M. Michel Amiel. Le premier amendement a pour objet de prévoir une expérimentation, puisqu’il faut parfois en passer par là, pour rendre obligatoire la vaccination contre la grippe du personnel, en général, exerçant dans des établissements de santé publics, privés, mais également en libéral. Il a été montré, et la Cour des comptes l’a rappelé, que la non-vaccination du personnel était un véritable problème dans ces établissements, en particulier dans les EHPAD. Il faut savoir que la grippe, maladie banalisée, est la première cause de mortalité par maladie infectieuse dans notre pays.

Le deuxième amendement est un amendement de repli. En effet, je sais que l’on va m’expliquer, sans que j’aie encore compris pourquoi, qu’il n’est pas possible d’obliger le personnel à se vacciner. Cet amendement ne concerne donc que le personnel soignant.

Le troisième amendement, qui ne vise qu’à reprendre une préconisation de la Haute Autorité de santé, est de proposer, sans la rendre obligatoire, la vaccination en pédiatrie. On sait bien que les enfants sont le principal réservoir du virus.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Catherine Deroche, rapporteur. S’agissant de l’amendement n° 342, le code de la santé publique prévoit déjà que toute personne travaillant dans un établissement accueillant des personnes âgées et exerçant une activité l’exposant à une contamination doit être immunisée contre plusieurs maladies, dont l’hépatite B et la grippe. Toutefois, cette obligation vaccinale peut être suspendue par décret. Un décret du 14 octobre 2006 a ainsi suspendu la vaccination obligatoire des professionnels de santé contre la grippe.

Si nous voulons plaider pour le rétablissement de cette obligation vaccinale, il nous a semblé plus simple d’encadrer dans le code de la santé publique la possibilité pour l’État de suspendre cette obligation, lors de l’examen du projet de loi annoncé sur la santé, plutôt que d’expérimenter. Nous souhaitons donc avoir l’avis du Gouvernement sur les amendements nos 342 et 343.

Nous sollicitons également l’avis du Gouvernement sur l’amendement n° 344. Cette proposition d’expérimentation porte tout de même sur une vaccination qui doit être effectuée tous les ans sur des enfants.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Agnès Buzyn, ministre. Évidemment, monsieur Amiel, vous touchez là une corde sensible. Pour ma part, je pense que c’est un enjeu déontologique pour les soignants que d’être vaccinés. Un soignant a comme première obligation de ne pas nuire. Quand un soignant peut transmettre une maladie potentiellement mortelle chez un de ses malades, c’est vraiment un enjeu déontologique.

J’ai, cette année, proposé aux sept ordres des professionnels de santé de signer avec moi une charte d’engagement, pour qu’ils incitent tous les professionnels dont ils ont la charge à se faire vacciner, parce que c’est avant tout, je le répète, un problème déontologique.

Je veux revenir sur ce décret qui a été abrogé en 2006. L’histoire est liée en fait à un avis du Conseil d’État qui a, sur la base de la proportionnalité du risque et de l’obligation, estimé que, la vaccination antigrippale n’étant pas à 100 % protectrice et entraînant un bénéfice individuel assez faible pour celui qui la recevait – un soignant en bonne santé a peu de risques de mourir de la grippe ; si on lui demande de se vacciner, c’est pour protéger les personnes âgées ou les personnes vulnérables –, il n’était pas justifié de recourir à l’obligation vaccinale. Le gouvernement de l’époque a donc pris ce décret d’abrogation.

Cela dit, quand on voit les ravages de la grippe aujourd’hui, l’engorgement des urgences tous les ans au mois de décembre, les dégâts et le coût sociétal, je me pose la question de réinterroger le Conseil d’État sur l’obligation vaccinale des soignants.

Pour l’instant, j’ai considéré qu’il fallait tout mettre en œuvre pour faciliter la vaccination des soignants dans les établissements de santé, dans les EHPAD. Des circulaires ont donc été envoyées à tous les établissements. Nous essayons vraiment de relancer de façon très proactive cette vaccination. Nous avons demandé aux ordres professionnels de s’engager à nos côtés. Si nous voyons que la montée en charge de cette vaccination est insuffisante, je pense que nous pourrons réinterroger le Conseil d’État sur la possibilité de la rendre obligatoire pour protéger nos aînés et les personnes malades.

Au bénéfice de ces explications, je vous propose de retirer vos amendements. (M. Michel Amiel se montre dubitatif.) Semble-t-il, vous ne le souhaitez pas ! (Sourires.) À défaut, j’émettrai un avis défavorable.

M. le président. La parole est à M. Michel Amiel, pour explication de vote sur l’amendement n° 342.

M. Michel Amiel. Cette fois, madame la ministre, votre charme n’agit pas ! (Rires.) Je ne retirerai pas mes amendements pour marquer le coup, même si j’ai entendu vos arguments. Je vous donne rendez-vous à l’année prochaine, sur le même sujet !

M. le président. La parole est à Mme Laurence Rossignol, pour explication de vote.

Mme Laurence Rossignol. Je veux juste vous poser une question, madame la ministre. Vous évoquez une démarche avec les ordres pour les personnels soignants, mais quid des personnels non soignants travaillant dans les EHPAD ? Pour ces personnels qui ne relèvent pas d’un ordre, on a un taux de vaccination inférieur à 50 %, et encore je suis optimiste.

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Agnès Buzyn, ministre. Vous avez raison, cette démarche doit inclure toutes les personnes qui interviennent auprès de publics vulnérables. En réalité, elle devrait valoir pour toutes les personnes en contact avec le public. Il faut bien trouver une limite. Ce qui compte, c’est que l’on réduise la circulation du virus, que l’on s’attaque aux établissements de santé et aux EHPAD. Je le confirme, dans notre esprit, ce sont bien tous les personnels intervenant auprès des personnes âgées dans les EHPAD qui sont visés, mais nous ne pouvons mobiliser que les ordres professionnels. Ce serait déjà bien si nous pouvions obtenir une augmentation de la vaccination des infirmières, des médecins, des sages-femmes, les taux de vaccination étant au-dessous de 50 % ; c’est très choquant. Mais j’entends bien la totalité des personnels.

M. le président. La parole est à M. Michel Amiel, pour explication de vote sur l’amendement n° 343.

M. Michel Amiel. Je voudrais répondre à Mme Rossignol. Peut-être ai-je eu le tort de faire une présentation globale. Le premier amendement concerne l’ensemble du personnel, tandis que l’amendement n° 343 est un amendement de repli pour le personnel soignant. Il est évident que la secrétaire employée d’un EHPAD peut autant propager la maladie que l’infirmière elle-même ou le médecin.

M. le président. Quel est maintenant l’avis de la commission sur les trois amendements ?

Mme Catherine Deroche, rapporteur. La commission s’en remet à la sagesse du Sénat.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 342.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 39 bis, et l’amendement n° 343 n’a plus d’objet.

Je mets aux voix l’amendement n° 344.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 39 bis.

Chapitre III

Améliorer les prises en charge

Article additionnel après l'article 39 bis - Amendement n° 344
Dossier législatif : projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2019
Article additionnel après l'article 40 - Amendement n° 141 rectifié bis

Article 40

I. – Le livre Ier de la deuxième partie du code de la santé publique est ainsi modifié :

1° Le titre III est complété par un chapitre V ainsi rédigé :

« CHAPITRE V

« Parcours de bilan et intervention précoce pour les troubles du neuro-développement

« Art. L. 2135-1. – Pour l’accompagnement des enfants présentant un trouble du neuro-développement et pour la réalisation d’un diagnostic, un parcours de bilan et intervention précoce est pris en charge par l’assurance maladie.

« Le parcours est organisé par des structures désignées par arrêté du directeur général de l’agence régionale de santé parmi les établissements ou services mentionnés aux 2°, 3° et 11° du I de l’article L. 312-1 du code de l’action sociale et des familles ou les établissements mentionnés à l’article L. 3221-1 du présent code.

« Les professionnels de santé mentionnés aux articles L. 162-5 et L. 162-9 du code de la sécurité sociale, aux articles L. 4331-1 et L. 4332-1 du présent code et les psychologues peuvent conclure avec les structures désignées au deuxième alinéa du présent article un contrat, conforme au contrat type défini par arrêté des ministres chargés de la santé, de la sécurité sociale et du handicap. Ce contrat prévoit notamment, pour chaque catégorie de professionnels, des engagements de bonnes pratiques professionnelles et les conditions de retour d’information à la structure désignée et au médecin traitant. Pour les professionnels mentionnés aux articles L. 4331-1 et L. 4332-1 et les psychologues, le contrat prévoit également les modalités selon lesquelles la structure désignée rémunère les prestations réalisées dans le cadre du parcours.

« La prise en charge du parcours est soumise à prescription médicale.

« Un décret en Conseil d’État fixe les conditions d’application du présent article. » ;

2° L’article L. 2112-8 est complété par une phrase ainsi rédigée : « Par dérogation au premier alinéa, les régimes d’assurance maladie financent l’intégralité des dépenses relatives au parcours mentionné à l’article L. 2135-1. »

II. – La section 10 du chapitre IV du titre VII du livre Ier du code de la sécurité sociale est ainsi rétablie :

« Section 10

« Dépenses relatives au parcours de bilan et intervention précoce pour les troubles du neuro-développement

« Art. L. 174-17. – Les structures désignées en application de l’article L. 2135-1 du code de la santé publique perçoivent une dotation pour financer le parcours de bilan et intervention précoce pour les troubles du neuro-développement, versée par la caisse mentionnée au premier alinéa des articles L. 174-2 ou L. 174-8 du présent code. »

III. – Le présent article est applicable à Saint-Pierre-et-Miquelon.

IV. – le huitième alinéa de l’article 9 de l’ordonnance n° 77-1102 du 26 septembre 1977 portant extension et adaptation au département de Saint-Pierre-et-Miquelon de diverses dispositions relatives aux affaires sociales est complété par la référence : « et L. 174-17 ».

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. Bernard Bonne, rapporteur de la commission des affaires sociales pour le secteur médico-social. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, l’article 40 est le seul du PLFSS à évoquer l’accompagnement des personnes handicapées. Son dispositif n’en est pas moins particulièrement ambitieux, en ce qu’il propose une prise en charge financière intégrale d’un parcours de bilan et intervention précoce pour les enfants atteints de troubles du neuro-développement ou TND.

J’ai pu constater, madame la ministre, que la mesure, bien qu’animée des meilleures intentions, n’était pas toujours parfaitement comprise des personnes auxquelles elle s’adresse. Améliorer le champ du diagnostic était indispensable, mais le faire sans mentionner celui du repérage ne pouvait que créer quelques incompréhensions, qu’il nous faudra clarifier au cours du débat.

Un autre point doit être soulevé. L’article 40 introduit dans la loi la notion de troubles du neuro-développement, dont je dois signaler qu’elle n’est pas encore intégrée à la classification internationale des maladies, la CIM, telle qu’établie par l’Organisation mondiale de la santé. L’incorporation de cette nouvelle catégorie diagnostique n’interviendra qu’en 2022, lorsque la onzième version de la CIM sera officiellement adoptée par l’OMS.

Entre-temps, des repérages et des diagnostics auront été réalisés sur le fondement d’une notion thérapeutique dont les maisons départementales des personnes handicapées, les MDPH, qui appuient la recevabilité des demandes qu’elles reçoivent sur la CIM en vigueur, n’auront pas connaissance.

Afin d’assurer la pleine effectivité de cet article 40 et de faire en sorte que ces diagnostics et ces parcours de bilan puissent réellement donner lieu à des accompagnements, j’insiste, madame la ministre, pour qu’une instruction ministérielle soit rédigée à destination des MDPH. Ces dernières doivent en effet intégrer, avant l’adoption de la nouvelle CIM, cette nouvelle catégorie des troubles du neuro-développement.

M. le président. La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly, sur l’article.

Mme Cathy Apourceau-Poly. Monsieur le président, permettez-moi, à l’occasion de l’examen de cet article, d’évoquer une problématique à laquelle il me semble que nous devons, en notre qualité de législateurs, apporter des réponses.

J’ai eu l’occasion de rencontrer l’association Azur, qui rassemble des familles d’enfants atteints de troubles du spectre autistique, TSA, ou autres. Ces familles se retrouvent souvent seules à devoir courir les cabinets médicaux pour les dépistages, à monter les dossiers auprès des MDPH, à chercher la meilleure solution pour l’accueil de leurs enfants à l’école, en institut médico-éducatif, en IME, voire, dans certains cas, à l’étranger. Chez moi, dans le Pas-de-Calais, les parents se rendent en Belgique. Ce qui m’a le plus frappée, c’est l’isolement dans lequel se retrouvent ces familles, notamment les mères, une fois le diagnostic posé. Entièrement occupées à assurer le meilleur pour leurs enfants, elles arrêtent parfois de travailler et se retrouvent complètement démunies. Elles m’ont expliqué combien, peu à peu, elles se désocialisent.

En cette matière, le handicap mental est un poids très lourd à porter, puisqu’il réduit l’autonomie de son porteur. Les différentes lois sur le handicap sont insuffisantes et ne tiennent pas compte des spécificités du handicap mental pour les personnes atteintes et leur entourage.

Cet article a le mérite d’exister. En plus d’une meilleure prise en charge des parcours, c’est aussi d’accompagnement par les institutions de référence que les parents ont besoin. Le « ping-pong » entre MDPH, rectorat, CAF n’est pas seulement usant, il peut parfois être préjudiciable. Dans la jungle des dossiers à compléter, la moindre erreur peut en effet coûter cher, d’autant qu’il se passe, malheureusement, plusieurs mois avant que les premiers versements à prestations se mettent en place pour ces familles.

M. le président. La parole est à Mme Corinne Féret, sur l’article.

Mme Corinne Féret. Madame la ministre, je prends la parole sur cet article pour vous dire l’inquiétude de nombre de familles, acteurs associatifs et intervenants auprès d’enfants « dys » et TDAH.

L’article 40 vise à créer une nouvelle prestation, prise en charge entièrement par l’assurance maladie, à destination des enfants présentant des troubles du neuro-développement. Cette prestation, sous la forme d’un parcours de soins coordonnés, devra être organisée par des structures dites de deuxième ligne médico-sociales ou sanitaires, lesquelles recevront un « forfait de bilan et intervention précoce ».

La mesure s’inscrit dans le cadre du déploiement de la stratégie nationale pour l’autisme 2018-2022. Or, si elle représente une avancée en termes de repérage des troubles du spectre de l’autisme, ce dont je me réjouis, inclure dans le cadre de cette mesure les enfants « dys » et TDAH risque de les exposer à un éventuel amalgame et à une confusion particulièrement contre-productifs pour eux.

L’appartenance aux TND ne crée pas une homogénéité des besoins et des parcours. En effet, les troubles « dys » et TDAH, en tant que troubles cognitifs spécifiques, nécessitent des explorations pluridisciplinaires, qui sont étrangères à l’approche psychologique ou psychanalytique. Elles interviennent d’ailleurs généralement après l’âge de 6 ans. Le risque d’équivoque et de glissement des repérages pour les enfants « dys » et TDAH vers des diagnostics de TSA est énorme, car ces troubles cognitifs spécifiques, quand ils sont mal identifiés, conduisent très fréquemment à les y assimiler.

Comment donc ne pas s’inquiéter en constatant que les suivis proposés seront pilotés par des structures et des professionnels largement orientés vers une approche essentiellement psychologique et, surtout, psychanalytique des troubles ?

Oui, le dépistage des enfants « dys » et TDAH est essentiel.

Oui, les familles ont besoin d’une prise en charge des bilans et des suivis de leurs enfants, notamment en neuropsychologie, psychomotricité et ergothérapie.

Il me paraît urgent de mettre en place une concertation sur ces sujets et de faire le lien avec ce qui se passe dans nos écoles, les MDPH renvoyant toujours plus d’enfants « dys » et TDAH vers le plan d’accompagnement personnalisé, le PAP, au détriment du plan personnalisé de scolarisation, pourtant le seul dispositif adapté à des enfants présentant un handicap au sens de la loi de 2005. J’avais d’ailleurs interpellé au Sénat le ministre de l’éducation nationale sur ce sujet lors d’un débat, le mois dernier, sur la scolarisation des enfants en situation de handicap.

Les « dys » et TDAH représentent 80 % des enfants porteurs de troubles neuro-développementaux. Ils ne sont pas autistes et méritent un projet qui tienne véritablement compte de la réalité et des spécificités de leurs troubles.

M. le président. La parole est à Mme Patricia Schillinger, sur l’article.

Mme Patricia Schillinger. Cet article s’inscrit pleinement dans l’un des objectifs de la stratégie nationale pour l’autisme 2018-2022, qui est d’intervenir précocement auprès des enfants présentant des différences de développement, afin de limiter le surhandicap. Il est en effet primordial que l’enchaînement des actions de repérage, de diagnostic et d’intervention précoce soit rapide et fluide.

Dans nos territoires respectifs, nous connaissons, hélas, les carences du système, la détresse des familles et de leurs enfants : un temps précieux perdu en raison d’un manque de formation au repérage ou de la saturation des structures spécialisées dans le diagnostic, mais également des obstacles à la prise en charge par l’assurance maladie.

L’amélioration de la prise en charge grâce à une nouvelle prestation est une excellente nouvelle, dont chacun se félicitera et vous félicitera, madame la ministre ; une prestation de parcours coordonné, prise en charge par l’assurance maladie sans reste à charge et visant à accompagner les enfants avant même l’établissement du diagnostic.

Elle permettra d’intervenir rapidement, de réduire les délais de diagnostic et de soulager le poids qui pèse sur les familles contraintes de financer le recours à des professionnels non conventionnés.

Elle s’accompagnera des moyens renforcés de la stratégie nationale 2018-2022, avec, au total, près de 400 millions d’euros dédiés à l’amélioration de la réponse aux besoins des personnes, soit près du double de l’enveloppe du troisième plan.

Autre vertu, cette réforme, accompagnée de son décret d’application, renforcera la coordination des professionnels impliqués dans tous les troubles du neuro-développement.

À ce sujet, j’attire tout particulièrement votre attention sur les PMI, les centres de protection maternelle et infantile, et les professionnels de santé qui y exercent. La PMI est essentielle pour le repérage, la prise en charge précoce et, plus largement, pour notre politique de prévention et de lutte contre les inégalités. Ce réseau de professionnels est une ressource précieuse.

La réflexion sur l’organisation de notre système de santé en lien avec les problématiques de cohésion sociale et territoriale devrait conduire à inclure très largement les professionnels de santé des PMI dans les réseaux de soins. J’espère que nous aurons la possibilité d’en discuter hors de la « guillotine » de l’irrecevabilité financière, qui a eu raison de nos amendements « PMI » pour ce PLFSS !

M. le président. L’amendement n° 82, présenté par M. Bonne, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 1

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

…° Le deuxième alinéa de l’article L. 2132-2 est complété par les mots : « et sont effectués conformément aux recommandations de bonne pratique diffusées par l’autorité mentionnée à l’article L. 161-37 du code de la sécurité sociale » ;

La parole est à M. le rapporteur.

M. Bernard Bonne, rapporteur. Cet amendement vise à préciser le dispositif porté par l’article 40, qui crée un parcours de soins intégré et financé par l’assurance maladie pour les enfants atteints de troubles du neuro-développement.

Cette mesure utile risque néanmoins de ne trouver qu’une effectivité limitée si l’étape préalable – et cruciale – du repérage de ces troubles ne fait l’objet d’aucune réforme. C’est la raison pour laquelle cet amendement vise à faire explicitement mention des recommandations de bonne pratique produites par la HAS en février 2018, qui offrent un outil didactique aux médecins de la PMI et aux pédiatres pour leur permettre de détecter ces troubles le plus tôt possible.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Agnès Buzyn, ministre. Pour répondre aux interventions sur l’article, vous avez évoqué, madame Féret, le fait que les troubles « dys » ne seraient pas concernés : je vous rassure, ils sont concernés.

Aujourd’hui, tous les troubles du neuro-développement seront bel et bien concernés par cette mesure, mais on tiendra compte de la spécificité de chaque trouble pour l’accès à tel ou tel praticien.

Je veux ensuite préciser qu’il reviendra à des structures sélectionnées par les ARS sur appels à projets d’assurer un maillage territorial avec les professionnels concernés. De plus, le cahier des charges de ces structures, qui garantit l’application des bonnes pratiques, a été consulté par les associations de familles concernées.

Quant à la remarque formulée sur les MDPH, aujourd’hui, soyons clairs, nous intervenons en amont du diagnostic, en amont donc de la déclaration d’une pathologie à la MDPH. On peut tenir les MDPH informées, elles seront forcément destinataires, à un moment donné, du dossier de l’enfant quand le diagnostic sera posé. Nous parlons là d’un repérage et d’une prise en charge précoces avant même la pose du diagnostic et la demande de reconnaissance d’un handicap.

J’en viens à l’amendement de la commission, monsieur le rapporteur : actuellement, les recommandations de la Haute Autorité de santé sont un peu plus larges que le sujet de l’article. Nous ne sommes pas particulièrement favorables à les mentionner dans la loi, mais j’émets, au nom du Gouvernement, un avis de sagesse. Nous sommes surtout attachés à l’application des bonnes pratiques, un point qui sera inclus dans le cahier des charges des structures et des professionnels impliqués. Si vous souhaitez inscrire dans la loi qu’il faut prendre en compte les bonnes pratiques selon la HAS, je ne m’y oppose pas, mais cela ne nous semble pas le plus important.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. Bernard Bonne, rapporteur. Je veux revenir sur les MDPH. Il me paraît utile qu’elles soient informées de la prise en compte de ces nouvelles classifications qui ne sont pas encore officielles par rapport à la CIM, non au stade de repérage, mais dans les bilans et le parcours de ces enfants.

S’agissant des repérages, je pense qu’il serait bien que les médecins de PMI, les pédiatres et même les médecins généralistes aient une sorte de fiche de repérage officielle, leur permettant d’observer les troubles survenant à certains moments précis. L’inscription dans les carnets de santé, dans une rubrique particulière, des visites dans les PMI, chez les pédiatres, de même que chez les médecins généralistes aiderait à détecter ces troubles le plus tôt possible, quel que soit l’âge.

M. le président. La parole est à Mme Michelle Meunier, pour explication de vote.

Mme Michelle Meunier. Madame la ministre, j’apprécie votre ouverture puisque vous vous en remettez à la sagesse du Sénat sur cet amendement, que nous voterons. Le repérage est essentiel. Il est vraiment le point de départ qui nécessite, ensuite, en pluridisciplinarité, le travail sur la globalité de l’enfant porteur de handicap ou de dysfonctionnements.

J’y ajouterai volontiers l’annonce du handicap, qui est parfois un véritable tsunami dans la famille et dans l’environnement proche de l’enfant. C’est la raison pour laquelle tout ce que la Haute Autorité de santé établit comme fiche de bonne pratique doit être absolument valorisé et diffusé là où il y a parfois, hélas, bien des manques.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 82.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. L’amendement n° 83, présenté par M. Bonne, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :

Alinéa 5

Après le mot :

accompagnement

insérer les mots :

, avant ou pendant leur scolarité,

La parole est à M. le rapporteur.

M. Bernard Bonne, rapporteur. Cet amendement a pour objet de préciser le public cible du parcours de bilan et intervention précoce pour les troubles du neuro-développement.

Cette nouvelle catégorie de troubles, qui ne sera opérationnelle qu’à partir de 2022, englobe de nombreux syndromes, dont les troubles du spectre autistique, les troubles de la déficience intellectuelle et les troubles de l’apprentissage. L’âge de repérage de ces troubles peut fortement varier et n’intervenir qu’au moment de la première scolarité. Or l’étude d’impact de l’article 40 semble insister sur les enfants de moins de 6 ans, alors que de nombreux troubles du neuro-développement ne sont repérés pour la première fois qu’après cet âge. Par cet amendement, nous entendons sécuriser leur inclusion.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Agnès Buzyn, ministre. Je suis défavorable à cet amendement, car on change de philosophie de logique et de champ. Ce qui est en cause, c’est vraiment le repérage de troubles chez les tout petits enfants, pour éviter la perte de chance liée à des délais de diagnostic très longs. Les mêmes pathologies qui surviennent à l’adolescence ne sont pas tout à fait les mêmes.

Aujourd’hui, nous souhaitons renforcer la formation de tous les professionnels qui interviennent auprès de la petite enfance pour améliorer le repérage et une prise en compte immédiate du moindre symptôme qui oriente vers un centre de niveau 2.

Je ne suis pas favorable à une extension brutale pour laquelle nous n’avons pas de cadrage. Nous avons fait un vrai travail avec l’ensemble des professionnels, les associations de familles sur la période 0-6 ans, dans laquelle se produit le maximum de retard de diagnostic. Cela mériterait une instruction beaucoup plus approfondie que ne peut l’ouvrir l’adoption d’un simple amendement dans ce texte. Je le répète, ce ne sont pas du tout les mêmes pathologies ni les mêmes situations.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.