MM. Georges PATIENT et Eric DOLIGÉ, rapporteurs spéciaux

LES PRINCIPALES OBSERVATIONS
DE VOS RAPPORTEURS SPÉCIAUX

Vos rapporteurs spéciaux se réjouissent que, dans le contexte de redressement des finances publiques, l'effort budgétaire et financier en faveur des outre-mer soit préservé . Ainsi, les crédits de la mission « Outre-mer » sont en hausse de 1 % par rapport à 2013 .

S'agissant de la défiscalisation, vos rapporteurs spéciaux considèrent qu'après la réforme importante prévue par l'article 13 du présent projet de loi de finances, ces dispositifs doivent désormais être stabilisés, que ce soit en ce qui concerne le montant global - l'aide à l'Outre-mer ne doit pas diminuer - ou dans les dispositions juridiques - les investisseurs ont besoin de stabilité et de visibilité.

Ils regrettent que la dette de l'État envers les organismes de sécurité sociale au titre de la compensation des exonérations de charges reparte à la hausse et atteigne près de 80 millions d'euros en fin d'exercice 2012.

Vos rapporteurs spéciaux s'inquiètent également du retour d'une dette de l'État envers les organismes de logement social , du fait d'une sous-budgétisation chronique (en CP) de la LBU, qu'ils n'ont eu de cesse de dénoncer. Après avoir atteint un sommet de 115 millions d'euros en 2006, celle-ci avait été ramenée à 7 millions d'euros fin 2011. Elle atteint fin 2012 plus de 40 millions d'euros et pourrait atteindre 80 millions d'euros en 2013, d'après les informations recueillies.

Ils déplorent également le taux relativement faible d'engagement des contrats de projet État-régions dans les quatre DOM , dont le niveau est bien inférieur à celui de métropole.

Enfin, s'agissant de leur contrôle sur l'aide au fret, vos rapporteurs spéciaux souhaitent que la procédure de guichet unique, mise en place à La Réunion, puisse être étendue, afin d'alléger les procédures administratives applicables et ainsi faciliter le recours à ce dispositif. Ils s'inquiètent également que les crédits inscrits puissent se révéler désormais insuffisants, au regard des besoins.

L'article 49 de la loi organique relative aux lois de finances (LOLF) fixe au 10 octobre la date limite pour le retour des réponses aux questionnaires budgétaires.

À cette date, 48 % des réponses étaient parvenues à vos rapporteurs spéciaux en ce qui concerne la mission « Outre-mer ».

PREMIÈRE PARTIE
LA MISSION « OUTRE-MER »

I. DANS LE CONTEXTE DE REDRESSEMENT DES FINANCES PUBLIQUES, LA PRÉSERVATION DE L'EFFORT BUDGÉTAIRE ET FINANCIER EN FAVEUR DE L'OUTRE-MER

A. UNE MISSION PRÉSERVÉE

La comparaison, à périmètre courant, des crédits demandés par le présent projet de loi de finances aux crédits votés dans la loi de finances pour 2008, année de stabilisation de la maquette budgétaire de la mission, met en évidence deux périodes distinctes, comme l'illustre le graphique ci-dessous.

Évolution des crédits de paiement de la mission « Outre-mer »

Source : commission des finances

Entre les années 2008 et 2010, le montant des crédits de paiement (CP) de la mission a fortement augmenté (+ 17,7 %), avant de se stabiliser depuis lors.

En 2014, dans le contexte de redressement de nos finances, au nom duquel les dépenses publiques vont diminuer de 15 milliards d'euros, la mission « Outre-mer » se voit préservée, puisque ses crédits sont en augmentation d'un peu plus de 1 %.

Les autorisations d'engagement (AE) connaissent pour leur part une légère baisse de 2 %.

Évolution des crédits des deux programmes de la mission

(en millions d'euros)

AE ouvertes en LFI pour 2013

AE demandées pour 2014

Évolution

CP ouverts en LFI pour 2013

CP demandés pour 2014

Évolution

Programme n° 138 « Emploi outre-mer »

1 404

1 404

+ 0,01 %

1 393

1 388

- 0,40%

Programme n° 123 « Conditions de vie outre-mer »

784

744

- 5,16 %

646

673

+ 4,19 %

Total de la mission « Outre-mer »

2 188

2 148

- 1,84 %

2 039

2 060

+ 1,05%

Source : projet annuel de performances annexé au projet de loi de finances pour 2014

On observe que les deux programmes connaissent une évolution différente, avec une stabilisation du programme 138, tandis que les CP du programme 123 connaissent une augmentation significative (+ 4 %) mais une diminution en AE (- 5 %).

B. UNE PROGRAMMATION TRIENNALE 2013-2015 RESPECTÉE

La loi de programmation des finances publiques pour les années 2012 à 2017 a fixé les plafonds des crédits de paiement de la mission « Outre-mer » conformément au tableau ci-dessous.

Plafonds des crédits de paiement* de la mission « Outre-mer »
pour les années 2013 à 2015

(en millions d'euros)

Loi de finances pour 2013

Plafond des CP 2014

Plafond des CP 2015

1 990

2 069

2 144

Source : Projet annuel de performance annexé au présent projet de loi de finances

* Hors contributions de l'État au CAS Pensions

Avec 2 010 millions d'euros en CP - hors contributions de l'État au CAS Pensions et au format LPFP - sur la présente mission, la programmation triennale est respectée.

C. UNE DÉFISCALISATION RÉFORMÉE QU'IL CONVIENT DÉSORMAIS DE STABILISER

Vos rapporteurs spéciaux rappellent que la dépense fiscale est le premier outil de la politique de l'État en faveur des territoires ultramarins . Les 4 milliards d'euros ( cf. tableau) de la dépense fiscale représentent en effet près du double des crédits de la mission budgétaire.

Le coût des principales dépenses fiscales rattachées à la mission « Outre-mer »

(en millions d'euros)

Dispositif

Base légale

Impôt concerné

Chiffrage
pour 2013

Chiffrage pour 2014

Taux de TVA minoré

Art. 296 du code général des impôts (CGI)

TVA

1 160

1 260

Défiscalisation des investissements productifs

Art. 199 undecies B du CGI

IR

380

380

Défiscalisation des investissements en matière de logement

Art. 199 undecies A et 199 undecies D du CGI

IR

280

235

Défiscalisation dans le logement social

Art. 199 undecies C

IR

300

-

Réduction du barème de l'impôt sur le revenu

Art. 197-I-3 du CGI

IR

300

310

Défiscalisation des investissements productifs

Art. 217 undecies et 217 duodecies du CGI

IS

190

190

Exonération de certains produits et matières premières ainsi que des produits pétroliers

Art. 295 du CGI

TVA

190

195

TVA dite « non perçue récupérable »

Art. 295 A du CGI

TVA

100

100

Exclusion du champ d'application de la TIPP

Art. 267 du code des douanes

TICPE

795

800

Autres dépenses fiscales rattachées à la mission

213

211

Total (en estimant constant, en 2014, le coût de la défiscalisation à l'IR en matière de logement social)

3 908

3 981

Source : projet annuel de performances annexé au projet de loi de finances pour 2014

L'effort fiscal en faveur de l'outre-mer est donc en hausse en 2014 par rapport à 2013, d'après les estimations présentées dans les annexes au présent projet de loi de finances. Ce tableau appelle cependant plusieurs observations.

Tout d'abord, l'on constate que la dépense fiscale au titre des investissements dans le logement libre et intermédiaire (article 199 undecies A) est en baisse (- 45 millions d'euros) après une diminution de 50 millions d'euros l'année précédente. Cette évolution est logique, puisque la LODEOM avait - entre autre - pour objectif de recentrer la dépense fiscale en matière de logement de ce dispositif, pour l'essentiel mis en extinction, vers le logement social.

S'agissant justement du logement social, vos rapporteurs spéciaux notent que pour la deuxième année consécutive, le Gouvernement n'a pu chiffrer le montant prévisionnel de cette dépense , particulièrement dynamique. Ainsi, après avoir atteint 68 millions d'euros en 2011, cette dépense fiscale a progressé jusqu'à 208 millions d'euros en 2012 et 300 millions d'euros en 2014.

Vos rapporteurs spéciaux s'étonnent également qu'aucun impact de la réforme de la défiscalisation outre-mer, qui fait l'objet de l'article 13 du présent projet de loi de finances, ne soit attendu.

Celle-ci propose notamment la mise en place de deux crédits d'impôts - l'un pour les investissements productifs, l'autre pour le logement social - dont la finalité est de capter une partie des investissements aujourd'hui défiscalisés, afin de faire baisser la dépense fiscale. Certes, il est difficile d'évaluer le report des investisseurs sur ces deux dispositifs, qui, de plus, comportent pour l'État un coût de trésorerie les premières années, dans la mesure où le crédit d'impôt est versé en une seule fois. Ainsi, l'étude d'impact de l'article 13 ne prévoit pas d'impact financier pour l'État.

Vos rapporteurs spéciaux considèrent qu'après cette réforme importante, la défiscalisation doit désormais être stabilisée , que ce soit en ce qui concerne ses montants - l'aide à l'Outre-mer ne doit pas diminuer - ou dans ses dispositions juridiques - les investisseurs ont besoin de stabilité et de visibilité.

D. UN EFFORT BUDGÉTAIRE ET FINANCIER GLOBAL CONSACRÉ À L'OUTRE-MER STABILISÉ

Le document de politique transversale (DPT) « Outre-mer » annexé au présent projet de loi de finances fait apparaître une stabilisation des autorisations d'engagement globalement consacrés par l'État à la politique transversale en direction des territoires ultramarins (- 4 millions d'euros), qui atteint 14,3 milliards d'euros.

Cette évolution globale masque des différences importantes selon les territoires, comme le montre le tableau ci-dessous :

Évolution des autorisations d'engagement
de la politique transversale « Outre-mer »

(en millions d'euros)

Autorisations d'engagement

Évolution

2012

2013

2014

2013/2012

2014/2013

Guadeloupe

2 328

2 362

2 353

1,5 %

-0,4 %

Guyane

1 541

1 554

1 526

0,9 %

-1,8 %

Martinique

2 266

2 163

2 133

-4,5 %

-1,4 %

Saint-Martin

40

51

52

29,0 %

0,4 %

Saint-Barthélemy

2

2

2

-4,1 %

11,7 %

La Réunion

4 493

4 468

4 428

-0,5 %

-0,9 %

Mayotte

731

741

732

1,4 %

-1,2 %

Nouvelle-Calédonie

1 184

1 168

1 223

-1,4 %

4,8 %

Polynésie-française

1 250

1 231

1 220

-1,5 %

-0,9 %

Wallis et Futuna

103

81

80

-21,9 %

-1,3 %

Saint-Pierre-et-Miquelon

91

76

73

-16,4 %

-4,4 %

TAAF

22

22

21

-2,4 %

-4,1 %

Crédits non répartis

188

360

431

91,5 %

19,9 %

Total

14 239

14 280

14 276

0,3 %

0,0 %

Source : document de politique transversale « Outre-mer » annexé au présent projet de loi de finances

On peut notamment noter une hausse importante des AE à destination de la Nouvelle-Calédonie (+ 55 millions) et des crédits non répartis (+ 71 millions), tandis qu'à l'inverse, connaissent une baisse importante - en montant - les crédits à destination de la Guyane (- 28 millions d'euros), de la Martinique (- 30 millions d'euros) et de La Réunion (- 40 millions d'euros).

Vos rapporteurs spéciaux regrettent que les éléments fournis dans le DPT ne permettent pas d'évaluer les causes des évolutions de crédits les plus importantes en faveur de chaque territoire ultramarin, ce qui rend l'exploitation des données fournies particulièrement difficile.