MM. Pierre JARLIER et Daniel RAOUL, rapporteurs spéciaux

DEUXIÈME PARTIE : LE PROGRAMME 112 « IMPULSION ET COORDINATION DE LA POLITIQUE D'AMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE » (PICPAT)
(RAPPORTEUR SPÉCIAL : PIERRE JARLIER)

I. UN PROGRAMME MARQUÉ PAR UNE RÉFORME D'ENVERGURE MAIS QUI CONSERVE UNE STRUCTURE STABLE

A. UN PROGRAMME DÉDIÉ AUX MOYENS DU NOUVEAU COMMISSARIAT GÉNÉRAL À L'ÉGALITÉ DES TERRITOIRES (CGET)

Le programme 112 « Impulsion et coordination de la politique d'aménagement du territoire » (PICPAT), est placé sous la responsabilité politique du Premier ministre et de la ministre du logement, de l'égalité des territoires et de la ruralité .

Conformément à son intitulé 4 ( * ) , ce programme ne représente qu' une part des crédits contribuant à la politique de l'aménagement du territoire , enjeu « transversal » pour 31 programmes relevant de 14 missions du budget général d'après le DPT annexé au présent projet de loi de finances ( cf . supra , I). Pour 2015, la contribution du PICPAT représente 4,7 % de l'effort global prévu en la matière (5,7 milliards d'euros), la mission « Politique des territoires » dans son ensemble en concentrant 13 %.

La responsabilité administrative du programme a cessé en 2014 d'être confiée au délégué interministériel à l'aménagement du territoire et à l'attractivité régionale , suite à la création du Commissariat général à l'égalité des territoires (CGET) . Ce dernier, placé sous l'autorité du Premier ministre, regroupe en effet depuis 2014 la délégation à l'aménagement du territoire et à l'attractivité régionale (DATAR), le secrétariat général du comité interministériel des villes (SG-CIV), et l'Agence nationale pour la cohésion sociale et l'égalité des chances (ACSé). Cette fusion entre trois structures doit permettre de dégager des gains d'efficience et de renforcer les synergies entre les différents acteurs du développement des territoires. C'est donc la commissaire générale à l'égalité des territoires, qui est désormais responsable du programme 112 .

Le PICPAT s'inscrit au coeur de la politique d'aménagement du territoire, puisqu'il retrace les moyens mis à la disposition du CGET , après avoir retracé les moyens de la DATAR, qui avait pris temporairement le nom de Délégation interministérielle à l'aménagement et à la compétitivité des territoires (DIACT) de 2006 à 2010.

B. UN DÉCOUPAGE EN TROIS ACTIONS

D'une manière générale, le PICPAT vise au développement de la compétitivité, de l'attractivité et de la cohésion des territoires. Le présent projet de loi de finances reconduit pour 2015, sans la modifier, l'organisation actuelle du programme déclinée , depuis la loi de finances pour 2008, en trois actions . Les deux premières sont caractérisées par le foisonnement des dispositifs qu'elles retracent, la troisième constitue une action de soutien.

L'action 1, « Attractivité économique et compétitivité des territoires », regroupe les moyens mis en oeuvre par le CGET en faveur du développement économique et de la compétitivité internationale des territoires : prime d'aménagement du territoire (PAT), politique des pôles de compétitivité, accompagnement des mutations économiques et des territoires affectés par le redéploiement des armées, financement de l'Agence française pour les investissements internationaux (AFII), grandes opérations d'aménagement et d'urbanisme...

L'action 2, « Développement solidaire et équilibré des territoires », rend compte de politiques visant à assurer la cohésion sociale et territoriale et à favoriser un développement équilibré et durable des territoires. Les moyens du Fonds national d'aménagement et de développement du territoire (FNADT 5 ( * ) ) sont mobilisés par ces politiques, qui mettent en oeuvre les « contrats de projets » État-régions (CPER). Ceux-ci, également financés au sein de l'action 1 mais de manière moindre, ont pris la suite, pour la période 2007-2014, des « contrats de plan » de la période 2000-2006. La nouvelle génération, couvrant la période 2015-2020, devrait reprendre le nom de contrats de plan. Votre rapporteur spécial précise à cet égard que votre commission des finances a demandé à la Cour des Comptes une enquête sur l'exécution des CPER , en application de l'article 58-2° de la LOLF, et que ce travail a fait l'objet d'un rapport de notre collègue rapporteur général Albéric de Montgolfier en octobre 2014 6 ( * ) .

Par ailleurs, les crédits de l'action 2 sont affectés au financement des décisions du CIACT (ex-CIADT). Celles-ci concernent surtout la valorisation des atouts des territoires ruraux en matière de patrimoine, de développement culturel, de tourisme et d'espaces naturels, notamment par les pôles d'excellence rurale (PER) et par le plan d'action en faveur des territoires ruraux . Les décisions du CIACT portent également sur l'amélioration de l' égalité d'accès aux services publics et aux technologies de l'information et de la communication (haut débit, téléphonie mobile), ainsi que sur la réalisation de projets territoriaux interministériels (Mont Saint-Michel, littoral aquitain, sillons fluviaux de la Garonne et du Rhône, politique des massifs de montagne). Votre rapporteur spécial considère que les soutiens spécifiques aux secteurs particulièrement fragiles , soumis à des handicaps naturels, tels que les zones de montagne par exemple, gagneraient en lisibilité si les concours financiers qui leur sont destinés faisaient l'objet d'une dotation au sein de cette action 2 . La disparition du fonds d'intervention pour l'autodéveloppement en montagne (FIAM), assimilé au FNADT en 1995 7 ( * ) , a de ce point de vue constitué un recul puisque les crédits budgétaires destinés à la montagne ne sont plus identifiés en tant que tel.

Enfin, l'action 4 (ce numéro a été maintenu, malgré la suppression en 2008 de l'action 3 du programme), « Instruments de pilotage et d'étude », correspond à la totalité des moyens de fonctionnement du CGET, dont ses dépenses de personnel, ainsi qu'à des crédits d'études et d'évaluation.

C. LA REFONTE DU DISPOSITIF DE MESURE DE LA PERFORMANCE

Le volet performance du PICPAT enregistre, pour 2015, de nombreuses modifications, dans un objectif de simplification et de meilleure lisibilité , suite à la circulaire du secrétaire d'État chargé du budget du 1 er avril 2014 relative à la préparation des volets « performance » du projet de loi de finances. En effet, cette circulaire prévoit « la réduction du nombre d'indicateurs de 10 % à 50 % par programme » pour arriver « en moyenne à une réduction de 25 % ».

La performance du programme « Impulsion et coordination de la politique d'aménagement du territoire » sera ainsi mesurée en 2015 par deux objectifs et quatre indicateurs au total, au lieu de trois objectifs et sept indicateurs auparavant . Le dispositif arrêté par le PAP 2015 est donc assez différent de celui mis en oeuvre en 2014 . Il ne s'agit pas d'une simple réduction du nombre d'indicateurs, puisque la moitié des indicateurs seront des nouveautés inédites introduites en 2015 .

Pour le suivi de l'objectif 1 « Soutenir la compétitivité et l'attractivité des territoires », est créé l'indicateur « Efficience des financements attribués aux entreprises bénéficiaires de la prime d'aménagement du territoire », qui mesure à la fois les effets de la PAT sur les créations et le maintien d'emploi et sur la réalisation d'investissements productifs par les entreprises. Cette modification a été introduite afin de recentrer l'analyse du dispositif sur la pertinence des financements au regard des résultats effectifs des programmes plutôt que sur la seule analyse des résultats sans appréciations des montants financiers octroyés. En effet, le précédent indicateur analysait uniquement l'effectivité des créations d'emplois. Au sein de cet objectif, l'indicateur « Nombre de projets d'investissements internationaux aboutis par une contribution significative de l'AFII rapporté aux ETP de l'AFII », a été supprimé parce qu'il constituait un indicateur d'activité et était donc jugé, à ce titre, non pertinent par la Cour des comptes.

S'agissant de l'objectif 2 « Accompagner les mutations économiques et renforcer la cohésion sociale et territoriale », il est créé un indicateur « Réduction du temps d'accès des usagers à une maison de services au public (MSAP) », permettant de mesurer la performance, pour les usagers, du déploiement de la politique en faveur des services au public. Il s'agit ici de mesurer les effets d'une politique publique emblématique selon le Gouvernement, lancée sur la période 2014-2017.


* 4 Le programme 112, initialement dénommé « Aménagement du territoire », a vu son intitulé précisé dans la loi de finances pour 2008 à l'initiative de la commission des affaires économiques du Sénat.

* 5 Pour mémoire, le FNADT est composé de deux sections. La section générale comprend notamment le soutien apporté aux différentes structures de l'ancien réseau de la DATAR, repris par le CGET, l'assistance technique des programmes européens, et le financement d'engagements pris par le Gouvernement en CIADT/CIACT. La section locale se trouve elle-même subdivisée en deux parties, l'une contractualisée, l'autre non. La partie contractualisée permet de soutenir, exclusivement, des opérations inscrites dans les contrats État-régions, au sein de contrats de pays, ou dans un cadre intercommunal reconnu par la loi. La partie non contractualisée permet d'attribuer des subventions à des projets qui participent, soit de l'accompagnement de restructurations industrielles ponctuelles et localisées, lorsque l'ampleur ou l'impact du sinistre ne justifie pas des décisions de niveau central (contrats de site, mesures territoriales arrêtées en CIADT/CIACT), soit de la modernisation et de l'amélioration de services publics locaux.

* 6 « L'État et les régions : l'avenir des contrats de plan », rapport d'information fait au nom de la commission des finances (n° 36, 2014-2015).

* 7 L'article 33 de la loi d'orientation pour l'aménagement et le développement du territoire du 4 février 1995 a fusionné