M. François Baroin, rapporteur spécial

DEUXIÈME PARTIE - LES POINTS SAILLANTS RELATIFS AUX CRÉDITS DÉDIÉS À LA COMMUNICATION ET À L'AUDIOVISUEL EN 2015

I. LES DÉPENSES EN FAVEUR DE LA PRESSE ET DES RADIOS LOCALES SONT GLOBALEMENT PRÉSERVÉES, CE QUI PEUT SE JUSTIFIER AU REGARD DE LEUR RÔLE FONDAMENTAL DANS LA DÉMOCRATIE ET LE PLURALISME

A. L'AGENCE FRANCE PRESSE BÉNÉFICIE D'UNE HAUSSE DE SA DOTATION, EN LIEN AVEC SON NOUVEAU CONTRAT D'OBJECTIFS ET DE MOYENS

Pour la deuxième année consécutive, l'Agence France Presse (AFP) bénéficie d'une hausse de sa dotation. Elle passe ainsi de 123 millions d'euros en 2014 à 126 millions d'euros en 2015, soit une hausse de 2,6 %.

Cette évolution favorable est liée à la mise en oeuvre du nouveau contrat d'objectifs et de moyens (2014-2018) de l'agence, à partir du 1 er janvier 2015, le coeur de ce nouveau document stratégique étant la clarification des relations financières entre l'Etat et l'Agence .

1. La fin de la procédure communautaire et la négociation d'un nouveau COM

L'année 2014 a été marquée par la fin de la procédure communautaire relative aux relations financières de l'Etat et de l'AFP.

Pour mémoire, en février 2010, une agence de presse allemande avait déposé une plainte alléguant que la France aurait accordé des aides d'Etat à l'AFP. Après quatre ans d'instruction, la Commission européenne a transmis fin mars 2014 au Gouvernement français une lettre dite de « mesures utiles » qui valide le soutien financier de l'Etat à l'AFP sous-réserve que la France s'engage à plusieurs évolutions visant à mettre en conformité avec les règles sur les aides d'Etat les relations entre l'Etat et l'agence .

Le Gouvernement dispose d'un an pour prendre ces mesures. Il s'est notamment engagé à définir plus précisément, dans le cadre du nouveau contrat d'objectifs et de moyens (COM), les missions d'intérêt général confiées à l'agence, qui tiennent au caractère complet et impartial de l'information ainsi qu'au caractère d'organisme d'information à rayonnement mondial.

En outre, le COM doit définir les modalités de calcul et de versement de la compensation des missions d'intérêt général de l'agence.

2. Des performances commerciales en progression, qui doivent se confirmer

Parallèlement au soutien public important dont elle dispose, l'AFP s'efforce de développer ses ressources propres .

Ainsi, l'indicateur de performance relatif au développement de produits et de marchés à fort potentiel de croissance témoigne des progrès réalisés par l'agence depuis 2012 . En effet, le chiffre d'affaires provenant des marchés à fort potentiel de croissance est passé de 39,4 millions d'euros en 2012 à 40,3 millions d'euros en 2013, avec une prévision actualisée de 42,4 millions d'euros en 2014, supérieure à la prévision initiale (42,1 millions d'euros).

En outre, votre rapporteur spécial relève les bons résultats de l'AFP s'agissant du chiffre d'affaires issu de son activité multimédia , qui doit passer de 23,1 millions d'euros en 2013 à 28,3 millions d'euros en 2014, la prévision actualisée pour cette dernière année étant supérieure de 4 points à la prévision initiale. On relèvera cependant que le chiffre d'affaires lié à cette activité a diminué entre 2012 et 2013.

Ces résultats sont donc encore fragiles et doivent être confirmés, dans un univers très concurrentiel .

Enfin, l'agence réalise également des performances satisfaisantes du point de vue de la croissance de la masse salariale du groupe, qui a baissé entre 2012 et 2013, passant de 2,18 % à 1,75 %. La prévision pour 2014 est de 1,6 %.

En revanche, s'agissant de l'ensemble des indicateurs de performance, on peut regretter que le projet annuel de performance ne mentionne pas encore la prévision pour 2015 et la cible pour 2017, qui « seront fixées dans le plan d'affaires du contrat d'objectifs et de moyens qui doit être signé au dernier trimestre 2014 » 11 ( * ) .

B. UNE LÉGÈRE DIMINUTION DES AIDES À LA PRESSE DANS LA CONTINUITÉ DE LA RÉFORME INITIÉE EN 2013

Dans la continuité de la réforme des aides à la presse écrite initiée en 2013, les crédits qui leur sont dédiés dans le cadre du projet de loi de finances pour 2015 diminuent à hauteur de 3 %.

Au cours de l'année 2014, le décret n° 2014-659 du 23 juin 2014 a fusionné les sections du fonds stratégique pour le développement de la presse, « afin de mettre fin au cloisonnement entre aides destinées à la presse imprimée ou numérique » 12 ( * ) . En outre, ce décret a modifié les critères d'éligibilité et les taux de subvention du fonds de façon à réorienter ses interventions vers les projets mutualisés et technologiquement innovants .

Une réforme de l'aide au portage est également en cours, dans le but de favoriser le portage multi-titres et le développement des abonnés portés.

Le tableau ci-après présente l'évolution des différents types d'aides entre 2014 et 2015.

Évolution des différentes aides à la presse entre 2014 et 2015 (en CP)

(en millions d'euros)

Types d'aides

2014

2015

Aides à la diffusion

57 227 519

58 543 125

Aides au portage de la presse

36 000 000

36 000 000

Exonération de charges patronales pour les vendeurs-colporteurs et porteurs de presse

21 227 519

22 543 125

Aides au pluralisme

11 475 000

11 475 000

Aide aux quotidiens nationaux d'information politique et générale (IPG) à faibles ressources publicitaires

8655 000

8 655 000

Aide aux quotidiens régionaux, départementaux et locaux d'IPG à faibles ressources de petites annonces

1 400 000

1 400 000

Aide à la presse hebdomadaire régionale

1 420 000

1 420 000

Aides à la modernisation

66 372 481

60 099 707

Aide à la modernisation sociale de la presse d'IPG

12 572 774

7 000 000

Aide à la modernisation de la distribution de la presse

18 850 000

18 850 000

Aide à la modernisation des diffuseurs de presse

4 000 000

4 000 000

Fonds stratégique pour le développement de la presse

30 949 707

30 449 707

Total « Aide à la presse »

135 075 000

130 117 832

Source : commission des finances du Sénat, d'après les données des projets annuels de performances de la mission « Médias, livre et industries culturelles » annexés aux projets de loi de finances pour 2014 et 2015

On constate la stabilité du niveau des différents types d'aides , à l'exception de l'aide à la modernisation sociale de la presse quotidienne d'information politique et générale (IPG) et de la dotation du Fonds stratégique pour le développement de la presse.

S'agissant de la première aide, les crédits ouverts en 2015 au titre de la participation de l'Etat au coût des départs anticipés pour la presse quotidienne nationale (PQN) et la presse quotidienne régionale (PQR) ont été évalués à 7 millions d'euros, et se répartissent entre la PQN (2,8 millions d'euros) et la presse locale - PQR/presse quotidienne départementale - PQD (4,2 millions d'euros). Ces prévisions sont inférieures à celles de 2014 (respectivement 4,4 millions pour la PQN, 7,6 millions pour la presse locale et 0,6 million de provisions). Le nombre de bénéficiaires décroît d'année en année, passant de 114 pour la PQN et 244 pour la PQR en 2014 à 105 pour la PQN et 228 pour la PQR en 2015.

En ce qui concerne le Fonds stratégique, on peut regretter la baisse de sa dotation, certes limitée . En effet, celui-ci est présenté par le Gouvernement comme l'outil principal de la modernisation de la presse, objectif central de la réforme des aides à la presse écrite. Dans ce contexte, la baisse de la dotation ne paraît pas très cohérente avec les priorités affichées par le Gouvernement.

Votre rapporteur spécial s'inquiète également de l'accélération de la disparition des diffuseurs de presse - kiosquiers, maisons de la presse - sur l'ensemble du territoire, notamment dans les villes moyennes, et regrette l'incapacité du Gouvernement à proposer des mesures pour enrayer cette évolution .

Il souhaite enfin rappeler que, depuis l'année dernière, les crédits dédiés à l'aide au transport postal de la presse ont été transférés vers le programme « Développement des entreprises et du tourisme » de la mission « Economie », décision qui peut paraître contestable du point de vue de la transparence budgétaire.

D'après les réponses au questionnaire budgétaire de votre rapporteur spécial, les aides au transport postal passeront de 150,5 millions d'euros en 2014 à 130 millions d'euros en 2015 , après une très forte réduction entre 2013 et 2014, liée à l'arrêt de la compensation du moratoire de l'aide postale décidé en 2009 et à la baisse tendancielle, prévue par les accords « Schwartz 13 ( * ) », du besoin de compensation des tarifs postaux.

C. UNE STABILITÉ DE LA DOTATION EN FAVEUR DES RADIOS LOCALES DE PROXIMITÉ

L'action 10 « Soutien à l'expression radiophonique locale » retrace le financement public de l'aide aux radios associatives, attribué dans le cadre du fonds de soutien à l'expression radiophonique locale (FSER). Une aide est ainsi accordée aux radios locales associatives dont les ressources publicitaires sont inférieures à 20 % de leur chiffre d'affaires total.

Dans un contexte budgétaire particulièrement contraint, la stabilité de la dotation attribuée aux radios associatives locales est satisfaisante, à hauteur de 29 millions d'euros depuis 2010 . Ces radios remplissent en effet des missions sociales de proximité fondamentales, tant en métropole qu'en outre-mer, et contribuent à ce titre au dynamisme et au pluralisme de la démocratie locale, dans le contexte par ailleurs incertain de la réforme territoriale et de la réduction des dotations aux collectivités territoriales.

Votre rapporteur spécial prend par ailleurs acte de la réforme annoncé du Fonds de soutien à l'expression radiophonique locale (FSER). Celle-ci vise à « renforcer le caractère incitatif et la sélectivité du dispositif, avec une part plus large consacrée à la subvention sélective, laquelle sera attribuée sur la base de critères plus exigeants. L'objectif est donc d'éviter un « saupoudrage » de la subvention sélective en augmentant le montant moyen de cette subvention et en la réservant aux radios les plus engagées dans la communication sociale de proximité » 14 ( * ) .


* 11 Source : projet annuel de performances de la mission « Médias, livre et industries culturelles » annexé au projet de loi de finances pour 2015.

* 12 Source : projet annuel de performances de la mission « Médias, livre et industries culturelles » annexé au projet de loi de finances pour 2015.

* 13 Les accords Schwartz couvrent la période 2009-2015. Ces accords tripartites entre l'Etat, la presse et le groupe La Poste prévoient un engagement réciproque de chacune des parties sur des évolutions progressives et programmées : hausse de la productivité de La Poste, augmentation des tarifs acquittés par les éditeurs de presse et baisse de la compensation de l'Etat versée à La Poste.

* 14 Source : projet annuel de performances de la mission « Médias, livre et industries culturelles » annexé au projet de loi de finances pour 2015.