M. Eric Bocquet, rapporteur spécial

IV. LE PROGRAMME 124 « CONDUITE ET SOUTIEN DES POLITIQUES SANITAIRES, SOCIALES, DU SPORT, DE LA JEUNESSE ET DE LA VIE ASSOCIATIVE »

A. UNE BAISSE DES CRÉDITS NOTAMMENT ALIMENTÉE PAR LA RÉDUCTION DES EFFECTIFS

Le programme n° 124 « Conduite et soutien des politiques sanitaires, sociales, du sport, de la jeunesse et de la vie associative » porte l'ensemble des crédits de soutien de ces politiques. Il englobe en particulier les charges liées aux directions centrales, régionales et départementales de la cohésion sociale, de la jeunesse et des sports, ainsi que la contribution de l'Etat au fonctionnement des agences régionales de santé (ARS).

Comme lors du projet de loi de finances pour 2014, le présent programme est le seul de la mission à connaître une baisse de ses crédits, qui passent de 1 505,9 millions d'euros en 2014 à 1 493,6 millions d'euros en 2015 (-0,8 %) . Cette diminution est cependant plus faible si l'on tient compte de l'effet de la mesure de transfert des certifications de formation (ancienne action n° 13, désormais sans objet) vers le programme n° 304.

S'agissant des dépenses de fonctionnement, la plupart des lignes budgétaires sont stables . Deux évolutions sont toutefois à noter :

• Les dépenses d'informatique connaissent une augmentation notable (+9,6 %). En effet, le projet annuel de performances indique que, suite à la création d'une direction des systèmes d'information par fusion de plusieurs sous-directions préexistantes, l'année 2015 sera « marquée par la poursuite des renouvellements des serveurs et des logiciels obsolètes ainsi que par la mise en place de solutions nouvelles de messagerie et de travail collaboratif ». En effet, la directrice générale de la cohésion sociale, Sabine Fourcade, a souligné devant votre rapporteur spécial que le ministère des affaires sociales était un ministère traditionnellement « sous-informatisé » , avec un important retard à rattraper en la matière. Ce constat alarmant fait écho à celui déjà établi concernant la remontée d'informations sur les décisions prises par les MDPH et leur suivi.

• S'agissant des dépenses immobilières , les autorisations d'engagement sont significativement plus importantes pour 2015 qu'en 2014 (78 millions d'euros, contre 52,3 millions d'euros) du fait du renouvellement de certains baux pluriannuels . Il convient de souligner que deux grandes opérations immobilières ont pris fin en 2013 et 2014 pour les sites parisiens du ministère : le site Duquesne a été intégralement restructuré, tandis que les services ont été rassemblés sur le Montparnasse Sud-Pont. D'après le projet annuel de performance, ces opérations ont permis une baisse des crédits locatifs de 11,4 milliards d'euros sur la période 2013-2015 (baisse portée par le programme n° 124 et par le programme n° 155 « conception, gestion et évaluation des politiques de l'emploi » de la mission « Travail et emploi »).

Répartition des crédits du programme 124 par action

(en millions d'euros)

Maquette PLF 2013

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

Variation des CP

LFI 2014

PLF 2015

LFI 2014

PLF 2015

Action n° 10 « Fonctionnement des services »

19,7

20,3

19,7

20,3

+3,0 %

Action n° 11 « Systèmes d'information »

24,9

27,3

24,9

27,3

+9,6 %

Action n° 12 « Affaires immobilières »

52,3

78,0

74,9

73,9

-1,3 %

Action n° 13 « Certification des formations »

7,5

-

7,5

-

-

Action n° 14 « Communication »

6,1

5,7

6,1

5,7

-6,6 %

Action n° 15 « Affaires européennes et internationales »

6,9

6,8

6,9

6,8

-1,4 %

Action n° 16 « Statistiques, études et recherches »

10,6

10,1

10,6

10,1

-4,7 %

Action n° 17 « Financement des agences régionales de santé »

589,6

600,0

589,6

600,0

+1,8 %

Action n° 18 « Personnels mettant en oeuvre les politiques sociales et de la santé »

258,7

245,8

258,7

245,8

-5,0 %

Action n° 19 « Personnels mettant en oeuvre les politiques du sport, de la jeunesse, de l'éducation populaire et de la vie associative »

295,6

298,3

295,7

298,3

+0,9 %

Action n° 20 « Personnels mettant en oeuvre les politiques pour les droits des femmes »

11,2

14,0

11,2

14,0

+ 25 %

Action n° 21 « Personnel mettant en oeuvre les politiques de la ville, du logement et de l'hébergement »

42,8

43,6

42,8

43,6

+1,9 %

Action n° 22 « Personnels transversaux et de soutien »

134,2

125,7

134,2

125,7

-6,3 %

Action n° 23 « Autres dépenses de personnel »

23,1

22,1

23,1

22,1

-4,3 %

Total du programme n° 124

1 483,2

1 497,7

1 505,9

1 493,6

-0,8 %

Source : projet annuel de performances annexé au projet de loi de finances pour 2015

Les dépenses de personnel (titre 2) représentent près de 50 % des dépenses du programme . De plus, les dépenses inscrites en titre 3 recouvrent en partie des dépenses de personnel, à travers la subvention pour charges de service public versée aux agences régionales de santé. Les emplois portés par le présent programme, à la fois directement en titre 2 et à travers la subvention pour charges de service public des ARS, représente près de 1 % de l'emploi public total (22 057 ETPT sur un total de 2 304 131 ETPT).

La gestion des effectifs constitue donc un déterminant important de la dépense, mais aussi de la qualité de l'action publique menée dans les territoires.

Or, le projet de loi de finances pour 2015 poursuit la politique de réduction des effectifs entamée depuis 2010 . Ainsi, il prévoit la réduction du plafond d'emplois de 253 équivalents temps plein travaillé (ETPT) , résultant de l'incidence du schéma d'emploi 2015 (-150 ETPT) et de l'extension en année pleine du schéma d'emploi 2014 (-135). Au total, sur la période 2010-2015, le programme n° 124 a connu la suppression de 803 emplois (sur un total de 9 591 en 2010, soit une diminution de 8,4 % des effectifs en cinq ans). Cela se traduit par une légère baisse des dépenses de deux actions portant des crédits de personnel du programme (action n° 18 : -5 % ; action n° 22 : -6,3 %), et par une maîtrise des dépenses des deux autres actions portant des crédits de personnel (action n° 19 : +0,9 % ; action n° 21 : +1,9 %).

Au-delà des conséquences de ces réductions sur la qualité de la politique menée, votre rapporteur spécial constate que la baisse est intégralement portée par les agents de catégories B et C , alors que les catégories A sont préservées. Ainsi, l'échelle continue de se déformer en faveur des catégories A , qui représentent désormais 58 % des effectifs financés par le programme (hors ARS).

Évolution du plafond d'emploi depuis 2012 et dans le triennal 2015-2017

(en ETPT)

LFI 2012

LFI 2013

LFI 2014

PLF 2015

Plafond 2016

Plafond 2017

Plafond d'emplois

11 283

11 157

10 558

10 305

10 160

10 010

Suppression d'effectifs

-126

-599 (1)

-253

-145

-150

Évolution annuelle

-1,1 %

-5,7 %

-2,5 %

-1,4 %

-1,5 %

(1) Dont 389 ETPT liés à un transfert sortant (délégués des préfets et secrétariat général du comité interministériel à la ville).

Source : commission des finances, d'après les réponses au questionnaire budgétaire

B. LE FINANCEMENT DES AGENCES RÉGIONALES DE SANTÉ

Mises en place en 2010, les 26 agences régionales de santé (ARS) regroupent des services déconcentrés de l'Etat (partie sanitaire des DDASS et des DRASS), l'agence de l'hospitalisation, le groupement régional de santé publique, l'union régionale des caisses d'assurance maladie, la mission régionale de santé, ainsi qu'une partie des personnels des caisses régionales d'assurance maladie, du régime social des indépendants, de la mutualité sociale agricole et de la direction régionale du service médical.

Les ARS sont financées de la manière suivante :

- une subvention de fonctionnement (subvention pour charges de service public) portée par le présent programme n° 124, pour 600 millions d'euros en 2015 ; cette subvention est complétée par des crédits de l'assurance-maladie ;

- des crédits d'intervention , issus de l'assurance-maladie (par exemple pour le financement des établissements médico-sociaux), de la CNSA et de l'Etat, pour 417 millions d'euros en 2015 5 ( * ) .

La dotation du programme n° 124, soit 600 millions d'euros, est en légère augmentation (+10 millions d'euros) par rapport à 2014, car les effets à la hausse liés au glissement vieillesse technicité (GVT) positif, aux mesures catégorielles et aux mesures de titularisation, pour un total de 18,5 millions d'euros, sont plus importants que les effets à la baisse liés à la réduction du schéma d'emplois et à la baisse des dépenses de fonctionnement courant, pour un total de -9 millions d'euros.

Les ARS sont ainsi soumises à la même politique de réduction des effectifs, avec une baisse de leur plafond d'emplois de 100 ETPT en 2015 (80 ETPT sur le plafond relevant de l'Etat et 20 sur celui relevant de l'assurance-maladie). Là encore, votre rapporteur spécial s'interroge sur la capacité de toutes ces administrations, dont les missions sont de la première importance pour garantir le suivi sanitaire et social et, plus largement, la cohésion de la société dans une situation de crise économique, à accomplir leurs tâches dans un contexte de réorganisation permanente du fait des suppressions d'effectifs .


* 5 Ces crédits sont en forte réduction par rapport à 2014, car la subvention de l'Etat portée par le programme n° 204, pour les dépenses liées à la formation médicale, sera désormais assurée par l'assurance-maladie.