MM. Vincent Eblé et André Gattolin, rapporteurs spéciaux

II. UN BUDGET ATTENTIF À L'ACCOMPAGNEMENT DES TERRITOIRES ET AUX PUBLICS FRAGILES DANS LE CONTEXTE DE BAISSE DES DOTATIONS AUX COLLECTIVITÉS TERRITORIALES

A. LA PRÉSERVATION DES CRÉDITS DÉDIÉS À LA PROTECTION ET À LA VALORISATION DU PATRIMOINE, NOTAMMENT AU NIVEAU DÉCONCENTRÉ

L'effort en faveur des monuments historiques sera maintenu en 2016 pour la troisième année consécutive . Avec des autorisations d'engagement en hausse de 10 millions par rapport à loi de finances initiale pour 2015, à hauteur de 338 millions d'euros, et des crédits de paiement en croissance de 2 millions d'euros, pour un montant de 313 millions, le projet de loi de finances témoigne d'un soutien constant en faveur des investissements consacrés aux monuments historiques .

Quelques chiffres sur les monuments historiques

En France, près de 44 000 immeubles de tous types sont classés ou inscrits au titre des monuments historiques : châteaux et fortifications, lieux de culte, sites archéologiques...

A ce patrimoine s'ajoutent près de 260 000 objets mobiliers protégés. Enfin, près de 19 000 communes font l'objet d'une mesure de protection au titre du patrimoine, au moins sur une partie de leurs espaces, soit environ 5 % du territoire national.

Source : ministère de la culture et de la communication

Par ailleurs, les crédits destinés aux opérations en région, qui représentent plus de 70 % des crédits dédiés aux monuments historiques et soutiennent directement l'attractivité territoriale et l'emploi, seront confortés, à travers une dotation de 227 millions d'euros en autorisations d'engagement, en hausse de 2 millions par rapport à loi de finances initiale pour 2015, et de 224 millions d'euros en crédits de paiement, montant stable par rapport à l'année dernière. Cet effort rendra possible en 2016 la poursuite de chantiers importants de monuments majeurs appartenant à l'État (restauration de la cathédrale d'Amiens notamment) comme à des collectivités territoriales (par exemple, amphithéâtre de Nîmes et cathédrale du Havre).

En outre, le Centre des monuments nationaux (CMN), qui gère 90 monuments nationaux sur l'ensemble du territoire , bénéficiera d'une dotation de fonctionnement en hausse de 1 million d'euros , ainsi que de six créations d'emplois.

Pour leur part, les crédits d'acquisition augmentent de 0,5 million par rapport à trajectoire triennale prévue pour 2016 , pour un montant de 9 millions d'euros. Ils s'ajouteront aux différents dispositifs publics existants dont le but est de favoriser les acquisitions (mécénat, dations notamment).

En ce qui concerne les musées de France, le projet de loi de finances pour 2016 entend poursuivre le rééquilibrage territorial par le soutien à ces établissements pour la conservation, l'enrichissement et la mise en valeur de leurs collections , à travers le maintien d'une capacité d'investissement élevée . En effet, les crédits d'investissement déconcentrés bénéficieront de 14 millions d'euros en 2016, dans le respect de la trajectoire prévue en 2015, soit 48 millions d'euros sur trois ans.

Ces crédits financeront en particulier un certain nombre d'opérations menées par les collectivités territoriales dans les musées de France . On peut citer à cet égard la rénovation du musée des beaux-arts de Dijon, la rénovation et l'extension du musée historique lorrain de Nancy, et la création de la cité internationale de la tapisserie et de l'art tissé en région Limousin.

De la même manière, les crédits de fonctionnement destinés à soutenir les actions structurantes des musées territoriaux seront maintenus à 6,8 millions d'euros, pour leur permettre de financer, en particulier, la numérisation des collections et la conservation préventive , les actions de diffusion et de médiation. Enfin, du fait de la complexité de la première édition du récolement décennal, les opérations post-récolement bénéficieront également en 2016 des aides de l'état.

Dans le contexte de réforme territoriale et de baisse des dotations, l'évolution des crédits dédiés au patrimoine monumental et au patrimoine des musées de France témoigne de la constance de l'engagement de l'État auprès de ses partenaires territoriaux . Elle constitue un signal fort , alors que l'article 104 de la loi portant nouvelle organisation territoriale de la République (NOTRe) consacre la culture comme compétence partagée et confirme que la culture est un domaine d'intervention commun entre les collectivités territoriales et l'État.

B. UN RÉTABLISSEMENT BIENVENU DES CRÉDITS DÉDIÉS AUX CONSERVATOIRES

L'année 2015 avait été marquée par la quasi-suppression des crédits destinés aux conservatoires , situation qui avait été fort critiquée , dans la mesure où ces établissements constituent l'un des principaux réseaux de proximité en ce qui concerne l'accès, l'éducation et la formation du jeune public aux pratiques artistiques.

Dans le cadre du projet de loi de finances pour 2016, le Gouvernement revient sur cette situation défavorable , en rétablissant 13,5 millions d'euros de crédits, dans le cadre « d'un plan de soutien aux conservatoires dont le projet d'établissement portera un volet ambitieux d'éducation et de formation artistique en faveur de la jeunesse, de la diversité artistique et culturelle et de l'irrigation culturelle des territoires » 32 ( * ) . Cela représente une hausse de 8 millions d'euros par rapport à la dotation accordée en 2015 , qui avait atteint un niveau plancher à hauteur de 4,4 millions d'euros.

Le plan « conservatoires »

Le plan conservatoires, qui mobilisera 13,5 millions d'euros en 2016 , doit permettre d'accélérer l'ouverture des conservatoires au profit de toute la jeunesse , notamment des jeunes résidant dans des quartiers éloignés du centre-ville, d'encourager le développement de nouvelles disciplines et esthétiques afin de favoriser une plus grande diversité des profils d'amateurs mais également d'étudiants qui intègrent les établissements de l'enseignement supérieur culturel. Il s'agit aussi de favoriser le travail en réseau des conservatoires sur les territoires avec les autres structures d'éducation artistique spécialisées et les structures culturelles.

Source : ministère de la culture et de l'éducation

Malgré cette évolution favorable, qui marque la prise de conscience du rôle indispensable des conservatoires et le réengagement de l'État auprès des collectivités territoriales, il convient toutefois de rappeler que la dotation dédiée en 2016 reste largement inférieure au niveau des crédits atteint en 2012 (27 millions d'euros). Mais elle a le mérite d'enrayer la chute très brutale de ces crédits entre 2012 et 2015 (- 83,3 %) et de lancer un signal positif aux partenaires territoriaux de l'État.

Le ministère de la culture et de la communication estime par ailleurs que « cette mesure doit s'accompagner d'une redéfinition de priorités et partant, d'une refonte des procédures de classement dont l'objectif global doit être une meilleure ouverture des conservatoires à la diversité , ainsi qu'une modernisation de leurs démarches pédagogiques et de leur offre afin d'être au plus près des aspirations de nos concitoyens. Cela s'effectuera dans le cadre d'une observation des bonnes pratiques et d'une concertation avec les collectivités territoriales , les professionnels et les usagers qui a été lancée à l'automne 2015 dans le cadre du Conseil des collectivités territoriales pour le développement culturel (CCTDC) » 33 ( * ) .


* 32 Source : ministère de la culture et de la communication.

* 33 Source : réponses du ministère et de la communication au questionnaire budgétaire de vos rapporteurs spéciaux.