Questions orales

M. le président. - L'ordre du jour appelle dix-huit questions orales au gouvernement.

Sécurité et entretien du Champ de Mars

M. Yves Pozzo di Borgo. - Le VIIème arrondissement, dont je suis l'élu, connaît des problèmes de sécurité bien spécifiques, liés à la présence de certains lieux historiques tels que le Champ de Mars et de différents lieux de pouvoir. La concentration de bâtiments officiels, Hôtel Matignon, ministères importants, dont le vôtre, monsieur le ministre, imposent soit une garde statique soit une protection particulière importante, surtout avec le plan Vigipirate, et la moindre manifestation donne lieu au déploiement d'un arsenal impressionnant de forces de l'ordre : pas moins de dix cars de CRS pour quinze sans-papiers devant l'Assemblée nationale !

Cet état de fait a de lourdes conséquences pour la population de l'arrondissement : interdictions de stationner, mise en fourrière réglée obligatoirement en liquide, risques évidents, stationnement ininterrompu de véhicules de gendarmerie et de police, accès de certaines rues interdits.

Tout cela mobilise beaucoup de militaires et de fonctionnaires et a un coût pour l'Intérieur. Ne pourrait-on reconsidérer la paranoïa permanente qui affecte cet arrondissement, réviser le système de protection des points dits sensibles du Vllème arrondissement et redéployer le nombre important de militaires et de fonctionnaires pour les occuper à des tâches de proximité.

Le Champ de Mars est un lieu très sollicité pour des manifestations nationales et sportives, proche de surcroît de la Tour Eiffel dont je suis administrateur. Je sais bien que la gestion du Champ de Mars est de la compétence du maire de Paris, mais l'État ne peut fermer les yeux sur ce problème de sécurité. De plus, depuis l'arrêté de messidor an VIII, c'est le Préfet de police de Paris qui exerce les pouvoirs de police municipale du maire de Paris. C'est une anomalie à laquelle on devrait mettre fin, pour que la Ville de Paris revienne dans le droit commun des collectivités locales. Je déposerai prochainement une proposition de loi en ce sens.

Malgré les efforts de la préfecture de police, le Champ de Mars est devenu un lieu d'insécurité où sont commis 80 % des délits commis dans l'arrondissement -lequel est grand comme une ville telle que Cannes ou Colmar. C'est un lieu où, en juin, des milliers d'étudiants fêtent la fin de leurs examens, d'où des problèmes d'alcool, de bouteilles cassées et j'en passe. Hier encore, un directeur d'école me confiait ses inquiétudes devant la présence de dealers venant proposer de la drogue aux enfants. Les riverains se mobilisent contre cette situation et une pétition a déjà réuni plusieurs milliers de signatures.

Que comptez-vous faire, monsieur le ministre, pour que le Champ de Mars retrouve son rayonnement et redevienne un lieu paisible et agréable à fréquenter ?

M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'État, porte-parole du gouvernement. - Je vous prie de bien vouloir excuser l'absence de Mme Alliot-Marie qui inaugure le Salon international de la police et de la sécurité, ce qui me donne le plaisir de vous transmettre sa réponse.

Depuis 2002, les conditions de protection des points sensibles ont été redéfinies et le nombre des gardes statiques est en forte diminution. Le ministère de l'Intérieur a en effet décidé de privilégier les gardes « dynamiques ». C'est dans cette optique que l'Unité mobile d'intervention et de protection a été créée, à l'initiative du Préfet de police. Cette unité privilégie notamment les itinéraires aléatoires, le recueil d'informations stratégiques auprès des services de sécurité présents sur les sites protégés et la mobilisation rapide de forces de renfort. Cette redéfinition a permis une rationalisation des effectifs. Il serait toutefois difficile de diminuer beaucoup plus le nombre des gardes statiques dans cette zone sensible, en particulier dans le contexte du plan Vigipirate .

D'autre part, la mise en place des barriérages est essentielle lors des fréquentes manifestations revendicatives ou des rassemblements spontanés. Leur absence pourrait affecter la sécurité de certains édifices. Les forces de l'ordre ont toutefois reçu l'instruction d'ôter rapidement ces barrières à l'issue de chaque manifestation afin de limiter la gêne occasionnée aux riverains.

Enfin, comme vous le savez, le maire de Paris est seul habilité à gérer le Champ de Mars, espace municipal. Aussi, la Préfecture de Police ne peut en aucun cas délivrer d'autorisation pour l'organisation d'événements sans un accord explicite du maire de Paris. Lorsque des manifestations à caractère revendicatif sont organisées à Paris, sur le Champ de Mars ou dans un autre quartier, la Préfecture de Police est informée par simple déclaration et elle en informe alors systématiquement la mairie de Paris.

M. Yves Pozzo di Borgo. - Merci de cette réponse, mais peut-être faudrait-il reconsidérer le dispositif de sécurité concernant le Champ de Mars qui est un lieu « lourd », où, notamment, le maire aime à multiplier les évènements festifs.

Défense incendie

M. Bernard Murat. - Du Champ de mars, nous allons passer à la Corrèze et aux problèmes des territoires ruraux.

M. Yves Pozzo di Borgo. - Le Champ de mars est aussi un territoire rural ! (Sourires).

M. Bernard Murat. - Les projets de réforme de la réglementation relative à la défense incendie, visant à abroger les anciens textes, en particulier la circulaire du 10 décembre 1951, n'ont pas encore abouti.

Un groupe de travail technique, sous l'égide de la direction de la défense et de la sécurité civile, définit les axes d'une réforme. De nouvelles règles s'appliqueront à trois niveaux : un cadre national, un règlement départemental -en liaison avec l'organisation du SDIS- et un schéma communal ou intercommunal de défense incendie.

En mars dernier, un décret en Conseil d'État et un guide méthodologique ont été annoncés, qui doivent préciser les rôles respectifs des communes, des intercommunalités et du SDIS. Ces deux documents devaient être soumis à l'avis des parties concernées, dont l'association des maires de France, et entrer en vigueur fin 2007. Cette réforme est très attendue, par les élus locaux, les SDIS et les services chargés de l'instruction des permis de construire. Où en sommes-nous ?

M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'État, porte-parole du Gouvernement. - Sachant, monsieur Murat, que vous êtes l'un des meilleurs experts de cette réglementation, je vais tâcher d'être précis ! D'autant plus que nous avons le Massif central en commun.

Le Gouvernement s'est engagé, lors de la discussion de la loi de modernisation de la sécurité civile en 2004, à réformer des règles devenues obsolètes, celles de l'approvisionnement en eau des communes au profit des SDIS ou de l'examen des permis de construire. Il s'agit là d'une réforme complexe, la troisième tentative en trente ans, les deux précédentes n'ayant pas abouti.

Il y faut de la méthode et de la concertation. Nous prévoyons, comme vous l'avez rappelé, la définition de règles à trois niveaux. National, d'abord, sous la forme d'un décret fixant les grands principes, pluralité des approvisionnements, mode d'évaluation des besoins,... et d'un arrêté interministériel. Au niveau départemental, un règlement sera établi en liaison avec le SDIS, le schéma départemental d'analyse et de couverture des risques permettant de déterminer les besoins en eau d'extinction. La réalité des ressources en eau mobilisable sera désormais prise en compte. Enfin, au niveau communal ou intercommunal, le schéma de défense incendie informera les maires sur les risques couverts et les nouveaux moyens à mettre en oeuvre en cas de développement de l'urbanisation locale.

Les textes nationaux seront soumis dans le courant de ce mois à l'avis des acteurs concernés : Association des maires de France, ministères concernés, fédération nationale des collectivités concédantes, régies, conférence nationale des SDIS, afin que le dispositif soit prêt à la fin de l'année. Le Gouvernement privilégie cependant une concertation approfondie et recherchera l'adhésion de tous.

M. Bernard Murat. - Monsieur le ministre, élu du Massif central, je sais que vous êtes sensible à ce problème. N'importe lequel de nos territoires doit avoir le même niveau de défense incendie que nos grandes villes. Lorsqu'une entreprise souhaite s'implanter dans la zone d'activité d'une petite commune rurale, le maire n'a pas toujours les moyens de financer les infrastructures de sécurité nécessaires et l'entrepreneur jette alors son dévolu sur une plus grande ville...

C'est une question non négligeable pour l'aménagement du territoire et je suis heureux que ce dossier, sur lequel je me bats depuis des années et qui ne peut qu'intéresser le Sénat, trouve bientôt un heureux dénouement.

Le coût des grands prédateurs

M. Gérard Bailly. - Pourrions-nous faire le point sur le coût du maintien des prédateurs tels que le loup, l'ours ou le lynx dans nos montagnes ? Tout récemment, 400 moutons, en Savoie, se sont jetés dans un ravin, effrayés par les loups. Et la première attaque vient d'avoir lieu dans mon département, le Jura, provoquant la mort de 23 agneaux. De tels événements suscitent le découragement, l'incompréhension et le désarroi des éleveurs ovins. M. Fortassin et moi-même sommes chargés par la commission des affaires économiques d'un rapport sur l'élevage ovin. Et je me rends compte, dans toutes les régions de France concernées par la production ovine, des problèmes immenses causés par les prédateurs !

Il me paraît donc urgent de faire le point sur l'emploi des deniers publics utilisés pour leur introduction ou leur maintien dans les zones montagneuses. L'élevage ovin est très souvent le dernier rempart avant la friche, il contribue à l'entretien des alpages -contre le feu par exemple- et maintient une population en montagne. J'ai vu la détresse des éleveurs des Alpes-maritimes qui n'ont pas eu d'eau pendant deux mois...

M. le président. - Cinq !

M. Gérard Bailly. - Pourriez-vous, monsieur le ministre, m'indiquer la situation exacte par espèce et par nature des dépenses et le nombre d'agents affectés, dans les différentes administrations, à ce dossier ? Peut-être faut-il choisir entre prédateurs et éleveurs. Ces derniers sont découragés : j'en ai vu pleurer !

M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État chargé des transports. - Les grands carnivores que vous évoquez sont protégés par la Convention de Berne et par des directives communautaires et nationales. Ils participent de la biodiversité à la préservation de laquelle un groupe de travail a été consacré dans la cadre du « Grenelle de l'environnement ».

La protection ou la restauration de ces espèces répond donc aux obligations internationales de la France et à ses engagements en faveur de la biodiversité.

Mais la présence des grands prédateurs a un impact sur les activités humaines et le Gouvernement a pris les mesures d'accompagnement qui s'imposaient. Le suivi efficace des populations, par exemple -une très forte demande des élus locaux- favorise la gestion des effectifs, par espèce. Un soutien est apporté aux élevages confrontés à la prédation. En outre, l'animation pastorale et le soutien au gardiennage des troupeaux participent pleinement à la création d'emplois locaux. L'indemnisation des prédations permet de compenser les dégâts subis. Les mesures d'information et de communication complètent ces actions.

L'ensemble a coûté environ 6,3 millions d'euros en 2006, dont 30 % dans les Pyrénées et 70 % dans l'arc alpin. Le suivi des espèces représente environ 11 % de la dépense, l'aide au pastoralisme 70 %, l'indemnisation des dégâts 13 % et les actions d'informations et de développement local, 6 %.

Qui s'occupe de cette question ? Les ministères de l'Ecologie et de l'Agriculture ainsi que des établissements publics comme l'Office national de la chasse et de la faune sauvage, les parcs nationaux en leur qualité de gestionnaires d'espaces protégés. Certains parcs naturels régionaux ont pu également s'impliquer dans les démarches d'accompagnement des activités en présence de loups. Les agents sont une quarantaine sur l'aire de répartition des trois espèces, dont les trois quarts dans les Alpes. D'un point de vue comptable, ces données ne relèvent pas seulement de la stricte conservation des espèces et s'inscrivent dans une perspective plus large de développement durable et de soutien aux activités humaines compatibles avec la protection de la nature.

M. Gérard Bailly. - Je vous remercie pour ces précisions. On verra dans les prochaines semaines ce qu'il en sera des données budgétaires. En quelques années, nous avons déjà perdu 20 000 éleveurs et un million de brebis ; il faut agir !

Eaux pluviales

M. Louis Souvet. - M. Doublet, souffrant, m'a demandé de lire sa question.

La loi du 30 décembre 2006 a créé un crédit d'impôt en faveur de la récupération des eaux pluviales. Un arrêté interministériel du 4 mai dernier a précisé les caractéristiques techniques des équipements de récupération des eaux pluviales ouvrant droit au crédit d'impôt, limité au 31 décembre 2009. Cet arrêté concerne uniquement l'utilisation de l'eau de pluie pour des usages extérieurs à l'habitation. Mais un second arrêté est en cours de rédaction qui porte sur les conditions d'usage de l'eau de pluie dans les bâtiments raccordés au réseau public de distribution d'eau potable, ce qui m'inquiète beaucoup plus.

Le risque sanitaire est en effet très important, autant pour le propriétaire que pour le gestionnaire du service d'eau potable. Malgré les nombreuses prescriptions prévues, il existera toujours des risques sur l'origine de l'eau et sur le renvoi d'eau pluviale dans le réseau public. Il faudrait que le dispositif de séparation des deux réseaux soit mieux précisé et que le texte rappelle clairement que les eaux usées domestiques rejetées dans le réseau d'assainissement feront partie de l'assiette de calcul de la redevance d'assainissement. La mission de contrôle du système de récupération des eaux pluviales pour un usage à l'intérieur de l'habitation prendra beaucoup de temps et exigera du service une grande compétence technique et une lourde responsabilité.

Les inquiétudes suscitées par la récupération des eaux de pluie sont justifiées par la multiplication des forages privés, lesquels ne font pas l'objet de la déclaration réglementaire en mairie et sont à l'origine de plusieurs contaminations. En outre, les volumes ainsi utilisés échappent à la redevance d'assainissement. Je m'interroge sur l'intérêt économique pour un propriétaire de réaliser et d'entretenir un système de récupération des eaux de pluie pour un usage limité aux installations sanitaires, comparé à une utilisation du réseau public. L'eau de pluie pouvant être récupérée pour les installations sanitaires représente 30 % du volume consommé par un foyer. Cela peut déséquilibrer gravement le budget des services et entraîner une augmentation de la redevance pour les autres consommateurs.

Pouvez-vous me donner votre sentiment sur l'utilité de la mise en place d'un dispositif administratif et juridique complexe, et m'assurer que le texte sera complété dans le sens que nous souhaitons ?

M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État chargé des transportrs. - M. Doublet m'a en effet indiqué qu'il était souffrant et ne pouvait venir ce matin.

La période de validité du crédit d'impôt étant limitée au 31 décembre 2009, un arrêté a été pris le 4 mai 2007 afin de ne pas pénaliser les contribuables. Il se rapporte au seul crédit d'impôt pour des équipements de collecte des eaux de pluie pour un usage extérieur. Un second texte, en cours de rédaction avec le ministère de la santé, précisera les usages autorisés de l'eau de pluie dans l'habitation et modifiera en ce sens l'arrêté « crédit d'impôt ». Il sera proposé pour les immeubles d'habitation d'ouvrir l'utilisation aux toilettes et au nettoyage des sols.

Le conseil supérieur d'hygiène publique de France, par un avis de septembre 2006, a préconisé d'interdire l'utilisation de l'eau de pluie pour le lavage du linge. L'utilisation d'eau non potable sera interdite dans un certain nombre d'immeubles, tels que les hôpitaux ou les crèches. L'utilisation de l'eau de pluie par les industriels devrait être soumise à une instruction individuelle. Les utilisateurs auront l'obligation de se déclarer à la mairie, qui diffusera l'information auprès des services d'eau et d'assainissement.

La loi sur l'eau et les milieux aquatiques a autorisé les services d'eau potable à procéder à des contrôles des installations intérieures des utilisateurs de ressources alternatives.

Les connexions physiques entre réseaux de distribution d'eau de pluie et réseaux de distribution d'eau potable seront interdites, à l'exception de la surverse du réseau de distribution d'eau potable vers celui d'eau de pluie.

Pour ce qui est du prix de l'eau, il est nécessaire de rester vigilant de façon à ne pas rompre la solidarité entre tous les consommateurs, afin que les plus démunis puissent profiter du même service public et dans des conditions socialement acceptables. La réglementation prévoit déjà la possibilité de percevoir la redevance assainissement sur les volumes transitant par le réseau de collecte des eaux usées. Un compteur qui totalisera l'eau de pluie utilisée dans les toilettes sera obligatoirement installé.

Le projet de texte sur l'utilisation de l'eau de pluie dans les immeubles devrait être proposé au comité national de l'eau à l'automne.

M. Louis Souvet. - Le risque d'intrusion de l'eau de pluie dans le réseau communal n'est pas nul, je l'ai constaté dans ma commune : une vanne a été entrouverte et, quand on a arrosé le terrain de football, l'eau est entrée dans le réseau communal.

M. le Président. - La secrétaire d'État à l'environnement n'est pas là. Je comprends qu'un ministre d'État ne vienne pas ; d'un secrétaire d'État, ce n'est pas admissible. (Applaudissements)

Isolation phonique des autoroutes

M. Louis Souvet. - Mon intervention ne se situera pas dans le registre du classique « tout sauf dans mon jardin », « oui aux énergies renouvelables mais pas question de vivre auprès d'un parc éolien ». J'ai, moi-même, à gérer ces réactions.

Il s'agit simplement d'évoquer l'intérêt général. L'amélioration des corridors de transport au sein de l'espace national et communautaire, qui requiert la mise à deux fois trois voies d'un tronçon autoroutier, doit aussi respecter la qualité des loisirs pratiqués autour d'une base nautique. Le problème est général car l'accroissement du volume de la circulation posera le même problème au niveau national. L'occasion nous est donc donnée, à travers un cas concret, d'améliorer les règles, de les actualiser.

Pour l'heure, ne sont concernées par la protection phonique que les zones d'habitat, les utilisateurs de zones de loisirs sont oubliés, alors que, par définition, ils viennent chercher le calme. Avec les progrès technologiques, on peut s'attendre à une réduction du bruit des moteurs, mais, sur une autoroute, c'est le bruit du contact des pneus sur la chaussée qui domine. Il est vrai que les revêtements routiers et autoroutiers font l'objet de recherches constantes mais se posera toujours la question de la tenue dans le temps de l'enrobé.

Va-t-on aligner la protection phonique des usagers de campings et de zones de loisirs sur celle des zones d'habitat, où les normes sont de soixante décibels de jour et cinquante-cinq décibels de nuit ? Un mur isolant diminue le bruit d'environ vingt-cinq décibels. On pourrait même envisager des normes plus contraignantes puisque, selon la Direction générale de la santé, un niveau de bruit de cinquante-cinq décibels constitue une gêne sérieuse le jour et en soirée.

M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État chargé des transports. - Je vous prie d'excuser Mme Kosciusko-Morizet qui m'a prié de vous répondre que la politique de limitation des nuisances sonores suit quatre lignes directrices : le classement des voies bruyantes et la définition des secteurs où l'isolation doit être renforcée ; la prise en compte en amont des nuisances ; le traitement des « points noirs » ; enfin l'évaluation et la prévention du bruit. Les constructeurs ont l'obligation de prendre les dispositions propres à limiter les nuisances en application du principe d'antériorité ; la protection des bâtiments existants doit en outre être assurée en cas de modification d'une infrastructure existante ou d'aménagement d'une nouvelle infrastructure. Le décret du 9 janvier 1995 impose aux maîtres d'ouvrage de prendre les dispositions nécessaires afin que les nuisances sonores soient limitées à un niveau compatible avec les modes d'occupation ou d'utilisation normaux des bâtiments ou des espaces ; il fixe également des limites nationales que la contribution sonore de l'infrastructure ne saurait dépasser -pour les habitations seulement, il est vrai. Cela dit, les maîtres d'ouvrage peuvent retenir des objectifs plus exigeants et rechercher pour les atteindre des participations financières.

De nouvelles obligations résultent en outre des articles 572 et suivants du code de l'environnement, à la suite de la transposition de la directive européenne de juin 2002. Peuvent ainsi être définies des zones calmes, notamment en agglomération, et des espaces remarquables ou dont la faible exposition au bruit doit être préservée.

Il va de soi que le Grenelle de l'environnement traitera des nuisances sonores. De nouvelles mesures seront certainement proposées à cette occasion. J'attirerai l'attention de ma collègue sur le point spécifique que vous avez évoqué.

M. Louis Souvet. - Je vous remercie. Il est nécessaire de revoir la protection des zones où les gens viennent chercher calme et repos. Quand une voie routière passe de deux fois deux voies à deux fois trois voies, le bruit ne peut qu'augmenter avec la vitesse. Or, les maîtres d'ouvrage refusent aujourd'hui de prendre les dispositions qui s'imposent.

Urbanisme et zonage

M. Bernard Piras. - Le droit applicable aujourd'hui aux constructions situées dans les zones non urbaines des communes pose problème. Si les bâtiments sont destinés à l'agriculture, ils sont classés en zone A ; sont classés de façon particulière les bâtiments agricoles qui, par leur intérêt architectural ou patrimonial, peuvent changer de destination ; enfin, les bâtiments se trouvant dans des espaces naturels à protéger sont classés en zone N. Mais rien n'est prévu pour les constructions existantes non destinées à l'agriculture et situées en zone naturelle. Des milliers de logements sont concernés dans la Drôme ; ils sont classés par défaut en zone A alors qu'ils n'ont aucun lien avec l'agriculture et ne peuvent dès lors être aménagés ni étendus.

Pour remédier à cette situation, des communes ont créé dans leurs PLU des microzones N pour les bâtiments concernés ; mais le tribunal administratif de Grenoble a jugé ces opérations illégales. Les services de l'État refusent désormais tout microzonage, ce qui place les élus dans une impasse et risque d'inciter à ne pas déclarer les travaux.

Quelles mesures le gouvernement entend-il prendre pour combler cette lacune juridique ?

M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État chargé des transports. - L'article R 123-7 du code de l'urbanisme limite l'autorisation de construction sur les terres agricoles. Comment traiter les parcelles non agricoles situées dans ces zones ? Le décret du 27 mars 2001 n'interdit pas l'aménagement de constructions existantes, sans toutefois l'autoriser de manière générale en zone A. Aux termes de l'article R.123, les PLU peuvent, de façon strictement encadrée, instituer des zones naturelles où des constructions non agricoles peuvent être autorisées ; la création de microzones N au sein des zones A est donc possible.

Un contentieux est toutefois en cours, comme vous l'avez rappelé ; la cour administrative d'appel de Lyon est saisie, le Conseil d'État le sera peut-être : la jurisprudence n'est donc pas fixée. En attendant, je confirme la lecture que fait le gouvernement : la création de microzones N en zone A est légale. Nous verrons ce qu'il en sera lorsque toutes les juridictions se seront prononcées.

M. Bernard Piras. - Je vous remercie. Il ne faudrait pas que ce dossier reste bloqué encore deux ou trois ans. Le gouvernement doit donner des instructions aux DDE pour qu'elles cessent de refuser les microzonages.

M. le président. - Les DDE devraient être plus attentives aux remarques des parlementaires...

Fret ferroviaire

Mme Marie-France Beaufils. - Le nouveau directeur du fret à la SNCF voulait « rendre le sourire » à ses clients. Les chargeurs que j'ai rencontrés rient jaune aujourd'hui ! Les PME sont pénalisées, qui vont subir « la disparition des wagons isolés », alors que le gouvernement dit vouloir les aider.

L'entreprise de logistique Geodis, installée à Saint-Pierre-des-Corps, a rénové son embranchement et négocié un nouveau contrat avec son fournisseur allemand ; mais la gare de triage va fermer ! Je partage l'indignation des clients de la SNCF ; si l'on considère la carte de restructuration du fret, seule la grande région Est est préservée. Quid de l'Ouest et du dynamisme de ses PME ? Veut-on sa désindustrialisation ? La colère gronde, celle des salariés, des chargeurs, des citoyens ! Un moratoire est indispensable.

La gare de triage de Saint-Pierre-des-Corps pourrait devenir le grand hub stratégique qui fait aujourd'hui défaut, alors que la région parisienne est saturée.

Entre 2004 et 2006, 1,5 million de camions supplémentaires ont emprunté les autoroutes françaises. Avec la fermeture d'une soixantaine de gares dans la région Centre, l'Indre-et-Loire devra faire face à 26 000 camions supplémentaires.

Les difficultés actuelles du fret ferroviaire sont le résultat de l'insuffisance de nos infrastructures. L'audit d'un cabinet suisse a montré, il y a peu, que nous devions nous engager résolument dans une politique de rénovation des lignes.

Comment accepter que l'on ferme massivement des gares, sans attendre les conclusions du Grenelle de l'environnement, alors que le Président de la République a pris l'engagement d'augmenter le fret non routier de 25 % en cinq ans ? Monsieur le ministre, pouvez-vous obtenir de la SNCF qu'elle décide un moratoire et s'engage à trouver des solutions adaptées aux entreprises ?

M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État chargé des transports. - Madame Beaufils, je vous remercie d'avoir rappelé les engagements du Président de la République en faveur de l'intermodalité et du développement des transports maritime, fluvial et ferroviaire.

En France, le fret ferroviaire se porte mal tandis qu'il gagne chaque année des parts de marché chez nos voisins européens, y compris au Royaume-Uni qui a procédé à une réforme dont nous avons tant moqué la brutalité. La situation n'a cessé en France de se détériorer, quelle que le soit la majorité au Gouvernement. (M. René-Pierre Signé le conteste) M. Gayssot lui-même a dû en rabattre.

Nos difficultés ne sont pas liées à un problème d'infrastructure, mais de fonctionnement. Avec la libéralisation du secteur ferroviaire depuis 2006 et l'apparition de cinq opérateurs privés, on ne peut exiger de la SNCF qu'elle tracte des wagons à perte. Si l'on veut, comme l'avait prédit Louis Armand, que le rail qui a survécu au XXème siècle devienne le transport de l'avenir, les compagnies françaises doivent privilégier le transport massifié comme leurs homologues européennes. La Deutsche Bahn s'est déjà lancée dans une telle politique : 50 % du trafic est assuré par le rail à Hambourg, le premier port d'Europe, contre à peine 10 % au Havre et des trains relieront bientôt l'Allemagne à la Russie et la Chine !

J'en viens maintenant au transport en wagon isolé. En nous inspirant du modèle américain des short lines et de l'exemple allemand, nous militons pour qu'il soit pris en charge par des opérateurs ferroviaires de proximité. (On s'exclame sur les bancs socialistes où l'on parle de privatisation) Ces opérateurs, issus du regroupement d'acteurs tels que les chambres de commerce, les coopératives agricoles, les ports ou encore les collectivités, décident de mettre leurs moyens en commun pour assurer le fret ferroviaire sur de courtes distances. Un premier opérateur, Proxirail, devrait voir le jour dans la région Centre. Une solution analogue pourrait être trouvée à Saint-Pierre-des-Corps.

Un wagon non estampillé SNCF sur le rail est toujours préférable à un camion supplémentaire sur la route !

M. René-Pierre Signé. - Donc, en toute logique, vous fermez des gares !

Mme Marie-France Beaufils. - Monsieur le ministre, la SNCF a annoncé la fermeture des gares pour le 30 novembre 2007 et Proxirail ne sera en service qu'au premier trimestre 2008, d'où l'urgence de prendre un moratoire...

De plus, la solution des opérateurs de proximité n'est pas adaptée à la situation de Saint-Pierre-des-Corps où il s'agit de couvrir de longues distances. L'exemple de Geodis le montre bien : il s'agissait d'un projet reliant le réseau français au réseau allemand.

Nous buttons toujours sur le problème des infrastructures. Le Royaume-Uni a réussi sa reconversion parce qu'il a consenti un effort financier important pour la rénovation des voies et des matériels. Le journal Les Echos notait dans un article récent que la mise en place de Proxirail exigeait la remise à niveau de 600 kilomètres de voirie dans le Centre.

M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État. - Le contrat de projet avec la région Centre prévoit des engagements financiers importants de l'État pour la rénovation des voies de fret autours de Tours, Orléans et Blois, voies pour lesquelles les normes de sécurité sont moins strictes que pour le transport de voyageurs. S'agissant de Geodis, il s'agit d'abord d'une affaire interne à la SNCF puisque Geodis est une filière de la SNCF. Laissons les entreprises la régler.

Enfin, pour la région Centre, il est prévu d'électrifier les voies de Tours à Vierzon et nous proposerons, dans le cadre du Grenelle de l'environnement, de développer une nouvelle autoroute ferroviaire Est-Ouest, reliant la région nantaise et Saint-Nazaire à Lyon. Ce qui renforcera l'importance de Saint-Pierre-des-Corps, ce centre historique du trafic ferroviaire.

Soutien à la filière veau

M. Bernard Cazeau. - Monsieur le ministre, lors d'une récente visite en Dordogne, vous avez annoncé que 8 millions seraient consacrés au soutien de la filière veau de boucherie. De l'avis des professionnels, c'est très insuffisant. Les entreprises d'intégration, telle Sobeval, connaissent des pertes sévères qui se répercutent sur les éleveurs. Le cercle vicieux est connu : un aliment laitier plus cher, un coût de production majoré, des prix de vente peu flexibles du fait de la grande distribution et donc des pertes qui menacent aujourd'hui des centaines d'exploitations agricoles et, à terme, notre capacité à produire. Les nouveaux produits pour l'engraissement des veaux, qu'on nous présente comme une solution, ne sont pas encore au point. Le découragement est grand parmi les éleveurs des filières intégrées dont les charges augmentent à mesure que le prix des produits chute.

La situation exige donc une action forte des pouvoirs publics. Faudra-t-il attendre la pénurie, comme cela a été le cas pour les céréales et le lait, pour que l'on songe à préserver notre capacité de production ? Monsieur le ministre, quelles dispositions prendrez-vous pour redonner confiance à cette communauté agricole ?

M. Michel Barnier, ministre de l'agriculture et de la pêche. - Lors de ma visite dans votre département, j'ai mesuré la grande inquiétude, la désespérance même des éleveurs de veaux de boucherie, ainsi que le volontarisme et le professionnalisme des entreprises de transformation. Ce secteur, ancré dans un territoire, est confronté à un déséquilibre récurrent entre offre et demande et au renchérissement des coûts de production, qui affecte également d'autres filières comme celles du porc et de la volaille.

Dans des conditions budgétaires difficiles, la concertation entre professionnels et administration a permis d'aboutir à une proposition tenant compte des difficultés des éleveurs : j'ai ainsi annoncé le 21 août un plan de soutien de 7,8 millions d'euros, dont 1,5 million d'allègements de charges, qui prévoit une adaptation du nombre de places dans les exploitations, une compensation des pertes de marges pour les entreprises de transformation, des moyens financiers sécurisés via l'Office de l'élevage et un effort accru de recherche et de promotion. En juin, nous avons également obtenu au niveau communautaire que la dénomination veau soit réservée aux seuls bovins de moins de huit mois.

Je reconnais le caractère conjoncturel de ces mesures. Nous travaillons à des réponses plus structurelles. Nous n'avons pas les outils adaptés pour faire face aux crises climatiques, sanitaires -comme actuellement la fièvre catarrhale ovine- et économiques que nous devons affronter. Dans le cadre des discussions qui s'ouvrent sur le bilan de la PAC et l'après-2013, je vais travailler à améliorer nos outils de prévention et de mutualisation des risques. J'espère que le Sénat s'associera à ces travaux.

M. Bernard Cazeau. - Vous reconnaissez que cette action conjoncturelle est insuffisante. Je ne mésestime pas la qualité du travail que vous pouvez mener pour résoudre les crises qui touchent l'ensemble de la profession agricole, mais il faudrait au moins quinze millions pour aider ce secteur qui connaît de grandes difficulté, tant au niveau national que périgourdin. Ce sont des milliers d'entreprises agricoles et industrielles qui risquent de disparaître. Je souhaite que vous puissiez annoncer prochainement une augmentation de cette aide.

Agrément et assermentation des policiers municipaux

M. Christian Demuynck. - Une fois recruté par le maire, un agent de police municipale doit être agrémenté par le préfet, qui contrôle sa moralité et son honorabilité -ce qui prend entre cinq et sept mois. Dans ma ville de Neuilly-Plaisance, un fonctionnaire recruté en mai n'est toujours pas agrémenté ! Il lui faut ensuite être agrémenté par le tribunal de grande instance, ce qui prend environ six mois, avant l'assermentation devant le tribunal d'instance -ce qui ne prend que quelques semaines. S'il entre dans une police où le port d'arme est autorisé, il faut compter quelques semaines supplémentaires. Ne pourrait-on réduire ces délais, afin que les policiers municipaux soient opérationnels plus rapidement ?

M. Michel Barnier, ministre. - Mme Alliot-Marie vous prie d'excuser son absence, et me charge de vous répondre. La question de l'agrémentation des policiers municipaux est essentielle pour le bon fonctionnement de la police municipale, qui concourt à la sécurité dans notre pays. L'accès à cette fonction, qui entraîne l'exercice d'une prérogative de puissance publique, exige le contrôle préalable de la moralité de l'agent, notamment à travers la connaissance de ses antécédents judiciaires. Mme Alliot-Marie est favorable à une simplification de ces procédures, qui peuvent en effet poser des difficultés aux maires : l'article L 412-49 du code des communes sera modifié afin que les agents soient agrées par le procureur de la République dès leur succès au concours d'entrée, et continuent à bénéficier de cet agrément, indépendamment de leur affectation géographique. Le Parlement sera saisi prochainement de cette réforme, qui est très attendue par les maires.

M. Christian Demuynck. - J'espère que cette question sera réglée rapidement.

M. le président. - Dans la deuxième ville de France, la police municipale n'est pas armée, et cesse son activité à 21 heures. Elle ne peut être armée sans un effort de formation supplémentaire. Sans compter qu'en cas de bavure, on ne traite pas la police nationale et la police municipale sur le même pied ! Il faudrait plus d'équité.

M. Christian Demuynck. - Très bien !

M. Michel Barnier, ministre. - J'en ferai part à Mme Alliot-Marie.

Financement des écoles privées

M. Michel Teston. - La circulaire d'application de l'article 89 de la loi du 13 août 2004 étend au financement des écoles privées sous contrat les procédures qui régissent la répartition entre les communes des dépenses de fonctionnement des écoles publiques. Désormais, toute commune où il n'y a pas d'école privée devra financer la scolarisation d'un enfant dans une école privée d'une autre commune. S'agissant d'une école publique, la commune de résidence n'est pourtant tenue de contribuer financièrement que si le maire a donné son accord à cette scolarisation...

Les dispositions de l'article 89 risquent de ruiner les efforts de nombreux élus pour maintenir un service public de qualité sur leur territoire et de conduire à la disparition de nombreuses écoles publiques, avec des conséquences particulièrement dommageables dans les zones rurales. Aussi, je vous demande de reconsidérer l'article 89 de la loi du 13 août 2004 lors de cette session parlementaire et, dans l'attente, de ne pas mettre en application la circulaire.

M. Christian Demuynck. - Très bonne question.

M. Xavier Darcos, ministre de l'éducation nationale. - J'ai eu l'occasion de répondre à votre collègue M. Houel sur ce sujet difficile lors de la séance de questions d'actualité. Vous pouvez difficilement demander au gouvernement de ne pas appliquer une loi votée par le Parlement, même si je comprends certaines de vos réticences. L'article 89 a été introduit sur proposition sénatoriale.

M. Christian Demuynck. - Exactement.

M. Xavier Darcos, ministre. - Cette transposition pour l'enseignement privé de règles existant pour le public doit reposer sur le dialogue entre les communes intéressées. Cela est valable pour le public comme pour le privé. Ce n'est qu'en cas de désaccord entre communes que l'intervention du préfet peut être requise.

L'article 89, tout comme la circulaire, ont été guidés par un principe d'équité : équité à l'égard des communes, qui ne sauraient payer plus pour le privé que pour le public ; équité à l'égard des familles, qui ont droit à ce que leur liberté de choix soit pleinement respectée.

La circulaire de décembre 2005 a été annulée pour de simples raisons de forme.

Nous avons soumis le texte de la nouvelle version à l'Association des maires de France, ce qui a permis de retirer certaines dépenses de la liste figurant en annexe. Moins oppressante, cette circulaire s'appliquera dans un esprit de mutuelle compréhension et de conciliation entre l'équilibre des finances publiques et de respect des décisions des familles, les sans doute très rares conflits faisant l'objet d'arbitrages par le préfet.

M. Michel Teston. - Selon les explications de M. Charasse, son amendement ne concernait que les communes qui n'ont pas ou plus d'école publique. Mais la rédaction n'était pas très explicite et l'article 89 de la loi du 13 août 2004 a une portée très générale. Il en résulte une disparité de traitement entre les communes (M. Courteau le confirme) car le maire est consulté s'il s'agit d'une école publique mais non s'il s'agit d'une école privée, sa commune étant obligée dans ce cas de participer au financement de la scolarité. Le Gouvernement va-t-il déposer une proposition de modification de l'article 89 ? Deux voies s'ouvrent à lui, soit le compléter par un alinéa stipulant que « les dispositions du présent article ne s'appliquent qu'aux communes qui n'ont pas ou plus d'école publique », soit substituer les mots « les dispositions de l'article L 212-8 du Code de l'éducation sont applicables », aux mots « les trois premiers alinéas de l'article L 212-8 du Code de l'éducation sont applicables ». (Applaudissements sur les bancs socialistes)

Secours à personnes

M. Philippe Madrelle. - Bien avant que le dernier congrès des sapeurs pompiers ne dresse un bilan alarmiste, j'avais été alerté par des élus ruraux du sud-Gironde. Un dramatique incendie a coûté la vie à quatre personnes mais ce drame ne doit pas être utilisé pour discréditer l'organisation des secours incendie : je redis notre indéfectible attachement aux pompiers dont nous savons l'engagement. Il n'en est pas moins urgent de réorganiser les services de sécurité civile. Le Président de la République vient d'ailleurs de souhaiter l'expérimentation d'une coopération. La centralisation des appels au 15 entraîne des délais supplémentaires et la rigidité du système apparaît antinomique de la nécessaire réactivité des secours : des corrections sont urgentes.

Le Conseil national de sécurité civile avait retenu les secours à la personne comme thème de ses travaux. Nous voulons maintenant assurer un traitement équitable à tous les citoyens ce qui suppose qu'on n'applique pas mécaniquement les même règles aux secteurs ruraux, qui manquent de médecins pendant les vacances et les week-ends. Il faut refuser la concurrence et chercher les plus values. Les services d'urgence travaillent bien, je l'ai vu récemment à La Réole, mais une réorganisation est urgente.

M. le président. - Mme Létard qui va vous répondre après avoir siégé parmi nous est ici comme chez elle.

Mme Valérie Létard, secrétaire d'État chargée de la solidarité. - Merci, monsieur le président.

Les secours à la personne ont représenté en 2006 70 % de l'activité des SDIS soit 2,5 millions d'interventions (+ 7 %). Ils impliquent une relation permanente avec les SAMU car la médicalisation a permis de réduire de 30 % la mortalité des urgences vitales.

L'objectif commun est de mieux s'organiser, de mutualiser les moyens pour être plus opérationnel. Comme l'a annoncé le Président de la République le 29 septembre, nous allons revoir l'organisation des secours sans querelles de chapelle mais en assurant la coordination. Dès 2008, les schémas départementaux d'analyse et de couverture des risques seront rapprochés des schémas régionaux pour l'organisation des urgences médicales. La réception des appels au 15 et au 18 sera revue en mettant à profit les technologies informatiques et les outils de radiocommunication numérique seront expérimentés. Une évaluation de la nouvelle réponse graduée interviendra dès 2009.

En tout point du territoire, nos concitoyens bénéficient d'un système de secours efficace : je rends hommage aux sapeurs pompiers et au personnel des SAMU. Mme Alliot-Marie s'engage à adapter ce dispositif.

M. Philippe Madrelle. - Je vous remercie de cette réponse encourageante. La rigidité n'améliore pas les choses ; il faut en finir avec les procédures trop compliquées.

Accueil des enfants handicapés hors du temps scolaire

M. Georges Mouly. - Je suis heureux de la présence de Mme Létard à qui j'aurai sans doute l'occasion de poser de nombreuses questions.

La loi handicap du 11 février 2005 privilégie l'accueil des enfants souffrant de handicaps en milieu ordinaire et le Gouvernement vient de renforcer les moyens d'accompagnement. Cependant, le dispositif va monter en puissance et la réflexion sur l'épanouissement des enfants handicapés a déjà souligné la difficulté de concilier temps scolaire et rythme familial tout en respectant la spécificité du handicap, ce qui suppose une formation du personnel. M. Darcos a annoncé des mesures spécifiques, et les auxiliaires de vie scolaire récemment recrutés recevront les soixante heures de formation initiale prévue par la loi de 2003.

Une convention nationale devrait être signée prochainement, pour intégrer la question du handicap dans la formation des maîtres en IUFM. Ne faudrait-il pas intégrer aussi des modules spécifiques dans la préparation au BAFA et autres diplômes d'animation ?

Mme Valérie Létard, secrétaire d'État chargée de la solidarité. - Merci d'avoir souligné les efforts particuliers, dès cette rentrée scolaire,  pour l'intégration des élèves handicapés en milieu ordinaire : 2 700 postes d'assistants de vie scolaire en plus, 200 unités pédagogiques d'intégration et 1 250 places supplémentaires en Services d'éducation spéciale et de soins à domicile (SESSAD).

Comme vous, je souhaite que les enfants handicapés se voient offrir la possibilité de participer aux activités périscolaires et extrascolaires proposées à tous les enfants : c'est une question de justice et d'égalité des chances. Leur accueil suppose effectivement que les animateurs soient formés ou, tout au moins, que quelqu'un connaissant l'enfant puisse participer avec lui aux activités.

Le ministère de la Jeunesse et des Sports met en place une politique de formation des animateurs et moniteurs depuis plusieurs années. La Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie (CNSA) finance 300 postes d'animateurs sportifs spécialisés dans les fédérations Handisport et Sport adapté ; des modules de formation à l'accueil des personnes handicapées sont dispensés aux moniteurs qui le souhaitent, sur la base du volontariat.

Dès 2001, les ministères de la Jeunesse et des Sports et de la Solidarité ont recommandé l'accueil des enfants handicapés en centres de loisir ou de vacances. Le guide méthodologique à l'attention des formateurs intervenant au cours des sessions de formation au BAFA, édité en 2003, prévoit une sensibilisation des futurs animateurs à l'accueil des enfants handicapés.

Il est souhaitable d'aller plus loin. Je me rapprocherai de Mme Bachelot pour examiner la possibilité d'inclure un module de formation sur le handicap au sein des formations au BAFA. Il devrait en être de même pour les enseignants, les architectes, les autres métiers du bâtiment ou encore les gestionnaires des ressources humaines.

A l'occasion de la préparation du plan « Métiers » prévu par la loi du 11 février 2005, je vais passer en revue l'ensemble des formations et certifications professionnelles, pour repérer ceux des métiers où la sensibilisation à la question du handicap est indispensable.

M. Georges Mouly. - Merci pour cette réponse, j'en profite pour vous dire ma grande satisfaction de vous voir au gouvernement... La rentrée scolaire témoigne de l'effort du gouvernement, j'espère que vous aurez les moyens de tenir vos engagements !

CAP emploi

Mme Marie-Thérèse Hermange. - Je m'inquiète de voir diminuer, en Ile-de-France, le nombre de structures qui aident l'insertion professionnelle des travailleurs handicapés. La loi de février 2005, en modifiant la prise en compte des travailleurs handicapés dans les effectifs des entreprises, a créé une incitation à leur embauche. En augmentant la contribution des entreprises, elle a accru mécaniquement les moyens confiés à l'agence de gestion des fonds pour l'insertion professionnelle des personnes handicapées (Agefiph).

Or, l'Agefiph lance un appel d'offres pour réduire, notamment en Ile-de-France, le nombre de CAP emploi. Ces organismes de placement spécialisés, créés en 1976, jouent un rôle essentiel pour la préparation, l'accompagnement et le placement des travailleurs handicapés. Ils interviennent dans le cadre d'une délégation de service public et sont un partenaire privilégié des entreprises.

L'Agefiph fait une interprétation erronée de la loi en estimant de sa seule responsabilité d'organiser le conventionnement des CAP emploi. Comme le rappelait notre commission des affaires sociales en examinant la loi de février 2005, le législateur a souhaité que l'Etat conserve la responsabilité de ce conventionnement. Madame le ministre, qu'en est-il ?

Mme Valérie Létard, secrétaire d'État chargée de la solidarité. - Comme vous, je suis attachée à l'existence des CAP emploi : ils accompagnent chaque année plus de 80 000 personnes handicapées et contribuent au placement de 45 000 d'entre elles. La loi leur confie la compétence de préparer, d'accompagner vers l'emploi et de placer les travailleurs handicapés en milieu ordinaire de travail. Ils ne sont donc pas des prestataires auxquels l'Agefiph aurait loisir de recourir pour exercer une de ses propres missions. Ce sont des partenaires au financement desquels la loi impose à l'Agefiph de contribuer. Il est indispensable de s'assurer de la qualité de leurs prestations. C'est pourquoi la loi a prévu un conventionnement, une évaluation régulière, ainsi que la possibilité de mettre fin au conventionnement.

La loi ne dit pas explicitement quelle est l'autorité responsable du conventionnement. Vous avez raison : c'est l'Etat, lequel est cependant libre de déléguer cette compétence tout en gardant le contrôle de la procédure.

Il intervient de deux manières dans ce conventionnement. D'abord par un rôle d'orientation et d'impulsion de la politique en faveur des CAP emploi, à travers la définition de leur offre de service nationale : un protocole national a été signé en janvier 2007 avec l'Agefiph et les CAP emploi. Ensuite, en cosignant chaque convention avec les CAP emploi, l'Agefiph étant également cosignataire comme financeur.

L'Etat a choisi de déléguer le suivi des conventions à l'Agefiph et à son réseau régional : l'association s'assure du respect de l'offre de service élaborée avec l'Etat, à travers une procédure d'audit dont les conclusions seront rendues à la fin de l'année. Quand l'audit préconise de changer l'opérateur, l'Agefiph sélectionne un nouveau prestataire, et l'Etat participe à ce choix en signant la convention.

L'Etat est mobilisé dans le pilotage du réseau CAP emploi et je veillerai à ce qu'il le reste, en demandant aux services déconcentrés de participer aux comités de pilotage régionaux qui instruisent les décisions de conventionnement.

Le recours à l'appel d'offres ne me paraît pas contestable pour sélectionner un nouvel opérateur en cas de défaillance du précédent. A l'inverse, on déstabiliserait le réseau si l'on devait renouveler les conventionnements par appel d'offres tous les trois ans, en empêchant la constitution d'une véritable expertise professionnelle.

L'Ile-de-France est dans une situation particulière : pour des raisons historiques, elle compte dix-sept CAP emploi pour huit départements. La taille des bassins d'emploi peut justifier un nombre plus important de CAP emploi, mais cela n'interdit pas de vouloir en optimiser la répartition. Le travail engagé en ce sens depuis 2004 n'a donné lieu qu'à une seule fusion. L'Agefiph, en accord avec ses autorités de tutelle, a donc décidé de définir elle-même un schéma régional d'implantation et de lancer un appel d'offre pour sélectionner les structures répondant aux orientations de ce schéma.

Si la démarche est légitime, l'Agefiph est allée trop vite en fixant un schéma qui ne compte qu'un CAP emploi par département, sans même attendre les résultats de l'audit qu'elle a elle-même lancé. On risque effectivement de supprimer des structures qui rendent de réels services.

Il est plus prudent de prendre connaissance des résultats de l'audit puis de définir un schéma d'implantation des CAP emploi avec l'Agefiph, le ministère de l'économie, des finances et de l'emploi, chargé de sa tutelle, et les organismes de placement spécialisés concernés. Ces démarches accomplies, l'appel d'offre pourrait être réactivé, sur des bases plus saines.

Mme Marie-Thérèse Hermange. - Merci pour cette réponse très complète. Je proposerai une réunion aux CAP emploi d'Ile-de-France, pour la leur transmettre et les rassurer.

Imprimerie de l'armée de terre

M. René-Pierre Signé. - Les gouvernements passent, les problèmes demeurent, en particulier pour l'établissement d'imprimerie de l'Armée de terre (EIAT) implantée à Château-Chinon.

Avec la suppression du service obligatoire et la réduction des effectifs militaires, le travail d'impression a été réduit et les mutations du personnel, maintenant civil, sont plus difficiles à obtenir. Une étude en cours -mais qui date, il est vrai de plusieurs mois- évoque diverses options assez peu favorables : attendre le départ en retraite de la majorité du personnel et envisager une fermeture à moyen terme, constater la carence d'encadrement et fermer l'établissement plus rapidement, regrouper à Saint-Etienne l'EIAT de Château-Chinon avec l'EDIACAT. Pourtant il semble que le taux d'encadrement se soit amélioré, que l'activité de l'EIAT se soit consolidée et, donc, qu'il devienne possible de sauver l'établissement. Une confirmation de votre part serait la bienvenue.

M. Hervé Morin, ministre de la défense. - II est vrai que, dans le cadre d'une étude d'ensemble sur les fonctions de soutien et d'impression, nous examinons la situation de l'EIAT. A la fin de 2005, ces tâches occupaient 41 ateliers et 1 000 agents dont 200 militaires. On compte 8 établissements pour l'Armée de l'air, 4 pour la Marine, 17 pour l'Armée de terre, 3 pour la Gendarmerie, 8 pour le Secrétariat général à l'administration, et un pour le Service de santé.

L'établissement de Château-Chinon, créé en 1982 occupe 80 personnes, dont 17 administratifs et 14 personnes affectées aux tâches de soutien. Dans le cadre de la révision générale des politiques publiques, j'ai lancé une étude visant à vérifier si on peut faire aussi bien, ou mieux, pour moins cher et à éviter les doublons au sein des armées. La situation de l'établissement de Château-Chinon sera examinée dans le cadre de cette étude qui se prolongera jusqu'en mars. Comme à tant d'autres interlocuteurs je ne peux que vous donner rendez-vous à l'issue de ces travaux. Ce n'est que fin mars que nous déterminerons le nouveau plan d'organisation des forces de soutien et que nous nous prononcerons, notamment, sur le sort de l'EIAT de Château-Chinon.

M. René-Pierre Signé. - Votre réponse ne me surprend pas mais m'inquiète, même s'il n'est pas de crainte sans espoir. Je crains que la mutualisation et la réorganisation envisagées ne soient défavorables aux établissements modestes et enclavés dans le rural profond. Sans vouloir vous faire pleurer sur Château-Chinon, je vous invite à considérer que cette petite ville a déjà subi des séismes et traumatismes industriels et que la disparition de l'EIAT lui porterait un coup supplémentaire. Je vous demande, monsieur le ministre, de mesurer la situation qui en résulterait.

M. Hervé Morin, ministre. - Je ne vous apporte de message ni positif, ni négatif. Nous sommes en train d'examiner la totalité de la situation et, lorsque nous en aurons fini, alors, je pourrai vous répondre. Bien entendu, cette étude prend en compte tous les éléments, y compris ceux que vous me signalez.

Vente du tabac entre la métropole et les DOM

Mme Anne-Marie Payet. - L'article L.3511-3 du Code de santé publique interdit la vente promotionnelle du tabac, parce que contraire aux objectifs de santé publique. Or, tout voyageur français quittant le territoire métropolitain pour aller dans un département d'outre-mer peut se procurer dans les boutiques hors taxe des aéroports, des produits de tabac à un prix défiant toute concurrence. En 2004, 480 000 passagers sont arrivés à La Réunion. Sachant que 30 % des Français sont fumeurs, ce sont près de trois millions de paquets qui sont acquis à un prix promotionnel, puisque la moyenne est de deux cartouches par acheteur. Ce chiffre est encore en dessous de la réalité puisque mon calcul ne concerne pas les Antilles, mais seulement La Réunion, et uniquement pour les voyages depuis la métropole.

Dans un souci de cohérence avec la politique de santé publique, il serait opportun d'interdire, lors de vols entre la métropole et les DOM, la vente de tabac à prix promotionnel dans les boutiques hors taxe des aéroports, comme c'est déjà le cas pour toute autre destination de l'Union européenne.

M. Hervé Novelli, secrétaire d'État chargé des entreprises et du commerce extérieur. - Je vous prie d'excuser l'absence de Mme Lagarde et de M. Woerth, tous deux retenus à l'Assemblée nationale.

Les voyageurs en provenance ou à destination des départements d'outre-mer peuvent effectivement acheter en exonération de droits et taxes des produits du tabac dans les limites de franchises quantitatives fixées par les directives communautaires. Dans les échanges avec les pays de l'Union européenne, les DOM sont considérés comme pays tiers. Par exemple, pour les cigarettes, les franchises sont fixées à 200 unités soit une cartouche. Au-delà, le voyageur à destination d'un DOM doit acquitter le droit de consommation sur les cigarettes, l'octroi de mer et/ou la TVA ce qui peut mettre le paquet de cigarettes à un prix supérieur à celui commercialisé en France et à la Réunion où la fiscalité en vigueur est identique à celle de la métropole.

La vente considérée à un prix de nature promotionnelle ne s'applique pas au cas évoqué, sauf à remettre en cause le système des duty free et la réglementation communautaire des échanges entre l'Union européenne et les pays tiers. Je ne puis donner une réponse plus favorable à votre question sans risquer de mettre en cause le principe même des duty free.

Mme Anne-Marie Payet. - Je ne veux pas remettre en cause le système des duty free puisque je ne parle que du tabac. Chez nous, les buralistes n'ont même pas besoin de licence pour en vendre, on peut en trouver dans de nombreux commerces et dans les distributeurs automatiques, ce qui est interdit en métropole. J'espère qu'on mettra fin à toutes ces dérives commerciales à La Réunion où l'on compte chaque année 500 décès dus au tabac, soit dix fois plus que de tués sur la route.

Taxe professionnelle et finances des collectivités locales

Mme Catherine Procaccia. - Les collectivités locales constatent qu'elles supportent l'essentiel de l'effort financier consécutif à la réforme de la taxe professionnelle, même si le principe de la compensation est respecté. Les différents rapports publiés à l'occasion du 25ème anniversaire de la loi du 2 mars 1982 et de la mise en oeuvre progressive de « l'Acte II de la décentralisation », ont établi que les finances des collectivités sont saines, mais de plus en plus contraintes par des facteurs exogènes qui progressent plus vite que la richesse nationale.

Alors que la taxe professionnelle représente 50 % de leurs ressources fiscales, l'article 85 de la loi de finances pour 2006 a réformé cette taxe. Pour les entreprises, son dégrèvement pour investissements nouveaux entrant dans le champ des amortissements dégressifs est pérennisé à hauteur de 100 % la première année, 2/3 la deuxième année et 1/3 la troisième année. Les entreprises bénéficient également d'un plafonnement à hauteur de 3,5 % de leur valeur ajoutée. Soit un allégement total de 2,7 milliards d'euros en 2007 et de 3,4 milliards en 2008.

Pour les collectivités territoriales et leurs groupements, la partie du plafonnement imputable aux hausses des taux votées est mise à leur charge. Un mécanisme de réfaction peut s'appliquer en fonction de la situation de la collectivité.

Cet allégement de la fiscalité directe locale, qui profite à l'activité économique, est en partie compensé par l'État.

De récents rapports critiquent la fiscalité locale actuelle, notamment la part grandissante des compensations par l'État d'exonérations et de dégrèvements. Quelles sont les pistes de réflexion pour une future réforme ?

M. Hervé Novelli, secrétaire d'État chargé des entreprises et du commerce extérieur. - Mme Lagarde a hier été chargée par le Président de la République et le Premier ministre d'animer une revue générale des prélèvements obligatoires afin de proposer d'ici le printemps prochain des mesures de réforme.

Déjà, dans le passé, la taxe professionnelle a été plafonnée à 3,5 % de la valeur ajoutée. Le financement du plafonnement est partagé entre I'Etat, les collectivités territoriales et les Epci à fiscalité propre, la plus grande partie étant prise en charge par l'Etat, sur la base d'une cotisation déterminée en retenant un taux de référence actualisé, ou le taux de l'année d'imposition s'il est inférieur. La charge supplémentaire du dégrèvement résultant d'une augmentation de taux décidée par les collectivités territoriales est financée par elles. Leur participation au financement du dégrèvement au titre du plafonnement s'apprécie donc annuellement -avec des mécanismes d'atténuation spécifique.

Cette réforme était indispensable pour mettre fin aux surimpositions qui pesaient sur la compétitivité des entreprises et pour rendre à la taxe professionnelle son caractère d'impôt local. Nous avons atteint un juste équilibre quant aux charges et responsabilités pesant sur les collectivités, l'Etat et les contribuables.

S'agissant de la fiscalité locale en général, nous devons moderniser les valeurs locatives puisque la révision prévue par la loi de 1990 n'a jamais été mise en oeuvre par crainte de transferts entre contribuables et entre collectivités : les valeurs de 1961 pour le non-bâti, de 1970 pour le bâti, sont toujours en vigueur ! Aussi, dans la revue générale des prélèvements obligatoires et en étroite concertation avec les élus locaux, un assouplissement du mode d'actualisation des valeurs locatives et une plus grande participation des élus locaux dans la détermination de ces valeurs seront envisagés.

Pour rendre plus visible le lien entre la collectivité territoriale et le contribuable local, nous entendons éviter les superpositions d'autorités ayant un pouvoir de taux sur une assiette donnée ; assurer à chaque collectivité territoriale une diversification suffisante de ses ressources fiscales ; supprimer à terme toute interposition de l'Etat entre les collectivités et les contribuables ; limiter les transferts entre collectivités.

La rénovation de la fiscalité locale est un chantier difficile mais essentiel. Soyez assurée de la détermination du Gouvernement à aboutir, en étroite collaboration avec les élus locaux. C'est l'engagement qui a été pris par le Premier ministre lors de l'installation de la Conférence nationale des exécutifs. Les décisions interviendront au printemps prochain.

M. Roland Courteau. - Après les municipales...

Mme Catherine Procaccia. - Ma question était à la fois prémonitoire et prématurée... La réflexion me semble toutefois aller dans le bon sens. Mais nous avons des inquiétudes pour l'avenir : comment lancer des projets si nous ignorons ce que seront demain nos sources de financement ? Les élus apprécieront d'être associés par vos services à la réflexion qui sera menée.

Numéros de téléphone surtaxés

M. Roland Courteau. - Les numéros de téléphone surtaxés se sont multipliés ces dernières années. Alors qu'ils avaient été mis en place pour rémunérer les fournisseurs de service à faible valeur ajoutée, aujourd'hui, cette pratique s'est généralisée. Certaines entreprises, des banques, des assurances, des cliniques même, ou encore Air France y ont recours sans véritable service en échange.

Plus grave encore, les numéros surtaxés se sont propagés jusque dans les caisses d'allocations familiales, la SNCF, le Centre impôts services, Allo service public, SOS cartes volées... Les tarifs varient de 12 centimes la minute à 45 centimes et plus, à comparer aux 2 ou 3 centimes la minute au tarif normal. Une simple demande de document a coûté 8 euros à une personne lors d'un appel vers un numéro surtaxé. L'addition est plus lourde encore pour les appels passés depuis un téléphone portable, car s'ajoute une autre taxe, variable selon l'opérateur. Or, 30 % des appels sont effectués depuis des mobiles. Les personnes de condition modeste qui ont besoin de joindre des organismes sociaux sont les plus touchées.

De plus, concernant les services publics, cela revient à faire payer l'impôt deux fois, au contribuable d'abord, à l'usager ensuite. La loi que nous avons votée, dite « de confiance dans l'économie numérique » prévoit un décret en Conseil d'Etat pour déterminer chaque année les numéros accessibles gratuitement depuis les téléphones fixes ou mobiles. Trois ans après, on attend toujours...

Aucun cadre juridique n'autorise pourtant les administrations et services publics à faire participer l'usager au financement des structures d'accueil téléphonique. Mais on n'a même pas le choix, le numéro géographique n'étant bien sûr plus communiqué. Le site internet Geonumbers.com rendait publics les numéros géographiques non surtaxés : il a dû fermer, sous les pressions -il est aisé de deviner d'où elles provenaient. Le gouvernement entend-il légaliser les démarches comme celle de Geonumbers.com ? Une pétition circule, qui atteindra les 100 000 signatures d'ici novembre. Quelles sont vos intentions ?

M. Hervé Novelli, secrétaire d'État chargé des entreprises et du commerce extérieur. - Votre question est parfaitement fondée. Nous avons organisé, Luc Chatel et moi, à Bercy le 25 septembre dernier, une table ronde consacrée aux relations entre les consommateurs et les opérateurs de téléphone. Un projet de loi « concurrence et protection du consommateur » sera bientôt élaboré.

Les numéros commençant par 08 recouvrent une grande diversité de services pour lesquels le surcoût est généralement justifié.

Il ne s'agit donc pas de remettre en cause l'existence des numéros surtaxés, qui constituent un moyen de règlement efficace pour des prestations épisodiques d'un montant limité.

Nous avons procédé à un audit de modernisation sur l'accueil à distance dans les administrations. Le rapport d'audit met en évidence la diversité des pratiques des administrations, certains appels pouvant être surtaxés quand d'autres sont facturés au prix d'une communication locale. Il recommande un abaissement général du coût des appels vers les administrations, qui pourrait passer par le recours à des numéros en 09, moins coûteux.

Le ministre du budget a décidé de mettre en oeuvre cette recommandation et a donné instruction pour que les appels des usagers aux services placés sous son autorité soient tarifés au prix d'une communication locale. Cette mesure importante concerne 1,3 million d'appels par an. Éric Woerth, qui est en charge de la réforme de l'État, a en outre demandé que soit évalué l'impact de la généralisation de cette mesure à l'ensemble des ministères.

Le rapport d'audit a identifié une série de difficultés qui compliquent l'application littérale de l'article 55 de la loi de 2004 pour la confiance dans l'économie numérique.

La gratuité totale de l'accès aux services est porteuse d'effets pervers : nombreux appels non pertinents, inutilement réitérés ou abusivement prolongés. Le coût de mise en oeuvre serait de 80 millions pour les trois principaux organismes de protection sociale.

Les rapporteurs envisagent donc soit de modifier cet article 55, soit de publier un décret d'application ne concernant qu'un nombre très limité d'organismes, comme ceux répondant à un critère de « détresse sociale ». Le Gouvernement étudie ces propositions, sachant qu'il existe d'autres moyens d'assurer la gratuité ou le plafonnement du coût des appels pour certains publics. On pourrait envisager que certains usagers aient la possibilité d'appeler en PCV grâce à un code d'identification personnel ou que des lignes spécifiques moins coûteuses, leur soient ouvertes.

La question des services après-vente des opérateurs de communications électroniques a été abordée lors de la rencontre du 25 septembre avec les consommateurs et les opérateurs, que j'ai coprésidée avec Luc Chatel. À cette occasion, nous avons indiqué l'intention du Gouvernement de légiférer sur ce point dans le cadre du projet de loi sur la concurrence et les droits du consommateur. L'interdiction qui pourrait être faite aux opérateurs de communications électroniques de recourir à des numéros surtaxés pour leurs services après-vente fait partie de possibilités à l'étude. Un client n'a pas à supporter des surcoûts pour faire valoir une réclamation lorsque le service auquel il a souscrit n'est pas rendu. C'est le sens d'une décision récente du Tribunal de grande instance de Paris, qui indique que le professionnel « ne saurait faire supporter à son client le coût des moyens mis en oeuvre pour satisfaire son obligation de résultat, qu'il doit donc en conséquence supporter le coût des frais de communication avec la hotline ».

La quasi-totalité des opérateurs de communications électroniques, s'ils ne l'ont déjà fait, vont très prochainement mettre en place la gratuité des temps d'attente pour les appels à destination de leur hotline. Le Gouvernement entend confirmer la gratuité du temps d'attente pour ces appels dans le cadre du projet de loi sur la concurrence et les droits du consommateur.

M. Roland Courteau. - Nous avons pris acte de vos engagements et serons attentifs à l'évolution de la situation.

ACMO

M. José Balarello. - Les collectivités Iocales, quelle que soit leur taille, sont tenues de nommer un ou plusieurs agents chargés de la mise en oeuvre des règles d'hygiène et de sécurité. Les missions de ces agents, appelés ACMO, sont déterminées à l'article 4-1 du décret du 10 juin 1985. Elles consistent à assister et conseiller l'autorité territoriale dans la mise en oeuvre des règles de sécurité et d'hygiène au travail, améliorer l'organisation et l'environnement du travail, faire progresser la connaissance des problèmes de sécurité et veiller à l'observation des prescriptions législatives et réglementaires. Afin de leur permettre d'acquérir et d'actualiser leurs connaissances dans ce domaine, les ACMO reçoivent, en application de l'article 4-2 du décret et de l'arrêté du 3 mai 2002, une formation préalable à leur prise de fonction d'un minimum de trois jours et une formation continue. Ces textes et la circulaire du 9 octobre 2001 ont également transposé en droit français, la directive du 12 juin 1989, dont l'article 7 précise que dans chaque collectivité territoriale une personne doit s'occuper de la prévention des risques et de la sécurité.

Cette mission dévolue aux ACMO étant réglementaire et obligatoire, elle justifie le versement d'une nouvelle bonification indiciaire. Il serait donc équitable de compléter le décret du 3 juillet 2006 afin d'allouer à ces agents une nouvelle bonification indiciaire de 25 points majorés.

Je pose cette question en tant que président du centre de gestion de la fonction publique territoriale.

M. Hervé Novelli, secrétaire d'État. - Les décrets du 3 juillet 2006 ont réformé le dispositif territorial de la nouvelle bonification indiciaire (NBI) institué par le décret du 24 juillet 1991, afin de permettre le maintien de la NBI prévue pour certains fonctionnaires de l'État dont les compétences sont transférées aux collectivités locales et, d'autre part, de se conformer à la jurisprudence du Conseil d'État qui demande que l'attribution de la NBI soit fonction des missions exercées et non de l'appartenance à un grade ou à un cadre d'emplois.

Cette refonte a été élaborée à l'issue d'un travail de concertation au sein d'un groupe spécialisé du Conseil supérieur de la fonction publique territoriale. Elle n'avait pas pour objet d'actualiser la liste des emplois susceptibles de bénéficier de la NBI.

C'est pourquoi le Gouvernement, conscient qu'une telle actualisation était rendue nécessaire par l'évolution des métiers au sein de la fonction publique territoriale, a confié une tâche d'évaluation au même groupe spécialisé du CSFPT, en vue de définir de nouveaux emplois pouvant bénéficier de la NBI.

Les représentants du personnel au sein de cette instance ont émis plusieurs propositions, notamment que les agents chargés de la mise en oeuvre des règles d'hygiène et de sécurité bénéficient d'une NBI. Compte tenu de l'impact financier des diverses propositions des représentants du personnel, il appartiendra au collège des employeurs territoriaux de décider si ces propositions doivent figurer dans le rapport qu'adoptera le CSFPT en séance plénière. Une concertation interministérielle sera ensuite engagée sur la base de ces propositions.

Nous attendons ce rapport avant de nous prononcer.

M. José Balarello. - Merci de ces précisions.

La séance est suspendue à midi quarante-cinq.

La séance reprend à 16h 35.

présidence de M. Christian Poncelet