II. RAPPORT ASSEMBLÉE NATIONALE N° 3805 (2011-2012) ANNEXE 37

Observations et décision de la Commission :

Le présent article prévoit la mise en oeuvre d'un fonds national de péréquation des recettes fiscales intercommunales et communales (FPIC), dans le cadre défini l'an dernier à l'article 125 de la loi de finances (n° 2010-1657 du 29 décembre 2010).

I.- LES BASES D'UN FONDS NATIONAL DE PÉRÉQUATION DES RECETTES FISCALES COMMUNALES ET INTERCOMMUNALES (FPIC) ONT ÉTÉ JETÉES EN LFI POUR 2011

En dépit des réformes de la fiscalité locale, les inégalités entre communes ou entre intercommunalités demeurent importantes . Une comparaison entre les niveaux de collectivités démontre ainsi que les plus forts écarts se situent au sein du bloc communal. Ces écarts de richesse atteignent un rapport de 1 pour 2 parmi les régions, en ressources fiscales (1 pour 3 en potentiel financier) ; 1 pour 7 parmi les départements, en ressources fiscales (1 pour 5 en potentiel financier) et dépassent 1 pour 17 pour les communes.

Ce constat a justifié la mise en place de mécanismes de péréquation, destinés à assurer une redistribution des ressources entre collectivités. Jusqu'en 2010, cette péréquation était essentiellement « verticale » - reposant sur une redistribution de l'État vers les collectivités locales - grâce à des dotations attribuées de manière différenciée, en fonction de critères de ressources et de charges ou de contraintes spécifiques.

LES MÉCANISMES DE PÉRÉQUATION

Régions

Départements

EPCI

Communes

Péréquation verticale

Dotation de péréquation des régions

Dotation de fonctionnement minimal

Dotation de péréquation urbaine

Dotation d'intercommunalité

DSU

DSR

Dotation nationale de péréquation

Péréquation horizontale

Fonds de péréquation des recettes de CVAE

Fonds de péréquation des DMTO

Fonds de péréquation des recettes de CVAE

Dotation de solidarité communautaire (facultative)

Fonds de péréquation des recettes communales et intercommunales

Fonds de solidarité de la région Île-de-France

Fonds départemental de péréquation de la TP

Fonds de péréquation des recettes communales et intercommunales

Source : documents annexés au PLF pour 2012.

La réforme de la taxe professionnelle n'a, en tant que telle, pas remis en cause les inégalités entre collectivités ; dans la mesure où elle s'opérait sous condition de garantie individuelle de ressources, celle-ci a reconduit les inégalités antérieures. Toutefois, sur la base des premières évaluations de la réforme votée en 2009, plusieurs mécanismes nouveaux ont été introduits au cours des deux dernières années en loi de finances :

- le fonds de péréquation des droits de mutation à titre onéreux (DMTO) perçus par les départements, créé dans le cadre de la réforme de la taxe professionnelle et instauré à compter de 2010 ;

- les mécanismes de péréquation de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE), prévus par la loi de finances pour 2010 pour les départements et les régions, puis remaniés l'an dernier et qui doivent entrer en vigueur en 2012 ;

- et, enfin, le fonds de péréquation des recettes communales et intercommunales (FPIC), dont le principe a été adopté l'an dernier.

A.- L'ÉLABORATION PROGRESSIVE D'UN CONSENSUS SOUS L'ÉGIDE DU COMITÉ DES FINANCES LOCALES

L'article 125 de la loi de finances pour 2011 , initialement proposé par le Gouvernement, a jeté les bases d'un mécanisme péréquateur permettant de réduire ces inégalités. Il a pu être adopté au terme de longs débats à l'Assemblée nationale, puis au Sénat.

Toutefois, les modalités de prélèvement et de redistribution ont été renvoyées au projet de loi de finances pour 2012. Dans l'intervalle, un groupe de travail constitué au sein du comité de finances locales (CFL) et présidé par le Rapporteur général Gilles Carrez a étudié, avec les services de la DGCL, les différents scénarii envisageables et s'est efforcé de dégager des points de consensus.

De leur côté, les commissions des Finances des deux assemblées ont constitué des missions d'information sur le sujet. À l'Assemblée nationale, cette mission a été confiée à MM. Jean-Pierre Balligand et Marc Laffineur ; elle a présenté, le 21 juin dernier, ses conclusions à l'occasion d'une communication. Un nouvel échange de vues a eu lieu lors de l'audition du directeur général des Collectivités locales, le 21 septembre dernier.

Le présent article reprend le schéma présenté au Comité des finances locales et traduit les choix opérés par le Gouvernement. Il abroge, par conséquent, les orientations votées l'an dernier ( alinéa 57 ) devenues sans objet, à l'exception du VIII de l'article 125 qui gelait sur la base de 2011 la dotation versée aux fonds départementaux de péréquation de la taxe professionnelle (FDPTP).

B.- UN EFFORT SANS PRÉCÉDENT EN FAVEUR DE LA PÉRÉQUATION

Ainsi, les alinéas 2 et 3 du présent article introduisent un nouvel article L. 2336-1 ainsi qu'un nouveau chapitre dans le code général des collectivités territoriales, qui prévoit (au I) la création formelle du fonds à compter du 1 er janvier 2012, conformément aux dispositions déjà votées.

Les alinéas 4 à 6 transposent, au 1° du II de l'article L. 2336-1, la trajectoire retenue l'an dernier (250 millions d'euros en 2012, 500 millions en 2013, 750 millions en 2014) et l'objectif à l'horizon 2015 fixé en montant relatif.

Les recettes fiscales à prendre en compte pour le dimensionnement du fonds sont énumérées au 2° du II ; elles correspondent aux impôts directs locaux perçus par les communes et les établissements publics de coopération intercommunale (communautés de communes, communautés urbaines, communautés d'agglomération et métropoles), c'est-à-dire :

- la taxe foncière sur les propriétés bâties ;

- la taxe foncière sur les propriétés non bâties ;

- la taxe d'habitation, la cotisation foncière des entreprises (CFE) ;

- la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE) ;

- et l'imposition forfaitaire sur les entreprises de réseaux (IFER).

Sur la base des projections établies par la mission Durieux sur « les effets de la réforme de la taxe professionnelle » correspondant aux recettes fiscales communales précédemment énumérées, le volume du fonds devrait atteindre, à l'horizon 2015, un montant de 1,08 milliard d'euros. Le Rapporteur spécial se félicite de l'effort considérable qui serait ainsi consenti en faveur des communes et des intercommunalités les plus pauvres .

II.- UN MÉCANISME ÉQUILIBRÉ AFIN DE CONCILIER LES ASPIRATIONS CONTRADICTOIRES DES COLLECTIVITÉS

A.- QUELS SERONT LES CONTRIBUTEURS AU FPIC ?

1.- Les modalités de prélèvement

Aux termes des alinéas 30 à 32 du présent article , les contributeurs au fonds sont de deux sortes :

- des « ensembles territoriaux » , notion nouvelle définie à l'alinéa 7 (III de l'article L. 2336-1 du code général des collectivités territoriales rassemblant un EPCI à fiscalité propre et l'ensemble de ses communes membres ;

- et des communes isolées , c'est-à-dire qui n'appartiennent à aucun EPCI.

a) La détermination de la contribution

Pour chacune de ces deux catégories, un potentiel financier agrégé (PFiA) est déterminé par les alinéas 15 à 28 qui insèrent un nouvel article L. 2336-2 dans le code . Il se définit comme la somme des bases brutes de certaines impositions communales multipliées par le taux moyen national (c'est-à-dire le potentiel fiscal), à laquelle est ajouté le produit de certaines dotations.

? La détermination du PFiA a été longuement débattue au sein du Comité des finances locales. Sur la base du compromis retranscrit par le texte du Gouvernement, ce potentiel prend en compte les ressources suivantes :

- la taxe d'habitation, les deux taxes foncières ;

- la CFE, la CVAE, l'IFER, la taxe additionnelle à la taxe foncière sur les propriétés non bâties, la taxe sur les surfaces commerciales ;

- le prélèvement sur les jeux de casino, la taxe sur les remontées mécaniques ( 23 ) , la surtaxe sur les eaux minérales, la redevance communale sur les mines ;

- la dotation de compensation de la réforme de la taxe professionnelle (DCRTP) et le Fonds national de garantie individuelle des ressources (FNGIR) communales et intercommunales ;

- la part « compensation » de la dotation forfaitaire, pour les communes, et la dotation de compensation, pour les EPCI, de la suppression de la part salaires.

La clé de calcul intègre également la dotation forfaitaire dont les composantes sont énumérées à l'article L. 2334-7 (de base, proportionnelle à la superficie, complément de garantie, coeur de parc...).

? Le Rapporteur spécial observe que d'autres scénarios intégrant la dotation d'intercommunalité voire la dotation globale de fonctionnement (DGF) elle-même, un temps avancés, sont finalement écartés .

Il apparaît en effet que la dotation d'intercommunalité souffre d'une forte instabilité au gré des recompositions d'EPCI. C'est pourquoi elle a été laissée de côté, dans l'attente de l'achèvement de la nouvelle carte intercommunale. De surcroît, son mode de calcul basé sur le coefficient d'intégration fiscale et le potentiel fiscal aboutirait, en cas de prise en compte dans la détermination des contributeurs, à surpondérer ce dernier critère.

La mission d'information de nos collègues Balligand et Laffineur avait considéré qu'un maximum de ressources locales devait être pris en compte, de manière à créer une assiette large permettant de donner l'image la plus fidèle de la richesse de la collectivité. A ce titre, on peut pointer l'absence de prise en compte notamment des droits de mutation à titre onéreux, de la taxe de séjour, de la taxe locale d'équipement, du versement pour dépassement du plafond légal de densité ou encore de l'imposition forfaitaire sur les pylônes.

Pour justifier le choix opéré, le Gouvernement avance deux séries d'arguments :

- d'une part, les taxes affectées à une dépense spécifique ne sauraient être prises en compte dans la détermination des ressources potentielles d'une collectivité, ce qui exclut la prise en compte de la taxe de séjour forfaitaire, juridiquement affectée, ou encore de la taxe d'enlèvement des ordures ménagères, de la taxe locale d'équipement ;

- d'autre part, le calcul du potentiel financier nécessite d'utiliser des taxes pour lesquelles les données d'assiette et de taux sont connues : c'est pourquoi la taxe locale sur l'électricité et la taxe sur la publicité n'ont par exemple pas été retenues.

S'agissant plus particulièrement des droits de mutation à titre onéreux, une difficulté supplémentaire a conduit à les écarter : les droits des communes de moins de 5 000 habitants ne leur sont pas directement alloués mais font l'objet d'une péréquation départementale ; ces montants sont donc susceptibles de varier chaque année selon les choix du Conseil général. Cette même raison a justifié l'exclusion des sommes versées par les fonds départementaux de péréquation de la taxe professionnelle (FDPTP).

? Comme le prévoyait déjà l'article 125 de la loi de finances initiale pour 2011, ce PFiA constituera le critère unique pour apprécier la richesse des contributeurs .

Toutefois, le seuil de prélèvement qui avait été, l'an dernier, provisoirement fixé à 1,5 fois le potentiel financier par habitant moyen est abaissé à un niveau permettant d'éviter une concentration excessive tandis que la référence à un PFiA moyen national est revue. Les alinéas 30 à 32 du présent article prévoient ainsi que le prélèvement aura lieu dès que le PFiA de l'ensemble intercommunal ou de la commune isolée dépassera 0,9 fois le PFIA moyen de leur groupe démographique .

Pour ce calcul, six strates démographiques sont définies (de 0 à 10 000, 20 000, 50 000, 100 000 et 200 000 habitants) aux alinéas 8 à 14 (IV de l'article L. 2336-1). Cette approche « stratifiée » doit permettre de comparer les collectivités entre elles au sein de catégories relativement homogènes.

Ces groupes démographiques seront composés à la fois d'ensembles intercommunaux et de communes isolées. En effet, du fait de l'achèvement de la carte intercommunale, ces dernières seront amenées à disparaître ; il ne serait pas opportun de recourir à des groupes composés exclusivement de communes isolées. Ce choix permet également, pour l'appréciation de la richesse, de neutraliser les choix locaux de partage des compétences entre les communes et leurs EPCI.

Le Rapporteur spécial souligne que l'utilisation de strates démographiques ne constitue pas une nouveauté pour la prise en compte de l'importance de la population dans le calcul des dotations, comme le rappelle le tableau ci-dessous.

LE RECOURS AUX STRATES DANS L'ATTRIBUTION DES DOTATIONS

Dotation de base

DSU

DSU cible

DSR
bourg centre

DSR péréquation

DSR cible

DNP part principale

DNP majoration

Modalités de prise en compte de l'importance de la population

Coefficient de pondération logarithmique

2 macro-strates (5 000 à 10 000 et plus de 10 000)

2 macro-strates (5 000 à 10 000 et plus de 10 000)

2 macro-strates
(- 10 000 et de 10 000 à 20 000)

15 Groupes démographiques (L.2334-3)

15 Groupes démographi-ques (L.2334-3)

15 Groupes démogra-phiques (L.2334-3)

15 Groupes démogra-phiques (L.2334-3)

De son côté, la mission d'information s'était résolument opposée à la mise en oeuvre de strates, estimant que celles-ci risquaient de multiplier les effets de seuil et proposant une prise en compte spécifique des charges en milieu urbain grâce à un choix judicieux de critères déterminant le reversement.

RÉPARTITION DU PRÉLÈVEMENT DANS UN SCÉNARIO DÉSTRATIFIÉ

pop DGF
totale

Nb
ensembles
intercom-munaux

Nb
communes

Nombre
collectivités

PFIA total

Moyen-ne
PFIA

écart
tvpe
PFIA
/HAB

Nb EI au
dessus
PFIA
moyen

%
EPCI

Nb com au dessus
PFIA
moyen

%
com-munes

< 10 000

9 237 856

1 358

1 534

2 892

6 174 680 760

989 €

361,76

52

4 %

233

15 %

Entre 10 et 20 000

9 590 708

641

38

679

6 994 071 015

43

7 %

27

71 %

Entre 20 et 50 000

11 813 363

356

51

407

10 404 176 797

58

16 %

34

67 %

Entre 50 et 100 000

10 643 765

138

14

152

10 805 794 639

51

37 %

14

100 %

Entre 100 et 200 000

8 901 072

65

1

66

9 621 881 432

36

55 %

1

100 %

sup à 200 000

18 372 739

41

1

42

23 817 553 489

31

76 %

1

100 %

68 560 003

2 599

1 639

4 238

67 818 158 131

271

10 %

310

19 %

Source : direction générale des Collectivités locales, ministère de l'Intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration.

Selon les simulations fournies au groupe de travail du CFL, on ciblerait avec un scénario stratifié 1 125 EPCI et 800 communes isolées, soit respectivement 43 % et 49 % des collectivités représentant 54 % de l'ensemble de la population. Avec un scénario déstratifié, le prélèvement serait concentré sur 271 EPCI et 309 communes isolées, soit respectivement 10 % et 19 % des collectivités représentant 43 % de l'ensemble de la population.

RÉPARTITION DU PRÉLÈVEMENT DANS UN SCÉNARIO À SIX STRATES

Groupes démogra-
phiques

Pop dgf totale

Nb ensembles intercom-munaux

Nb com-munes

Nombre collecti-vités

PFIA total

Moyenne PFIA/
habitant (€)

Écart type PFIA/
Habitant

Nb collectivités au-dessus du PFIA moyen

% collectivités au-dessus du PFIA moyen

< à 10 000

9 237 856

1 358

1 534

2 892

6 174 680 760

668,41

368,25

909

31%

entre 10 et 20 000

6 590 708

641

38

679

6 994 071 015

729,25

267,28

230

34%

entre 20 et 50 000

11 813 863

356

51

407

10 404 176 797

880,68

302,88

144

35%

entre 50 et 100 000

10 643 765

138

14

152

10 805 794 639

1 015,22

319,36

56

37%

entre 100 et 200 000

8 901 072

65

1

66

9 621 881 432

1 080,98

389,98

27

41%

supérieur à 200 000

18 372 739

41

1

42

23 817 553 489

1 296,35

329,23

12

29%

TOTAL

68 560 003

2 599

1 639

4 238

67 818 158 131

989,18

361,76

1 378

33%

Source : direction générale des Collectivités locales, ministère de l'Intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration.

S'écartant des préconisations de la mission, le mécanisme de prélèvement proposé par le Gouvernement repose donc sur une assiette des contributeurs relativement large. Le Rapporteur spécial estime que, de ce fait, l'effort en faveur de la péréquation sera mieux accepté par les grandes collectivités.

COMPARAISON DES EFFETS DE LA PÉRÉQUATION DANS UN SCÉNARIO DÉSTRATIFIÉ ET DANS LE SCÉNARIO À SIX STRATES PROPOSÉ


Source : direction générale des Collectivités locales, ministère de l'Intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration.

b) La progressivité du prélèvement

Conformément à l'alinéa 33 du présent article (2° du I de l'article L. 2336-3) , le prélèvement est reparti en fonction de l'écart relatif entre le PFiA par habitant du bloc territorial (ou le potentiel financier dans le cas d'une commune isolée) et le PFiA moyen par habitant de sa strate démographique, multiplié par la population du bloc (respectivement de la commune).

La formule est la suivante :

Prélèvement = [(PFiA/habitant de l'ensemble intercommunal - PFiA moyen/habitant)/ PFIA moyen/habitant)] x population DGF x valeur de point

Ce mode de calcul garantit une contribution d'autant plus importante que l'écart de richesse par rapport à la moyenne du groupe démographique est important. Il assure, au niveau des ensembles intercommunaux, une contribution moyenne par habitant homogène d'une strate à l'autre, et même légèrement croissante.

Au niveau des communes isolées, le montant de la contribution moyenne par habitant est plus erratique, ce qui fausse l'analyse agrégée (cf. diagramme ci-dessous). Le Rapporteur spécial observe cependant que les communes isolées sont appelées à disparaître avec l'achèvement de la carte intercommunale, ce qui aboutira à un lissage des contributions par habitant moyenne.

COMPARAISON DES CONTRIBUTIONS RESPECTIVES DES ENSEMBLES INTERCOMMUNAUX ET DES COMMUNES ISOLÉES DANS LE SCÉNARIO À SIX STRATES PROPOSÉ


Source : direction générale des Collectivités locales, ministère de l'Intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration.

c) La répartition du prélèvement entre les EPCI, leurs communes membres et les communes isolées

Dans le schéma proposé par le Gouvernement à l'alinéa 34 (3° du I de l'article L. 2336-3) , la répartition interne du prélèvement pourra s'effectuer selon deux modes alternatifs :

- le prélèvement est réparti par les services gestionnaires du fonds au prorata des ressources fiscales de chacune des communes membres et de l'EPCI ;

- ou, par délibération adoptée à l'unanimité, le conseil de l'établissement peut décider une répartition différente des contributions respectives de l'EPCI et des communes membres et déroger ainsi à la répartition de droit commun.

Le Rapporteur observe que les communes membres seront peu incitées à négocier entre elles ; la règle de vote retenue confère, de surcroît, un droit de veto à chaque commune membre. Il paraît donc très improbable que des blocs s'écartent de la répartition strictement proportionnelle.

d) L'articulation avec le Fonds de solidarité des communes de la Région Île-de-France (FSRIF)

L'existence d'un fonds régional de péréquation en Ile-de-France n'empêchera pas qu'un double prélèvement puisse être opéré à la fois en direction du FSRIF et du fonds national.

Toutefois, en application de l'alinéa 26 (II de l'article L. 2336-2) le calcul du potentiel financier agrégé des ensembles intercommunaux et des communes isolées franciliens pourra être minoré de leur contribution au FSRIF ou majoré de leur attribution au titre de ce dispositif.

Les élus de grandes villes s'étaient émus de l'effort qu'allait représenter à compter de 2012 la péréquation pour certaines collectivités. Sur la base des simulations transmises au Rapporteur spécial, la ville de Paris contribuerait dès la première année de mise en place du FPIC à hauteur de 39,3 millions d'euros, qui s'ajouteront à la somme de 130,1 millions d'euros versée au FSRIF.

Le Rapporteur spécial observe néanmoins que d'autres villes franciliennes bénéficieront largement de la péréquation : ainsi, la Communauté d'agglomération du Val de France, qui regroupe Sarcelles, Arnouville, Garges-lès-Gonesse et Villiers-le-Bel, recevrait l'an prochain 1,5 million d'euros au titre du FPIC et 12,8 millions d'euros au titre du FSRIF. D'ici 2015, le flux de péréquation nationale progressera encore puisque le montant du FPIC sera quadruplé.

Pour prévenir d'éventuelles contributions excessives, l'alinéa 35 (4° du I de l'article L. 2336-3) met en place un mécanisme de plafonnement des contributions au titre de l'un ou l'autre des deux dispositifs, ou des deux cumulés, à hauteur de 15 % du PFiA. L'ensemble des collectivités, franciliennes ou non, peuvent en théorie bénéficier de ce plafond.

Selon les informations dont a pu prendre connaissance le Rapporteur spécial, ce plafonnement concernerait davantage les villes moyennes à grandes que les très grandes agglomérations et il bénéficierait tout autant à l'Île-de-France qu'aux collectivités situées dans les autres régions. En pratique, ce plafond ne jouerait qu'à compter de 2015 et il ne concernerait alors, sur la base des simulations réalisées par la DGCL, que quatre collectivités.

e) Un mécanisme classique de quote-part, prélevée sur les ressources du FPIC et destinée aux communes et EPCI d'outre-mer

Le nouvel article L. 2337-4, introduit par les alinéas 37 à 39 du présent article , organise le prélèvement d'une quote-part sur les ressources du fonds au profit des communes et des EPCI à fiscalité propre des cinq départements d'outre-mer et des collectivités de Nouvelle-Calédonie, de Polynésie française, de Saint-Pierre-et-Miquelon et de Wallis-et-Futuna. Le Rapporteur spécial rappelle que ce type de mécanisme est courant pour la répartition des dotations versées par l'État ou par des fonds (deuxième et troisième parts du fonds de mobilisation départemental en faveur de l'insertion) aux collectivités territoriales ; de telles quote-parts permettent de prendre en compte les spécificités de l'outre-mer tout en utilisant les circuits de financement communs à l'ensemble des collectivités du pays.

Le montant de cette quote-part est calculé au prorata de la population de ces collectivités rapportée à celle du pays entier (métropole et outre-mer) et majorée d'un tiers. Ce coefficient est le même que celui utilisé pour la détermination de la quote-part outre-mer de la dotation d'aménagement de la DGF (article L. 2334-13).

La répartition de la quote-part ainsi constituée est d'abord opérée en deux sous-enveloppes , en proportion de la population de deux groupes de collectivités :

- la première sous-enveloppe est destinée aux départements d'outre-mer, à l'exclusion de Mayotte, et elle est répartie entre ceux-ci en fonction de la population ;

- la seconde est versée aux collectivités de la Nouvelle-Calédonie, de la Polynésie française, de Saint-Pierre-et-Miquelon, de Wallis-et-Futuna ainsi qu'au département de Mayotte ; elle est repartie en fonction de la richesse des collectivités et de leurs habitants, en utilisant le même indice synthétique associant le potentiel financier agrégé et le revenu par habitant que pour la redistribution du fonds en métropole.

Compte tenu de sa situation socio-économique, l'incorporation du département de Mayotte dans cette seconde sous-enveloppe assure une redistribution plus importante à son profit.

III.- QUELLES COLLECTIVITÉS BÉNÉFICIERONT-ELLES DE CE MÉCANISME DE PÉRÉQUATION ?

Dans le système proposé par le Gouvernement, une collectivité pourrait être à la fois contributrice et bénéficiaire tandis que d'autre ne seront ni l'une, ni l'autre. La mission d'information de nos collègues Balligand et Laffineur avait également préconisé une telle souplesse. À titre d'exemple, la communauté de communes de Vitry-le-François contribuerait à hauteur de 25 000 euros mais recevrait près de 217 000 euros tandis que la communauté de communes voisine des Côtes de Champagne ne verrait ses ressources ni prélevées, ni abondées.

a) Les modalités de redistribution

Conformément au I du nouvel article L. 2336-5 du code général des collectivités territoriales introduit par les alinéas 40 à 48 , le reversement s'opérera en fonction d'un indice synthétique de ressources et de charges, comme il en existe déjà pour la dotation de solidarité urbaine (DSU) ou la dotation de péréquation urbaine (DGF des départements). Un tel indice permettra une combinaison de critères de ressources et de charges, avec des pondérations spécifiques.

Les critères de charges habituellement utilisés pour la répartition de dotations mesurent les charges générales d'un territoire, qu'il soit urbain ou rural (population, revenu par habitant...) ou prennent en compte des charges spécifiques liées aux caractéristiques physico-financières d'un territoire (longueur de voirie...).

Des critères de ressources peuvent également être utilisés tels que le potentiel financier, l'effort fiscal et, pour les intercommunalités, le coefficient d'intégration fiscale.

L'indice synthétique proposé à l'alinéa 46 n'intègre que deux données pondérées à 50 % : le PFiA et le revenu par habitant . Le critère de l'effort fiscal, qui avait été présenté au groupe de travail, n'a finalement pas été retenu.

IS = ( PFIA moyen de la strate + Revenu moyen national )

Pfia/hab Revenu/hab

La mission d'information avait également écarté l'effort fiscal, estimant que cette prise en compte risquait de pousser les EPCI à augmenter leurs impôts. En revanche, elle s'était prononcée pour des critères de charges plus nombreux et relativement dispersés - de manière à assurer une redistribution efficace - comme le nombre de logements sociaux, la longueur de voirie communale, le nombre d'enfants de 0 à 18 ans en structure ou le nombre d'étudiants.

Comme le prévoit l'alinéa 43 , la prise en compte du PFiA dans cet indice synthétique repose, comme pour le prélèvement, sur la mise en place de six strates démographiques . Le revenu par habitant n'est à l'inverse pas rapporté à une moyenne de la strate mais à une moyenne nationale ( alinéa 44 ).

La mission d'information, qui s'était élevée contre la stratification du prélèvement comme de la redistribution, aura donc partiellement satisfaction.

Sur la base des simulations présentées au Comité des finances locales, 51 % des collectivités seraient bénéficiaires, ce qui représente 36 % de la population. La redistribution paraît donc tout aussi ciblée que sur la base d'un scénario non stratifié (40 % de la population) reposant sur les mêmes critères dans lequel la sixième strate correspondant aux grandes unités urbaines bénéficie moins de la redistribution, avec un nombre de bénéficiaires (collectivités et habitants) comparativement inférieur.

Les collectivités bénéficiaires recevraient en moyenne 10,20 euros par habitant et davantage lorsque leur potentiel financier s'écarte de la moyenne de la strate : par exemple, la communauté de communes de la Thiérache du Centre, dont le potentiel financier atteint 660 euros par habitant contre 887,4 euros en moyenne parmi les ensembles de 20 000 à 50 000 habitants, recevra 312 000 euros (soit 10,81 euros par habitant). Le Rapporteur spécial observe constate néanmoins un écart (9,79 euros redistribués par habitant) au niveau de la première strate qui s'explique, comme pour le prélèvement, par la proportion de communes isolées relativement riches ; ils disparaîtront avec l'achèvement de la carte intercommunale.

REVERSEMENTS AU TITRE DU FPIC

Répartition FPIC

Répartition au sein des ensembles intercommunaux

Communes isolées (hors Paris)

Strates démographiques

Nombre collectivités

Moyenne PFIA utilisée pour calcul
(hors COM)

Nb de contributeurs

Nb de bénéficiaires

Nb de contributeurs nets

Nb de bénéficiaires nets

Nb de contributrices

Nb de bénéficiaires

Nb de contributrices nettes

Nb de contributrices nettes

Inférieur à 10 000

2 971

669

533

859

405

859

701

817

660

811

entre 10 et 20 000

690

732

302

298

275

298

34

14

34

14

entre 20 et 50 000

413

888

160

144

155

144

47

7

47

7

entre 50 et 100 000

154

1 024

73

45

71

45

14

2

14

2

entre 100 et 200 000

66

1 089

36

19

34

19

1

-

1

-

supérieur à 200 000

42

1 296

19

13

18

13

-

-

-

-

Total

4 336

993

1 123

1 378

958

1 378

797

840

756

834

Répartition ensemble des collectivités

Strates démographiques

Nombre collectivités

Moyenne PFIA utilisée pour calcul
(hors COM)

Total Masse prélevée

Total Masse versée

Contribution par habitant des collectivités contributrices
(en euros)

Montant redistribué par habitant des collectivités bénéficiaires
(en euros)

% Pop DGF contributrice

% Pop DGF bénécifiaire

% Collectivités contributrices

% Collectivités bénéficiaires

Inférieur à 10 000

2 971

669

35 924 782

53 530 062

8,39

9,79

44

56

42

56

entre 10 et 20 000

690

732

35 213 959

42 550 509

7,22

10,16

50

43

49

45

entre 20 et 50 000

413

888

44 514 513

41 348 213

7,05

10,23

53

34

50

37

entre 50 et 100 000

154

1 024

35 739 927

32 670 335

5,65

11,01

59

28

56

31

entre 100 et 200 000

66

1 089

32 346 690

26 580 479

6,40

10,56

57

28

56

29

supérieur à 200 000

42

1 296

66 260 125

53 320 401

6,55

10,02

55

29

45

31

Total

4 336

993

249 999 996

250 000 000

6,76

10,20

54

36

44

51

Il faut en outre préciser que les reversements du FPIC seront opérés par voie de douzième, comme le prévoit l'alinéa 52 (III de l'article 2336-5).

b) La répartition des sommes reversées entre les EPCI, leurs communes membres et les communes isolées

Le pivot du système de redistribution sera l'intercommunalité, comme le prévoyait déjà la LFI pour 2011 et comme le rappelle l'alinéa 40 du présent article : les attributions au titre du FPIC seront calculées à l'échelle du territoire intercommunal , par parallélisme avec le prélèvement.

En revanche, la redistribution de l'EPCI vers ses communes membres pourra s'opérer selon un accord local comme le proposait la mission.

Un système à trois étages est proposé par le Gouvernement au II de l'article L. 2336-5 ( alinéas 49 à 51 ) :

- la loi fixe par défaut les modalités de répartition de la redistribution entre l'EPCI et ses communes, au prorata de la part respective des ressources fiscales de l'EPCI et de ces communes membres ( alinéa 48 ) ;

- par accord local à la majorité qualifiée, l'EPCI et ses communes membres pourraient décider d'opter pour un système alternatif, par exemple en fonction du coefficient d'intégration fiscale afin d'opérer la répartition du reversement entre l'EPCI et ses communes puis en fonction des ressources pour le reversement entre les communes ( alinéa 50 ) ;

- enfin, à l'unanimité, l'EPCI et ses communes pourraient opter pour une répartition selon des critères librement fixés par leurs soins ( alinéa 51 ).

Le Rapporteur spécial observe que ce schéma, qui repose sur des règles de majorité contraignante, risque en pratique d'aboutir systématiquement à une répartition sur la base des critères légaux, au détriment de la négociation locale.

c) Une garantie non renouvelable en cas de sortie du dispositif

L'alinéa 53 , qui insère un article L. 2336-6 dans le code général des collectivités territoriales, prévoit une clause de sauvegarde pour les ensembles intercommunaux et les communes isolées qui, au-delà de la première année de fonctionnement du fonds, cesseraient d'être éligibles au reversement.

Ces collectivités percevront pendant un an une attribution représentant la moitié de celle perçue l'année précédente. Les sommes correspondantes seront prélevées sur l'enveloppe du FPIC avant répartition.

Le Rapporteur spécial accueille favorablement ce mécanisme, qui assurera une sortie progressive du fonds et évitera tout effet de seuil.

Enfin, l'alinéa 58 renvoie à un décret en Conseil d'État le soin de fixer les modalités d'application du présent article.

La Commission est saisie de l'amendement n° II-CF-47 de M. Jean-Pierre Balligand.

M. Jean-Pierre Balligand. Cet amendement de repli vise à dédoubler la strate des moins de 10 000 habitants pour distinguer les ensembles intercommunaux de moins de 2 500 habitants de ceux dont la population est comprise entre 2 500 et 10 000 habitants ; ces derniers rassemblent des communes qui supportent des charges de centralité les plaçant dans une situation différente de celle des plus petites communes.

M. Gilles Carrez, Rapporteur général. La situation des ensembles intercommunaux comptant 8 000 à 10 000 habitants mérite effectivement un examen attentif.

M. le Président Jérôme Cahuzac. L'adoption de cet amendement serait utile, à tout le moins pour cette question soit traitée en séance publique.

La Commission adopte l'amendement II-CF-47 (amendement n° 66) .

La Commission est saisie de l'amendement n° II-CF-76 rectifié de M. Michel Bouvard.

M. Michel Bouvard. Cet amendement vise, par coordination avec celui adopté à l'article 55, à ne pas prendre en compte la taxe communale sur les remontées mécaniques dans le calcul du potentiel financier agrégé.

Suivant l'avis favorable du Rapporteur spécial et du Rapporteur général, la Commission adopte l'amendement n° II-CF-76 rectifié présenté par M. Michel Bouvard (amendement n° 67) .

La Commission est saisie d'un amendement n° II-CF-106 présenté par M. Bernard Carayon.

M. Bernard Carayon, Rapporteur spécial. Cet amendement vise à créer un préciput pour rectifications au sein du fonds national de péréquation des recettes intercommunales et communales afin de prélever, avant la répartition des attributions au titre de l'année, le montant nécessaire à la correction des éventuelles erreurs au titre de l'année précédente.

La Commission adopte l'amendement n° II-CF-106 (amendement n° 68) .

La Commission adopte l'article 58 ainsi modifié .