1.6. ALLOCUTION DE MONSIEUR JACQUES DONNAY
Sénateur
membre de la commission interparlementaire avec le Japon

Je vous remercie mon cher collègue, car vous êtes non seulement professeur de droit mais vous êtes également maire. Je crois que là vous avez non seulement des qualités intellectuelles, mais vous avez aussi l'expérience.

Mesdames et Messieurs, je suis très heureux d'avoir pour la première fois, parce que je suis un jeune sénateur, la présidence d'une manifestation aussi importante. Je suis heureux à double titre. D'abord, j'ai été député européen pendant cinq ans, et j'ai eu la chance d'appartenir à la commission de la politique régionale, des transports et du tourisme où je m'intéressais à la fois aux collectivités territoriales et aux transports : transport maritime, transport fluvial, transport routier, transport aérien, transport ferroviaire et la réglementation.

D'autre part, j'ai été aussi membre de la commission interparlementaire avec le Japon, et j'ai eu le plaisir d'aller à Tokyo, à la Diète, et de recevoir également dans mon département, les élus japonais, sénateurs, députés, ainsi que Monsieur l'Ambassadeur Matsuura, j'en parlerai tout à l'heure.

D'autre part, je suis moi-même un acteur de cette décentralisation dont vous venez d'avoir une description intéressante. Aujourd'hui sénateur du Nord, j'ai été aussi dans toutes les fonctions qui ont été évoquées tout à l'heure. C'est-à-dire que j'ai été conseiller municipal de Lille pendant 12 ans. J'ai été conseiller de la Communauté urbaine de Lille. J'ai été président du Conseil général du Nord pendant 6 ans. J'ai été conseiller régional également pendant 6 ans, et je suis redevenu conseiller régional. Vous voyez que toutes ces expériences me permettent d'avoir un avis sur l'organisation de la décentralisation et des collectivités en France.

Ce qui a été dit est tout à fait justifié, je n'ai pas un iota à retirer, je crois qu'il est difficile de gérer avec un Etat qui cherche toujours à se désengager de ses actions. Car, comme vous le savez, la décentralisation n'est pas complète ; il y a eu des compétences pour toutes les collectivités, mais malheureusement le financement n'a pas suivi ces compétences. Je parlerai des collèges dans le département du Nord : nous dépensons actuellement pour leur construction 6 fois plus que la somme qui nous a été attribuée par l'Etat en compensation du transfert.

De la même façon à la région pour les lycées. Actuellement, nous sommes en discussion sur la régionalisation des transports, c'est la raison malheureusement pour laquelle je devrai vous quitter si vite. Nous faisons en ce moment une expérience : les transports rapides régionaux nous sont confiés, mais le problème est de savoir si le financement sera en concordance avec la responsabilité. Nous avons, naturellement, des objectifs, mais si l'Etat ne nous donne pas les moyens de les accomplir, on restera toujours au stade initial. Le problème du financement est donc très important.

Il y a une chose importante que je dois vous signaler : la différence entre les départements et les régions, on l'a dit tout à l'heure, nous la subissons. Dans le département du Nord, qui est le plus gros département au point de vue population de France puisque nous avons 2 millions et demi d'habitants, nous avons 79 conseillers généraux, et ces conseillers généraux sont élus par canton, c'est-à-dire dans des circonscriptions géographiques au scrutin uninominal à deux tours. C'est-à-dire que la personne qui représente cette partie du territoire est vraiment celle qui est la plus appréciée par tous les habitants. C'est très important car, quand vous avez 79 conseillers généraux devant vous, vous avez toutes les parties du territoire, aussi bien le Nord, avec les gens de Dunkerque, mais nous avons aussi des gens qui sont presque dans l'Aisne. Nous avons donc vraiment une répartition tout à fait remarquable de la population.

Quant à la région, j'ai quelques réticences sur la façon dont elle est élue, car elle est élue par liste départementale à la proportionnelle. L'avantage, c'est que naturellement, les petites formations politiques sont représentées, quelqu'un qui fait 5 % est représenté, mais d'autre part, comme l'a dit très justement mon collègue, il n'y pas de majorité, car tout le monde est un petit peu représenté.

Mais la conception et la qualité de l'assemblée sont complètement différentes, car elles sont beaucoup plus politiques. Vous pensez bien que si vous avez une élection par liste, dans une liste qui fait entre 10 ou 15 élus, les partis politiques peuvent mettre des gens qui ne peuvent pas être élus au suffrage direct, parce qu'il n'ont pas la même qualité. Par contre, ils peuvent donner des universitaires par exemple, il y en a quelques-uns, mais pas beaucoup, pas assez à mon avis. Mais, le problème est complètement différent. L'assemblée est différente, la représentation est différente et certaines zones ne sont absolument pas représentées.

J'ai une petite angoisse lorsqu'on dit qu'on va avoir une élection régionale, car cela risque d'être encore pire, parce que les élus seront concentrés sur les zones urbaines au détriment des zones rurales, et naturellement cela changera la physionomie. La région Nord-Pas-de-Calais fait actuellement 4 millions d'habitants, et à peu près 1300 communes. C'est donc quelque chose de très important qui mérite une attention particulière, mais comme on l'a dit très justement, toutes les collectivités manquent de moyens. Je ne voudrais pas m'étendre, car c'est un sujet qui me passionne, mais nos amis japonais ont peut-être des informations à recueillir, car nous avons une expérience de cette superposition de collectivités, qui est angoissante dans un sens, mais intéressante : je vous le dis tel que je le sens, tout le monde fait un peu tout. La culture, par exemple, est financée par les communes, par les intercommunalités, par les départements, par la région et par l'Etat. Vous voyez que pratiquement, si vous voulez faire une manifestation, ou si vous êtes une association culturelle, vous allez taper un peu à toutes les portes. C'est bien, mais cela manque de clarté parce qu'il serait mieux d'avoir une compétence en tant que chef de file au moins, pour que l'on puisse savoir à qui il faut s'adresser en premier.

Voilà quelques avis sur cette décentralisation et sur les contacts avec nos amis japonais, que j'ai eu l'occasion de recevoir, alors que j'étais président du Conseil général du Nord à Lille. J'ai eu aussi, à l'occasion de France-Japon, l'Année du Japon en France, d'accueillir des représentants de Nikko.

Retour Sommaire Suite

Page mise à jour le

Partager cette page