La ruralité,un atout pour demain à défendre ensemble



Palais du Luxembourg, 28 mai 2003

1ère Table Ronde : La ruralité est-elle encore agricole ?

Entre histoire, géographie et approche sociologique, les intervenants feront la chasse aux idées reçues sur la ruralité. Les ruraux sont-ils encore agriculteurs ? Entre l'exode rural et l'attrait des conditions de vie plus agréables, qui sont les nouveaux ruraux ? Quels sont leurs modes de vie ? Comment répondre à ces nouveaux besoins ? Comment définir une nouvelle identité rurale ?

Président de table ronde Gérard LARCHER Sénateur des Yvelines, président de la commission des Affaires économiques et du plan du Sénat

Mesdames et messieurs, il me revient d'ouvrir cette première table ronde. Je ne pourrais pas le faire, sans avoir salué mes collègues et féliciter Ladislas Poniatowski, membre de la commission des Affaires économiques, pour avoir pris cette initiative. La passion de Ladislas Poniatowski pour la ruralité est une passion partagée. Il la partage aussi avec son intérêt pour la chasse ou la pêche, mais aussi d'autres sujets comme l'énergie. Il n'est que d'avoir suivi ses récentes interventions dans le débat national sur l'énergie, pour savoir que Ladislas Poniatowski est sur ce front-là un parlementaire remarqué et remarquable.

Il faudrait aussi saluer et remercier Gérard César, qui est l'auteur, avec Marcel Deneux, d'un récent rapport sur la politique agricole commune.

Le monde rural est-il encore agricole aujourd'hui ? S'il a traditionnellement toujours été, Pierre Miquel devra nous apporter un précieux éclairage historique. Il semble apparemment qu'il ne le soit plus que marginalement si l'on regarde un certain nombre de chiffres. En effet, l'espace rural défini par l'INSEE est constitué des zones non habitées ainsi que des zones comprenant des communes de moins de 2 000 habitants.

Cet espace, Madame Parisot en précisera la perception tant des urbains que des ruraux, leurs ressentis, leurs vécus, leurs regards sur l'autre. Cet espace, c'est 80 % du territoire national. La population qui occupe cet espace, le ministre l'a dit, représente selon le mode d'estimation une douzaine de millions de personnes. Quelle est la part d'agriculteurs ? Même s'ils sont encore le sel du monde rural, les agriculteurs ne sont que 8 % des actifs ruraux, moins de 3 % de la population active totale. Cette profession diminue en chiffre dans les campagnes où les retraités, les employés et les ouvriers représentent désormais 85 % de la population rurale active et inactive. Monsieur Perrier-Cornet nous renseignera plus précisément sur ces nouveaux propriétaires. De l'espace rural, Robert Buguet évoquera la réaction des artisans et leur évolution.

À en croire le seul calcul arithmétique, le monde rural ne serait donc plus qu'accessoirement agricole. Pourtant, l'agriculture demeure au coeur de l'activité économique des zones rurales. Si les activités de production et d'élevage tendent à voir leur contribution au PIB diminuer, toute une nébuleuse d'activités y étant plus ou moins directement liées ne cessent de prendre de l'ampleur. C'est le cas naturellement pour les coopératives ou les organisations privées, les établissements d'abattage, les industries agroalimentaires, les sociétés de commercialisation du machinisme agricole, les semenciers, les entreprises d'aménagement. Ces activités sont de plus en plus présentes dans le secteur périurbain du paysage rural, sans évoquer les activités liées au bois ou à la chasse. Notre collègue, Monsieur Censi, auteur d'un rapport sur le développement rural apportera un éclairage sur la multiplicité des activités souvent complémentaires que suscitent l'espace rural et ses richesses.

Ce constat établi, comment le monde rural peut-il aborder avec succès le virage du XXI ème siècle ? C'est l'un des objectifs majeurs du projet de loi qu'a évoqué le ministre et qui sera d'ailleurs examiné par notre commission.

Il faudra aborder ce virage en utilisant de nouveaux instruments. Notre Délégué, monsieur Jacquet a beaucoup d'idées dans ce domaine. Les nouvelles technologies de l'information et de la communication sont une chance à saisir, pour favoriser le désenclavement des zones rurales les plus reculées. Ce sont elles qui peuvent permettre aux différents acteurs de la ruralité de valoriser leurs atouts, d'améliorer leur productivité et de rester ouverts à la société et au monde.

L'avenir du monde rural passe aussi par sa capacité à répondre à de nouveaux besoins. À cet égard, une demande très forte concernant le tourisme vert et ses multiples dérivés, (activités culturelles, artisanales, activités d'insertion), est indéniablement une opportunité à saisir. Elle permettra au monde paysan un nouvel enrichissement de son métier millénaire et ce sera aussi pour la ruralité un moyen de diversifier ses activités, ses sources de revenus et d'assurer son avenir dans un environnement largement urbain et postindustriel.

C'est donc autour de ces interrogations fondamentales pour l'avenir de la ruralité que le débat doit s'engager. Mais avant, nous devons avoir à l'esprit, que sans paysan, il n'y aura plus guère de monde rural. La lecture hier d'une tribune, dans le journal La Tribune, d'un des responsables du Fonds monétaire international, me semblait d'une simplification presque infantile. Elle faisait croire que les dotations au soutien de l'agriculture en Europe, était la cause du malheur d'un certain nombre de pays pauvres. Il ne faut pas faire passer l'accessoire devant l'essentiel. Ayons à coeur, au cours de cette journée, que sans paysan, il n'y aura plus de monde rural.

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