II. RAPPORT ASSEMBLÉE NATIONALE N° 2857 TOME III (2010-2011) ANNEXE 1

Observations et décision de la Commission :

Le présent article vise à corriger le fonds de péréquation des droits de mutation à titre onéreux (DMTO) perçus par les départements, instauré par l'article 78 de la loi de finances pour 2010 dans le cadre de la réforme de la taxe professionnelle.

I.- UN FONDS DE PÉRÉQUATION POUR CORRIGER LES INÉGALITÉS GÉOGRAPHIQUES D'UNE RECETTE VOLATILE ET MAL RÉPARTIE

Le fonds de péréquation adopté à l'article 78 de la loi de finances pour 2010, sur l'initiative de M. Marc Laffineur, visait à corriger les inégalités patentes d'une recette fiscale majeure des départements.

A.- LES DMTO : UNE RECETTE POTENTIELLEMENT TRÈS DYNAMIQUE, MAIS TRÈS INÉGALEMENT RÉPARTIE

En vertu de l'article 1594 A du code général des impôts, les départements perçoivent les droits d'enregistrement, ou la taxe de publicité foncière, exigibles sur les mutations à titre onéreux d'immeubles sur leurs territoires respectifs.

1.- Une recette majeure pour les conseils généraux, mais déconnectée de la politique départementale

Dans les budgets des départements, les DMTO représentent une recette fiscale de première importance. Depuis le début des années 2000, leur niveau équivaut à celui de la taxe professionnelle dans les finances départementales et excède de beaucoup celui de la taxe d'habitation ou des taxes foncières.

Depuis 2004, les DMTO représentent structurellement plus d'un cinquième de la fiscalité des départements, lors même que celle-ci a crû continûment sous l'effet de la compensation des transferts de compétences prévus par l'acte II de la décentralisation par des fractions de TIPP ou de TSCA.

PART DES DMTO DANS LA FISCALITÉ DÉPARTEMENTALE

(en milliards d'euros)

2005

2006

2007

2008

Impôts et taxes (y compris TIPP et TSCA)

30,8

33,1

35

36,6

dont DMTO

6,7

7,6

7,9

7,3

soit

21,7 %

22,9 %

22,6 %

20 %

Les DMTO ont été affectés aux départements en compensation de la première vague de transferts de compétences à partir de 1983. Cependant, il s'agit d'une fiscalité particulièrement dépourvue de lien tant avec les compétences des conseils généraux qu'avec la conduite de leurs politiques publiques.

Ainsi, contrairement à la fiscalité directe locale, dont le volume résulte à la fois de taux votés par les départements et de bases qui évoluent indirectement en fonction de la politique départementale, le produit des DMTO procède de deux facteurs exogènes : le nombre de mutations à titre onéreux et leur rythme, d'une part, et le prix auquel sont réalisées lesdites mutations, d'autre part.

2.- Une recette dont le niveau est structurellement très hétérogène

Certes, il serait inexact de penser que le niveau du produit des DMTO dans chaque département est totalement dépourvu de lien avec la démographie, en particulier le volume de population. Néanmoins, les facteurs explicatifs des écarts de recettes constatés d'un département à l'autre relèvent pour l'essentiel du marché immobilier.

Ceci explique très largement les écarts relevés, en particulier lorsqu'ils sont rapportés au nombre d'habitants de chaque département. On observe ainsi que les DMTO sont la recette la plus inégalement répartie entre les départements.

Le tableau suivant montre également que les inégalités de DMTO par habitant sont fortes lorsque la recette est dynamique (2007 ou 2008), mais ne sont pas moins exacerbées lorsque la recette est déprimée (2009).

DMTO PAR HABITANTS : FOURCHETTE NATIONALE ET ÉCARTS À LA MOYENNE

(en euros par habitant)

2007

soit par rapport à la moyenne

2008

soit par rapport à la moyenne

2009

soit par rapport à la moyenne

Minimum

24,9

21 %

28

26 %

22

27 %

Moyenne

120,7

109,7

80,2

Maximum (hors Paris)

290,5

241 %

275,7

251 %

188,6

235 %

Dès lors, il est compréhensible de constater qu'en 2008, par exemple, 17 départements captaient à eux seuls la moitié de la recette nationale, tandis que les 50 départements aux DMTO les plus faibles ne rassemblaient que 17 % du produit national.

3.- Une recette volatile, dont les dynamiques sont très inégales

Par symétrie avec le cycle du marché immobilier, le produit des DMTO est une recette dont la volatilité n'est plus à démontrer, ainsi que la plupart des conseils généraux en ont fait l'amère expérience depuis 2008 après une décennie de forte dynamique.

Cependant, le Rapporteur général souligne que cette volatilité, en particulier lorsque la recette croît, est aussi très inégalement répartie entre les départements.

Ainsi, tandis que le produit national des DMTO a crû de 6,6 % entre 2006 et 2007, on a pu observer que 13 départements avaient enregistré une croissance de plus de 11 % alors que 10 bénéficiaient d'une croissance inférieure à l'inflation, quatre enregistrant même une baisse du produit. A cet égard, il est d'ailleurs frappant de relever que ces inégalités de dynamiques sont elles-mêmes sans aucun lien avec le niveau de la recette par habitant.

B.- LE FONDS CRÉÉ EN 2009 VISE À CORRIGER LES DYNAMIQUES INÉGALES DE DMTO

Au total, il n'est donc pas illégitime de conclure que les DMTO sont une recette dont le niveau comme la dynamique sont très inégalement répartis entre les départements, sans que ceux-ci disposent de la moindre prise sur ce pan important de leur fiscalité.

1.- Une philosophie novatrice : la mutualisation d'une partie des dynamiques les plus rapides

Sur le fondement de ce constat, le fonds de péréquation instauré par l'article 78 de la loi de finances pour 2010 visait, de façon innovante, à péréquer les inégalités de croissance du produit des DMTO entre les départements.

En effet, compte tenu de l'imprévisibilité du niveau de la recette départementale d'un exercice sur l'autre, le fonds a pour objectif de redistribuer ce qui peut largement être considéré comme une recette d'aubaine, lorsque les dynamiques sont très rapides.

Son mécanisme est relativement simple. Lorsque la croissance du produit des DMTO enregistrée d'une année sur l'autre excède deux fois l'inflation, la moitié de cet excédent est reversée au fonds de péréquation. Cette règle permet ainsi de conserver une part importante (plus de la moitié) des dynamiques dans chaque département, tout en mutualisant la partie la plus élevée de ces croissances imprévisibles.

Par ailleurs, une règle de garantie de non contribution a été instaurée afin de protéger les départements dont le niveau des DMTO par habitant est inférieur à 75 % de la moyenne nationale. Cette règle vise donc à conserver aux départements dont les DMTO sont structurellement faibles l'intégralité de leurs dynamiques.

2.- Une redistribution sur un critère de richesse plus large

En outre, le fonds de péréquation créé en 2009 (en vue d'une première application en 2011) a été conçu pour redistribuer les sommes à sa disposition en fonction d'un critère totalement déconnecté des DMTO eux-mêmes, le potentiel financier par habitant. Ceci appelle deux remarques :

- Premièrement, il en découle qu'un même département peut parfaitement être contributeur et bénéficiaire du fonds. Cette situation garantit que le mécanisme du fonds de péréquation ne peut avoir pour effet de pénaliser un département d'ores et déjà défavorisé par la faiblesse de son potentiel financier. Elle assure également qu'un département au potentiel financier très élevé ne sera pas bénéficiaire du fonds, même si sa recette de DMTO est déprimée une année donnée.

- Deuxièmement, le fonds de péréquation n'a pas strictement vocation à corriger les inégalités de DMTO. Son action vise au contraire à exploiter des dynamiques très favorables de DMTO pour corriger des inégalités fiscales et financières plus larges.

Ainsi, la dissymétrie entre le mode d'alimentation du fonds et son mécanisme de reversement génère une forme de double péréquation : elle prévient l'aggravation des inégalités en bloquant une partie des croissances de recettes et elle corrige une partie de ces inégalités en les redistribuant en fonction du potentiel financier.

3.- Les particularismes d'une péréquation sur des droits indirects

Cependant, la novation que constitue ce fonds s'accompagne de spécificités inconnues jusqu'à présent en matière de péréquation.

Il faut tout d'abord noter que la péréquation des dynamiques constitue une véritable péréquation horizontale entre collectivités territoriales, mais qu'elle a pour caractéristique de ne pas prélever sur le « stock » de recettes des départements contributeurs. En effet, le décalage calendaire prévu par le fonds de péréquation consiste à faire le bilan, au terme d'un exercice complet de perception des DMTO, avant d'opérer les prélèvements sur les douzièmes de fiscalité de l'exercice suivant. Or, le produit des DMTO ne peut pas, contrairement à celui de la fiscalité directe locale, être notifié aux conseils généraux en début d'exercice, même à titre prévisionnel. Il est donc versé mensuellement, en fonction des encaissements antérieurs par l'Etat. Pour les départements, la dynamique est donc constatée ex-post .

Le Rapporteur général souligne également que, dans la mesure où il est alimenté par les dynamiques annuelles, le fonds peut ne disposer d'aucune somme certaines années où le produit des DMTO recule en masse. Ainsi, au titre de 2009, aucun département n'aurait contribué au fonds, le seul ayant enregistré une dynamique comptant moins de 75 % de la moyenne nationale des DMTO par habitant. En portant à la fois sur des dynamiques de produits fiscaux et sur des droits indirects, ce fonds procède donc d'une philosophie radicalement nouvelle.

II.- LES CORRECTIONS PROPOSÉES : UN CALIBRAGE PLUS RAISONNABLE DU FONDS DE PÉRÉQUATION

Le présent article propose d'apporter certains ajustements au fonds de péréquation tel qu'instauré en 2009, à quelques mois de son premier exercice de répartition. En dehors de quelques corrections techniques, il vise essentiellement à limiter une alimentation du fonds qui serait massive en 2011, compte tenu du niveau particulièrement bas des DMTO perçus en 2009 par les départements.

A.- LES AJUSTEMENTS PROPOSÉS

Le présent article abroge le 4.5 de l'article 78 de la loi de finances pour 2010 et propose de codifier le dispositif du fonds de péréquation au sein d'un chapitre consacré à la péréquation départementale dans le code général des collectivités territoriales.

1.- Les aménagements techniques

En premier lieu, l'alinéa 12 précise que la population à prendre en considération pour l'application du dispositif, notamment pour le calcul du ratio de DMTO par habitant, est la population dite « DGF », prévue à l'article L. 3334-2 du code général des collectivités territoriales et utilisée pour la répartition des concours de l'Etat. Cette population est celle recensée par l'INSEE, majorée d'un habitant par résidence secondaire.

L'alinéa 10 précise également que la contribution d'un département au fonds de péréquation s'opère par prélèvement sur les douzièmes de fiscalité, prévus à l'article L. 3334-1-1 du code général des collectivités territoriales.

Enfin, l'alinéa 8 modifie le taux d'inflation servant de référence au calcul de la dynamique excédentaire devant être écrêtée au profit du fonds. Dans le dispositif adopté en 2009, une ambiguïté pouvait demeurer sur l'exercice budgétaire de rattachement de ce taux d'inflation. Cependant, il ne fait pas de doute que la volonté du législateur était de comparer la croissance des DMTO au cours d'une année N avec le taux d'inflation prévisionnel au titre de l'année N, tel qu'associé au projet de loi de finances pour l'année N.

Or, le Rapporteur général relève que le présent article propose de décaler d'une année le référentiel de comparaison, en tenant compte non plus de l'inflation prévisionnelle de l'année de perception de la dynamique de DMTO, mais de celle de l'année de reversement par le fonds. Ce décalage paraît peu cohérent, puisque la référence de la dynamique des DMTO à l'inflation n'a de sens que si les deux termes comparés relèvent du même exercice. Ainsi, l'application de la rédaction proposée conduirait à comparer les dynamiques de DMTO en 2010 avec l'inflation prévisionnelle de 2011.

2.- Le « refroidissement » du fonds de péréquation

Le mécanisme adopté en 2009 est entré en vigueur au 1 er janvier 2010, et compare pour la première fois les DMTO perçus en 2010 avec ceux perçus en 2009, en vue de prélever et reverser les sommes en 2011.

Or, 2009 a été une année de repli généralisé du produit des DMTO dans tous les départements (sauf un), conséquence de la crise économique et financière ayant frappé la France. Il s'ensuit que le premier exercice de fonctionnement du fonds de péréquation pourrait être un des plus intenses, en raison du rebond logique du marché immobilier et de la recette fiscale en 2010, par comparaison avec un point très bas du cycle en 2009.

Plusieurs conseils généraux se sont émus du référentiel retenu pour le fonds de péréquation qui pourrait les priver d'une part substantielle des retombées fiscales très importantes du rebond en 2010. Ces départements ont notamment fait valoir que prendre en considération comme point de référence l'année la plus basse du cycle de la recette fiscale assurerait un « effet d'aubaine » à la péréquation. Le Gouvernement a décidé de faire droit à cette revendication des départements aux DMTO les plus dynamiques, et par la même occasion de prévenir le risque que le fonds ne dispose d'aucune somme au titre de certaines années de baisse de la recette (quoique ce risque soit consubstantiel de la construction d'un fonds sur les dynamiques).

C'est pourquoi l'alinéa 5 du présent article propose de comparer le produit des DMTO perçu au titre d'une année, non pas avec ceux perçus l'année précédente, mais avec la moyenne des produits perçus au cours des cinq années précédentes. Il est indéniable que ce recours à la moyenne neutralise en grande partie le niveau des DMTO de 2009, en particulier dans les départements dont la recette est structurellement élevée et qui avaient enregistré des baisses lourdes sur cet exercice.

Par coordination , l'alinéa 6 du présent article prévoit de neutraliser, dans le calcul de cette moyenne, le transfert supplémentaire de DMTO opéré par l'Etat en compensation de la réforme de la taxe professionnelle, qui résulte du 1.2 de l'article 77 de la loi de finances pour 2010. Cette coordination est indispensable afin que la comparaison de la dynamique des DMTO s'opère sur des assiettes comparables.

B.- L'IMPACT DES MODIFICATIONS CONCERNANT L'ALIMENTATION DU FONDS

Les ajustements proposés par le présent article entraîneraient deux types de conséquences : un effet sur l'évolution dans le temps du fonds de péréquation, et un impact sur les montants destinés à la péréquation, qui peuvent être mesurés grâce à l'exercice 2010.

1.- Le passage d'une dynamique annuelle à une dynamique moyenne pluriannuelle

Il convient tout d'abord de noter que la principale correction proposée, c'est-à-dire le recours à la moyenne quinquennale pour étalonner le niveau de référence de la recette fiscale, marque un changement de philosophie du fonds de péréquation, qui conditionnera son évolution sur plusieurs années.

a) La question de la pertinence du recours à la moyenne s'agissant des DMTO

Les DMTO sont une recette fiscale relativement imprévisible. En outre, ils ne frappent pas une assiette localisée assujettie à un impôt annuel sur rôle.

Par construction, la dynamique de la recette fiscale se résume donc pour l'essentiel, comme en matière de droits indirects, à la dynamique de l'assiette, c'est-à-dire à la combinaison de la quantité de mutations à titre onéreux d'immeubles et du prix auquel s'opèrent les transactions.

Par conséquent, si le recours à une moyenne pluriannuelle peut être une méthode pertinente pour apprécier l'historique de la richesse relative d'un département, il ne semble que modérément adapté à la mesure des dynamiques actuelles ou futures du produit fiscal. En effet, dans les faits, comme dans les prévisions budgétaires des départements, ces dynamiques ne peuvent guère être calculées ou anticipées par comparaison avec un historique pluriannuel.

À titre d'exemple, lorsque le conseil général de Loire-Atlantique a construit son budget primitif 2009, il a retenu un produit probable de DMTO de 145 millions d'euros. Cependant, la recette enregistrée n'a été que de 111 millions d'euros sur l'exercice, de sorte que le département a bel et bien dû faire face à une moindre recette de 34 millions d'euros en section de fonctionnement. Le conseil général a donc construit son budget primitif 2010 en retenant une prévision de produit de DMTO de 100 millions d'euros. Or, la projection du produit qui sera encaissé par le département au titre de 2010 s'élève à 182 millions d'euros à la date de publication du présent rapport ( 51 ) . Si ce produit 2010 est rapproché de la moyenne quinquennale antérieure, soit 145 millions d'euros par an, la dynamique sera évaluée à 35 millions d'euros. Pourtant, le conseil général bénéficiera bel et bien d'une dynamique manifestement inattendue et exogène du produit fiscal encaissé de l'ordre de 70 millions d'euros, soit le double.

b) La création d'une inertie propre au fonds de péréquation

De plus, la prise en compte d'une moyenne quinquennale glissante pour mesurer la dynamique du produit fiscal encaissé leste le dispositif à la fois dans les années de croissance et dans les années de décrue. En effet, il est logique que le lissage sur cinq ans des produits génère une certaine inertie du fonds de péréquation par rapport à la volatilité réelle du produit des DMTO.

Cependant, il faut noter que, si cet effet est bien celui recherché dans le cas de l'année 2010, il se poursuivra également au-delà. Ainsi, si pour 2010 et sans doute 2011, le recours à la moyenne a pour effet de neutraliser l'exercice 2009, il faut souligner que le niveau bas de cet exercice continuera de peser sur ladite moyenne jusqu'en 2014. Ainsi, des départements enregistrant une stabilité voire une baisse de produit de 2010 à 2011, ou de 2011 à 2012, par exemple, pourraient néanmoins contribuer au fonds de péréquation au motif que le produit reste dynamique par rapport à la moyenne quinquennale glissante.

Dans l'exemple ci-dessus du département de Loire-Atlantique, il n'est pas certain que le conseil général eût jugé soutenable de cumuler sur une même année à la fois une moindre recette réelle de 34 millions d'euros et une contribution à un fonds de péréquation sur ces mêmes DMTO. Encore ne s'agit-il que d'un département médian où les DMTO représentent moins de 10 % du budget total... tandis que dans certains départements le niveau très élevé des DMTO couvre 20 % à 30 % des recettes de fonctionnement.

2.- Comparaisons chiffrées

L'impact du présent article serait donc indubitablement de réduire les sommes mises à la disposition du fonds en 2011. Les départements contributeurs seraient 12 de moins, et verraient leur contribution divisée par trois.

(en euros)

Texte LFI 2010

Article 61 PLF 2011

montant du Fonds 2011

851 060 089

281 595 141

% des DMTO nationaux redistribués

11,43%

3,78%

nombre de contributeurs 2011

43

31

DMTO/hab moyen des contributeurs, après prélèvements par le Fonds

127,08

144,43

nombre de bénéficiaires

66

66

DMTO/hab moyen des bénéficiaires, après dotation du Fonds

98,94

84,81

Pour info : DMTO/hab moyenne nationale 2009

80,24

80,24

Pour info : DMTO/hab moyenne nationale 2010

111,68

111,68

Cependant, on observe que l'application du texte adopté en 2009 aurait maintenu au profit des départements contributeurs non seulement une dynamique certaine (par construction) mais encore une situation avantageuse par comparaison nationale. En effet, leur moyenne de DMTO par habitant, après mécanisme du fonds, se situerait à 114 % de la moyenne nationale. La proposition du Gouvernement leur permettrait de conserver un écart plus substantiel, à 129 % de cette moyenne.

En revanche, les départements bénéficiaires du fonds (c'est-à-dire dont le potentiel financier par habitant est inférieur à la moyenne), dont les DMTO par habitant ne représenteraient que 89 % de la moyenne nationale en appliquant le texte voté en 2009, descendraient à 76 % de cette moyenne par l'effet du présent article.

*

* *

La Commission examine l'amendement II-CF 238 de M. Marc Laffineur, ainsi rédigé :

I.- À l'alinéa 5, substituer au nombre : « cinq » le nombre : « deux ».

II.- En conséquence, à l'alinéa 6, substituer au millésime : « 2006 » le millésime : « 2009 ».

M. Marc Laffineur. Nous avions adopté l'année dernière un mécanisme de péréquation du produit des DMTO payés au titre de 2009. Cette recette ayant été particulièrement faible cette année-là, le Gouvernement nous propose de moduler cette péréquation à partir de la moyenne des recettes de DMTO sur les cinq dernières années. Cette modification entraînerait une diminution considérable du fonds, qui passerait de 800 à 160 millions d'euros. Il présente cependant l'avantage aux yeux du Gouvernement de réduire le caractère excessivement aléatoire de ce type de recettes. C'est pourquoi je propose de partir de la moyenne des deux dernières années, ce qui porterait le fonds à environ 400 millions d'euros, tout en le pérennisant pour les deux ans qui viennent.

M. le rapporteur général. Votre amendement me semble tout à fait raisonnable puisqu'il permet une péréquation d'environ 6,5 % du produit des DMTO. Le mécanisme que nous avions voté l'an dernier était trop dur, puisqu'il aboutissait à redistribuer 11 % de la recette. En revanche, la version du Gouvernement est trop édulcorée, la péréquation ne portant que sur 3 % de la recette. En régime de croisière, ce mécanisme présentera en outre l'avantage de lisser quelque peu l'alimentation du fonds.

La Commission adopte l'amendement ( amendement n° II-474 ).

Elle examine ensuite l'amendement II-CF 277 de M. Claude Bartolone, ainsi rédigé :

1° Dans le II de cet article, remplacer dans le premier alinéa : «  les deux conditions suivantes » par : « les trois conditions suivantes » ;

2° Ajouter un 3° ainsi rédigé :

« Les dépenses sociales nettes obligatoires par habitant sont inférieures à 125 % de la moyenne nationale ».

M. Claude Bartolone. On ne peut pas décider, comme nous venons de le faire, la péréquation d'une des rares recettes dynamiques des départements sans tenir compte de leurs dépenses sociales, sauf à placer ces collectivités dans une position intenable. Je pense notamment aux départements qui bénéficient de recettes importantes de DMTO mais doivent supporter des charges extrêmement lourdes. Une fois réglées les dépenses sociales obligatoires, il ne reste que 80 millions d'euros au département de Seine-Saint-Denis, alors qu'il en reste 500 aux Hauts-de-Seine... Si on ne prend pas en compte ces différences de charges sociales, la péréquation que vous proposez sera totalement insupportable.

M. le rapporteur général. Je suis défavorable à cet amendement, qui confond deux sujets distincts, celui du prélèvement et celui de sa redistribution : celle-ci ne peut pas être réglée à l'étape du prélèvement.

M. Claude Bartolone. Le texte fixe pourtant des critères de répartition. Comment peut-on minorer les ressources de certains départements sans prendre en compte le poids des dépenses sociales que la loi leur impose ?

M. Henri Emmanuelli. Ce que M. Bartolone veut vous dire, c'est qu'il y a davantage de érémistes en Seine-Saint-Denis qu'à Neuilly...

M. Claude Bartolone. Je parle des dépenses sociales en général. En effet, des départements dont les situations sont totalement différentes se retrouvent dans la même impasse. Ainsi, c'est le vieillissement de sa population qui provoque l'augmentation des charges de la Creuse, notamment de l'allocation départementale personnalisée d'autonomie, l'ADPA, alors que les départements urbains souffrent surtout de l'explosion des dépenses de RMI-RSA.

M. le rapporteur général. Les critères de redistribution tiennent-ils compte des charges des départements ?

M. Marc Laffineur. C'est le cas pour la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises, la CVAE, mais pas pour les DMTO. Il faut quand même dire que les départements de la région parisienne bénéficient de DMTO particulièrement importants. En revanche, certains départements ruraux supportent des dépenses d'APA extrêmement lourdes, un grand nombre de retraités venant s'y installer après avoir travaillé dans les départements plus urbanisés. Il n'y a pas de système parfait, et le nôtre a au moins le mérite d'introduire une certaine dose de péréquation horizontale, sans laquelle il n'y aura point de salut pour notre pays.

M. Thierry Carcenac. En vérité, il n'y a plus de péréquation verticale, et le peu que vous introduisez de péréquation horizontale n'est qu'un pis-aller, qui ne réglera aucun des problèmes sociaux dont souffrent les départements. J'ignore même si le département que je préside arrivera encore dans deux ans à mener les politiques qu'il a l'obligation de conduire, et la péréquation que vous proposez lui donnera à peine assez d'air pour survivre. Aujourd'hui, on nous propose de boucler notre budget avec des avances remboursables.

M. le président Jérôme Cahuzac. C'est de la cavalerie !

M. Thierry Carcenac. Eh bien, sous prétexte que j'ai refusé cette solution, ni l'inspection générale de l'administration ni l'inspection des finances n'ont accédé à ma demande de venir constater la situation de mon département.

M. Claude Bartolone. J'entends vos arguments, monsieur Laffineur, et peut-être que le mécanisme que vous proposez permettra aux départements de sortir de la passe très difficile qu'ils sont en train de traverser. Les dépenses sociales des départements urbains et des départements ruraux sont certes de natures différentes, mais même en admettant le principe de la péréquation, celle-ci ne peut porter que sur les recettes qui restent aux départements. D'après mes calculs, la péréquation que vous proposez conduirait 47 départements à reverser une partie du produit de DMTO. Qu'on me trouve donc 47 départements qui ne connaissent pas une situation financière difficile ! Voilà pourquoi nous acceptons le principe d'une péréquation si celle-ci ne porte que sur le différentiel entre les recettes et les charges des départements.

M. Henri Emmanuelli. Tous les départements vont dans le mur, y compris ceux gérés par vos amis. Une péréquation ne peut pas ne pas tenir compte de réalités qui peuvent être extrêmement différentes. Ainsi, entre les Pyrénées-Orientales et les Landes, deux départements qui comptent à peu près le même nombre d'habitants, le nombre de érémistes varie de un à dix.

M. Claude Bartolone. Par ailleurs, l'article 62 instaurant un mécanisme de péréquation des recettes de CVAE prévoit que les départements éligibles au fonds sont déterminés en fonction, non seulement de leur potentiel fiscal, mais aussi de leurs charges sociales, en prenant en compte des critères tels que le nombre de bénéficiaires de minima sociaux ou des personnes âgées de plus de soixante-quinze ans.

La Commission rejette l'amendement.

Elle examine ensuite l'amendement II-CF 243 de M. Marc Laffineur, ainsi rédigé :

A l'alinéa 8, après le mot : « année », insérer le mot : « précédente ».

M. Marc Laffineur. Je propose de retenir l'inflation de 2010, et non celle de 2011, pour fixer les conditions de la péréquation.

M. le rapporteur général. Favorable.

La Commission adopte cet amendement ( amendement n° II-475 ).

Elle examine ensuite l'amendement II-CF 344 de M. Michel Bouvard, ainsi rédigé :

I.- Le neuvième alinéa de cet article est complété par les mots :

« et le montant par mètre carré des droits visés au 1° du I pour le Département est supérieur à 90% de la moyenne nationale du montant par mètre carré des droits visés au même 1° pour l'ensemble des départements. »

II.- Le dixième alinéa de cet article est ainsi rédigé :

« Cet excédent constaté est partagé en deux sommes égales sur lesquelles sont appliquées respectivement un prélèvement proportionnel à l'écart entre le montant des droits de mutation à titre onéreux départementaux par habitant pour chaque département et le montant moyen des droits de mutation à titre onéreux départementaux par habitant perçus par l'ensemble des départements pour la première part et un second prélèvement proportionnel à l'écart entre le montant des droits de mutation à titre onéreux départementaux par mètre carré pour chaque département et le montant moyen des droits de mutation à titre onéreux départementaux par mètre carré perçus par l'ensemble des départements pour la seconde part. La contribution de chaque département au fonds national de péréquation des droits de mutation à titre onéreux est constituée par la somme de ces deux prélèvements.

Il est effectué sur les douzièmes prévus par l'article L. 3332-1-1 du code général des collectivités territoriales. »

III.- Le onzième alinéa de cet article est ainsi rédigé :

« Les ressources du fonds national de péréquation des droits de mutation à titre onéreux départementaux sont réparties, chaque année, pour moitié entre les départements dont le potentiel financier par habitant, tel que défini à l'article L. 3334-6, est inférieur à la moyenne des potentiels financiers par habitant de l'ensemble des départements, proportionnellement à l'écart entre le montant des droits de mutation à titre onéreux départementaux par habitant pour chaque département et le montant moyen des droits de mutation à titre onéreux départementaux par habitant perçus par l'ensemble des départements et pour l'autre moitié entre les départements dont le potentiel financier par mètre carré, tel que défini à l'article L. 3334-6, est inférieur à la moyenne des potentiels financiers par mètre carré de l'ensemble des départements, proportionnellement à l'écart entre le montant des droits de mutation à titre onéreux départementaux par m² pour chaque département et le montant moyen des droits de mutation à titre onéreux départementaux par m² perçus par l'ensemble des départements. »

M. Michel Bouvard. Cet amendement vise à perfectionner le mécanisme de péréquation par l'introduction d'un critère de superficie, sur le modèle de la part superficiaire de la DGF, afin de mieux tenir compte de la situation des départements à dominante rurale.

M. le rapporteur général. Défavorable. Il n'y a pas de comparaison possible avec la DGF, les droits de mutation n'étant pas liés à la superficie du département.

M. Michel Bouvard. Mais les charges le sont !

M. le rapporteur général. Une telle disposition serait injuste pour les départements à forte densité de population.

La Commission rejette l'amendement.

Puis elle examine l'amendement II-CF 242 de M. Marc Laffineur, ainsi rédigé :

Substituer à l'alinéa 11, les trois alinéas suivants :

« III.- Les ressources du fonds national de péréquation des droits de mutation à titre onéreux départementaux sont réparties, chaque année, entre les départements dont le potentiel financier par habitant, tel que défini à l'article L. 3334-6, est inférieur à la moyenne des potentiels financiers par habitant de l'ensemble des départements :

« - pour un tiers au prorata du rapport la population du département et celle de l'ensemble des départements bénéficiaires tels que définis à l'alinéa précédent ;

« - pour les deux-tiers au prorata du rapport entre le potentiel financier par habitant de l'ensemble des départements et le potentiel financier par habitant du département. »

M. Marc Laffineur. Alors que les modalités de répartition que nous avions instituées l'année dernière étaient peut-être trop favorables aux départements ruraux, le texte du Gouvernement les désavantage à l'excès. Ainsi, la Lozère, à qui six millions d'euros auraient été reversés au titre de la disposition votée l'année dernière, ne bénéficierait plus que de 800 000 euros si le texte du Gouvernement était voté. Voilà pourquoi je propose une répartition un peu plus équitable pour les départements ruraux.

M. le rapporteur général. Favorable.

La Commission adopte l'amendement ( amendement n° II-476 ).

Elle adopte ensuite l'article 61 ainsi modifié .