M. François PATRIAT, rapporteur spécial

II. LE BUDGET 2013 : RÉPONDRE À L'URGENCE ET PRÉPARER L'AVENIR

A. UNE HAUSSE DES CRÉDITS EN FAVEUR DES POLITIQUES ACTIVES DE L'EMPLOI

Pour 2013, les crédits de la mission « Travail et emploi » s'établissent à 10,3 milliards d'euros de crédits de paiement (CP), en augmentation de 2 % par rapport à 2012 (10,1 milliards d'euros), et traduisent sur le plan budgétaire le renforcement des moyens de l'Etat pour faire face à la montée du chômage.

La priorité donnée par le Gouvernement aux politiques actives de l'emploi se mesure tout particulièrement aux montants des autorisations d'engagement (AE). Les crédits ouverts en AE pour 2013 connaîtront une hausse de 2,37 milliards d'euros, soit 23,5 % de plus (12,44 milliards d'euros contre 10,07 cette année), pour financer la mesure phare du programme présidentiel : les 100 000 emplois d'avenir créés l'année prochaine, qui présentent un coût de 467 millions d'euros en CP et 2,32 milliards d'euros en AE afin d'assurer le financement pendant une durée de 1 à 3 ans des contrats souscrits en 2013.

Décomposition des crédits de paiement de la mission « Travail et emploi »

(en milliards d'euros)

LFI 2012

PLF 2013

Solde 2012/2013

Variation 2012/2013

Programme 102 - « Accès et retour à l'emploi »

5,37

5,70

0,33

6,15%

Programme 103 - « Accompagnement des mutations économiques et développement de l'emploi »

3,91

3,75

-0,16

-4,09%

Programme 111 - « Amélioration de la qualité de l'emploi et des relations du travail »

0,08

0,08

0

0 %

Programme 155 - « Conception, gestion et évaluation des politiques de l'emploi et du travail »

0,74

0,78

0,04

5,41%

Totaux

10,1

10,31

0,21

2,08%

Source : d'après le projet annuel de performances « Travail et emploi » pour 2013

Le périmètre de la politique de l'emploi représente 9,4 milliards d'euros , soit 91 % des crédits de la mission, répartis entre les deux programmes suivants :

- 102 « Accès et retour à l'emploi » (5,7 milliards d'euros en CP) ;

- 103 « Accompagnement des mutations économiques et développement de l'emploi » (3,7 milliards d'euros en CP).

Si l'augmentation des crédits du programme 102 (+6,15 %) reflète l'impact budgétaire de la création des emplois d'avenir, la réduction de la dotation du programme 103 n'est qu'apparente et résulte d'un changement de périmètre se traduisant par un transfert de crédits de 250 millions d'euros, ainsi que cela sera expliqué ci-après dans le chapitre II consacré à l'examen par programme. En réalité, hormis cette modification d'affectation de crédits, les moyens du programme 103 progresseraient de 94 millions d'euros.

Les deux autres programmes de la mission relevant des moyens de gestion des politiques du travail et de l'emploi comportent les crédits suivants :

- 111 « Amélioration de la qualité de l'emploi et des relations du travail » (78,8 millions d'euros) ;

- 155 « Conception, gestion et évaluation des politiques de l'emploi et du travail » (782,6 millions d'euros) 3 ( * ) .

Enfin, entre dans le champ de compétences de votre rapporteur spécial le compte spécial « Financement national du développement et de la modernisation de l'apprentissage » (CAS « FNDMA »), créé en 2011, dont le montant des dépenses pour 2013 est fixé à 825 millions d'euros , contre 575 millions pour 2012.

Ainsi que le met en évidence le diagramme ci-dessous, l'exercice 2013 met un terme à la décrue des crédits constatées depuis 2008.

Répartition des crédits votés en LFI et évolution de 2008 à 2013

(en milliards d'euros)

Source : d'après le projet annuel de performances « Travail et emploi » annexé au projet de loi de finances pour 2012

La mise en oeuvre des priorités du Gouvernement pour l'emploi se traduit principalement par :

- la création des emplois d'avenir (467 millions d'euros en CP) ;

- le maintien des contrats aidés (390 000 contrats en 2013 pour un coût de 1,67 milliard d'euros) ;

- le renforcement des moyens humains et financiers de Pôle emploi par le recrutement de 2 000 CDI (107 millions d'euros), portant la subvention pour charges de service public de 1 360 millions d'euros en 2012 à 1 467 millions pour 2013 ;

- le dispositif d' aide au poste des entreprises adaptées , qui croît de 22,9 millions d'euros passant ainsi à 289,86 millions d'euros ;

- la dotation pour l' activité partielle , qui augmente de 40 millions d'euros (70 millions d'euros pour 2013) afin de retrouver le niveau de consommation de 2011 ;

- les dispositifs AFPA certification et PAS formation professionnelle, qui sont abondés de 74 millions d'euros (1,6 million d'euros en 2012) ;

- la rémunération des stagiaires (publics fragiles et actions qualifiantes), réintégrée au programme 103 pour un montant de 185,7 millions d'euros, après avoir été débudgétisée en 2012 et financée par le prélèvement de 300 millions d'euros sur le FPSPP. Aucune nouvelle ponction n'est prévue en 2013 sur ce fonds.

B. UNE PARTICIPATION À L'EFFORT DE MAÎTRISE DES DÉPENSES PUBLIQUES

La mission participe à l'effort de réduction du déficit public avec :

- la non reconduction du dispositif des contrats d'autonomie (46 millions d'euros), lesquels ont vocation à être repris par le dispositif des emplois d'avenir ;

- la réduction des moyens en personnel du ministère (- 141 ETPT dans le nouveau périmètre de la mission qui intègre désormais les personnels de la délégation générale à l'emploi et à la formation) ;

- la suppression de l'exonération de cotisation sociale liée au régime de l'auto-entrepreneur, soit une économie de 65 millions d'euros.

Au total, hors contribution au compte d'affectation spéciale « Pensions » (191 millions d'euros), les crédits de la mission s'établissent à 10,12 milliards d'euros (dont 447 millions d'euros de masse salariale). Ce montant s'insère dans l'épure du budget triennal pour la période 2013-2015.

Programmation pluriannuelle de la mission « Economie »
hors CAS Pensions

(en milliards d'euros)

2012

2013

2014

2015

Loi de programmation 2011-2014

9,87

9,02

2 ème loi de programmation 2013-2017

-

10,12

9,67

9,74

Loi de finances initiale pour 2012

10,01

(soit 9,95 au format retraité du PLF 2013

-

-

-

Projet de loi de finances pour 2013

-

10,12

-

-

Sources : projet de loi de programmation pluriannuelle des finances publiques pour la période 2011-2014 et projet annuel de performances 2013 de la mission « Economie »

On observe donc que le renforcement des crédits de la mission est significatif, plus d'un milliard d'euros par rapport à la programmation pluriannuelle précédente, indépendamment de l'augmentation naturelle des dépenses de personnel liées au GVT (638 millions d'euros en 2013 contre 600 millions cette année).

La réduction programmée des crédits à l'horizon 2015 est de 3,75 % et s'inscrit dans une hypothèse de réduction de la courbe du chômage à la fin 2013. Par ailleurs, le relèvement des crédits de la mission en 2015 par rapport à 2014 est lié à la montée en puissance maximale des emplois d'avenir (100 000 en 2013 et 50 000 en 2014) dont la durée est de trois ans.

L'ensemble des moyens de fonctionnement (+ 5,1 %) et d'intervention (+ 1 % %), à l'exception de ceux de titre 6 du programme 103 du fait des économies présentées ci-dessus, progressent ainsi que l'expose le tableau ci-après.

Décomposition par titres des crédits de paiement de la politique de l'emploi

(en milliards d'euros)

LFI 2011

PLF 2012

Solde
2012/2011

Variation
2012/2011

Programme 102 « Accès et retour
à l'emploi »

Titre 3 : dépenses de fonctionnement

1,51

1,58

0,07

4,6%

Titre 6 : dépenses d'intervention

3,86

4,12

0,26

6,7%

Programme 103 « Accompagnement
des mutations économiques
et développement de l'emploi »

Titre 3 : dépenses de fonctionnement

0,06

0,07

0,01

16,7%

Titre 6 : dépenses d'intervention

3,85

3,67

-0,18

-4,7%

TOTAUX

Titre 3 : dépenses de fonctionnement

1,57

1,65

0,08

5,1%

Titre 6 : dépenses d'intervention

7,71

7,79

0,08

1,0%

Source : d'après le projet annuel de performances « Travail et emploi » pour 2013

C. UNE PRÉFIGURATION DES CHANTIERS DU QUINQUENNAT EN FAVEUR DE L'EMPLOI

Le budget pour 2013 vise à répondre à l'urgence de la crise que traverse l'économie française qui n'a pas retrouvé le niveau d'activité et d'emploi d'avant 2008. Le chômage touche 10 % de la population active contre 7,5 % en 2007.

Pour relever le défi du redressement productif et de l'emploi, la méthode lancée par le Gouvernement, avec l'ensemble des partenaires sociaux, au travers de la « grande conférence sociale » des 9 et 10 juillet dernier et de la commande, à Louis Gallois, commissaire général à l'investissement, d'un rapport pour la compétitivité, la croissance et l'emploi, a abouti à des résultats concrets : la définition d'une feuille de route sociale et le lancement, le 6 novembre 2012 par le Premier ministre, du pacte national pour la croissance, la compétitivité et l'emploi.

Les accords et décisions issus de ces deux processus auront vocation à compléter les dispositifs financés par le budget de la mission « Travail et emploi » pour 2013 qui ne constitue donc que le premier étage de la politique en faveur de l'emploi.

1. La feuille de route sociale

L'adoption de la loi n° 2012-1189 du 26 octobre 2012 portant création des emplois d'avenir constitue une première traduction, tant sur le plan juridique que budgétaire, de la consultation lancée cet été auprès des partenaires sociaux et des acteurs territoriaux.

Elle préfigure le lancement des contrats de génération qui ont pour objectif l'insertion professionnelle durable des jeunes et le maintien en emploi des salariés seniors 4 ( * ) . Un accord est intervenu entre les partenaires sociaux le 19 octobre dernier et un projet de loi devrait être présenté par le conseil des ministres le 12 décembre prochain afin d'être discuté en janvier au Parlement.

Cette seconde mesure phare du programme présidentiel qui prévoit de créer 500 000 contrats de générations sur cinq ans, soit 100 000 par an, devrait ainsi trouver une traduction budgétaire dès 2013.

2. Le pacte national pour la croissance, la compétitivité et l'emploi

Avec la croissance et la compétitivité, toutes les mesures du pacte ont vocation à soutenir l'environnement productif et l'emploi. Parmi les 35 décisions énumérées par le séminaire gouvernemental, six concernent plus particulièrement l'emploi et la formation professionnelle :

- la décision n° 1 vise à alléger de 20 milliards d'euros , avec une montée en charge progressive sur 3 ans (10 milliards d'euros dès la première année), les coûts des entreprises via un crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi (CICE). Celui-ci serait calculé en proportion de la masse salariale brute de l'entreprise hors salaires supérieurs à 2,5 fois le SMIC. Les entreprises bénéficieraient du CICE pour la première fois sur leurs impôts au titre de l'exercice 2013 ;

- la décision n° 20 vise à assurer une évaluation permanente de l' adaptation de l'offre des formations aux besoins de compétences des employeurs et amorcer dès 2013 la mise en place d'un nouveau service public de l'orientation, du secondaire au supérieur, fondé sur une approche « Métiers-Qualifications » ;

- la décision n° 21 a pour objet de créer, dès 2013, dix plateformes territoriales d'appui aux mutations destinées à mobiliser les principaux acteurs dans des bassins où les enjeux pour l'emploi et le développement économique sont particulièrement prégnants, afin de répondre aux besoins en ressources humaines des TPE et PME. Il s'agit de guichets uniques rassemblant sur un même territoire l'ensemble des acteurs de la formation et de l'emploi ;

- la décision n° 22 vise à renforcer la place des entreprises au sein de l'enseignement technique et professionnel , en systématisant leur présence au sein des instances de gouvernance de ces structures ;

- la décision n° 23 est destinée à favoriser l'embauche de jeunes en apprentissage dans les PME avec l'objectif de 500 000 apprentis en 2017 ;

- enfin, la décision n° 24 proposer aux partenaires sociaux de discuter des modalités de mise en place d'un compte individuel de formation attaché à la personne et non au statut, dans le cadre des travaux du conseil national de la formation professionnelle tout au long de la vie.


* 3 Ces deux programmes relèvent de la compétence de notre collègue Serge Dassault.

* 4 Il s'agit de faciliter l'embauche en CDI de jeunes tout en maintenant les seniors dans l'entreprise. Ce dispositif vise à répondre aux deux principales victimes du chômage en France : les jeunes de moins de 25 ans et les seniors de plus de 57 ans. 22% des jeunes Français de moins de 25 ans sont au chômage et seulement 43,5 % des 55-64 ans sont en emploi (Insee).