Mme la présidente. La parole est à M. Jean Hingray. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)

M. Jean Hingray. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, permettez-moi tout d’abord d’excuser notre collègue Catherine Morin-Desailly, spécialiste de l’audiovisuel, qui a été retenue par d’autres engagements et que j’associe naturellement à mon intervention.

Comme l’a dit le rapporteur spécial Jean-Raymond Hugonet, jamais la situation de l’audiovisuel public n’aura paru aussi confuse et incertaine qu’en cette fin d’année 2022.

Nous devrions être entrés dans une nouvelle étape après le vote de la loi audiovisuelle portée par Franck Riester. Mais nous voilà aujourd’hui au point mort, puisque Roselyne Bachelot l’a enterrée en 2020.

Cette loi aurait permis, entre autres, de clarifier le modèle économique et le modèle de financement. Pourtant promise par Emmanuel Macron en 2017, elle semblait indispensable.

Cerise sur le gâteau, on supprime, cet été, au détour du projet de loi de finances rectificative, la contribution à l’audiovisuel public sans avoir pris soin d’évaluer les conséquences de cette mesure ni réfléchi à un mode de financement alternatif pérenne à l’occasion d’un véritable débat dans nos commissions.

Vous le savez, madame la ministre, le groupe Union Centriste, hostile à l’accroissement de la dette publique, souhaitait le report d’une année de suppression, le temps précisément d’une étude sérieuse et d’un débat éclairé.

Aujourd’hui nous actons le fait que le compte de concours financiers « Avances à l’audiovisuel public » est maintenu. Il est alimenté par une fraction du produit de la TVA correspondant au niveau de dépenses prévues par la trajectoire financière des entreprises.

L’incertitude demeure maintenant sur le mécanisme qui sera retenu à compter de 2025 pour financer l’audiovisuel public de manière pérenne. À cet égard, nous regrettons que les préconisations de nos rapporteurs visant à créer une instance indépendante chargée de proposer une évaluation pluriannuelle des besoins de l’audiovisuel public – idée défendue par notre collègue Catherine Morin-Desailly dans des rapports antérieurs – n’aient pas été retenues par le Gouvernement.

Par ailleurs, les crédits inscrits sont certes en hausse, mais doivent être relativisés, car nous avons découvert les effets fiscaux de la suppression de la CAP, données non communiquées lors de l’examen du projet de loi de finances rectificative.

À cela s’ajoute, pour France Médias Monde et Arte, la perte du droit de déduire la TVA, ce qui a pour conséquence d’augmenter leurs charges en 2022 et 2023.

Restent l’inflation et les coûts de l’énergie, qui auront des conséquences non négligeables sur le budget. En dépit des économies réalisées, la hausse affichée des crédits ne suffira donc pas pour compenser toutes ces difficultés.

Nous craignons aussi que ces moyens ne suffisent pas à financer les nouvelles priorités de ces entreprises. France Télévisions doit être structurellement et financièrement capable d’affronter la concurrence et de continuer à financer la création.

Quant à l’audiovisuel extérieur, amené à jouer un rôle essentiel dans le monde troublé et menaçant que nous vivons – l’actualité nous le rappelle chaque jour –, nous sommes inquiets d’un niveau de ressources insuffisant.

Le financement de France Médias Monde et d’Arte n’est en effet plus suffisamment indépendant, une dotation d’État s’étant substituée à une dotation publique. Voilà pourquoi, en l’absence, à ce stade, de mécanisme de financement approprié et inscrit dans une loi organique – ce que préconise ni plus ni moins le rapport demandé à l’inspection générale des affaires culturelles (Igac) – nous ne pouvons que suivre l’avis du rapporteur et nous abstenir sur ces crédits.

Attaché aux missions de l’audiovisuel public, le groupe centriste restera, madame la ministre, particulièrement vigilant et exigeant dans les semaines à venir pour que les missions dont l’audiovisuel public est doté ne soient pas plus longtemps fragilisées et que les personnels soient rassurés sur leur avenir. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Else Joseph. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

Mme Else Joseph. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, alors que les différents secteurs sont touchés par une crise multiforme, la hausse des crédits affectés ne suffit pas à masquer de véritables difficultés sur l’efficacité et la pertinence des dispositifs actuels.

Nous devons déplorer l’absence de véritables réformes pour une meilleure adaptation aux nouveaux enjeux. Les usagers et les usages changent. Les publics n’ont plus les mêmes goûts et les acteurs de l’industrie culturelle proposent de nouvelles démarches. Le numérique est désormais une donnée incontournable dans tous les médias.

Pour l’audiovisuel public, il faut ainsi reconnaître l’absence d’une véritable réforme d’ampleur à la hauteur des attentes.

La suppression de la redevance audiovisuelle est restée avant tout la simple traduction d’une promesse électorale, une décision adoptée sans vision d’ensemble et sans solution concrète pour notre audiovisuel public. Rien n’a été engagé sur son organisation, qui reste nécessaire.

Voilà quelques mois, mes collègues Roger Karoutchi et Jean-Raymond Hugonet proposaient la création d’un « média public puissant et innovant » pour répondre notamment au défi du numérique en raison de la concurrence des plateformes.

Il n’en est rien, malheureusement. Nous sommes loin de nos voisins allemands ou britanniques, qui ont su mettre en place un réseau attractif et reconnu.

La hausse des crédits ne doit pas faire illusion : elle vise surtout à neutraliser les conséquences fiscales de la suppression de la redevance. Le problème du financement des médias publics est prégnant. Si le niveau des recettes est maintenu, rien n’a été fait pour évaluer les besoins de l’audiovisuel public. Et l’horizon 2025 nous inquiète.

Quant à la presse, rien n’a été fait sur la réforme des aides, sauf pour les aides à la distribution. C’est insuffisant. Les rapports entre le système actuel des aides et le contexte numérique n’ont pas été redéfinis.

Dans le cadre du récent rapport de notre collègue Michel Laugier, nous avions émis le vœu que la presse régionale soit mieux aidée pour la digitalisation, en raison de nouveaux usages constatés chez les lecteurs.

Le secteur doit être accompagné pour qu’il puisse se réinventer et trouver lui-même les solutions. Or nous ne les percevons pas.

Pour rester dans le domaine de la culture, nous devons saluer l’attachement des Français au livre. Les ventes de livres sont en hausse, cela a été évoqué. Mais ce qui est gagné d’un côté grâce au goût des Français pour la lecture peut être, hélas ! perdu de l’autre par la hausse des prix du papier, rendant le prix des ouvrages inabordable.

Concernant les frais de port sur les livres, ma collègue Laure Darcos avait déploré un alignement sur le modèle Amazon. Le niveau minimum de frais de port pour les livres est trop faible. Ce n’est pas un message sérieux pour nos libraires et pour l’édition ! L’application de la loi sur l’économie du livre est décevante.

M. Pierre Ouzoulias. Très bien !

Mme Else Joseph. Les éditeurs, les libraires et, au-delà, les lecteurs sont en attente de fortes décisions.

Quant à la musique, il faut noter la poussée continue du streaming. C’est une consommation nouvelle destinée à être pérenne et qui pourrait être une base pour d’éventuelles ressources.

La question du financement du CNM reste posée. Il devient impératif de trouver une solution pour ses recettes, qui sont insuffisantes. Quelles seront les nouvelles ressources adaptées au streaming ? Faudra-t-il une taxe sur cette forme de consommation pour financer le CNM ? Là aussi, nous manquons de perspectives claires.

Parlons à présent du septième art, qui a été, hélas ! lui aussi éprouvé par la crise. Face à la crise sanitaire, le cinéma a symbolisé la vulnérabilité de la culture. Nous sommes sortis des polémiques sur l’ouverture des salles, mais la fréquentation a chuté d’un tiers par rapport à 2019, comme si les contraintes des gestes barrières étaient restées dans les esprits, une véritable jauge mentale qui se substitue aux anciennes.

Parce qu’il manie l’image, le cinéma subit la forte concurrence d’internet et des plateformes numériques. Il y a donc urgence à réviser les soutiens à ce secteur, comme le CNC s’y était engagé en janvier 2020. Nous sommes en attente de décisions fortes.

Comment redonner aux Français, tout simplement, le goût des salles de cinéma ? Voilà un test pour la politique du Gouvernement.

Enfin, la place du jeu vidéo se consolide. Ce secteur a bien résisté à la crise et les perspectives sont prometteuses. La France est bien représentée dans le secteur des jeux ; elle est même une référence. Soutenons la création si nous voulons que notre pays garde sa place, mais il faut prendre en compte la nécessité de préserver les jeunes publics.

Nous déplorons donc l’absence de réformes vitales et nécessaires dans cette mission, alors que des perspectives positives existent. Avec beaucoup de réserves, nous voterons tout de même les crédits de la mission « Médias, livre et industries culturelles ». (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – M. Michel Laugier, rapporteur pour avis, applaudit également.)

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.

Mme Rima Abdul-Malak, ministre de la culture. Madame la présidente, monsieur le président de la commission, madame, messieurs les rapporteurs, mesdames, messieurs les sénateurs, je suis très heureuse de poursuivre avec vous cet examen de la seconde partie du budget du ministère de la culture pour 2023, au travers des crédits de la mission « Médias, livre et industries culturelles » et du compte de concours financiers « Avances à l’audiovisuel public ».

Les enjeux que recouvrent le livre, les médias et notre audiovisuel public sont fondamentaux pour l’avenir de notre démocratie, surtout à un moment où notre pays est confronté, comme la plupart des sociétés démocratiques, à une crise de l’information. Nous sommes dans cette ère de l’immédiateté qu’avait si bien analysée Pascal Josèphe, à qui vous avez magnifiquement rendu hommage, cher André Gattolin – je vous en remercie.

Recul de la confiance des citoyens dans les médias, transformation des usages, perte de repères face à la profusion d’informations diffusées en ligne, fragilisation du modèle économique de la presse : les défis sont nombreux. S’agissant de consolider les acteurs des médias, du livre et des industries culturelles et créatives et de permettre à la France de rester une « puissance de rêve », pour reprendre des mots de Malraux, ce budget pour 2023 se veut ambitieux. Il peut même être qualifié d’historique : 704 millions d’euros de crédits budgétaires, soit 4,3 % de plus que l’année passée, sont alloués à cette mission « Médias, livre et industries culturelles ». Les crédits du compte de concours financiers « Avances à l’audiovisuel public » s’élèvent de leur côté à 3,8 milliards d’euros, soit une hausse d’un peu plus de 3 % par rapport à l’an dernier.

Je m’y étais engagée, cet engagement est tenu. Non seulement la compensation de la suppression de la redevance s’est faite à l’euro près, mais ce budget prévoit une hausse des dotations aux sociétés de l’audiovisuel public visant à prendre en compte les effets fiscaux du changement du mode de financement et compenser les effets de l’inflation.

La mission « Médias, livre, industries culturelles » pour 2023 est orientée autour de plusieurs grandes priorités.

Je veux d’abord évoquer le développement de la lecture, qui m’est très cher, sur tout le territoire, dans la continuité de la dynamique, très forte, qu’avait impulsée l’attribution à la lecture du label de grande cause nationale. S’il ne faisait aucun doute que les Français étaient attachés au livre et à la lecture – vous l’avez tous dit –, la crise sanitaire a été l’occasion de le rappeler et de mettre en lumière notre première industrie culturelle. Les librairies et les maisons d’édition ont été touchées par la pandémie, mais le soutien public a été au rendez-vous, via de nombreux dispositifs sectoriels, sans oublier, pour les deux dernières années, le plan de relance.

Le soutien au secteur du livre doit se poursuivre. Ce budget illustre bien cette ambition : 10 millions d’euros supplémentaires sont consacrés au développement de la lecture sur tout le territoire, au soutien de nos bibliothèques, du réseau des librairies, des maisons d’édition en région, ainsi qu’au renforcement des manifestations littéraires.

Nous lançons également, en lien avec le ministère des solidarités, de l’autonomie et des personnes handicapées, le projet d’une nouvelle plateforme accessible à toutes les personnes en situation de handicap, qui va référencer les livres adaptés à chaque handicap ; 5 millions d’euros sont prévus à cet égard jusqu’en 2025. Des budgets spécifiques seront aussi versés au Centre national du livre pour inciter les éditeurs à adapter davantage de livres pour les personnes handicapées.

En outre, des aides vont être mises en place, via la Centrale de l’édition, pour financer, faciliter, renforcer le transport des livres – +1 million d’euros de dotation. Il s’agit en particulier de faire face aux difficultés d’acheminement, dont vous avez tous conscience, notamment vers les territoires d’outre-mer et, à l’international, vers les librairies francophones ; cet enjeu me tient très à cœur.

Notre mission est également de garantir le pluralisme des médias et l’accès à une information fiable, libre, vérifiée, indépendante. J’y insiste, il y a là un enjeu majeur pour l’avenir de notre démocratie. Dans les mois à venir vont se tenir les États généraux du droit à l’information, auxquels l’ensemble des acteurs concernés vont être associés, ainsi que, bien sûr, tous les parlementaires qui le souhaitent.

Pour le secteur de la presse, l’année 2023 marque la fin du plan de filière « presse », qui était l’un des plans majeurs du plan de relance. Je veux rappeler l’ampleur de ce plan inédit, une enveloppe de 377 millions d’euros ayant permis de financer les transitions écologique et numérique du secteur et de réaffirmer l’attachement de l’État à cette presse si vitale pour notre démocratie.

Le ministère de la culture va continuer à soutenir le secteur. La priorité que nous avions définie avec la filière était la réforme de la distribution, sur laquelle nous avons travaillé depuis déjà plusieurs mois. C’est pour cette raison que le budget est en hausse de 17,3 millions d’euros pour les aides à la diffusion et la compensation du transport postal.

Vous avez raison, mesdames, messieurs les sénateurs, la hausse des coûts, notamment du prix du papier, est une préoccupation forte et légitime des professionnels. Je sais que vous y êtes tous attentifs et nous allons avoir l’occasion d’en parler lors de l’examen des amendements.

Une somme de 2 millions d’euros est également consacrée aux études préalables et au lancement des travaux de la future Maison du dessin de presse, projet très important à mes yeux, lieu d’exposition, de création et de médiation.

Je veux également vous assurer de ma volonté de mener un état des lieux assez complet des aides à la presse, pour travailler à cette réforme que vous appelez de vos vœux. Je ne suis ministre que depuis six mois ; j’ai déjà négocié un bon budget, mais maintenant, je vous l’accorde, nous devons travailler sur cette réforme des aides à la presse, qui n’est pas une mince affaire.

Concernant le secteur des médias, nous continuerons de soutenir les radios de proximité, pour la troisième année consécutive, en augmentant les crédits du fonds de soutien à l’expression radiophonique locale. Il s’agit d’accompagner la croissance du nombre de radios associatives éligibles à ce fonds, de 690 en 2017 à 744 en 2022.

Comme je l’ai dit à propos de la mission « Culture », ce budget permet non seulement de répondre aux besoins immédiats liés au contexte énergétique, mais aussi de préparer l’avenir en mettant la transition écologique de nos établissements et de nos opérateurs au cœur de l’ensemble de nos politiques publiques. Ainsi, 8 millions d’euros supplémentaires, en dépenses de fonctionnement, permettront de soutenir les établissements publics de la mission « Médias, livre et industries culturelles » face à l’inflation. Pour le Centre national de la musique, 900 000 euros sont prévus visant à accompagner la transition écologique du secteur de la musique en 2023 ; c’est une amorce, évidemment.

Je sais que l’enjeu du financement du Centre national de la musique est au cœur de vos préoccupations – vous l’avez tous évoqué. Le sénateur Julien Bargeton vient de commencer sa mission sur le financement de la filière musicale dans son ensemble, mais je veux vous rassurer de manière très claire pour ce qui est du budget pour 2023 : comme je vous l’avais indiqué – j’ai revérifié –, le Centre national de la musique peut compter sur 20 millions d’euros de reliquats du plan de relance, qui vont s’ajouter à son budget pour 2023. N’ayez crainte, l’an prochain, le secteur sera bien accompagné. Et, sur la base des conclusions de la mission, nous pourrons rediscuter ensemble de l’avenir à plus long terme.

Pour ce qui est de nos cinémas, je vous remercie, mesdames, messieurs les sénateurs, de votre engagement en leur faveur. Ce secteur a fait l’objet d’un soutien sans faille et sans précédent du Gouvernement pendant la crise sanitaire, et ce soutien va se poursuivre : le montant des taxes affectées au CNC va atteindre 711 millions d’euros, en légère hausse par rapport à 2022. L’enjeu principal des semaines passées et des mois à venir est évidemment celui de la fréquentation de nos salles de cinéma, vous l’avez tous dit. On s’attend, à la fin de cette année, à une baisse de fréquentation comprise entre 25 % et 30 % – j’espère que l’on sera plutôt autour des 25 %.

Néanmoins, je reste optimiste. Pourquoi ? Je puise cet optimisme dans l’histoire : au début des années 1990, on nous avait prédit la mort du cinéma, que la télévision devait tuer. La fréquentation annuelle avait chuté à 110 millions de spectateurs en 1992. Et puis les salles se sont réinventées, les films ont été au rendez-vous et, petit à petit, le cinéma a remonté la pente, jusqu’à 213 millions de spectateurs en 2019, avant le covid-19. Le sursaut est donc possible. Le cinéma ne fut pas tué par la télévision ; il ne le sera pas non plus par les plateformes.

Cet optimisme, je le puise aussi dans la comparaison avec nos voisins européens – 60 % de baisse de fréquentation en Italie, 40 % en Allemagne ou en Espagne – ou avec la Corée du Sud, où la baisse est de 50 %. Devant de tels chiffres, je me dis que, tout de même, le secteur du cinéma en France a mieux résisté et que les Français restent un peuple de cinéphiles. Nous avons un vrai appétit pour les films français en salle, pour l’émotion sur grand écran, comme a pu le montrer le succès de films comme Revoir Paris, La Nuit du 12, LInnocent, Simone, le voyage du siècle ou encore Novembre.

L’État accompagne fortement cette reprise, notamment grâce au pass Culture, que nous avons précédemment évoqué. Entre janvier et août 2022, 2,5 millions de séances de cinéma ont été réservées via cet outil, appui précieux à la fréquentation des jeunes, qui sont le public de demain.

À ce sujet, vous avez été plusieurs à mentionner le plan France 2030. C’est aussi par le biais de ce plan très ambitieux que l’État accompagne le secteur du cinéma. Madame de Marco, sachez que le ministère de la culture est pleinement impliqué dans ce plan, le CNC étant une administration centrale dudit ministère. Nous sommes entièrement mobilisés sur l’appel à projets « La grande fabrique de l’image », qui vient d’être clos ; quelque 175 dossiers, émanant de 13 régions – voyez la diversité ! –, ont été déposés.

L’objectif est triple : soutenir des infrastructures de tournage ; soutenir des studios de jeux vidéo, d’animation, d’effets visuels, de postproduction ; soutenir des formations, l’enjeu étant de développer les compétences et les talents. Tout cela est dans le plan France 2030, notamment l’appel à projets « La grande fabrique de l’image », qui est très « territorial » et qui coiffe l’ensemble des secteurs des industries créatives.

J’en viens maintenant au compte de concours financiers « Avances à l’audiovisuel public », dont les crédits augmentent de 114,4 millions d’euros, pour atteindre 3,8 milliards d’euros.

Nous avons eu de nombreux débats cet été. Je ne vais pas y revenir, d’autant que mon temps d’intervention est compté. Nous avons pleinement tenu nos engagements. Je l’ai dit et le redis : le PLF pour 2023 apporte une compensation à l’euro près de la redevance et des effets fiscaux liés au changement de financement. Bien sûr, nous avons aussi tenu compte, en partie, de la hausse des coûts de l’énergie ainsi que de l’inflation.

Je ne reviens pas sur tous les chiffres, que j’ai détaillés en commission, mais je veux rappeler que toutes ces hausses, entreprise par entreprise, ont été déterminées par l’État sur la base de projections qui ont été produites par ces entreprises et discutées avec elles.

Nous avons eu l’occasion, à plusieurs reprises, d’échanger sur le calendrier. La trajectoire financière pluriannuelle de l’audiovisuel public va être fixée en deux temps. Dans un premier temps, un avenant au contrat d’objectifs et de moyens (COM) actuel, 2020-2022, va être signé d’ici à la fin de l’année ; y seront fixées les cibles à atteindre et la dotation publique pour 2023.

Dans un second temps, à l’issue de travaux qui vont évidemment associer le Parlement, dans le cadre d’un dialogue nourri avec les entreprises de l’audiovisuel public, de nouveaux contrats d’objectifs et de moyens vont être établis au cours de l’année 2023 et adossés à une trajectoire de dotation pluriannuelle. Je souhaite que ces nouveaux COM aient une durée de cinq ans, de sorte que l’on se donne la plus grande visibilité possible.

J’ai déjà indiqué quelques grands axes prioritaires qui, à mes yeux, doivent guider ces nouveaux contrats d’objectifs et de moyens.

Nous avons parlé de l’information, de sa fiabilité, de son pluralisme.

Nous avons parlé de la jeunesse. Gardons en tête les chiffres récemment publiés pour le Royaume-Uni, dont nous ne sommes plus très loin : les jeunes regardent sept fois moins la télévision que leurs aînés.

Nous avons parlé de la création : nous savons l’importance du financement de la création par l’audiovisuel public.

Nous avons parlé de la proximité et de l’importance de l’audiovisuel extérieur – je vous remercie de l’avoir évoquée – surtout en des temps de grande manipulation de l’information et d’ingérences étrangères.

Voilà, mesdames, messieurs les sénateurs, les quelques priorités que je souhaitais réaffirmer pour cette mission « Médias, livre et industries culturelles ». Telles sont les ambitions que je veux défendre pour l’audiovisuel public. Je salue votre engagement sur ces enjeux et je me réjouis de pouvoir poursuivre avec vous l’échange nourri que nous avons entamé ces derniers mois. J’en ai terminé, en libérant deux minutes pour la suite du débat… (Sourires. – Applaudissements sur les travées du groupe RDPI et sur des travées du groupe UC. – M. Marc Laménie et Mme Monique de Marco applaudissent également.)

Mme la présidente. Merci, madame la ministre ; je vois que vous préféreriez terminer cet après-midi. (Nouveaux sourires.)

Mes chers collègues, je vous rappelle que, pour cette mission, la conférence des présidents a fixé la durée maximale de la discussion à deux heures quinze.

En conséquence, si nous n’avions pas terminé l’examen de cette mission à vingt heures vingt, celui-ci se poursuivrait à la fin des missions de cette semaine.

médias, livre et industries culturelles

Médias, livre et industries culturelles - Compte de concours financiers : Avances à l'audiovisuel public
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2023
État D
Médias, livre et industries culturelles - Compte de concours financiers : Avances à l'audiovisuel public
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2023
État D

Mme la présidente. Nous allons procéder à l’examen des crédits de la mission « Médias, livre et industries culturelles », figurant à l’état B.

ÉTAT B

(En euros)

Mission / Programme

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

Médias, livre et industries culturelles

702 387 108

704 860 321

Presse et médias

372 049 399

371 009 279

Livre et industries culturelles

330 337 709

333 851 042

Mme la présidente. L’amendement n° II-526, présenté par M. Dossus, Mme de Marco, MM. Breuiller, Parigi, Gontard, Benarroche, Dantec, Fernique et Labbé, Mme Poncet Monge, M. Salmon et Mme M. Vogel, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Presse et médias

 

20 000 000

 

20 000 000

Livre et industries culturelles

20 000 000

 

20 000 000

 

TOTAL

20 000 000

20 000 000

20 000 000

20 000 000

SOLDE

0

0

La parole est à M. Thomas Dossus.

M. Thomas Dossus. Madame la ministre, je vous ai bien entendu nous rassurer sur le financement du CNM pour l’année prochaine ; malgré tout, des inquiétudes demeurent, notamment chez les petits acteurs culturels. Même si nous nous félicitons de la mission qui a été confiée à notre collègue Bargeton sur les ressources du CNM, ses conclusions ne devraient être rendues que courant 2023 ; en d’autres termes, sa traduction budgétaire n’aura pas lieu avant 2024.

Dans l’attente, nous proposons, pour soutenir les filières musicales, d’instaurer un fonds doté de 20 millions d’euros pour l’année 2023. Ce bol d’air financier devrait permettre au CNM de passer cette année difficile, avant qu’il ne dispose de ressources pérennes.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Roger Karoutchi, rapporteur spécial. Demande de retrait ou, à défaut, avis défavorable.

Comme l’a dit Mme la ministre, et comme je l’ai moi-même rappelé, les responsables du CNM – nous les avons reçus – n’ont pas de problèmes financiers pour l’année 2023 : ils en ont pour 2024. La mission de Julien Bargeton, décidément à l’honneur (Sourires.), doit nous donner dans quelques mois des orientations. Sur cette base, nous demanderons un réaménagement du budget.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Rima Abdul-Malak, ministre. Demande de retrait également.

Considérez, monsieur le sénateur Dossus, que votre amendement est déjà pris en compte, puisque, je l’ai indiqué, il existe un reliquat d’environ 20 millions d’euros, dont j’ai obtenu le report sur l’exercice 2023. Cette somme va bel et bien abonder le budget pour 2023 du Centre national de la musique, en attendant de préparer l’avenir.

Mme la présidente. La parole est à M. Julien Bargeton, pour explication de vote.

M. Julien Bargeton. J’apporte rapidement des précisions, puisque la mission qui m’a été confiée vient d’être évoquée. Il s’agit de faire le point sur les dispositifs de financement de la filière musicale, en particulier du CNM, d’en faire l’histoire et le bilan, d’en tirer des conclusions, d’analyser le marché, d’objectiver et de documenter la réalité des besoins, et notamment des failles de marché qui justifient l’intervention publique. Il s’agit aussi d’élaborer des scénarios, d’envisager toutes les pistes possibles, avec leurs avantages et leurs inconvénients, et de faire un certain nombre de propositions non seulement sur le CNM, mais aussi, de manière générale, sur la gouvernance, l’organisation et la stratégie de la filière musicale en France.

Par cohérence avec la mission qui m’a été confiée, je ne pourrai donc pas voter cet amendement. En tout cas, j’ai bien entendu les préoccupations qui viennent d’être exprimées, et croyez bien que je m’appuierai aussi sur les travaux du Sénat et sur les nombreuses remarques de mes collègues pour écrire mon rapport.