IV. DÉBATS SÉNAT EN PREMIÈRE LECTURE (SÉANCE DU SAMEDI 3 DÉCEMBRE 2011)

Article 45 bis (nouveau)

M. le président. « Art. 45 bis . - I. - Au premier alinéa de l'article 200-0 A du code général des impôts, le taux : « 6 % » est remplacé par le taux : « 4 % ».

II. - Le I est applicable à compter de l'imposition des revenus de 2012, sous réserve des dispositions spécifiques mentionnées au III.

III. - Pour l'application du I, il est tenu compte des avantages fiscaux accordés au titre des dépenses payées, des investissements réalisés ou des aides accordées à compter du 1 er janvier 2012.

Toutefois, il n'est pas tenu compte des avantages procurés :

1° Par les réductions d'impôt sur le revenu mentionnées aux articles 199 undecies A, 199 undecies B et 199 undecies C du code général des impôts qui résultent :

a) Des investissements pour l'agrément ou l'autorisation préalable desquels une demande est parvenue à l'administration avant le 1 er janvier 2012 ;

b) Des acquisitions d'immeuble ayant fait l'objet d'une déclaration d'ouverture de chantier avant le 1 er janvier 2012 ;

c) Des acquisitions de biens meubles corporels commandés avant le 1 er janvier 2012 et pour lesquels des acomptes au moins égaux à 50 % de leur prix ont été versés ;

d) Des travaux de réhabilitation d'immeuble pour lesquels des acomptes au moins égaux à 50 % de leur prix ont été versés avant le 1 er janvier 2012 ;

2° Par la réduction d'impôt sur le revenu prévue à l'article 199 sexvicies du même code accordée au titre de l'acquisition de logements pour lesquels une promesse d'achat ou une promesse synallagmatique a été souscrite par l'acquéreur avant le 1 er janvier 2012 ;

3° Par la réduction d'impôt sur le revenu prévue à l'article 199 septvicies du même code au titre de l'acquisition de logements ou de locaux pour lesquels une promesse d'achat ou une promesse synallagmatique a été souscrite par l'acquéreur avant le 1 er janvier 2012.

M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° II-362, présenté par Mme Beaufils, MM. Foucaud, Bocquet et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Rédiger ainsi cet article :

I. - Au premier alinéa de l'article 200-0 A du code général des impôts, après les mots : « supérieure à », la fin de cet alinéa est ainsi rédigée : « un montant de 10 000 euros. »

II. - Les dispositions du I. ci-dessus s'appliquent à compter de l'imposition des revenus 2012.

La parole est à Mme Marie-France Beaufils.

Mme Marie-France Beaufils. Cet amendement de fond concerne le plafonnement des niches fiscales, compte tenu des propositions qui sont formulées en matière de dépenses fiscales dans le présent projet de loi de finances.

Si nous sommes opposés à des niches fiscales, ce n'est pas uniquement parce qu'elles nuisent à la situation budgétaire de l'État et qu'elles témoignent de la course au moins-disant fiscal qui caractérise malheureusement l'Europe depuis une bonne trentaine d'années, une tendance sans doute à l'origine des déficits cumulés comme de la dette publique. Non, si nous sommes opposés à ces niches, c'est d'abord parce qu'elles participent d'une rupture du principe d'égalité devant l'impôt, un principe constitutionnel auquel nous tenons.

Priver l'État de ressources parfois importantes au bénéfice de quelques-uns ou d'un nombre limité de contribuables, c'est lui retirer des moyens de répondre aux besoins de la collectivité.

Pour le seul impôt sur le revenu, les niches fiscales se sont élevées à environ 40 milliards d'euros, soit entre les deux tiers et les quatre cinquièmes de son produit !

Il faut donc réduire sensiblement les niches existantes, en les centrant sur quelques principes clés, et non en appliquant un système de rabot aveugle.

Que les particuliers soient incités à faire des dons aux oeuvres d'utilité publique, qu'ils soient aidés parce que leurs enfants sont accueillis en crèche collective ou qu'ils participent à la vie démocratique du pays en aidant le parti politique ou le syndicat de leur choix, tout cela ne me semble pas problématique.

Malheureusement, bien d'autres niches ont été mises en place ces dernières années, et nous en connaissons les coûts. Je pourrais évoquer certaines des aides aux entreprises qui ont été mentionnées précédemment. Pourtant, on nous dit toujours que, dans une économie libérale, nous n'avons pas besoin d'État...

Il est nécessaire de plafonner les niches fiscales pour éviter une trop grande inégalité devant l'impôt. Nous proposons de fixer le plafond à 10 000 euros, rejoignant en cela Mme la rapporteure générale.

M. le président. L'amendement n° II-356, présenté par Mme Bricq, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :

Alinéa 1

Rédiger ainsi cet alinéa :

Le premier alinéa de l'article 200-0 A du code général des impôts est ainsi rédigé :

« 1. Le total des avantages fiscaux mentionnés au 2 ne peut pas procurer une réduction du montant de l'impôt dû supérieure à 10 000 euros. »

La parole est à Mme la rapporteure générale, pour présenter cet amendement et pour donner l'avis de la commission sur l'amendement n° II-362.

Mme Nicole Bricq, rapporteure générale de la commission des finances. L'amendement de la commission vise à abaisser le plafond global à 10 000 euros, et ce sans part variable du revenu imposable.

C'est mesure franche et efficace, dont le rendement - certes, ce n'est pas l'objectif principal - est estimé à 245 millions d'euros, pour 32 500 contribuables concernés, ce qui n'est tout de même pas négligeable.

Nous voulons éviter la multiplication des niches fiscales, dont le plafond global reste élevé, même s'il a été abaissé progressivement à 18 000 euros. Par cet amendement, nous proposons de le ramener à 10 000 euros.

L'amendement n° II-362 a la même finalité, puisqu'il tend aussi à fixer le plafond à 10 000 euros. Toutefois, je demande à ses auteurs de se rallier à l'amendement de la commission.

En effet, à la différence du groupe CRC, qui souhaite réécrire intégralement l'article 45 bis , je suggère juste de le modifier de telle sorte que les crédits d'impôt d'investissement ne soient pas remis en cause durant la phase transitoire de mise en oeuvre du plafond global. Je pense notamment au crédit d'impôt d'investissement productif en outre-mer, que nous venons d'évoquer. Cela préserverait les décisions prises avant le 1 er janvier 2012, qui trouveront leur effet à compter de cette date.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Valérie Pécresse, ministre. Avis défavorable.

Une telle baisse du plafond global des niches fiscales nous paraît excessivement brutale. Comme vous le savez, c'est ce gouvernement qui a plafonné le premier les niches fiscales, d'abord à 25 000 euros, puis à 20 000 euros et, aujourd'hui, à 18 000 euros, avec 6 % du revenu imposable. Dans le présent projet de loi de finances, c'est 18 000 euros avec 4 % du revenu, à la demande du groupe Nouveau Centre de l'Assemblée nationale.

Passer de 18 000 euros à 10 000 euros sans ajout d'une fraction de revenu imposable conduirait à porter un coup très dur au secteur des emplois à domicile et favoriserait le travail « au noir ». Comme vous vous en doutez, ce n'est pas le choix du Gouvernement, surtout en période de remontée du chômage.

M. le président. Madame Beaufils, l'amendement n° II-362 est-il maintenu ?

Mme Marie-France Beaufils. Non, monsieur le président, je le retire au profit de l'amendement de la commission.

Madame la ministre, vous avez indiqué qu'il fallait aider les emplois à domiciles. Mais justement : les personnes qu'il faut aider sont précisément celles qui, compte tenu de leur situation financière, continueraient à bénéficier du dispositif si le plafond global des niches fiscales était ramené à 10 000 euros !

M. le président. L'amendement n° II-362 est retiré.

Je mets aux voix l'amendement n° II-356.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 45 bis , modifié.

(L'article 45 bis est adopté.)