faites-la !

M. François de Rugy, ministre dÉtat. Et lorsque nous la mettons en œuvre, monsieur le sénateur, je reprends vos mots parce que vous n’avez pas parlé à la légère, vous dites : c’est violent et c’est du poison. (Oui ! sur plusieurs travées du groupe Les Républicains.) Vous rendez-vous compte des mots que vous utilisez ?

Ne trouvez-vous pas que le dérèglement climatique, lui, est violent (Mme Cécile Cukierman proteste.) et que c’est un poison pour les Françaises et les Français et pour toutes celles et tous ceux qui en subissent directement les conséquences ? (Applaudissements sur les travées du groupe La République En Marche. – Vives protestations sur les travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.)

Mle président. La parole est à M. Martial Bourquin, pour la réplique.

M. Martial Bourquin. Monsieur le ministre d’État, ce n’est pas parce que l’on peint un matraquage fiscal en vert qu’il devient écologiste ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain et sur des travées du groupe Les Républicains. – Mme Sophie Joissains applaudit également.) Car c’est un matraquage fiscal !

Nous n’avons pas de leçons à recevoir concernant l’écologie ! Quand on regarde ce qui revient à la transition écologique sur ces 23 milliards d’euros, on se rend compte qu’il n’y a pas grand-chose…

Un sénateur du groupe Les Républicains. Une misère !

M. Martial Bourquin. … et qu’il y a même des reculs considérables.

Que représentent 2 000 euros pour quelqu’un qui n’est pas imposable, qui doit racheter une voiture et qui devra pour cela dépenser 10 000 ou 20 000 euros ?

M. le président. Il faut conclure.

M. Martial Bourquin. C’est du matraquage fiscal, monsieur le ministre d’État, ce n’est pas une fiscalité écologique ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain, du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, du groupe Les Républicains et du groupe Union Centriste.)

lutte contre l’antisémitisme

Mle président. La parole est à M. Jean-Pierre Decool, pour le groupe Les Indépendants – République et Territoires.

M. Jean-Pierre Decool. Monsieur le président, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, ma question s’adresse à M. le ministre de l’intérieur.

Samedi 27 octobre, à Pittsburgh, un terroriste est entré dans la synagogue Tree of Life et a vidé les chargeurs de sa kalachnikov en criant : « Tous les juifs doivent mourir », perpétrant le pire attentat antisémite de l’histoire américaine.

Deux jours plus tard, à Paris, une élève de médecine portait plainte contre un certain nombre de ses camarades qui, au nom d’un humour répugnant, voulaient baptiser leur week-end d’intégration « Auschwitz 2019 » ou encore « Rafle 2019 ». Ils illustraient leur proposition d’une photo d’un étudiant juif brûlant dans les flammes.

Rappelons-nous aussi les meurtres ignobles de Mireille Knoll et Sarah Halimi, l’attaque sanglante de l’Hyper Cacher de la porte de Vincennes, l’insoutenable tuerie de l’école Ozar Hatorah à Toulouse, l’assassinat atroce d’Ilan Halimi en banlieue parisienne. Tous furent assassinés parce qu’ils portaient dans leur cœur l’étoile de David.

Les mots nous manquent pour répondre à la haine meurtrière qui se déverse sur le sol de la République et fait trembler les remparts de la démocratie. Il est pourtant de notre devoir de prendre la parole et d’alerter la société tout entière contre la recrudescence d’un antisémitisme sanguinaire, dont la Shoah, ignominie de l’histoire de l’Humanité, reste le plus terrible témoignage.

Depuis plus de dix ans, une nouvelle vague d’antisémitisme sévit en France, et la France, trop souvent, reste impuissante. Les marches blanches ne suffisent plus, les manifestes restent sans portée, le devoir de mémoire s’essouffle…

Monsieur le ministre, quelles mesures le Gouvernement entend-il prendre pour combattre l’antisémitisme rampant qui sème la honte, le deuil et l’horreur au pays des droits de l’homme ? (Applaudissements sur lensemble des travées.)

Mle président. La parole est à M. le ministre de l’intérieur.

M. Christophe Castaner, ministre de lintérieur. Monsieur le sénateur, comme vous venez de le souligner, l’antisémitisme n’a pas de frontières, et l’antisémitisme tue. L’attaque abjecte – je ne sais même pas comment nous pouvons la qualifier – à Pittsburgh en est la preuve tragique.

À la demande du Premier ministre, je me rendrai ce soir à la cérémonie d’hommage aux victimes qui se déroulera à la grande synagogue de la Victoire, et Laurent Nunez ira, quant à lui, à la synagogue du Mouvement juif libéral de France, où nous représenterons le Gouvernement.

Il nous faut en effet, d’abord, apporter le soutien du Gouvernement et de la représentation nationale aux proches des victimes, à ceux qui sont meurtris par ces attaques insupportables.

Personne ici, personne, n’oublie les attentats, les violences et les insultes dont le seul motif était l’antisémitisme.

Personne ici n’oublie les attaques que vous avez évoquées.

Personne ici n’oublie le gang des barbares, si bien nommé, qui a assassiné et torturé Ilan Halimi.

Pour reprendre les propos du Président de la République, nous sentons ces vents mauvais qui continuent à souffler sur la France.

Dès samedi soir, j’ai demandé à l’ensemble des préfets de mobiliser des moyens forts pour protéger plus encore les synagogues, les lieux de culte, mais aussi pour sécuriser les différentes manifestations qui étaient organisées le week-end dernier.

Ce qui s’est passé à Paris-XIII est totalement inacceptable. Ma collègue Frédérique Vidal a reçu dès hier le président de cette université, une plainte a été déposée et l’instruction a démarré.

Nous savons tous que, trop souvent, les victimes ne veulent pas forcément porter plainte, alors même que l’objectif du combat contre l’antisémitisme passe par une condamnation forte, rapide, puissante.

Nous avons donc décidé, et c’est une première réponse, de mettre en place le dépôt des préplaintes en ligne pour les infractions discriminantes de ce type. Dans le même esprit, nous allons doubler les effectifs de la plateforme d’harmonisation, d’analyse, de recoupement et d’orientation des signalements, dite PHAROS, pour la cellule de lutte contre les discours de haine et de discrimination.

Vous pouvez, monsieur le sénateur, compter sur l’engagement total du Gouvernement, des services de l’État, des services de police et des services de la gendarmerie pour lutter contre l’antisémitisme.

Si, pour citer Hannah Arendt, « De tous les maux qui ont ravagé le XXsiècle, l’antisémitisme est le seul qui, au fond, demeure incurable », notre combat permanent contre ce mal permettra de le faire reculer. (Applaudissements sur les travées du groupe La République En Marche et sur des travées du groupe socialiste et républicain.)

politique étrangère du gouvernement

Mle président. La parole est à Mme Sophie Primas, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.)

Mme Sophie Primas. Monsieur le président, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, ma question s’adresse à M. le ministre de l’Europe et des affaires étrangères.

Monsieur le ministre, vous le savez mieux que quiconque, dans une Europe et un monde pleins de tensions, la diplomatie est l’art de jeter des ponts qui permettent le dialogue au-delà des différences. Voilà qui devrait conduire à bannir toute forme de propos inutilement blessants pour nos interlocuteurs dont la légitimité démocratique n’est pas contestable, même si le résultat ne nous plaît pas.

Malheureusement, quand j’écoute certaines déclarations du Président de la République, je doute de notre capacité à être ceux qui maintiennent le lien et qui unissent. C’est pourtant le rôle que la France a toujours assigné à sa diplomatie.

Est-il constructif de déclarer à propos de deux dirigeants européens : « Ils ont raison de me voir comme leur principal opposant » ? Est-ce le rôle du chef de l’État de parler de certains de ses collègues européens en ces termes : « Que font ces esprits fous » ? Un Président ne devrait pas dire ça !

Le combat contre le nationalisme est un vrai combat. C’est un combat exigeant. Il s’agit de mettre toutes nos forces dans la reconstruction d’une Europe exigeante sur les valeurs, qui doit à la fois panser les plaies d’un divorce douloureux, écouter les peuples et se consacrer aux grands projets.

Depuis quelques mois, nos relations avec nos voisins européens se sont dégradées.

Au-delà de l’Europe, les tensions demeurent avec la Russie, et après un départ en fanfare aux côtés de Donald Trump, la réalité aujourd’hui est bien différente.

Monsieur le ministre, vous êtes connu pour votre sens de la mesure et pour votre habileté. Le Breton que vous êtes sait qu’il faut contrôler ses émotions si l’on veut être respecté et efficace.

Ne croyez-vous pas que la voix de la France a beaucoup à perdre si elle se laisse trop souvent aller à l’anathème de la bouche même de son Président ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur des travées du groupe Union Centriste.)

Mle président. La parole est à M. le ministre de l’Europe et des affaires étrangères.

M. Jean-Yves Le Drian, ministre de lEurope et des affaires étrangères. Madame la présidente, alors que je me trouvais à l’Assemblée générale des Nations unies en septembre dernier, il y a eu deux grands discours.

Le premier était celui du Président Trump, qui a expliqué comment il fallait progressivement détruire l’ensemble des éléments du multilatéralisme et comment le rapport de force bilatérale devait régenter les relations internationales.

Le second était le discours du Président Macron, qui a dit devant l’Assemblée générale qu’il fallait refonder le multilatéralisme pour retrouver l’esprit de coopération, et privilégier la coopération par rapport à la confrontation. Ce discours a été très applaudi par l’ensemble des chefs d’État et de gouvernement présents.

Non, madame la présidente, la diplomatie française n’est pas isolée.

C’est sur l’initiative du Président Macron que s’est tenu le sommet sur la prolongation de l’Accord de Paris sur le climat. Et lors de ce One Planet Summit, il a été approuvé et applaudi par l’ensemble de nos partenaires.

C’est sur l’initiative du Président Macron, dont le discours a été approuvé par l’ensemble des chefs d’État et de gouvernement présents, et du Président Macky Sall que s’est tenu à Dakar le sommet du Partenariat mondial pour l’éducation.

Quant au discours de la Sorbonne, il sert de base aux propositions de refondation de l’Europe qui sont aujourd’hui en débat,…

MBruno Retailleau. Des discours, toujours des discours !

M. Jean-Yves Le Drian, ministre. … dans le respect des fondamentaux de la construction européenne.

C’est aussi sur l’initiative du Président de la République (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.) que se tiendra le forum de la Paix, lequel réunira dans quelques jours à Paris plus de 70 chefs d’État et de gouvernement pour reconstruire la paix ensemble.

C’est enfin sur l’initiative du Président de la République (Nouvelles exclamations sur les mêmes travées.) que se sont tenues les conférences et les initiatives pour lutter contre le blanchiment utilisé par le terrorisme.

Le Président de la République…

Mle président. Il va falloir conclure.

M. Jean-Yves Le Drian, ministre. … a également été sollicité par le Président Poutine et par le Président Erdogan samedi dernier, à Istanbul, pour mettre en œuvre la feuille de route destinée à faire la paix en Syrie.

M. Marc-Philippe Daubresse. Belle réponse, mais ce n’est pas la question !

M. Jean-Yves Le Drian, ministre. Non, madame la présidente, la France n’est pas isolée dans ses démarches.

M. le président. Il faut conclure.

M. Jean-Yves Le Drian, ministre. Elle est écoutée, elle est entendue, elle est respectée ! (Applaudissements sur les travées du groupe La République En Marche et sur des travées du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen. – Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)

Mle président. La parole est à Mme Sophie Primas, pour la réplique.

Mme Sophie Primas. Monsieur le ministre, les discours sont l’apanage du Président de la République.

Il est très fort pour faire des discours et pour recueillir l’approbation des auditoires auxquels il les délivre. Mais où sont les actes ? Que va devenir notre Europe ? Nous ne pouvons pas opposer le nationalisme et le fédéralisme.

Il faudra des actes pour reconstruire cette Europe, et beaucoup plus que des paroles. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur des travées du groupe Union Centriste.)

interprètes afghans non accueillis en France

Mle président. La parole est à M. Jacques Le Nay, pour le groupe Union Centriste. (Applaudissements sur les travées du groupe Union Centriste.)

MJacques Le Nay. Monsieur le président, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, ma question, à laquelle j’associe notre collègue Nathalie Goulet, à qui ce sujet tient à cœur, s’adresse à M. le ministre de l’Europe et des affaires étrangères.

Le 20 octobre dernier, Qader Daoudzai a été tué dans une attaque suicide à Kaboul. C’était un ancien interprète de l’armée, du temps de sa présence en Afghanistan.

La victime s’apprêtait à demander un visa pour la France, après un premier refus en 2015. En effet, lui et toute sa famille étaient menacés de mort par les talibans du fait de son travail pour la France. Il ne pouvait ni retourner dans son village ni sortir de Kaboul. Ses proches ont rapporté qu’il répétait souvent : « Si je ne vais pas en France, je vais mourir dans une attaque ou quelqu’un me tuera ».

En 2015, il avait fait état de ces menaces dans sa demande de visa pour la France, qui lui avait été refusée, comme ce fut aussi le cas pour 151 autres personnes faisant partie des personnels civils de recrutement local.

Avant sa mort, Qader préparait son dossier pour une nouvelle demande de visa dans le cadre de la procédure dite de « relocalisation » récemment ouverte. Aujourd’hui, ses enfants âgés de deux, trois et quatre ans, désormais orphelins, se trouvent dans un pays en guerre.

Plus de 600 auxiliaires de nos forces armées dans le monde risquent ainsi leur vie pour la France. En Afghanistan, ils étaient les intermédiaires indispensables des militaires français auprès des populations. Avant de quitter le pays, la France s’était engagée à les protéger. Elle avait promis de ne pas les oublier.

Or force est de constater que la France les a, à l’évidence, oubliés. Il a fallu un mort de plus pour que nous les fassions sortir de cet oubli.

Monsieur le ministre, je vous poserai donc deux questions très simples. Quand allez-vous enfin accueillir la famille de Qader Daoudzai ? Que comptez-vous faire pour protéger les auxiliaires locaux de nos armées ? (Applaudissements sur les travées du groupe Union Centriste et sur des travées du groupe Les Républicains, du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen, du groupe socialiste et républicain et du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.)

Mle président. La parole est à M. le ministre de l’Europe et des affaires étrangères.

M. Jean-Yves Le Drian, ministre de lEurope et des affaires étrangères. Je vous remercie, monsieur le sénateur Le Nay d’avoir posé cette question et rappelé que Qader Daoudzai a été tué dans un attentat suicide, et qu’il était un ancien interprète des forces françaises. Mais il fut aussi, et pendant beaucoup plus longtemps, un interprète des forces américaines.

Il n’a pas été ciblé personnellement, mais a succombé lors d’une attaque terroriste visant l’ensemble des opérations électorales qui se déroulaient à Kaboul.

Il faut dire les choses très clairement : en 2015, la France a mis en place un dispositif spécifique pour rendre hommage au travail des interprètes afghans qui avaient aidé à sa présence. Un certain nombre d’entre eux ont ainsi pu rejoindre la France après que leur demande a été légitimée.

La demande de Qader Daoudzai a été rejetée, à l’instar d’un certain nombre d’autres, pour des raisons de sûreté nationale. Je connais bien le sujet en raison de mes fonctions antérieures… Toutefois, comme vous l’avez souligné, le Président de la République a décidé récemment de rouvrir une procédure de relocalisation. À ce titre, la demande de Qader Daoudzai devait donc être réexaminée. Nous instruirons cette nouvelle procédure pour ses enfants et sa famille, afin de leur permettre de bénéficier, si toutes les conditions sont remplies, de l’aide que nous devons aux personnes ayant mis leur vie en jeu pour la défense d’intérêts communs et au service des forces françaises.

La situation nouvelle entraînée par le décès de Qader Daoudzai devrait nous permettre d’accélérer la procédure si tous les critères sont respectés. (Lamentable ! sur les travées du groupe socialiste et républicain.)

allocation logement accession en outre-mer

Mle président. La parole est à M. Michel Dennemont, pour le groupe La République En Marche.

M. Michel Dennemont. Ma question s’adressait à Mme la ministre des outre-mer.

Mme la ministre a annoncé, le 23 octobre dernier, lors de son audition sur les crédits de la mission outre-mer, à l’Assemblée nationale, des mesures concernant l’allocation logement accession. Ces mesures ont suscité de grandes espérances au sein de la population réunionnaise et auprès des élus réunionnais, tous unis autour de cet enjeu essentiel pour La Réunion.

Premièrement, la ministre a annoncé que tous les dossiers d’accession logement qui avaient été validés, mais qui n’ont pu être menés à terme du fait de la suppression des allocations logement en 2018, vont être soldés.

Deuxièmement, elle a précisé qu’un dispositif au moins équivalent – j’insiste sur les termes « au moins équivalent » financera, à partir de 2020, l’accession sociale à la propriété et la rénovation des logements des propriétaires occupants sous condition de ressources.

Mme la ministre est venue à La Réunion la semaine dernière. Elle a pu constater à quel point la question du logement est essentielle et nécessite des solutions innovantes et concrètes. C’est pourquoi je la félicite tout particulièrement d’avoir intégré la rénovation dans cette mesure.

Mme la ministre a bâti son action en outre-mer sur le dialogue et sur la confiance avec les élus. Aussi, quels gages peut-elle nous donner quant au rétablissement de l’allocation logement accession ?

Peut-elle nous assurer aujourd’hui que tous les dossiers suspendus seront repris ?

Peut-elle éclaircir la mention « sous condition de ressources » pour ce qui concerne le nouveau dispositif ? Quelle différence entraîne-t-elle avec le mécanisme précédent ? Le seuil de ressources sera-t-il identique ou la ministre compte-t-elle l’abaisser dans la mesure où elle souhaite un dispositif « au moins équivalent » ?

Au nom de tous les parlementaires réunionnais, je remercie le Gouvernement de nous apporter une réponse claire. (Applaudissements sur des travées du groupe La République En Marche.)

Mle président. La parole est à M. le ministre auprès de la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, chargé de la ville et du logement.

M. Julien Denormandie, ministre auprès de la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, chargé de la ville et du logement. Monsieur le sénateur, je vous remercie de votre question.

Je tiens tout d’abord à saluer votre engagement en faveur des territoires ultramarins, en particulier sur le sujet de la réhabilitation du logement.

Nous avons passé de longues heures, au sein de la Haute Assemblée, à débattre de la question du logement, et notamment de la façon dont nous pouvions favoriser le développement de celui-ci dans un certain nombre de territoires ultramarins.

Nous avons eu de nombreux échanges sur ces points. Je tiens à saluer la présidente de la commission des affaires économiques, Sophie Primas, et Mme le rapporteur, Dominique Estrosi-Sassone, pour la qualité de nos discussions qui ont abouti au texte que le Sénat a finalement voté voilà une quinzaine de jours. (Marques dapprobation sur les travées du groupe Les Républicains.)

Monsieur Dennemont, votre question appelle une réponse claire et précise.

Premier engagement : oui, l’ensemble des dossiers aujourd’hui en souffrance – soit environ un millier – seront repris dans le cadre du dispositif APL accession qui permet de lutter contre l’habitat insalubre dans les territoires ultramarins.

Second engagement : nous savons collégialement qu’il nous faut trouver des mécanismes plus pérennes, plus efficaces. C’est la raison pour laquelle nous avons demandé au Conseil général de l’environnement et du développement durable de mener une mission d’expertise, à laquelle nous allons vous associer, pour trouver un dispositif satisfaisant.

In fine, nous partageons tous la volonté de trouver des solutions innovantes, pour reprendre vos propos, et efficaces en faveur de l’habitat, notamment dans nos territoires ultramarins. (Applaudissements sur les travées du groupe La République En Marche.)

pénurie de médicaments