MM. Pierre JARLIER et Daniel RAOUL, rapporteurs spéciaux

QUATRIÈME PARTIE :
LE PROGRAMME 147 « POLITIQUE DE LA VILLE »
(RAPPORTEUR SPÉCIAL : DANIEL RAOUL)

Le programme 147 « Politique de la ville », placé sous la responsabilité du Commissaire général à l'égalité des territoires, a été déplacé de la mission « Égalité des territoires, logement et ville » (devenue « Égalité des territoires et logement ») à la mission « Politique des territoires ».

Il a pour objet de soutenir les politiques publiques engagées afin d'améliorer les conditions de vie des habitants des quartiers prioritaires de la politique de la ville. Une importante refonte de la politique de la ville et de ses modalités d'intervention a été opérée dans le cadre de la loi n° 2014-173 du 21 février 2014 de programmation pour la ville et la cohésion urbaine qui fixe ses objectifs dans son article premier.

Article premier de la loi n° 2014-173 du 21 février 2014
de programmation pour la ville et la cohésion urbaine (extraits)

La politique de la ville « vise , en tenant compte de la diversité des territoires et de leurs ressources, à :

« 1° Lutter contre les inégalités de tous ordres, les concentrations de pauvreté et les fractures économiques, sociales, numériques et territoriales ;

« 2° Garantir aux habitants des quartiers défavorisés l'égalité réelle d'accès aux droits, à l'éducation, à la culture, aux services et aux équipements publics ;

« 3° Agir pour le développement économique, la création d'entreprises et l'accès à l'emploi par les politiques de formation et d'insertion professionnelles

« 4° Agir pour l'amélioration de l'habitat ;

« 5° Développer la prévention , promouvoir l'éducation à la santé et favoriser l'accès aux soins ;

« 6° Garantir la tranquillité des habitants par les politiques de sécurité et de prévention de la délinquance ;

« 7° Favoriser la pleine intégration des quartiers dans leur unité urbaine, en accentuant notamment leur accessibilité en transports en commun, leur mixité fonctionnelle et urbaine et la mixité de leur composition sociale ; elle veille à ce titre à la revitalisation et la diversification de l'offre commerciale dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville ;

« 8° Promouvoir le développement équilibré des territoires , la ville durable, le droit à un environnement sain et de qualité et la lutte contre la précarité énergétique ;

« 9° Reconnaître et à valoriser l'histoire, le patrimoine et la mémoire des quartiers ;

« 10° Concourir à l'égalité entre les femmes et les hommes , à la politique d' intégration et à la lutte contre les discriminations dont sont victimes les habitants des quartiers défavorisés, notamment celles liées au lieu de résidence et à l'origine réelle ou supposée. »

I. UN IMPORTANT CHANGEMENT DE MAQUETTE

A. L'INTÉGRATION DU PROGRAMME 147 À LA MISSION « POLITIQUE DES TERRITOIRES » EN RAISON DE LA CRÉATION DU COMMISSARIAT GÉNÉRAL À L'ÉGALITÉ DES TERRITOIRES

Comme annoncé dès le débat d'orientation des finances publiques en juillet 2014, le programme 147 « Politique de la ville » relève désormais de la mission « Politique des territoires ».

Le Gouvernement justifie cette évolution par la création du Commissariat général à l'égalité des territoires (CGET) qui regroupe désormais les activités du secrétariat général du comité interministériel des villes (SG-CIV), de la délégation à l'aménagement du territoire et à l'attractivité régionale (DATAR) et l'Agence nationale pour la cohésion sociale et l'égalité des chances (ACSé). Placé sous l'autorité du Premier ministre en « co-responsabilité » avec le ministre chargé de la ville, le CGET constitue une administration centrale.

Le CGET, qui dispose d'une direction spécifiquement dédiée à la politique de la ville, doit reprendre les activités de l'ACSé, à savoir, dans le cadre de contrats urbains de cohésion sociale (CUCS), les actions dédiées aux quartiers de la politique de la ville, et notamment la mise en oeuvre de dispositifs tels que les adultes-relais, l'opération « ville vie vacances » et les internats d'excellence. Les crédits alloués à l'ACSé figuraient jusqu'à présent dans le programme 147 « politique de la ville » (action 1 « actions territorialisées et Dispositifs spécifiques de la politique de la ville »).

Compte tenu de ce transfert, la dissolution de l'ACSé est prévue par l'article 14 de la loi n° 2014-173 du 21 février 2014 de programmation pour la ville et la cohésion urbaine.

Si votre rapporteur spécial salue la création du CGET, considérant que cette nouvelle structure doit permettre de mutualiser les compétences des différents acteurs du développement des territoires ainsi que dégager des économies , comme cela sera développé plus loin dans son propos, il s'interroge sur la cohérence de ce changement de maquette budgétaire . Il considère, en effet, que le programme « Politique de la ville » avait toute sa place dans la mission par ailleurs consacrée au logement car les deux politiques, en particulier s'agissant du développement du logement social, sont très liées.

B. UN PROGRAMME AUX CONTOURS AYANT PAR AILLEURS PEU ÉVOLUÉ

Le programme compte toujours les quatre mêmes actions :

- l'action 1 « Actions territorialisées et dispositifs spécifiques de la politique de la ville », qui regroupe l'ensemble des actions menées dans le cadre des nouveaux contrats de ville tels que prévus par la loi précitée du 21 février 2014 de programmation pour la ville et la cohésion urbaine ;

- l'action 2 « Revitalisation économique et emploi » qui comprend à la fois les crédits consacrés à la compensation dues aux régimes de sécurité sociale des exonérations de charges sociales applicables en zones franches urbaines (ZFU) ainsi que la contribution du programme 147 à la subvention pour charge de service public de l'établissement public d'insertion de la défense (EPIDe) pour 22,2 millions d'euros en autorisations d'engagement et en crédits de paiement ;

- l'action 3 « Stratégie, ressources et évaluation », qui correspond aux crédits liées à l'animation de la politique de la ville, laquelle est mise en oeuvre par le CGET au niveau national et les préfets au niveau local ;

- l'action 4 « Rénovation urbaine et amélioration du cadre de vie », intégralement consacrée dans le projet de loi de finances pour 2015 à la rénovation des collèges les plus dégradés, dans le cadre de l'amélioration du cadre de vie dans les quartiers de la politique de la ville.

L'action 1 concentre à elle seule 73 % des crédits de la mission, soit 332,4 millions d'euros en autorisations d'engagement et en crédits de paiement.

Crédits de paiements par actions du programme 147

Source : projet annuel de performances et commission des finances

Seule la dissolution prévue de l'ACSé au profit du Commissariat général à l'égalité des territoires, a conduit à une évolution notable du périmètre de la mission dans le projet de loi de finances pour 2015 tel que déposé à l'Assemblée nationale. En effet, l'ensemble des crédits de fonctionnement de cette nouvelle entité a été transféré dans le programme 112 « Impulsion et coordination de la politique d'aménagement du territoire » appartenant à la même mission, à l'exception de ceux spécifiquement dédiés à la politique de la ville et qui restent dans le programme 147 au titre de dépenses d'intervention (formation des acteurs, animation des réseaux, communication...).

L'Assemblée nationale a, lors de l'examen des crédits de la mission, inséré un article 57 ter afin de décaler d'un an la dissolution de l'ACSé et adopté un amendement de crédits à l'article 32 afin de rebasculer 775 000 euros du programme 112 « Impulsion et coordination de la politique d'aménagement du territoire » au programme 147 « Politique de la ville » 23 ( * ) .

C. DES MODIFICATIONS SIGNIFICATIVES EN TERME D'INDICATEURS DE PERFORMANCE

Afin de simplifier la maquette budgétaire pour 2015, trois indicateurs ont été supprimés :

- 2.2 « Efficience de l'allocation de moyens consacrés à la réussite éducative et aux internats d'excellence » ;

- 3.1 « Part des crédits consacrés aux communes prioritaires » ;

- 4.2 « Respect du calendrier d'engagement du programme national de rénovation urbaine (PNRU) ».

Pour tenir compte de la loi du 21 février 2014 de programmation pour la ville et la cohésion urbaine et de la nouvelle géographie prioritaire de la politique de la ville, un nouvel indicateur de mission est créé et porte sur l'écart entre le revenu fiscal moyen des ménages (unités de consommation) habitant dans les quartiers de la politique de la ville et celui de leurs agglomérations. Votre rapporteur spécial se félicite de cet indicateur qui fait écho au critère unique désormais retenu pour déterminer les quartiers prioritaires de la politique de la ville, à savoir le revenu des habitants.

Enfin, l'indicateur 2.1, sur l'évolution des chances de réussite scolaire des élèves scolarisés en zone urbaine sensible ne comprend plus le sous-indicateur relatif au taux de réussite au brevet des collèges des élèves en zone urbaine sensible (ZUS) bénéficiant de l'intervention d'une équipe de réussite éducative. Cette suppression a été opérée compte tenu de la difficulté à obtenir les informations nécessaires pour renseigner ce sous-indicateur.


* 23 Voir le commentaire de l'article 57 ter ainsi que les développements consacrés aux modifications apportées par l'Assemblée nationale dans le présent rapport.