M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.

L’amendement n° 11 est présenté par Mmes Apourceau-Poly, Cohen et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

L’amendement n° 16 est présenté par Mme Poncet Monge, M. Benarroche, Mme Benbassa, MM. Dantec, Dossus, Fernique, Gontard et Labbé, Mme de Marco, MM. Parigi et Salmon et Mme Taillé-Polian.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Supprimer cet article.

La parole est à Mme Laurence Cohen, pour présenter l’amendement n° 11.

Mme Laurence Cohen. L’article 4 de cette proposition de loi autorise l’accès aux données des plateformes en ligne pour contrôler les assurés sociaux au détriment, de notre point de vue, des libertés individuelles et du respect de la vie privée.

Tout d’abord, permettez-moi de rappeler que, concernant l’usage des fichiers et de leur croisement pour renforcer les contrôles, la CNIL autorise « l’automatisation des outils, mais le croisement des données et les requêtes ne doivent pas prendre la place de l’intervention humaine dans le schéma de décision ».

Ensuite, comme l’a indiqué ma collègue Cathy Apourceau-Poly lors de la discussion générale, le Défenseur des droits, dans son rapport de 2017, constatait que « le développement des contrôles depuis une dizaine d’années et les pouvoirs nouveaux conférés aux régimes de protection sociale et à Pôle emploi ne sont pas sans soulever un certain nombre de questions ». En effet, le renforcement des contrôles entraîne un accroissement du nombre de réclamations, car « la politique mise en œuvre en la matière, marquée par certains excès et quelques dérives, [est] la source de nombreuses atteintes aux droits des usagers des services publics ».

Enfin, le recours croissant au data mining, qui établit d’éventuelles corrélations signifiantes et utilisables entre les données, peut lui aussi poser des problèmes, la définition des profils ou des situations à risques n’étant évidemment pas neutre.

La sécurité sociale dispose déjà des outils pour lutter contre la fraude, mais, on le voit, tout n’est pas réglé. Elle manque de moyens humains : ce sont eux qu’il faut renforcer.

La proposition de loi visant à lutter contre la fraude aux prestations sociales ne cherche donc pas à améliorer les contrôles, de notre point de vue, mais plutôt à renforcer les conditions d’accès aux prestations sociales, ainsi que la mise en place d’une cybersurveillance. C’est pourquoi nous demandons la suppression de cet article.

M. le président. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour présenter l’amendement n° 16.

Mme Raymonde Poncet Monge. Non seulement je suis contre cet article, mais je veux, par cet amendement, marquer mon étonnement, pour ne pas dire plus, qu’on puisse proposer à l’encontre des personnes bénéficiaires des prestations sociales des mesures de collecte et d’exploitation de leurs contenus librement accessibles sur internet, notamment sur les réseaux sociaux, et pas seulement du fait de la complexité de la mise en œuvre d’une telle mesure, mais parce que l’État de droit garantit la protection des données à caractère personnel. Pour les écologistes, il s’agit d’un pas de plus vers la surveillance des personnes sur internet, en collectant des contenus relatifs à la vie privée.

Rappelons que la CNIL s’était déjà montrée critique lorsque le Gouvernement avait suggéré un dispositif similaire ouvrant cette possibilité à l’administration fiscale et douanière lors du projet de loi de finances de 2019, en s’interrogeant sur son opportunité au regard des garanties fondamentales d’exercice des libertés publiques. Aussi, nous devrions nous soucier de la conformité de cet article au RGPD.

Je rappelle également que les publics ciblés par les prestations sociales font déjà l’objet de différents contrôles. Pour le RSA, par exemple, des départements déploient leurs propres contrôles, en plus de ceux de la CAF et de Pôle emploi. Ces trois instances sont déjà dotées de moyens de contrôle, et il convient de rappeler que leur rôle premier est d’accompagner, de permettre l’accès aux droits des personnes en difficulté, ce qui suppose au préalable d’installer une relation de confiance. Les moyens de surveillance généralisée renversent ce positionnement, et ce n’est pas acceptable.

Trop souvent, l’obsession de la chasse aux fraudeurs fait vivre aux personnes concernées des calvaires administratifs aux conséquences quelquefois graves, quand elle n’a pas pour principal effet le renoncement aux droits. Nous n’avons donc pas besoin d’un dispositif de surveillance supplémentaire qui se montrerait encore plus intrusif, au mépris des libertés individuelles, du respect des données et de la vie privée des personnes en situation de précarité. Pour un cas, combien de personnes, sur les 7 millions de personnes concernées par un minima social, seront ainsi malmenées ?

Nous proposons, par cet amendement, la suppression de cet article, et pas seulement de voter contre.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur. Nous l’avons dit en commission, une expérimentation est en cours pour la fraude fiscale. Il nous paraît nécessaire d’attendre d’en avoir un premier bilan. Nous constatons d’ailleurs des obstacles juridiques et techniques qui nous font craindre des difficultés supplémentaires pour une expérimentation dans le champ social, qui comporte plusieurs organismes et non pas une seule administration.

L’avis est donc favorable sur ces deux amendements de suppression.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Olivier Dussopt, ministre délégué. Le Gouvernement partage la position de M. le rapporteur pour les raisons qu’il a évoquées, c’est-à-dire la difficulté technique que poserait l’application du texte tel qu’il est proposé et le fait que nous préférons aller au bout de l’expérimentation dans le champ fiscal avant de l’élargir au champ social.

Compte tenu de ces arguments, et pour reprendre une partie de ceux qui ont été formulés par Mme Cohen, l’avis du Gouvernement est favorable, même si nous ne partageons pas du tout, madame Poncet Monge, votre appréciation. Votre description du système de collecte de données, lesquelles sont librement rendues publiques par les utilisateurs, comme vous l’avez dit, était trop caricaturale pour que nous puissions y souscrire.

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 11 et 16.

(Les amendements sont adoptés.)

M. le président. En conséquence, l’article 4 est supprimé, et l’amendement n° 1 n’a plus d’objet.

Chapitre II

Expérimenter la mise en place d’une carte Vitale biométrique

(Division et intitulé supprimés)

Article 4
Dossier législatif : proposition de loi tendant à appliquer diverses mesures urgentes pour lutter contre les fraudes sociales
Article 6

Article 5

(Supprimé)

TITRE II

AMÉLIORER LA COOPÉRATION ENTRE LES ACTEURS CHARGÉS DE LA LUTTE CONTRE LA FRAUDE SOCIALE

Chapitre Ier

Améliorer la coopération interne

Article 5
Dossier législatif : proposition de loi tendant à appliquer diverses mesures urgentes pour lutter contre les fraudes sociales
Article additionnel après l'article 6 - Amendement n° 7 rectifié ter

Article 6

(Supprimé)

Article 6
Dossier législatif : proposition de loi tendant à appliquer diverses mesures urgentes pour lutter contre les fraudes sociales
Article 7

Article additionnel après l’article 6

M. le président. L’amendement n° 7 rectifié ter, présenté par Mme Imbert, MM. Retailleau, D. Laurent, Karoutchi et Cardoux, Mme V. Boyer, MM. Pellevat et Burgoa, Mme Demas, MM. Bonhomme, Bascher, Sol, Joyandet, Vogel, Longuet et Chaize, Mmes Chauvin et Puissat, M. de Nicolaÿ, Mme F. Gerbaud, MM. Nougein et Lefèvre, Mme Gruny, M. Bonne, Mmes Deromedi et Noël, M. B. Fournier, Mme Lassarade, MM. Houpert et Sautarel, Mme Drexler, MM. Savin, Bouchet, Mandelli, Hugonet, Savary, Brisson et Genet, Mmes Bellurot et L. Darcos, MM. Le Rudulier, Somon, Babary, Boré et Bouloux, Mme Dumont, M. Piednoir, Mme Berthet, M. Charon, Mme Raimond-Pavero, MM. Pointereau, Belin et Rapin, Mmes Di Folco, M. Mercier, Canayer, Deseyne, Borchio Fontimp et Delmont-Koropoulis, MM. Meurant, Paccaud, Favreau, Laménie, Saury et Reichardt et Mme Pluchet, est ainsi libellé :

Après l’article 6

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le code de la sécurité sociale est ainsi modifié :

1° Au premier alinéa de l’article L. 114-16-1, après le mot : « État », sont insérés les mots : « , des collectivités territoriales » ;

2° L’article L. 114-16-3 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« … Les agents mentionnés à l’article L. 133-2 du code de l’action sociale et des familles. » ;

3° Après le 3° de l’article L. 114-19, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« … Aux agents chargés du contrôle mentionnés à l’article L. 133-2 du code de l’action sociale et des familles. »

La parole est à Mme Corinne Imbert.

Mme Corinne Imbert. Cet amendement vise à permettre aux agents habilités par le président du conseil départemental de pouvoir échanger tous renseignements et tous documents utiles à l’accomplissement des missions de recherche et de constatation des fraudes sociales.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur. Le rôle joué par les départements en matière sociale rend cette extension tout à fait légitime. La commission a donc émis un avis favorable.

M. André Reichardt. Très bien !

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Olivier Dussopt, ministre délégué. Le code de l’action sociale et des familles permet déjà de tels échanges entre les conseils départementaux et les CAF, qui partagent des compétences de contrôle pour lutter contre la fraude au RSA. Il ne nous paraît pas utile d’aller au-delà.

Ces bases nous paraissent suffisantes pour permettre les échanges utiles dans le cadre des Codaf en particulier, puisque les conseils départementaux sont invités au cas par cas et en fonction de l’ordre du jour. Nous ne sommes donc pas favorables à cette extension des prérogatives des agents habilités par les conseils départementaux.

M. le président. La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour explication de vote.

Mme Nathalie Goulet. Dans le cadre du rapport que nous avons commis avec Carole Grandjean, nous avions relevé que les départements étaient confrontés à de très grandes difficultés. De surcroît, les départements limitrophes ne communiquent pas entre eux sur ces données. Je suis donc très favorable à cet amendement de Mme Imbert, qui facilitera grandement les choses.

M. le président. La parole est à M. Michel Canevet, pour explication de vote.

M. Michel Canevet. Je suis également très favorable à cet amendement. Il n’y a rien de pire que de constater des abus et de ne pas pouvoir les sanctionner. Il est important que, à tous les niveaux, cela puisse s’effectuer.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 7 rectifié ter.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans la proposition de loi, après l’article 6.

Article additionnel après l'article 6 - Amendement n° 7 rectifié ter
Dossier législatif : proposition de loi tendant à appliquer diverses mesures urgentes pour lutter contre les fraudes sociales
Article 8

Article 7

(Supprimé)

Article 7
Dossier législatif : proposition de loi tendant à appliquer diverses mesures urgentes pour lutter contre les fraudes sociales
Article additionnel après l'article 8 - Amendement n° 8 rectifié ter

Article 8

Le code de la construction et de l’habitation est ainsi modifié :

1° Après l’article L. 823-5, il est inséré un article L. 823-5-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 823-5-1. – Le versement d’une aide personnelle au logement est subordonné à la transmission aux organismes chargés du paiement de l’aide des principales caractéristiques du logement auquel l’aide se rapporte susceptibles d’affecter sa valeur locative. Cette transmission est effectuée avant le premier versement par le bénéficiaire de l’aide ou, en cas de tiers payant, par le bailleur.

« La liste des caractéristiques mentionnées au premier alinéa est fixée par décret. Ce décret prévoit également le rythme auquel leur transmission doit être renouvelée. » ;

2° Après l’article L. 851-1, il est inséré un article L. 851-1-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 851-1-1. – Les organismes chargés du paiement de l’aide communiquent à l’administration des impôts les informations utiles à l’appréciation des revenus tirés par le bailleur du logement auquel se rattache une aide personnelle au logement. »

M. le président. L’amendement n° 12, présenté par Mmes Apourceau-Poly, Cohen et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly.

Mme Cathy Apourceau-Poly. L’article 8 renforce drastiquement les conditions d’accès à l’APL, en subordonnant le versement de cette aide à la transmission d’informations sur le logement. Une telle mesure complexifie inutilement la procédure aux dépens des droits des familles les plus précaires.

Je rappelle que, en 2019, l’omission constituait 70 % des fraudes détectées, tandis que la production et l’usage de faux documents représentaient seulement 12,5 % des fraudes qualifiées.

Alors que le Gouvernement a institué pour les entreprises un droit à l’erreur, vous proposez d’inverser la charge de la preuve pour les plus pauvres, soumis à la suspicion permanente de la tentative de fraude. La réalité, c’est que, à force de renforcer les contrôles pour prétendument plus de justice, vous découragez les honnêtes citoyens qui pourraient bénéficier des aides sociales.

Aujourd’hui, le non-recours est renforcé par les multiples démarches administratives imposées prétendument pour vérifier l’absence de fraude. C’est le constat du rapport du Secours catholique pour l’année 2018, qui indiquait une baisse de l’accès aux allocations familiales de 5 % ; 83 % de ces familles percevaient les allocations familiales en 2010 et seulement 78 % en 2017.

En limitant la lutte contre la fraude aux prestations sociales des assurés sociaux, le texte stigmatise les plus précaires et refuse de s’attaquer à la fraude des entreprises, dont le montant est évalué par la Cour des comptes à 25 milliards d’euros, soit 25 fois plus que le montant total de la fraude aux prestations et 250 fois celle de la « fraude documentaire ».

Tel est le sens de cet amendement de suppression.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur. La commission est défavorable à cet amendement de suppression de l’article 8, parce qu’il nous paraît intéressant d’avoir des précisions sur le logement auquel l’aide se rapporte. Cet article est d’ailleurs largement inspiré d’une préconisation de la Cour des comptes dans son rapport remis en septembre dernier.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Olivia Gregoire, secrétaire dÉtat auprès du ministre de léconomie, des finances et de la relance, chargée de léconomie sociale, solidaire et responsable. L’objectif visé par cet article est de sécuriser le versement des aides au logement, ce qui paraît légitime et souhaitable. Toutefois, subordonner le versement de l’APL à la transmission aux CAF des principales caractéristiques du logement auquel l’aide se rapporte, susceptible d’affecter sa valeur locative, n’a pas réellement d’intérêt en termes de contrôle. En effet, cette valeur locative n’est pas prise en compte dans le calcul de l’aide au logement et ne peut donc servir à détecter une fraude.

Le Gouvernement ne peut retenir cette mesure en l’état. Il est donc favorable à cet amendement de suppression.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 12.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’article 8.

(Larticle 8 est adopté.)

Article 8
Dossier législatif : proposition de loi tendant à appliquer diverses mesures urgentes pour lutter contre les fraudes sociales
Article 9

Article additionnel après l’article 8

M. le président. L’amendement n° 8 rectifié ter, présenté par Mme Imbert, MM. Retailleau, D. Laurent, Karoutchi et Cardoux, Mme V. Boyer, MM. Pellevat et Burgoa, Mme Demas, MM. Bonhomme, Bascher, Sol, Joyandet, Vogel, Longuet et Chaize, Mmes Chauvin et Puissat, M. de Nicolaÿ, Mme F. Gerbaud, MM. Nougein et Lefèvre, Mme Gruny, M. Bonne, Mmes Deromedi et Noël, M. B. Fournier, Mme Lassarade, MM. Houpert et Sautarel, Mme Drexler, MM. Savin, Mandelli, Hugonet, Savary, Brisson et Genet, Mmes Bellurot et L. Darcos, MM. Somon, Babary, Boré et Bouloux, Mme Dumont, M. Piednoir, Mme Berthet, M. Charon, Mme Raimond-Pavero, MM. Pointereau, Belin et Rapin, Mmes Di Folco, M. Mercier, Canayer, Deseyne, Borchio Fontimp et Delmont-Koropoulis, MM. Meurant, Paccaud, Favreau, Laménie, Saury et Reichardt et Mme Pluchet, est ainsi libellé :

Après l’article 8

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – Le code de l’action sociale et des familles est ainsi modifié :

1° L’article L. 262-15 est complété par sept alinéas ainsi rédigés :

« Ces organismes peuvent recueillir les informations nécessaires à l’appréciation des conditions d’ouverture, au calcul et au maintien du droit auprès :

« 1° Des organismes de recouvrement ;

« 2° Des organismes chargés de la gestion d’un régime obligatoire de base, d’un régime complémentaire ;

« 3° Des administrations centrales de l’État ;

« 4° Du gestionnaire du régime d’assurance-chômage ;

« 5° Des collectivités territoriales.

« Un décret en Conseil d’État fixe les conditions d’application du présent article. » ;

2° Au second alinéa de l’article L. 262-36, les mots : « mentionnés à » sont remplacés par les mots : « mentionnés au premier alinéa de ».

II. – Le présent article entre en vigueur le 1er janvier 2023.

La parole est à Mme Corinne Imbert.

Mme Corinne Imbert. Cet amendement vise à prévoir un changement de procédure d’attribution du RSA à compter du 1er janvier 2023. Il ne reviendrait plus au demandeur de fournir les pièces nécessaires à l’instruction de sa demande, mais à l’administration ou à l’organisme de récupérer les données le concernant auprès de ses différents partenaires : Urssaf, administration fiscale…

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur. Cet amendement, qui vise à modifier la procédure d’attribution du RSA, reprend une disposition d’une proposition de loi de notre ancien collègue Éric Doligé, rapportée en 2016 par Corinne Imbert.

La commission partage tout à fait l’intention exprimée par notre collègue. Elle s’interroge cependant sur les possibilités qui existent déjà pour les services en matière d’information pour instruire les demandes au sein des CAF. C’est la raison pour laquelle notre réflexion reste ouverte. Les évolutions du RNCPS nous permettront peut-être d’avancer et d’aller un peu plus loin.

À ce stade, nous nous en remettons à la sagesse du Sénat.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Olivia Gregoire, secrétaire dÉtat. Les dispositions de l’article L. 114-12 du code de la sécurité sociale, qui sont applicables au RSA, prévoient déjà la possibilité pour les caisses de récupérer directement les données nécessaires à l’examen des demandes auprès des autres administrations sans qu’il soit utile de compléter le code de l’action sociale et des familles en ce sens.

Par ailleurs, des travaux sont engagés en ce moment même pour que les CAF et les caisses de la MSA puissent récupérer les informations sur les ressources des demandeurs auprès des différents opérateurs impliqués. Cette réforme est rendue possible par la disponibilité des données issues des déclarations des employeurs et des organismes qui versent des prestations sociales.

La récupération automatique des ressources des bénéficiaires se fera par le biais du dispositif de ressources mensuelles (DRM) créé par l’article 78 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2019. Cela permettra de simplifier les démarches des déclarants, de stabiliser les droits versés en limitant les indus et les rappels, de faciliter la gestion pour les caisses et de favoriser le juste recours à la prestation.

Cet amendement apparaît donc satisfait en droit et le sera très prochainement en pratique par une récupération désormais automatique de certaines données. Le Gouvernement estime donc qu’il est satisfait : il en demande le retrait ; à défaut, l’avis sera défavorable.

M. le président. Madame Imbert, l’amendement n° 8 rectifié ter est-il maintenu ?

Mme Corinne Imbert. J’entends bien ce que vient de dire Mme la secrétaire d’État : l’amendement est satisfait en droit. Reste que, dans la vraie vie, il n’est pas encore « mis en musique ». Par conséquent, je le maintiens.

M. le président. La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour explication de vote.

Mme Nathalie Goulet. Je soutiens cette disposition, d’autant qu’elle figure déjà dans un rapport de 2016 et que nous sommes en 2021 ! C’est une application du « dites-le-nous une fois » : on remplace le déclaratif par un échange et une inversion de la production des éléments.

Si l’amendement est déjà satisfait, tant mieux ! Je crois cependant qu’il faut le voter : nous n’avons que trop attendu !

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 8 rectifié ter.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans la proposition de loi, après l’article 8.

Chapitre II

Améliorer la coopération transfrontalière

Article additionnel après l'article 8 - Amendement n° 8 rectifié ter
Dossier législatif : proposition de loi tendant à appliquer diverses mesures urgentes pour lutter contre les fraudes sociales
Article 10

Article 9

(Supprimé)

Article 9
Dossier législatif : proposition de loi tendant à appliquer diverses mesures urgentes pour lutter contre les fraudes sociales
Article 11

Article 10

L’article L. 161-24 du code de la sécurité sociale est complété par une phrase ainsi rédigée : « Ce justificatif peut notamment être fourni ou certifié par un organisme de retraite d’un État étranger ayant conclu une convention à cette fin avec un organisme français. »

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur. Les dispositions que cet article entend modifier sont nouvelles, puisqu’elles datent de décembre 2020. Lors du dernier projet de loi de financement de la sécurité sociale, nous avons en effet codifié les dispositions qui figuraient dans la loi de financement de la sécurité sociale pour 2013 concernant la preuve de l’existence des pensionnés résidant à l’étranger ou dans certains territoires ultramarins. À l’occasion de cette codification, nous avons également ouvert la possibilité de recourir à la biométrie pour assurer le contrôle de l’existence.

Cette rédaction est issue d’un amendement du rapporteur pour l’assurance vieillesse, René-Paul Savary, qui avait été adopté conforme par l’Assemblée nationale. Le rapporteur avait consulté sur ce sujet la CNAV, l’Agirc-Arrco, le GIP Union Retraite pour mieux comprendre la répartition des rôles et le fonctionnement de ce contrôle de l’existence au sein des caisses.

La rédaction issue de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2021 ne me semble pas devoir être modifiée aujourd’hui, d’autant que, comme je l’ai déjà évoqué, l’intention de l’auteur de la proposition de loi est tout à fait satisfaite par les dispositions qui sont issues de cette loi. Les organismes concluent déjà des conventions avec leurs homologues à l’étranger, permettant notamment des échanges automatisés d’état civil. La présente rédaction ne contraint pas davantage les procédures ni n’ouvre de faculté nouvelle. Nous vous invitons donc à ne pas adopter cet article.

M. le président. Je mets aux voix l’article 10.

(Larticle 10 est adopté.)

Article 10
Dossier législatif : proposition de loi tendant à appliquer diverses mesures urgentes pour lutter contre les fraudes sociales
Article 12

Article 11

(Supprimé)

Article 11
Dossier législatif : proposition de loi tendant à appliquer diverses mesures urgentes pour lutter contre les fraudes sociales
Article additionnel après l'article 12 - Amendement n° 15

Article 12

Dans un délai de six mois suivant la publication de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport sur l’état de la lutte contre les fraudes transfrontalières, faisant notamment mention des conventions signées dans ce cadre et de leur application, et des conventions en cours de négociation en précisant le stade de ces négociations et les problèmes éventuellement rencontrés.

M. le président. La parole est à M. André Reichardt, sur l’article.

M. André Reichardt. Je prends la parole sur cet article non pas pour insister sur la demande de rapport du Parlement au Gouvernement, mais pour dire toute l’importance de la lutte contre les fraudes transfrontalières en matière sociale. En fait, je souhaitais intervenir sur l’article 9 relatif aux échanges d’informations entre organismes européens de sécurité sociale. La commission des affaires sociales a jugé bon de le supprimer, considérant qu’un règlement européen portant coopération des systèmes de sécurité sociale les prévoyait déjà. Les prévoir dans la législation française ne serait donc plus nécessaire, selon la commission…

À titre personnel, je ne suis pas sûr que cette coopération entre organismes européens de sécurité sociale soit efficace à 100 %. J’aimerais redire ici qu’en zone frontalière la fraude sociale est une réalité et qu’il convient de lutter plus fermement contre son développement. Or cette fraude est rendue possible, voire facilitée par l’absence ou l’insuffisance d’échanges de données entre les pays et les organismes sociaux, même si de nombreux progrès ont été réalisés au fil des années depuis ce règlement. Une meilleure coopération entre administrations des pays concernés est essentielle, en attendant peut-être à terme une harmonisation complète au niveau européen de nos systèmes de protection.

La commission des affaires européennes poursuit un travail important en ce sens, et j’ai moi-même eu l’occasion, en janvier 2020, de déposer une proposition de résolution européenne visant à lutter contre la fraude aux prestations sociales et mettant l’accent sur l’urgence de renforcer la coopération entre les États. Celle-ci a été adoptée par notre commission des affaires européennes en février 2020, ce qui montre que tout n’est pas parfait en la matière, c’est le moins qu’on puisse dire.

Je voudrais également dire un mot de la suppression, par la commission, de l’article 11, qui proposait à l’origine qu’un décret établisse une liste de pays dont l’état civil serait présumé non fiable. Si, comme l’a dit la commission, le dispositif proposé risquait de poser des problèmes diplomatiques ou politiques sans vraiment résoudre le problème posé, je voudrais, en qualité de président du groupe d’amitié France-Afrique de l’Ouest, confirmer ici les faiblesses administratives que connaissent certains pays de la zone en matière d’état civil et, dès lors, confirmer les risques importants de fraude à l’identité que cette situation génère. Il est donc indispensable que la lutte contre cette fraude passe par un encouragement des États concernés à se doter au plus vite des instruments permettant la tenue d’un état civil rigoureux et fiable.

Mes chers collègues, socialement, la fraude n’est plus acceptable, surtout dans le contexte difficile que nous connaissons. En tant que parlementaires, nous devons nous atteler à éliminer toutes ces formes de fraudes, qui réduisent par leur existence même nos capacités budgétaires. Je tiens donc à féliciter et à remercier Nathalie Goulet et ses collègues de leur initiative.

M. le président. Je mets aux voix l’article 12.

(Larticle 12 est adopté.)

Article 12
Dossier législatif : proposition de loi tendant à appliquer diverses mesures urgentes pour lutter contre les fraudes sociales
Article 13

Article additionnel après l’article 12

M. le président. L’amendement n° 15, présenté par Mmes Apourceau-Poly, Cohen et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :

Après l’article 12

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Dans un délai de six mois à compter de la publication de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport sur la fraude patronale aux cotisations sociales et les moyens pour y mettre fin.

La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly.